La France : Collectif Rio+20 pour de nouvelles voies de développement

« Le sommet de Rio+20 s’est conclu, sans saveur et dénué d’engagements concrets, le 22 juin 2012. Il nous laisse autant sur notre faim qu’il laisse la planète face à des défis inéluctables et l’avenir de l’humanité dans l’incertitude. Rio+20 n’entame pas pour autant notre détermination et notre combativité. Agissons pour que les pistes de travail retenues et les alternatives citoyennes qui ont convergé à Rio, aboutissent à une feuille de route transformatrice, » a déclaré le Collectif Rio+20.

Ci-dessous la déclaration du Collectif Rio+20 :

Depuis deux ans, en amont de Rio+20, la raison d’être de notre Collectif, son action, ses expressions et interventions sont fondées sur l’exigence d’un texte de l’ONU résolument transformateur, qui réponde de manière équitable et durable aux besoins sociaux, alimentaires, énergétiques et sanitaires.

Une déclaration compatible avec la préservation des biens communs, guidée par les droits humains internationalement reconnus, annonçant une voie nouvelle de développement, un projet de société qui fasse sens. Nous réclamions des Etats – viciés par la primauté donnée au marché – qu’ils sortent de leur irresponsabilité et réaffirment leur vocation à défendre l’intérêt général. Ils ne l’ont pas fait ! L’accord conclu n’offre pas d’alternatives crédibles à un système économique avide de ressources.

Dénué de mesures contraignantes et juridiquement opposables, il n’est pas de nature à résoudre, ni des inégalités croissantes, ni la dégradation persistante de notre environnement. Il pourrait même contribuer à les aggraver s’il reculait sur le droit à l’eau ou la responsabilité des entreprises. Un texte, qui affiche a minima la préservation du multilatéralisme et qui se prête à toutes les interprétations, ne peut pas prétendre répondre aux enjeux de l’humanité.

Face à l’incapacité de l’ONU à être autre chose que le syndicat des gouvernants nationaux, nous devons réaffirmer la nécessité d’un droit international de la responsabilité, obligeant les grands acteurs publics et privés à assumer les leurs. Tout comme nous devons encourager l’autonomie et le devoir de propositions des mouvements internationaux de citoyens. Nos ambitions demeurent, notre action n’en prend que plus de sens et d’acuité.

 Parce qu’elle est ambigüe, la Déclaration de Rio+20 appelle d’autant plus à la vigilance. Mobilisons afin d’ouvrir la voie d’un changement aux chantiers lancés pour 2015.

Notre Collectif, car il était rassembleur et mobilisateur, a pesé sur la délégation de la France à Rio. Continuons ! Le rapport des forces et la mise en mouvement seront déterminants. Un exemple s’il ne fallait en citer qu’un : le syndicalisme des travailleurs, sa capacité à converger mondialement, sa stratégie et sa volonté d’action en cohérence dans l’enceinte de l’ONU et à l’extérieur, a marqué les négociations et a pu imposer une empreinte sociale dans le texte final.

Élargissons la mobilisation, imaginons des formes d’action et de structuration collectives efficace. Ensemble ne laissons pas la destinée du monde aux seules logiques du business (as usual) et des intérêts et égoïsmes nationaux qui les protègent.

Nous réaffirmons notre vocation à agir pour une transition écologique et sociale.

Le système économique et la gouvernance mondiale actuelle sont fondés sur la coexistence d’une souveraineté des États, d’une toute puissance des forces du marché et sur un droit international inadapté, créant les conditions d’une irresponsabilité généralisée. Malgré les crises multiples, toute remise en cause structurelle d’un tel modèle est resté dans l’impensé politique, à Rio+20.

L’avènement d’une économie verte, fondée sur les logiques actuelles, ne saurait y répondre. Ce n’est pas la couleur de la tapisserie qu’il faut changer mais les fondations de la maison monde qu’il faut transformer. Car le droit au développement pour tous n’est ni contestable, ni discutable. Le modèle actuel est inadapté aux besoins du 21eme siècle. Les populations du Sud refusent de se le voir imposé. La crise sévit au Nord et se propage par le jeu d’entreprises multinationales incontrôlables qui cherchent toujours de nouveaux marchés, sans pour autant sortir d’un type de développement qui fait concurrence entre les peuples, entre les salariés, entre les territoires. C’est ce que nous refusons. Recherchons sérieusement comment mettre en oeuvre un type nouveau de développement humain :

Qui assure un progrès social, vecteur de qualité de vie, d’accès aux droits fondamentaux et biens communs et, de ce fait, devienne facteur d’adhésion universelle à la protection de la planète et de l’humanité ;
Qui redéfinisse les finalités et modalités de production et de consommation, aujourd’hui exclusivement basées sur des logiques de pertinences financières ;
Qui sanctionne le non respect des règles et normes internationales, en matière environnementale comme en matière de protection sociale ou de droit du travail ;
Qui bannisse la marchandisation et la financiarisation de la nature et du vivant ;
Dans le cadre duquel soit enfin régulée l’influence des acteurs économiques sur les politiques publiques, pour qu’elles répondent véritablement à l’intérêt général.

Nous appelons la France et l’Europe à changer.

L’Europe n’a plus le choix, elle doit ressaisir son avenir, remettre en cause un modèle fondé sur des ressources dont elle ne dispose plus et une productivité obtenue par le sous-emploi et le dumping social et environnemental. Elle doit se donner les moyens d’initier une véritable transition économique et écologique, régulée et démocratique, en tirant parti de ses propres atouts, sa créativité, ses expertises… la volonté d’agir de ses citoyens.

La France a annoncé à Rio sa résolution à s’engager. Elle doit en conséquence généraliser les initiatives et favoriser les dispositifs législatifs porteurs de transition et activer toutes les coopérations possibles avec les pays volontaristes et progressistes. La conférence environnementale, pour la transition écologique qu’elle organise, serait bien inspirée de donner concrètement le ton. Ce serait une mise en oeuvre offensive pour un véritable développement humain durable. C’est aussi sur le terrain que les mises en oeuvre se concrétiseront. L+s collectivités territoriales ont déclaré être acteurs essentiels de la transition à réussir. Elles sont responsables des politiques publiques dans le domaine de la vie, le logement, le déplacement, l’emploi, l’éducation, l’alimentation, l’eau… Elles se doivent de les inscrire toujours dans une perspective d’intérêt général et faire des choix qui répondront à une solidarité interterritoriale et intergénérationnelle.

 Nous appelons l’ONU à faire des chantiers ouverts à Rio le point de départ d’une véritable transition, pour, dès 2015, se doter d’une feuille de route transformatrice.

L’ONU ne peut plus décevoir et les Etats qui la composent sont devant leurs responsabilités. Si elle veut rétablir sa légitimité, l’ONU doit, dès l’engagement des prochains travaux, installer une véritable démocratisation dans l’élaboration et de la mise en oeuvre de ses politiques. La seule voie efficace est de
reconnaître et accorder toute sa place à une société civile réellement représentative de l’ensemble des populations, notamment des plus vulnérables dans les instances de négociation. Les contributions que fait la

société civile doivent se retrouver dans les textes et dans les feuilles de route. Mais l’ONU doit avant tout clarifier ce qu’est la société civile et reconnaitre les conflits d’intérêts, l’illégitimité de certains représentants et se libérer de l’omniprésence, dans les process de décisions, des groupes transnationaux, fortement critiquée pour la préparation de Rio+20. Le multilatéralisme trouve d’abord sens par une ambition politique partagée par le plus grand nombre des Etats. En septembre 2012 l’assemblée générale de l’ONU aura pour ordre du jour la mise en oeuvre de la déclaration de Rio.

}Nous l’appelons à rentrer dans le concret, à faire des travaux qui lui ont été confiés à la Conférence des 20 au 22 juin, une perspective défaite des dogmes de l’économie et de la finance ultralibérales.

Une nouvelle gouvernance, des Objectifs de Développement Durable (ODD), un cadre juridique pour la gouvernance et la conservation de la biodiversité en haute mer, une protection sociale universelle, le travail décent pour tous, l’accès universel aux droits fondamentaux préservés de leur marchandisation, la lutte contre la pauvreté et la faim… peuvent et doivent former les bases d’une transition juste. Il faut l’engager sans plus attendre.

Nous appelons à une nouvelle définition des indicateurs de richesse afin de guider les activités économiques par des objectifs de production écologiquement et socialement soutenables, objectivement vérifiables. Nous ne laisserons pas interpréter le texte de Rio, aussi faible soit-il, en sens inverse. La marche se doit d’être en avant.

Nous nous sommes constitués dans la préparation de RIO, comme un acteur collectif de la société civile. Nous appelons tous ceux qui veulent continuer et contribuer aux solutions, à s’emparer des processus et créer les mises en mouvement indispensables pour peser dans les décisions.

 Les voix citoyennes doivent créer des alliances, dépasser les cloisonnements et les silos pour apporter une vision globale qui seule induit le choix de société. Nous voulons pousser un travail transversal engagé et porter nos capacités d’organisation et de mobilisation à la hauteur de l’enjeu et de nos convictions : le monde doit changer, le monde peut changer. Nous en sommes des acteurs. Nous faisons de l’ouverture démocratique des débats et des négociations, de la représentativité des expertises citoyennes et de la cohérence des échelles entre national et international, les fondements de nouvelles logiques d’actions pour le développement.

Rio+20 a accouché d’un texte pétri des questionnements et des nouveaux rapports de force que nos sociétés doivent affronter. Le sens de la mise en oeuvre de ce texte est conditionné aux mobilisations. Soyons vigilants, actifs et plus collectif. Construisons les dynamiques transformatrices pour rendre possible le futur que nous voulons.

 Participent au sein des travaux du Collectif RIO+20 : 4D, A.E.E.O. Guyane, Agir pour l’environnement, Artisans du Monde, Association des Populations des Montagnes du Monde, Association française des Petits Débrouillards, Attac, CCFD-Terre Solidaire, CFDT, CGT, Coalition Eau, Comité 21, CRID, ENERGIES 2050, FAIR, Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’Homme, Fondation Sciences Citoyennes, Forum pour une nouvelle gouvernance mondiale, France Libertés, France Nature Environnement, Global Chance, GRET, Groupe de contact Genre et développement soutenable, HELIO International, IDDRI, IGAPURA, Institut Veblen, JVE international, Ligue de l’Enseignement, Ligue Internationale des Femmes pour la Paix et la Liberté, OREE, P’ACTES LOCAUX, RAC-France, Secours Catholique, Syndex, VECAM.

Source
Cordination SUD : http://bit.ly/RUlk8w