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Sans protection face à l’effondrement
Joseph M. Sammut
Kopin Malta
Au début l’économie de Malte semblait être à l’abri de la crise économique mondiale, mais les conséquences commencent maintenant à se faire sentir. Le tourisme est en diminution et les aliments et les services publics sont plus chers. Les enquêtes d’opinion montrent que les maltais ne voient pas de solution à leurs problèmes dans un futur proche et qu’ils attendent une détérioration des conditions de vie pour 2009. Le nombre de demandeurs d’asile augmente jour après jour et leur situation s’aggrave.
Fin 2008, la majorité des pays développés étaient en récession et l’économie mondiale chutait brusquement. Pendant les deux premiers trimestres de l’année, l’économie maltaise semblait être, en grande mesure, à l’abri des conséquences de la crise financière. La demande interne a continué d’être le moteur de la croissance, principalement grâce à l’augmentation de la consommation et à une forte accumulation de stocks1. La situation du marché du travail, où le secteur privé a continué à générer de l’emploi, a été favorable. Il y a eu une légère augmentation de l’emploi (1,3 %), tandis que le taux de chômage s’est maintenu stable à 6 %, ce qui est relativement bas. Cependant les exportations nettes ont contribué négativement à la croissance pendant les deux derniers trimestres.
La hausse des prix internationaux des aliments et des combustibles a entraîné l’inflation et des prix plus élevés pour le consommateur. Le taux d’inflation de Malte a été de 4,7 % – le plus élevé de la zone euro en 20082. De même, les événements internationaux récents comportent de plus en plus de risques pour la croissance. Le marché des exportations de Malte a été le plus touché de toute l’UE : il est tombé de 14 % par rapport à la hausse moyenne de 6,2 %. Le Rapport du Printemps de la Commission Européenne des Affaires Economiques et Financières prévoit une croissance du PIB de 0,7 %, une inflation de 1,9 %, un taux de chômage de 7,4 %, un solde négatif de 2,6 % de la proportion du déficit budgétaire du PIB et une chute de -0,7 % dans le solde du compte courant3.
Les banques maltaises maintiennent une liquidité suffisante et sont bien capitalisées pour couvrir les risques de crédits, les risques opérationnels et les risques du marché. Leur système de régulation est approprié pour protéger leurs clients, bien que l’une des banques les plus importantes ait souffert une chute de 60 % de ses bénéfices annuels correspondant à 2008 en raison de la faillite d’une banque internationale. Le Gouvernement a garanti les dépôts bancaires jusqu’à un montant de 100.000 EUR (132.000 USD).
L’inflation s’est répercutée sur les économies des ménages, principalement ceux aux revenus les plus faibles. Les dépôts des résidents dans les banques maltaises ont augmenté, mais leur taux de croissance annuel a diminué, tandis que les crédits octroyés aux résidents ont continué leur expansion. Les taux d’intérêts bancaires sont tombés à 102 points de base entre septembre et novembre dans la mesure où les banques ont transféré à leurs clients une partie de la réduction des taux officiels d’intérêts. Entre-temps le rendement des titres de l’État a diminué et le prix des actions a continué à descendre4.
Les aliments et l’énergie
Malte importe la plus grande partie des aliments qu’elle consomme. Les rapports d’Eurostat de 2008 montrent que le pays a subi une hausse de 9,7 % du prix des aliments entre avril 2007 et avril 2008. Ce chiffre représente deux fois le taux d’inflation annuel et son incidence sur le revenu disponible des consommateurs a été très important. Un petit nombre d’importateurs domine le marché et empêche la concurrence : le rapport d’Eurostat reconnaît que Malte souffre du manque de concurrence, mais la montée des prix s’associe également au passage à l’euro. Le Bureau de la Juste Concurrence de Malte devrait analyser cette situation et mener des enquêtes à ce sujet.
L’énorme hausse du prix du pétrole sur le marché mondial (USD 147 le baril) en 2008 a conduit à une augmementation des prix des carburants, de l’électricité et spécialement de l’eau, étant donné que Malte en génère une partie substantielle par le procédé de l’osmose inverse. En octobre 2008 les coûts des services publics ont presque doublé pour les consommateurs. Les petits ménages qui ne sont pas couverts par le plan de réduction écologique – qui stimule l’économie volontaire d’énergie en réduisant les tarifs – ont été spécialement touchés par cette hausse des prix.
Les représentants de 11 syndicats ont posé au gouvernement le problème des nouveaux tarifs des services publics. Le 10 décembre 2008 ils ont envoyé une lettre au premier ministre où ils présentaient leurs désaccords sur la forme de calculer ces tarifs5. Ils affirmaient que le gouvernement avait manipulé les statistiques et qu’il avait gonflé le nombre de ménages qui se verraient bénéficiés par les réductions écologiques. En janvier 2009 les syndicats ont conseillé aux consommateurs de ne pas régler leurs notes de services public, avant que ne s’écoulent les 45 jours de sursis permis par la Water Services Corporation6. Après cela le patronat s’est joint aux critiques sur la structure des tarifs, qui selon lui discriminait les petites et moyennes entreprises. La Chambre des Petites Entreprises a donné l’ordre à ses associés de ne pas payer un pourcentage déterminé de leurs factures de services publics7.
Le ministre responsable des services publics a promis en septembre une baisse des tarifs quand le prix international du pétrole descendrait à moins de 85 USD le baril. Cependant, bien que le prix du pétrole soit descendu à moins de la moitié de cette valeur (37 USD le baril) 8, les consommateurs n’ont pas vu leurs notes se modifier. A ce sujet il est utile de rappeler que le gouvernement est en train de préparer la privatisation d’Enemalta, l’entreprise nationale d’énergie, et qu’il doit la remettre sur des bases financières solides – l’entreprise est dans les chiffres rouges. Le sujet des tarifs des services publics exige une étude socioéconomique appropriée, basée non seulement sur les statistiques internationales ou sur une moyenne, mais aussi sur les enquêtes concernant les budgets des différents types de ménages, d’entreprises et d’organisations. Ce genre d’étude doit aussi offrir des recommandations viables sur les possibles scénarios d’énergie durable pour Malte.
Le travail
La crise internationale a commencé à se faire sentir début 2009, c’est alors que beaucoup d’entreprises manufacturières ont adopté la semaine de travail de quatre jours et d’autres ont annoncé des licenciements pour réduire leur force de travail et leurs pertes financières. Les licenciements pourraient atteindre l’ordre de centaines, voire même de milliers, pendant l’année 2009. Le tourisme joue un rôle important dans l’économie et l’emploi à Malte. Actuellement le tourisme provenant de la Grande Bretagne a diminué et représente 33 % du marché9, ce qui nuira beaucoup aux travailleurs de ce secteur.
Les chantiers navals étaient le bastion de la main-d’oeuvre maltaise, ils employaient de 5.000 à 6.000 travailleurs jusque dans les années 1990. En 2008 la privatisation du secteur a commencé, c’est alors que les plans de retraite anticipée et de démission volontaire ont été proposés aux employés. Sur 1.626 travailleurs, seulement 59 ouvriers n’ont choisi aucun plan et sont restés effectifs, tandis que 679 qui avaient opté pour la retraite anticipée ont continué à travailler pour conclure les commandes en instance avant que l’entreprise ne ferme. Quatorze entreprises ont participé à l’appel d’offres du chantier naval, mais, d’après un journal local, aucune des propositions n’a comblé les attentes du gouvernement. Le fait de ne pas être arrivé à un accord acceptable est un coup dur pour le gouvernement. Dans une déclaration faite au journal Times of Malta, en 2008, Neelie Kroes, commissaire à la Concurrence de l’UE, a critiqué la stratégie de privatisation et a signalé que l’intention du gouvernement de solder 100 millions d’EUR (132 millions d’USD) de pertes avant de privatiser le chantier naval n’était pas acceptable dans le cadre de la législation de l’UE.
L’aide au développement
La politique étrangère d’aide au développement publiée en octobre 2007, identifiait cinq pays prioritaires pour recevoir l’aide maltaise au développement, dont quatre d’Afrique centrale et orientale: la Somalie, le Soudan, l’Erythrée et l’Ethiopie10. Les ONG maltaises pensent qu’il s'agit d’un choix politique, puisque la majorité des immigrants proviennent de ces pays11.
Le manque de transparence et d’évaluations convenables et indépendantes de l’aide officielle maltaise compromet la participation des ONG dans la coopération pour le développement. Le gouvernement avait promis aux ONG une analyse claire des statistiques dans ses rapports sur l’aide officielle au développement (AOD), mais il n’a pas tenu son engagement. Le Gouvernement avait également annoncé que davantage de fonds de développement seraient destinés à l’assistance technique et que les technologies informatiques et de la communication (TIC) seraient prioritaires. Les ONG s’inquiètent du fait que l’assistance technique ne répond généralement pas aux besoins réels des pays en développement et de son manque de transparence, alors que les TIC n’ont pas l’habitude de correspondre au principe d’appropriation nationale de ces technologies.
Bien qu’en 2007 Malte ait maintenu le rapport le plus élevé (0,15 %) entre AOD et le revenu national brut (RNB) de l’UE, les ONG sont inquiètes puisqu’un pourcentage substantiel de l’AOD déclarée est dépensé en logements pour les demandeurs d’asile pendant leur première année dans le pays, ce qui signifie dans la pratique que l’AOD est dépensé dans des centres de rétention. Les ONG s’inquiètent aussi du fait que l’aide au développement soit gonflée par l’inclusion de frais attribuée aux étudiants.
La migration et les demandeurs d’asile
La situation des immigrants et des demandeurs d’asile ne s’est pas améliorée, elle s’est même, dans un certain sens, aggravée à cause du nombre record de personnes qui sont arrivées par la mer en 2008 et les premiers mois de 2009. Un groupe de travail des Nations Unies sur les détentions arbitraires s’est rendu à Malte en janvier 2009. Bien que ce groupe ait souligné beaucoup de points positifs, il a signalé que l’arrestation des demandeurs d’asile ne se correspond pas à la législation internationale sur les droits de l’homme et a qualifié de « catastrophique » la situation dans les camps de Safi et de Lyster12. Pour le groupe de travail, les conditions dans les camps ont un effet sur la santé physique et mentale des détenus à tel point qu’ils sont incapables de comprendre leurs droits ou de suivre le procédé légal qui pourrait conduire, pour le meilleur ou pour le pire, à un changement de leur situation.
Les démarches pour les demandes d’asile sont extrêmement longues : après être restés six mois à Malte, certains immigrants continuent à attendre qu’on leur octroie une entrevue. Le système connu comme la « voie rapide » n’est pas meilleur. Bien que mis en place pour les personnes plus vulnérables – les femmes enceintes et les handicapés par exemple – au moins trois mois sont nécessaires pour obtenir la sortie des centres de rétention. Un immigrant d’Erythtrée a présenté une demande pour violation de la constitution contre le directeur du Bureau de l’Immigration et le ministre de la Justice et de l’Intérieur en mai 2007. Il a assuré que ses droits de l’homme avaient été violés en raison de la longueur des démarches pour obtenir l’asile et des conditions inhumaines de détention. Le verdict n’a pas encore été prononcé13. La prochaine audience est prévue pour juillet 200914.
Le Gouvernement affirme qu’il doit réussir à obtenir un équilibre entre les considérations de sécurité et les considérations humanitaires, et que des efforts intenses sont faits pour améliorer les conditions de détention, mais que le système actuel est saturé : en 2008 il a dû traiter 2.775 nouveaux cas, par rapport aux 1.702 de l’année 2007. Finalement, bien que les commentaires du groupe de travail des Nations Unies indiquant que l’immigration illégale est un problème qui doit être abordé par le monde entier, soient admissibles, il faut signaler que ces recommandations avait déjà été faites auparavant, avec peu de résultats15.
La crise financière et l’opinion publique
L’Eurobaromètre16de l’automne 2008 montre que le pessimisme des maltais sur l’économie augmente de plus en plus ; la confiance dans le système politique diminue et l’espoir d’une amélioration de la qualité de vie se réduit aussi17. La majorité absolue (57 %) a évalué l’économie de manière négative et seulement 39 % la perçoit en bonne santé. En même temps, 45 % attend une détérioration après 2009 – une forte augmentation du pessimisme économique, de 25 %, par rapport à 2007.
La situation de l’emploi sera plus grave selon 32 % et seulement 23 % pense que la situation s’améliorera, tandis que 27 % n’attend pas de changements pendant les 12 prochains mois. Les enquêtés qui disent avoir eu des problèmes pour payer leurs factures représentent 65 %, tandis que seulement 28 % a déclaré ne pas avoir eu de problèmes. Ceux qui croient que Malte est plus stable économiquement grâce à l’adoption de l’euro représentent 56 %, alors que ceux qui ne sont pas de cet avis représentent 33 %. La confiance des maltais dans l’euro est plus forte que celle des autres habitants de la zone euro, où 48 % des enquêtés considèrent que l’euro a aidé à stabiliser leurs économies, face à 42 % qui pense le contraire.
Sur le plan politique, 51 % des maltais ont exprimé leur mécontentement avec les partis politiques, et seulement 34 % ont exprimé leur confiance, ce qui s’est reflété lors des élections législatives de mars 2008, avec une participation légèrement plus faible que d’habitude. Par ailleurs, 59 % des maltais ont déclaré leur confiance dans la Commission Européenne, face à 13 % qui sont méfiants. Le Parlement Européen est l’institution qui génère le plus de confiance parmi les maltais – 64 % a déclaré avoir confiance, tandis que 14 % a déclaré le contraire. Une proportion plus faible, 57 %, a une tendance à avoir confiance dans le parlement maltais, ce qui représente une augmentation de 15 points par rapport à 2007; 50 % a confiance dans le gouvernement en tant qu’institution – une augmentation de 5 points de pourcentage – et 37 % n’a pas confiance.
Il est difficile de quantifier les problèmes d’inégalité et de pauvreté à Malte, puisqu’il n’est pas simple d’avoir accès aux statistiques. Le nombre croissant d’immigrants qui s’installent dans différentes zones a créé un phénomène de « ghettoïsation ». Ces ghettos sont des trappes à pauvreté et des bouillons de culture pour de futures tensions sociales. Lorsqu’on considère les conséquences de la crise économique, la hausse des prix des aliments et des services publics, la semaine de quatre jours, les licenciements et les retraités qui survivent avec une pension maximum plafonnée il y a 30 ans, on ne peut que faire le pronostic qu’en 2009 il y aura davantage de personnes
« nécessiteuses ».
1 Banque Centrale de Malte. Quarterly Review 2008, 41:4. Disponible sur : <www.centralbankmalta.org/updates/downloads/pdfs/qr_2008_4.pdf>.
2 Eurostat (2009). “Euro Area External Trade Deficit 32.1 bn Euros”, Communiqué de presse 21/2009. Le 17 février. Disponible sur : <epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/6-17022009-AP/EN/6-17022009-AP-EN.PDF>.
3 Commission Européenne des Affaires Economiques et Financières (2009). “Spring Forecasts 2009–2010.” Le 4 mai. Disponible sur : <ec.europa.eu/economy_finance/thematic_articles/article15178_en.htm>.
4 Banque Centrale de Malte. Quarterly Review 2008.
5 Syndicat des Sages-Femmes et Infirmières de Malte (MUMN), Syndicat des Professeurs de Malte (MUT), Syndicat Général des Travailleurs (GWU), Syndicat de l’Equipage de Cabine, Syndicat Haddiema Bank Centrali, Union des Techniciens et du Personnel Administratif de l’Autorité de la Planification et de l’Environnement de Malte, Syndicat Professjonisti Awtorità ghall-Ambjent u Ppjanar, Association du Personnel Académique de l’Université de Malte (Umasa), Association des Pilotes de Ligne, Syndicat Periti u Inginiera Servizz Pubbliku et Association d’Ingénieurs de Lignes Aériennes.
6 Voir : <www.di-ve.com/Default.aspx?ID=72&Action=1&NewsID=57111&newscategory=31>.
7 Sansone, K. (2009). “GRTU Has No Faith in Resources Authority”. Times of Malta, le 29 janvier. Disponible sur : <www.timesofmalta.com/articles/view/20090129/local/grtu-has-no-faith-in-resources-authority>.
8 Département de l’Information. Communiqué de presse, No. 0164, le 3 mars 2009. Disponible sur : <www.doi.gov.mt/>.
9 Bureau National de Statistiques. “Departing Tourists: December 2008”. News release 015/2009. Le 27 janvier 2009. Disponible sur : <www.nso.gov.mt/statdoc/document_file.aspx?id=2413>.
10 Voir : <www.doi.gov.mt/en/press_releases/2007/10/pr1620.asp>.
11 Concord (2008). No Time to Waste: European Governments Behind Schedule on Aid Quantity and Quality. Bruxelles : Concord. Disponible sur : <www.concordeurope.org/Files/media/extranetdocumentsENG/NavigationSecondaire/WorkingGroups/Aidwatch/Aidwatch2008/Light-Full-report.pdf>.
12 Nations Unies. “Annex to Press Release: UN Working Group on Arbitrary Detention Concludes Visit to Malta”. Le 26 janvier 2009. Disponible sur : <www.unhchr.ch/huricane/huricane.nsf/view01/125F21AAD7DCBD1AC125754A0057F318?opendocument>.
13 Voir : <docs.justice.gov.mt/SENTENZI2000_PDF/MALTA/CIVILI PRIM AWLA (SEDE KOSTITUZZJONALI)/20>.
14 Voir : <www2.justice.gov.mt/kawzi/ccm_sitt.asp?FrmCM=213021&lng=>.
15 Voir : <www.doi.gov.mt/EN/press_releases/2009/01/pr0102.asp>.
16 Voir : <ec.europa.eu/public_opinion/index_en.htm>.
17 Voir: <ec.europa.eu/public_opinion/index_en.htm>.
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Hors du système mais, à l’abri de la crise ?
Équipe de recherche dirigé par Selouha Kamel
Association pour le Développement Social EL-Amel
L’aspect le plus vulnérable de l’économie algérienne découle de sa forte dépendance de la production et de l’exportation d’hydrocarbures, un secteur très développé en Algérie. Le secteur financier, pour sa part, a montré un retard remarquable ainsi qu’une déconnexion vis-à-vis des finances globales. Paradoxalement, ce retard a évité que le système bancaire soit atteint par la crise financière internationale. Mais la crise se répandra quand même dans le pays à travers l’importation de biens et services.
Les difficultés ayant frappé les marchés financiers des États-Unis pendant l’été 2007 se sont transformées en une véritable crise financière mondiale en automne 2008. Les marchés de crédit se sont réduits, les bourses ont chuté et l’insolvabilité a menacé l’ensemble du système financier international. Les pays du monde entier, y compris l'Algérie, en ont ressenti l’impact de manière directe ou indirecte.
Le Président Algérien attribue la responsabilité partielle de la crise à l’absence de règlementations et à l’affaiblissement des efforts consacrés à l’assainissement de l’environnement économique, livré aux lois du marché.
La crise financière mondiale, en ayant mis en évidence les pièges économiques et financiers à éviter, devrait servir de leçon à l’Algérie. Les directives du gouvernement, soit par prévision, soit établies sur la base d’autres paramètres, ont protégé l’intérêt national et ont limité l’exposition de l’économie algérienne aux dangereux déséquilibres du système financier mondial découlant des contraintes du néolibéralisme.
Cette décision provient, partiellement, de la richesse pétrolière du pays, soutien principal de son économie. D’après le ministre de l’Énergie et des Mines – actuel président en exercice de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) – Chakib Khelil, le marché pétrolier a connu une évolution spectaculaire, dont la volatilité est une donnée structurelle qui s’explique par l’activité des spéculateurs1. Le prix du baril de pétrole dépassant à peine 140 USD en juillet 2008 s'est effondré pour atteindre le niveau actuel de 59 USD. La moyenne annuelle tolérée jusqu’au 4 novembre a été de 103,56 USD contre 65 USD en 2007. Le prix du baril algérien pour 2008 a atteint 108,28 USD contre 71,13 USD en 2007.
Tel qu’il est indiqué dans le tableau ci-dessous, l’économie algérienne est bien positionnée pour faire face à la crise économique et financière globale, du moins pendant les deux prochaines années. Ceci, du fait de sa faible exposition sur les marchés financiers internationaux, de sa prudente gestion des réserves de change (le pourcentage du rendement a atteint 4,6 % en 2007), de l’épargne d’une partie des ajouts budgétaires (20 % du PIB en moyenne annuelle pour la période 2005-2007) et de la priorité octroyée au financement interne de l'économie (en dinars algériens) du fait du surplus structurel de liquidité.
Le besoin de réformes
Les efforts pour transférer les opérations du Crédit Populaire et de la Banque de Développement Local à des établissements financiers étrangers – américains ou français – ont été abandonnés du fait que, après un court débat « intergouvernemental », les autorités ont décidé que l’Algérie n’était pas prête à céder le contrôle à des entités étrangères. Dans la mesure où l’économie n’a été ni libéralisée ni privatisée, les bénéfices qui avaient été anticipés ne se sont pas matérialisés2.
En septembre 2008 Sid Saïd, secrétaire général de l’Union Générale des Travailleurs Algériens, a annoncé que le Gouvernement revenait en arrière sur le sujet de la politique du « tout est susceptible d’être privatisé ». Les 220 entreprises publiques en attente de privatisation après la mise en application des mesures règlementaires ont finalement été effacées de la liste de sociétés destinées à la vente.
De plus, le conseil interministériel du Gouvernement, appliqué en janvier 2008 et relatif au traitement des crédits bancaires et de l’assainissement financier des organismes économiques publics, a décidé de remettre les dettes des sociétés viables. Le gouvernement a demandé à un groupe de travail interministériel de prendre en charge la supervision et le suivi de l’industrie des finances et de la promotion des investissements dans des petites et moyennes entreprises.
Renouveau rural
Grâce à la croissance naturelle moyenne de la population ayant atteint 1,62 % annuel (notamment supérieur à celui de 2000, considéré élevé, de 1,48 %) le nombre d’habitants du pays a augmenté de 4,6 millions entre juillet 1998 et juillet 2007. On estime que, vers fin 2010, la population atteindra 35,7 millions. Pour nourrir cette population jeune et croissante, l’Algérie a besoin de plus d'aliments.
Les eaux algériennes contiennent une biomasse de 600.000 tonnes, ce qui permettrait de pêcher 220.000 tonnes par an. Cependant, en raison du manque de moyens matériels, la pêche atteint à peine 170.000 tonnes3.
La balance commerciale agricole de l’Algérie est négative et le pays occupe l’un des dix premiers rangs parmi les importateurs d’aliments au niveau mondial. La valeur de ces importations dépasse le quart du total des importations du pays. Les trois principaux groupes de produits sont les suivants : céréales et dérivés (40 % de la valeur totale des importations agricoles), lait et produits laitiers (14,3 %), huiles et graisses (10,5 %)4.
L’Algérie a importé des céréales et leurs dérivés, des médicaments, du lait et des produits laitiers pour un montant de 2.600 millions d’USD au premier semestre 2008, et un peu plus de 2.000 millions d’USD en 2007. La moyenne de l’inflation a été de 4,9 % au premier semestre 2008, notamment en raison de l’augmentation de 9,2 % du prix des denrées alimentaires, situant l’inflation annuelle, entre juin 2007 et juin 2008, à 2,5 %. En vue de modérer la volatilité des prix, le gouvernement a lancé un système de règlementation en juillet 2008. Dès lors, quelque 51.700 tonnes de pommes de terre ont été stockées.
Pour favoriser les zones rurales, où habite une partie importante de la population, le gouvernement a lancé un plan de soutien à la revitalisation rurale basé sur les actions suivantes :
· Améliorer les conditions de vie des populations rurales, y compris la réhabilitation et la modernisation des villages et des ksours (villages berbères situés tout au long des oasis).
· Diversifier les activités économiques en milieu rural pour augmenter les revenus, ainsi que pour protéger et valoriser les ressources naturelles et le patrimoine rural matériel et immatériel.
· Renforcer les capacités humaines par le biais de l’assistance technique. La presque totalité des exploitations agricoles sont privées, avec des modalités de propriété différentes. Traditionnellement, la plupart des agriculteurs s’est consacrée à la production de céréales sèches et à l’élevage de petits ruminants. Pendant les dernières années, les productions dont les valeurs ajoutées sont plus élevées, comme par exemple les fruits et légumes, ont sensiblement augmenté. A l’exception de la tomate industrielle et de l’huile d’olive, les cultures industrielles restent toujours limitées.
Le Gouvernement, faisant encore un effort pour relancer la revitalisation rurale, a démarré plus de 5.000 projets de proximité dans le cadre du développement rural, conformément au programme de soutien au renouveau rural. Plus de deux millions de foyers, soit huit millions de personnes environ, bénéficient de ces projets.
Le plan national d'autoroutes pour la période 2005-2025, élaboré par le Ministère des Travaux Publics comprend un réseau routier de 1.216 km, direction est-ouest, qui assurera la liaison entre Annaba et Tlemcen. Ceci va bénéficier 24 wilayas (provinces) et, lors de la période de réalisation des travaux, il y aura 100.000 nouveaux postes de travail. Le démarrage du projet est prévu pour 20095.
Conclusion :
Depuis au moins dix ans, il y a eu deux facteurs qui ont provoqué un fort impact sur l’économie et les finances du pays. D’une part, la politique en matière d’hydrocarbures qui a permis le développement du potentiel des ressources du pays ainsi que l'augmentation corrélative du niveau des capacités de production (la production de pétrole est passée de 0,9 million de barils par jour en 2000 à 1,4 million en 2008, dont 1,2 million est destiné à l'exportation6). D’autre part, le soutien sans précédent de l’Etat aux banques nationales (une moyenne annuelle de 2,6 % du PIB pour la période 1991-2002 et 1,7 % pour la période 2005-2006), dans un contexte de réformes monétaires et financières7. Ces deux politiques ont entraîné une augmentation significative du niveau des réserves de change, une accumulation de ressources des fonds de régulation des revenus, un excédent de liquidité dans les banques, et un faible niveau de dette externe.
1 Chakib Khelil, ministre de l’Énergie et des Mines, président de l’OPEP, dans le forum du journal El-Moudjahid, 3 mars 2009.
2 Voir : Mohamed Gacem. « Crise financière mondiale : Vers un recadrage des réformes ». Disponible sur : <www.lesdébats.com/editionsdebats/221008/economie.htm>.
3 Voir : <jijelli.com/htdocs/modules/news/article.php?storyid=905>.
4 Conférence de haut niveau sur l’eau pour l’agriculture et l’énergie en Afrique : les défis du changement climatique. Le cas algérien. Syrte – Lybie, 15-17 décembre 2008.
5 Voir : <www.mtp.gov.dz/autoroute%20est-ouest.htm>.
6 Voir : <www.lemaghrebdz.com/lire.php?id=13393>.
7 Intervention du prof. Farid Yaici : « Les conséquences de la crise sur l’économie algérienne ». Journée d’études réalisée en collaboration avec le Ministre de l’Industrie et de la Promotion des Investissements.
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Avant la tempête: les impacts sociaux de la crise financière
Social Watch Allemagne
Uwe Kerkow
La stratégie de gestion de la crise du Gouvernement allemand ne comporte pas d’objectifs sociaux ou écologiques. Les plans de mesures de relance et les réductions d’impôt sont socialement injustes, et les licenciements et l’augmentation du nombre de travailleurs à temps partiel montrent le vrai visage de la dérèglementation. Bien que l’Aide Officielle au Développement (AOD) ait augmenté en Allemagne et que les engagements envers les Pays les Moins Avancés (PMA) en 2009 soient plus importants que jamais, ces mesures restent encore insuffisantes. Dans ses déclarations la chancelière A. Merkel a beau promettre d’appliquer une nouvelle approche des relations internationales, dans la pratique on constate que les politiques de gestion de la crise du Gouvernement sont centrées sur le G20.
Ces trois dernières années ont été marquées par une baisse du chômage mais aussi par une stagnation du salaire réel1. Néanmoins, il devient de plus en plus clair que, contrairement aux affirmations du Gouvernement, la déréglementation du marché du travail n’a pas relancé la croissance de l’emploi ; les fonds devraient être assignés à une économie assainie. Maintenant que le boom (financé par le crédit) arrive à son terme, le vrai visage de la dérèglementation apparaît. Le chômage augmente. Les emplois informels ont été les premiers à disparaître : Annelie Buntenbach, membre du Directoire Fédéral de la Confédération Allemande de Syndicats (DGB en allemand), estime que vers la fin du mois de janvier 2009, environ 120.000 travailleurs temporaires avaient déjà été licenciés2.
Les chiffres officiels montrent que le nombre de sans-emplois augmente cependant il n’atteint pas encore un niveau alarmant. Selon l’Agence Fédérale pour l’Emploi, en janvier 2009 on constatait que le nombre de chômeurs avait diminué de 170.000 par rapport à l’année précédente. Néanmoins, le taux de chômage qui est réajusté périodiquement commençait à augmenter tandis que les offres d’emploi étaient en chute libre3. Le directeur de cet organisme, Frank-Jürgen Weise, a déclaré avec inquiétude que le nombre de chômeurs, actuellement de 3,4 millions, risquait d’avoisiner les 4 millions avant la fin de l’année 2009.
Cependant, la véritable montée en flèche a eu lieu dans le secteur du travail à temps partiel. En février 2009 seulement, plus de 16.900 entreprises ont présenté des demandes visant à mettre 700.000 travailleurs à temps partiel pour des raisons économiques ; cela représente 648.800 personnes de plus que l’année dernière. Les travailleurs affectés touchent un salaire correspondant au nombre d’heures qu’ils effectuent complété par un supplément que l’État leur verse pendant une période déterminée – qui vient d’être prolongée à 18 mois – sous la forme d’une allocation spécialement conçue pour les travailleurs à temps partiel. Ils reçoivent ainsi les deux tiers de leurs revenus normaux sans perdre leur emploi, du moins pour le moment4. Malgré ces subventions, il est clair que la crise économique et financière aura un impact négatif sur le niveau de protection sociale de plusieurs millions de personnes en Allemagne.
La réponse du Gouvernement
Les mesures prises par le Gouvernement pour enrayer la crise sont les suivantes :
Dans certains cas, les montants alloués à la relance de l’économie par les ministères concernés sont beaucoup plus élevés que ceux mentionnés ci-dessus. Par exemple, en novembre 2008, le Ministère de l’Economie et de la Technologie et le Ministère des Finances ont annoncé que le premier plan de mesure de relance de l’économie s’élèverait à un total de 32 milliards d’euros jusqu’en 2010. Cependant, le Gouvernement consacre 9 à 10 fois plus d’argent liquide au rachat de la dette privée (au "renflouement") qu’aux investissements destinés à promouvoir l’activité économique. Comme ces plans comprennent aussi des réductions d’impôts, on peut s’attendre à ce que les investissements ayant un effet direct sur l’économie soient relativement réduits. De fait, selon certains calculs, le deuxième plan de mesures de relance ne représentera probablement que 9 milliards d’euros par an d’investissements supplémentaires5 – ce qui est sans aucun doute insuffisant pour briser le goulot d’étranglement de l’investissement public. Seulement pour s’aligner sur la moyenne européenne, l’Allemagne devra dépenser 25 milliards d’euros supplémentaires ; par ailleurs l’importance donnée à la construction de routes, à la "prime à la casse" versée en échange de l’achat d’un véhicule et à la rénovation des casernes militaires n’a pas vraiment éveillé la confiance de la population.
Les réductions d’impôts vont non seulement miner l’impact des programmes de relance mais elles sont aussi socialement injustes comme nous le montrons dans les exemples suivants :
1. Selon les calculs effectués par la DGB, les municipalités devraient recevoir 11,51 milliards d’euros provenant des deux plans de mesures économiques. Néanmoins, les déductions fiscales mises en place parallèlement vont provoquer une réduction de 6 milliards d’euros dans le budget des municipalités. « À terme, nous ne recevrons même pas la moitié du montant annoncé (...) On peut se demander si cela va vraiment permettre de protéger le marché de l’emploi » a déclaré la DGB6.
2. Les réductions fiscales en faveur des ménages donnent également lieu à des injustices sociales. Les salariés dont le revenu annuel est équivalent à 10.000 euros feront l’objet de déductions allant jusqu’à 0,15 milliard d’euros tandis que les salariés dont le revenu annuel est supérieur à 53.000 euros seront dix fois plus bénéficiés. Comme en conclut une analyse à ce propos : « À l’exception de l’augmentation du minimum vital assigné aux enfants vivant dans les foyers les plus démunis par le biais du Kinderbonus (...), aucune mesure de lutte contre la crise n’a vraiment été prise7 » .
Par ailleurs, cette dépression économique sera accentuée par le "freinage de la dette" présenté au Parlement allemand et dont l’objectif est de limiter l’emprunt net annuel à 0,35% du Revenu National Brut (RNB)8. Les critiques annoncent que les politiques d’austérité mises en place dans le secteur social seront maintenues à cause du renflouement bancaire massif. Hendrik Auhagen, membre du Conseil de Coordination d’ATTAC Allemagne estime que « la dette publique qui sert les intérêts des banques et des grandes entreprises, les réductions d’impôts destinées aux plus riches et la future mesure de « freinage de la dette », tout cela ouvre la voie vers un nouveau démantèlement de la protection sociale (…), vers une aggravation de la pauvreté et une explosion du nombre de délits9".
Politique de développement
En Allemagne, l’AOD est passée de 9 milliards d’USD en 2007 à 13,91 milliards d’USD en 2008. En termes absolus, cela met l’Allemagne au 2ème rang des principaux donneurs de l’AOD. Cependant, si l’AOD est évaluée en tant que partie du produit national brut (PNB), ce taux de 0,38% place le pays au 14ème rang parmi les principales nations donatrices. Il est également significatif qu’en 2008 près d’un cinquième de l’AOD allemande était destinée à l’allègement de la dette10. Le budget de l’AOD pour l’année 2009 comporte cependant des aspects positifs: les engagements des pays les moins avancés (PMA) est plus important que jamais auparavant : 827 millions d’euros (1 milliard d’USD), ce qui représente plus de la moitié de l’ensemble des engagements concernant l’aide fournie par l’Allemagne.
Dans le cadre du deuxième plan de mesures de relance, le Gouvernement a versé une deuxième somme extrabudgétaire équivalant à 100 millions d’euros (132 millions d’USD) au Ministère Fédéral pour la Coopération Économique et le Développement afin d’offrir son soutien aux projets d’infrastructure de la Banque mondiale11. L’Association allemande d’organisations non gouvernementales de développement (VENRO en allemand) a considéré cela comme un pas dans la bonne direction tout en déclarant que ce plan de mesures de relance pour les pays en développement était injuste: « les plus pauvres parmi les pauvres se font leurrer par des promesses charitables alors que ce sont eux les plus affectés par la crise », a déclaré Claudia Warning, la présidente du Directoire de VENRO12. La ministre du Développement, Heidemarie Wieczorek-Zeul, affirme que « le plan financier pour la période 2008-2012 comprend des mesures plus efficaces pour relancer la croissance »13, mais il semble qu’il n’y ait guère de possibilité que ces promesses soient tenues. Pour que les fonds investis dans le domaine du développement soient équivalents à 0,51 % du PNB en 2010 en accord avec l’objectif fixé par l’Union européenne, l’Allemagne devra augmenter son AOD à hauteur de 13,1 milliards d’euros (17,33 milliards d’USD)14.
Une nouvelle approche des relations internationales?
La chancelière Angela Merkel a provoqué une certaine inquiétude après avoir proposé de créer un Conseil Economique Mondial des Nations Unies. « Certes le G20 est un pas en avant mais il ne représente en aucune façon une image complète du monde », a-t-elle déclaré lors d’une conférence du parti de l’Union Démocratique en décembre 2008. « Je suis fermement convaincue que nous devons créer un conseil économique mondial pour traiter les questions économiques, exactement de la même manière que nous avons (…) le Conseil de Sécurité de l’ONU15 ». La Chancelière A. Merkel a exprimé à nouveau les mêmes convictions lors du Sommet financier du G20 en réclamant « Une charte mondiale pour la gouvernance économique durable » qui établirait les principes de base de l’architecture financière du monde de demain16.
Il reste à savoir à quel point la Chancelière compte tenir parole. Jusqu’à présent, les politiques de gestion de la crise du Gouvernement sont restées fermement centrées sur le G20.
1 Social Watch Germany a décidé de focaliser le rapport de cette année sur les réponses que la politique économique offre à la crise systémique étant donné que c’est là que l’impact social est le plus évident en Allemagne.
2 Voir : <www.welt.de/wirtschaft/article3146760/Schon-bis-zu-120-000-Leiharbeiter-entlassen.html>.
3 Voir : <www.arbeitsagentur.de/zentraler-Content/Pressemeldungen/2009/Presse_09_007>.
4 Voir : <www.arbeitsagentur.de/zentraler-Content/Veroeffentlichungen/Merkblatt-Sammlung/MB-08b-Kurzarbeitergeld-AN.pdf>.
5 Junge Welt. Voir : <www.jungewelt.de/2009/02-07/023.php>.
6 Voir : <www.dgb.de/themen/themen_a_z/abisz_doks/k/klartext05_2009.pdf/view?showdesc=1>.
7 Junge Welt, op. cit.
8 Voir : <de.wikipedia.org/wiki/Schuldenbremse (Deutschland)>. Consulté le 27 février 2009.
9 Voir : <www.attac.de/aktuell/presse/detailsicht/datum/2009/02/13/schuldenbremse-steuersenkungen-demontage-des-sozialstaats/?cHash=fe6adf2d10>.
10 Voir : <www.oecd.org/dataoecd/48/34/42459170.pdf>.
11 Regierungserklärung zum Stand der Millenniumsentwicklungsziele 2015 und zu den Auswirkungen der Finanz- und Wirtschaftskrise auf die Entwicklungsländer [Déclaration du Gouvernement relative à la situation des Objectifs de Développement du Millénaire 2015 et aux impacts de la crise économique et financière dans les pays en voie de développement], 29 janvier 2009. Disponible sur le site: <www.bmz.de/de/zentrales_downloadarchiv/Presse/20090129_Regierungserklaerung.pdf>.
12 Voir : <www.venro.org/404.html>.
13 Voir : <www.bmz.de/de/zahlen/deutscherbeitrag/index.html>. Consulté le 27 février 2009.
14 Voir : <www.tdh.de/content/materialen/download/download_wrapper.php?id=294>.
15 Voir : <www.stuttgart08.cdu.de/wp-content/uploads/2008/12/081201-rede-merkel-stbericht.pdf>.
16 Voir : <www.netzeitung.de/wirtschaft/ wirtschaftspolitik/1282337.html>.
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Nouveau contexte, anciennes politiques
Centro de Estudios Legales y Sociales (CELS)1
Les niveaux d’inflation, pauvreté et indigence sont très supérieurs à ceux montrés par les statistiques officielles. Les mesures pour combattre la crise devraient corriger la concentration et l'inégalité, sur la base d'un calendrier de transformation incluant des politiques sociales à caractère universel pour dépasser la dynamique exclusive des dernières décennies et construire une citoyenneté basée sur les droits civils et politiques et sociaux. D'autre part, pour avancer dans la durabilité des politiques sociales, il est nécessaire que l’on dispose, contrairement à ce qui s'est passé dernièrement, d'information publique fiable.
Sans aucun doute, la crise financière globale va se répercuter rapidement sur le pays. Dans ce cadre, quelles sont les réponses alternatives qui sont proposées pour faire face à une augmentation imminente de la pauvreté? Quelles sont les propositions en matière de politiques sociales face à ce nouveau scénario? Les politiques après la crise de l'année 2001 qui ont été soutenues dans un contexte de croissance économique continuent-elles en vigueur? D'autre part, en matière de politiques centrales au moment de penser à des questions comme l’exclusion, pauvreté et indigence, ainsi que le transfert de revenus, quelles perspectives y a-t-il en abandonnant les réponses à caractère focalisé et en faisant des incursions dans des politiques à caractère universel?
Comme tout le monde le sait, la décennie des années 90 a signifié pour l'Amérique latine, et particulièrement pour l'Argentine, un processus de transformation en termes économiques, politiques et sociaux. Tout d’abord, l'Argentine a été le pays de la région qui a appliqué de la manière la plus extrême les politiques dictées par les organismes internationaux d'assistance de crédit, et qui en même temps a transformé en peu d’années le fonctionnement de l'économie, du cadre régulateur, la privatisation de services publics, la couverture en matière de sécurité sociale, les responsabilités de l’état dans de nombreux secteurs et services et la propre conception d'une politique sociale étrangère à une analyse de droits de l’homme.
De manière parallèle, et contrairement aux intentions des mentors de ces politiques, le chômage, la pauvreté, l'indigence et l'inégalité ont augmenté, pour aboutir fin 2001 à une crise institutionnelle et économique grave qui a conduit à la chute du gouvernement, à l'abandon, après dix années d’application, du régime de convertibilité de la monnaie et à un accroissement abrupt des niveaux de pauvreté et d’indigence dans le pays qui ont atteint, respectivement, 57.2 % et 27.5 % de la population en octobre 20022.
Bien qu'à partir de 2003 les signes de récupération économique sont devenus évidents, au premier semestre 2008, la population sous le seuil de pauvreté était encore de 17,8 % alors qu'elle était de 5,1 % sous le seuil d'indigence. Bien que la production et la diffusion d'information officielle soit actuellement déficiente, des rapports privés et indépendants estiment que cette situation a dépassé 30 % – quelque 12 millions de personnes - en 2008. En ce qui concerne l'indigence, des mesures extra-officielles la situent à plus de 10 %, – c’est à dire, 4 millions d'argentins.
Or, au-delà des données elles-mêmes, ceci s'avère alarmant dans un contexte de croissance économique qui deviendra récessif comme cela a déjà été annoncé. Ainsi, au-delà du temps que prendra la crise internationale pour arriver, la situation est déjà singulièrement grave. Des situations limites se produisent dans ce cadre, qui dans certains cas ont à voir avec la vulnérabilité sociale, pour lesquelles le plus grand risque est représenté par l'inflation qui, selon des estimations privées, est 4 fois supérieur aux chiffres officiels. Par conséquent, une augmentation du panier de la ménagère supérieur aux revenus réduirait la distance déjà courte de ces ménages jusqu’au seuil de pauvreté.
Chômage
Quant au marché de travail, entre 2003 et 2007 le chômage a diminué de plus d’un tiers. Au quatrième trimestre 2008 le taux de chômage se situait à 7,3 %3. Peu de personnes perçoivent l'assurance chômage, découragées - entre autres raisons - parce que l’allocation représente à peine 20 % de l'actuel salaire moyen. Bien qu'il n'y ait pas de données officielles mises à jour, on estime que sur 1.200.000 chômeurs déclarés par l'INDEC (Institut National Statistique et Recensements) seulement 125.000 travailleurs licenciés perçoivent l’allocation chômage. Et pour sa part, le sous-emploi s’est réduit aussi de manière significative arrivant à 9,1 %. Dans tous les cas où l'on parle d'augmentations d’emplois, cela ne veut pas dire que l’on parle d’insertions définitives. D'autre part, les inégalités de sexe sur le marché du travail continuent sans changement, des actions positives visant à renverser les situations discriminatoires n’ont pas été mises en place. En effet, il persiste encore un niveau d’informalité très élevé.
Bien que les emplois non déclarés aient diminué – de 47 % au premier trimestre 2003 à 37,8 % au dernier trimestre 2008 – le pourcentage de travailleurs informels est encore extrêmement élevé. Concrètement, les règlements de travail et les politiques publiques qui favorisent le salaire indirect (comme l'augmentation des allocations familiales, les règlementations des assurances sociales, le barême de retraites, etc.) excluent quatre salariés sur dix.
L'accès à l'information
À tout ceci il faut ajouter l’échec de l'Institut National de Statistiques et Recensements (INDEC) 4 pour produire et diffuser, entre autres graves conséquences, des statistiques fiables pour des questions aussi sensibles que l’emploi, la pauvreté et l'inflation.
Sans aller plus loin, les mesures alternatives qui révèlent, entre autres, que les niveaux d’inflation, de pauvreté et d’indigence sont très supérieurs à ceux annoncés par les statistiques officielles, ont proliféré. Ce panorama complique l'analyse de la réalité sociale et le travail de conception de politiques en accord avec cette réalité.
Quelles sont les réponses ?
Dans les grandes lignes on pourrait affirmer que les politiques sociales argentines sont déjà consolidées, depuis la sortie de la crise de 2002, à travers deux grandes lignes : d'une part, celles destinées aux travailleurs salariés formels et, d’autre part, celles destinées aux secteurs non intégrés sur le marché de travail formel, concrètement par des programmes sociaux de transferts de revenus.
La première ligne, la politique de recomposition salariale et d'adoption de mesures destinées à des travailleurs salariés formels a aussi inclus conjointement la révision du régime prévisionnel et des allocations familiales, avec des incitations pour les emplois déclarés, parmi les mesures adoptées. Dans ce cadre il paraîtrait y avoir une confiance croissante sur le marché comme axe intégrateur et espace de canalisation des nécessités individuelles et sociales, auquel s’intègre un dispositif de politiques pour le « en attendant ».
La deuxième ligne consiste en des programmes de transferts de revenus pour des secteurs avec un autre genre de « vulnérabilité ». Dans cet ensemble de politiques, il convient de souligner le Plan Chefs de Famille au Chômage (PJJHD, en espagnol) , qui est l’aspect émergent du scénario de crise économique et haut niveau de conflit social qui a marqué les dernières années de la convertibilité en Argentine. Il constitue, principalement, un programme centré sur le paiement d'une aide monétaire (d’environ 40 USD par titulaire) dans le but rhétorique de « garantir le Droit Familial d'Inclusion Sociale » sur la base de l’assistance scolaire des enfants et du contrôle de santé, de l’incorporation de bénéficiaires d'éducation formelle et/ou des activités de qualification de travail qui contribuent à leur future réinsertion au travail et de l’incorporation de bénéficiaires à des projets productifs ou des services communautaires, en tant que « contre-prestation » 5.
Sans aucun doute, une de ses principales réalisations a été sa portée quantitative dans un bref délai. Entre les principaux destinataires des politiques de transferts de revenus on trouve le PJJHD, qui a commencé en juin 2003 et a atteint 1.992.497 personnes et en novembre 2007 il comptait 795.274 bénéficiaires6. Donc, comme on le verra après, on a enregistré une diminution à la suite de l'option de transfert à d'autres programmes sociaux comme le Programme Familles pour l'Inclusion Sociale (PF), certains ayant obtenu un emploi ou d'autres dont les enfants ont dépassé19 ans.
Puis, dans des contextes de croissance économique, pour les bénéficiaires du PJJHD considérés « employables » ou en voie de l’être, on a annoncé en mars 2006 la création de l'Assurance de la Formation et de l’Emploi sans que sa mise en oeuvre ait substantiellement avancé (pour mars 2007 seulement 32.000 bénéficiaires avaient adhéré à ce programme).
Pour les « inemployables » (en particulier les femmes avec enfants ou en âge de procréer) on a créé le PF dans l'orbite du Ministère du Développement Social. Selon les données officielles, en août 2007 le programme comptait 504.784 familles bénéficiaires reçevant une prestation variable selon la quantité d’enfants ou de mineurs jusqu’à 19 ans à charge ou d’handicapés de tout âge. La quantité de base est de 155 ARS (42 USD) et le chiffre peut arriver à 305 ARS (82 USD) avec 6 mineurs à charge. Les mères de sept enfants et plus peuvent recevoir une allocation de 390 ARS (105 USD).
Dans les grandes lignes ces programmes ne respectent pas les standards en matière de droits de l’homme de manière adéquate. Ponctuellement, ils présentent certaines faiblesses en termes « de contenu minimum » des standards acceptables des droits sociaux et en particulier sur les principes d'égalité, la non discrimination, l’universalité et l’accès à la justice. Par conséquent, au-delà du discours en termes de « droits », leur conception et mise en oeuvre continuent à être élaborées en termes de logique de bénéfices.
Toutefois, malgré son ampleur, la diminution du pourcentage de pauvreté et d'indigence entre 2002 et 2007 peut difficilement être attribuée aux programmes mis en place, dont l'apport peut se considérer davantage comme un « soulagement » que comme une stratégie de « dépassement » de la pauvreté. Mais surtout, l'ombre que projette la crise internationale démontrent des aspects de persistance et d’inamovilité qui se révèlent alarmants. Bien que le nombre de bénéficiaires du PJJHD ait diminué pour diverses raisons depuis la crise de 2001-2002, sa portée résulte encore significative pour un pays qui a bénéficié d’une croissance économique. Il convient aussi de rappeler que l'accès naturel à ces deux programmes est clos et que la seule voie d’admission est judiciaire et pour beaucoup de secteurs l'universalité de la couverture, dans le cadre des critères choisis, n’est qu’une illusion.
Politiques sociales universelles, une nécessité urgente
L'accroissement de l'emploi et des revenus a lieu principalement sur le marché formel. L'État a créé et soutenu les conditions macro-économiques qui ont permis le processus de relance économique, accompagné de quelques politiques et actions destinées à améliorer les revenus des secteurs formels (allocations familiales, salaire minimum, etc.) et par conséquent cette tendance a été renforcée. Dans les grandes lignes, l’accent dans ce processus a été mis principalement sur les travailleurs salariés formels, ceux qui ont amélioré leurs conditions de vie en raison des politiques appliquées pendant les années 90.
La persistance d'un important niveau d'emploi non déclaré et d'un haut niveau de pauvreté et d’indigence diminue l'impact de mesures orientées vers le travailleur salarié formel et augmente les disparités entre les deux secteurs.
Sans aller plus loin, les travailleurs qui se trouvent sur le marché du travail reçoivent une allocation familiale (AAFF) par enfant mais cela est impossible pour les secteurs appartenant à l'économie informelle, pour les travailleurs indépendants (freelance), ceux qui sont au chômage et ne sont pas bénéficiaires de l'assurance chômage (par exemple pour les bénéficiaires de plans sociaux), des femmes de ménage, des migrants, des personnes privées de liberté ou internées pour maladies mentales. Bien qu'il convienne de clarifier que l'objectif des allocations n'était pas de toucher directement les enfants mais la croissance et l'expansion familiale du travailleur salarié formel, il n'y a aucune raison qu’un enfant dont le père ou la mère se trouvent en dehors du marché formel de travail, comme par exemple un travailleur freelance ou un bénéficiaire de programme social, ne puisse pas bénéficier de la politique publique.
Le recensement de population de 2001 a montré que 70 % des enfants étaient exclus. Cette discrimination, d'autre part, est transposée sur les programmes sociaux de transferts de revenus comme le PF : ici, l’enfant d'une mère bénéficiaire reçoit 45 ARS (12 USD), alors que celui dont les parents ont un travail formel peut arriver à percevoir jusqu'à 100 ARS (27 USD) par AAFF.
Le nouveau scénario
Il est possible que la crise internationale rouvre un espace pour redécouvrir la pauvreté et ouvrir une nouvelle porte de dialogue sur l'universalité. Toutefois, comme signe encourageant, de nombreux projets législatifs se sont présentés qui ont seulement été examinés à un niveau de commission. De même, la province de Buenos Aires, la plus significative du pays en termes d'influence politique et de population, met en oeuvre progressivement une politique de bénéfice universel. Bien que les politiques universelles proposées n’aillent pas résoudre la problématique de pauvreté et d’exclusion, elles peuvent au moins mettre en marche un dispositif de politique sociale en accord avec le contexte socio-économique et les changements sur le marché du travail. Il est indispensable, alors, de prendre en considération les transformations arrivées et de supprimer la continuité de politiques conformes à d'autres contextes, comme celui du plein emploi.
La conclusion est évidente : dans le cadre de la récupération de l'activité économique, les conditions de fonctionnement de l'économie locale (concentration élevée et extrême inégalité) n'ont pas été modifiées substantiellement. Un calendrier de transformation devrait inclure, entre autres, des politiques sociales à vocation universelle, ce qui à la rigueur implique de rouvrir la discussion sur l'universalité et d’assumer que la politique sociale est encore essentielle à la construction de la citoyenneté basée sur le respect et l'approfondissement de droits individuels et sociaux. En même temps, les politiques à vocation universelle tracent une voie pour surmonter effectivement la dynamique d’exclusion des dernières décennies. Pour cela, il est fondamental de pouvoir compter sur une information publique fiable, de qualité et en quantité suffisante pour permettre d'avancer en direction de la durabilité des politiques sociales.
1 Elaboré par Pilar Arcidiácono et Laura Royo, directrice et membre du Programme des Droits Economiques, Sociaux et Culturels.
2 Instituto de Estadísticas y Censos (INDEC), Pourcentage de foyers et personnes sous les lignes de pauvreté et indigence dans les agglomérations urbaines EPH et régions statistiques, depuis mai 2001. Disponible sur : <www.indec.gov.ar/>.
3 “Seguro de desempleo: lo piden pocos y está desactualizado”. (Assurance chômage : peu demandé et périmée) Clarín, 9 mars 2009. Disponible sur : <www.clarin.com/diario/2009/03/09/elpais/p-01873175.htm>.
4 Or, les problèmes en rapport avec l'information non seulement se concentrent à l'INDEC. Il est important de rappeler ici le problème dont a fait face le Système d’Information, Monitorat et Évaluation de Programmes Sociaux (SIEMPRO, en espagnol), dont son site internet a été suspendu pour un temps prolongé et dont l'actuel ne dispose pas de l'information complète. A cause de cela, il manque aussi d'information pour analyser les politiques sociales étant donné le manque publicité et mise à jour dans les sites internet officiels.
5 Décret 565/02.
6 Selon information du Ministère du Travail, l'Emploi et la Sécurité Sociale à décembre 2008 le total des récepteurs de programmes d'emploi atteignait 970.000 bénéficiaires. De toute façon, en consacrant une prestation indifférenciée par chaque chef de foyer chômeur, le PJJHD n'a effectué aucune distinction selon la composition du groupe familial. De cette manière, autant plus grande la quantité de membres du foyer, plus faible est l'incidence de la prestation dans des termes de la réalisation des objectifs fixés. D'autre part il n'existe pas de mécanismes administratifs et/ou judiciaires de réclame prévus dans la réglementation du plan. Malgré de nombreuses actions d'abri par des personnes qui réunissent les conditions établies dans la réglementation, qui ont réclamé leur incorporation au PJJHD et ont remis en question la fermeture de l'inscription, au-delà des sentences favorables, le processus de juridisation n'a pas eu d’impact ni dans la révision de la politique publique, ni dans le domaine du dialogue et l'interaction entre les différents acteurs. À ce sujet, voir Arcidiacono, Pilier et Royo, Laura : “Loin d'une analyse de droits”, en Rapport Social-Watch 2008.
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L’impact de la mondialisation chez le peuple bahreïni
Social Watch Bahreïn1
L’économie du Bahreïn s’accroit, ainsi que le revenu par habitant. Cependant, bien qu’il y ait de plus en plus de milliardaires, la classe moyenne se rétrécit et les couches populaires s’appauvrissent. Les affrontements et les tensions entre les groupes appauvris et les forces de l’ordre augmentent. Il faut élaborer d’urgence une stratégie protégeant la société des impacts négatifs de la mondialisation.
Depuis toujours le Bahreïn a eu une économie ouverte au commerce, aux investissements et à l’échange de biens. Depuis son indépendance en 1971 le pays est une place financière pour les banques internationales, les institutions financières, les joint ventures du Conseil de Coopération du Golfe (CCG) et un carrefour pour le commerce et les biens de consommation. Il fait partie de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et il a éliminé les obstacles au commerce, aux investissements et à la circulation de la main d’œuvre et a signé avec les États-Unis un Traité de Libre Échange (TLE). En tant que membre du CCG le Bahreïn négocie la mise en place d’un TLE et il a été récemment l’hôte d’une conférence de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) et du CCG, qui a débattu des perspectives de la signature d’un TLE entre les deux groupes économiques.
Comme dans beaucoup d’autres pays, la mondialisation a influencé Bahreïn de manière positive aussi bien que négative. Le rapport ci-dessous analyse l’impact de la mondialisation sur le bien-être des Bahreïnis à plusieurs points de vue :
La libéralisation de l’économie
Le Gouvernement a constamment poursuivi l’objectif de libéraliser l’économie, ceci signifiant de moins en moins de participation de l’état dans la gestion économique.
Cela a mené inévitablement l’État à abandonner la prestation de certains services essentiels qu’il offrait auparavant à ses citoyens. Cela a également ouvert le marché à la libre concurrence avec des entreprises nationales et étrangères. D’autre part la réduction des restrictions pour les résidents étrangers leur a permis d’occuper des postes de travail jusque là réservés aux Bahreïnis, comme ceux de conseillers juridiques et d’auditeurs.
La privatisation
Le Gouvernement a fait appel à la privatisation de plusieurs institutions et services publics parmi lesquels l’électricité et le transport public, afin de se mettre au pas de la mondialisation et d’être à même de pouvoir concurrencer un marché ouvert. Le nombre des secteurs ouverts au contrôle privé comme l’éducation, les soins sanitaires, divers services municipaux, l’administration portuaire et le transport aérien, a d’ailleurs augmenté.
Le logement
Le Gouvernement a progressivement annulé les restrictions qui interdisaient d’acquérir des biens immobiliers aux étrangers résidant à Bahreïn, notamment aux citoyens appartenant au CCG. Cela a entraîné une hausse du prix des terrains et des biens immobiliers dans les quartiers résidentiels. A l’heure actuelle les Bahreïnis sont désavantagés par rapport à d’autres citoyens du CCG, en ce qui concerne le pouvoir d’achat. Ceci a amené une crise considérable du logement : la demande de logements subventionnés par l’état dépasse l’offre ; actuellement il y a une liste d’attente de près de 60.000 demandes. En conséquence, plusieurs familles ont dû emménager chez des parents dans des logements mal équipés pour héberger des locataires trop nombreux.
L’emploi
Les Bahreïnis qui cherchent un poste de travail se trouvent en position de faiblesse pour concurrencer des postes exigeant des compétences et une formation académique spécifiques, à cause de la rareté de contrôles sur le flux de travailleurs étrangers, notamment de la main d’œuvre bon marché. Les travailleurs étrangers sont plus disposés à accepter des bas salaires et des conditions de travail plus dures. Par conséquent, malgré l’augmentation des possibilités d’emploi générée par une économie florissante, le chômage s’accroît parmi les citoyens bahreïnis, surtout parmi les femmes et les personnes ayant des formations qui ne s’adaptent pas aux nouveaux emplois (par exemple, les arts libéraux ou la sociologie).
L’inflation
Le taux d’inflation augmente constamment : ces dernières années il a dépassé les 7 % annuel. Il n’y a eu aucune hausse importante des salaires, notamment dans le secteur public. En tenant compte de cette situation, le parlement est convenu de donner un bonus annuel de 50 BHD ( 133 USD) aux familles bahreïnies pendant les deux ans à venir. Cependant cette somme n’arrive pas à atténuer l’impact de l’inflation sur la plupart des travailleurs, y compris les résidents étrangers ayant de faibles revenus qui sont dans la même situation, touchant des salaires qui demeurent en total décalage par rapport à l’inflation. Le décalage augmente entre une minorité aux revenus très élevés et la plupart des habitants ayant des revenus très bas. Quelques familles bahreïnies vivent avec 120 BHD par mois (319 USD). Bien que le gouvernement dénie cette pauvreté relative, elle a été détectée par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD)2.
Le changement du tissu social. L’augmentation permanente du nombre de travailleurs étrangers venant surtout de l’Asie pendant la dernière décennie a augmenté la population étrangère, de 37 % sur la population totale en 2001, à 50 % en 2007. Cela a provoqué une altération du tissu social. Les travailleurs étrangers ont tendance à vivre dans des camps de travail, voisins des communautés locales mais isolés de celles-ci, dans les zones abandonnées des villes. En général ils ne s’intègrent pas à la vie publique ni aux activités sociales ni aux ONG. Ils vivent seuls dans la plupart des cas, sans leurs familles, ce qui est perçu comme une déviation des habitudes sociales et a créé des problèmes entre les deux communautés, surtout chez celles qui sont voisines. Il est fréquent que leur niveau de vie inférieur et leur absence de vie sociale créent un milieu propice aux délits, principalement les agressions sexuelles, les cambriolages, les vols et les atteintes physiques. Les conditions précaires de vie, la maltraitance des patrons, comme la rétention des salaires souvent pendant des mois, ont mené beaucoup de travailleurs étrangers au suicide pour endettement et incapacité à effectuer des virements à leurs familles demeurées dans leurs pays d’origine.
Conclusion
Bien que l’économie bahreïnie soit florissante et qu’elle ait un taux de croissance élevé et des revenus qui augmentent par habitant, les avantages de la mondialisation ne bénéficient pas à l’ensemble de la population. La quantité de milliardaires augmente, la classe moyenne se rétrécit et les couches populaires s’appauvrissent. Le pays a été témoin de plusieurs affrontements et tensions entre les communautés appauvries et les forces de la sécurité, notamment dans les villages. À cause de cela la Banque Mondiale a descendu Bahreïn de son rang dans le classement de stabilité politique3. D’ où l’urgence de la mise en place d’une stratégie protégeant la société des impacts négatifs de la mondialisation.
2 Le rapport de développement humain 2007 - 2008 du PNUD accorde à Bahreïn 0,88 points dans l’indicateur de développement humain, malgré le formidable revenu 20.800 d’USD par habitant.
3 Le rapport Governance Matters 2009: Worldwide Governance Indicators, 1996-2008 de la Banque Mondiale montre que la position de Bahreïn est montée au-dessus de 0,50 seulement en 2003. Elle est constamment descendue jusqu’en 2007 et a légèrement augmenté en 2008 à 0,36. Voir : <info.worldbank.org/governance/wg/pdf>.
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Davantage de pauvreté, de vulnérabilité et d’insécurité alimentaire
Unnayan Shamannay
Taifur Rahman
Arifur Rahman
La pauvreté, la vulnérabilité et l’insécurité alimentaire se sont accrues au Bangladesh. La cherté des grains et l’inflation élevée ont encore mené à la pauvreté 1,2 millions de personnes. Les catastrophes naturelles sont plus fréquentes et plus sévères qu’auparavant. Deux inondations consécutives et le cyclone Sidr, ainsi que les prix des aliments dans le monde ont entraîné des problèmes d’approvisionnement alimentaire. Les plus démunis et les ménages gérés par des femmes sont les plus frappés par la hausse des prix des produits de base.
Depuis son indépendance en 1971 le Bangladesh a mené une stratégie de développement qui s’est concentrée sur l’intérieur du pays, avec un interventionnisme excessif de l’état dans chaque secteur de l’activité économique. Comme il existait une vision de l’agriculture de type socialiste, un système de coopératives agricoles s’est développé avec un gouvernement contrôlant l’obtention et la distribution des semences, des pesticides et de toute sorte d’équipement agricole. Diverses mesures ont été prises telles que des restrictions sur les quantités, des taux très différenciés de tarifs, (de 0 % à 400 %) avec des subventions très importantes et dans le même temps l’instauration d’un taux de change surévalué, afin de protéger les fermes familiales de la concurrence. Des interventions politiques sur le marché intérieur sous la forme de limitations au crédit, accord arbitraire de licences et contrôle des prix ont renforcé cet environnement de restriction.
Ces politiques n’ont donné lieu ni à une augmentation durable de la production, ni à une production efficace ; bien au contraire au cours des années l’écart entre la demande et l’approvisionnement des produits agricoles s’est agrandi. A la recherche d’une issue pour la crise des années 1980 ce pays a pris un virage politique : il s’est éloigné du dirigisme étatique et a appliqué des mesures plutôt guidées par le marché, qui se sont traduites en politiques sectorielles de soutien à la libéralisation macroéconomique. Les mesures de réforme adoptées ont inclus la rationalisation des tarifs, la libéralisation de l’investissement pour l’irrigation, la privatisation du commerce des engrais, les importations de machines agricoles, la distribution des semences et les systèmes de distribution des aliments, ainsi que la gestion des systèmes de recherche et d’extension agricoles. D’autre part les réformes de l’agriculture ont conduit à une diminution du rôle de l’état, qui s’est fait sentir au moment de la distribution des biens, de la réduction des subventions, de la libéralisation des marchés par un système d’incitations de prix des cultivateurs, de l’élimination et de la réduction progressive du système public de distribution des grains, de la stabilisation des prix moyennant des politiques d’achat à travers des appels d’offres ouverts et de la libéralisation des importations des grains de par le secteur privé.
Les efforts de libéralisation ne se sont pas limités à l’agriculture. Toute l’économie s’est engagée dans une libéralisation intégrale, en particulier après le début des années 90, représentant l’un des processus d’ouverture les plus rapides du monde. Même si certains se plaignent de cette trop grande rapidité , la Banque Mondiale a remarqué : « Bien que la libéralisation commerciale au Bangladesh se soit passée soudainement, il y a eu des cas d’engagements plus intenses et plus décisifs vers la libéralisation commerciale dans le reste du monde. Le Bangladesh est donc en retard pour la plupart des mesures d’ouverture commerciale. Même après avoir réduit la protection nominale dans le budget de l’année fiscale 2007, le Bangladesh a le niveau le plus élevé de protection commerciale dans la région qui est, à la fois, la plus restrictive du monde entier au niveau commercial »1.
Malgré la croissante pression pour en arriver à une plus grande libéralisation, il faut également évaluer les résultats des mesures déjà prises dans ce sens. Le peuple a-t-il bénéficié du processus de libéralisation ou les seuls bénéficiaires ont-ils été quelques gigantesques multinationales en croissance ? L’une des principales conséquences de ces réformes intégrales a été le renforcement de la dépendance des importations, y compris celle des produits agricoles. Par conséquent, bien qu’il s’agisse d’un pays agricole, le Bangladesh a peu à peu perdu le contrôle des prix de beaucoup de produits de base dont les gens ont chaque jour besoin.
L’impact des crises globales
Le diagramme suivant montre l’impact provoqué par les crises mondiales interdépendantes – changement climatique, prix des matières premières et crises économiques et financières – sur la pauvreté et l’insécurité alimentaire au Bangladesh.
Le changement climatique. Le Bangladesh est en tête sur la liste des pays les plus frappés par les changements climatiques. L’un des plus fréquents auquel le pays doit faire face est la plus grande fréquence et intensité des catastrophes naturelles. Le cyclone Sidr, qui a atteint la côte du Bangladesh en 2007, a été l’une des catastrophes les plus dévastatrices de l’histoire du pays. Il a provoqué une perte énorme en ressources naturelles, et le plus important a été son incidence sur l’une des pénuries d’aliments les plus graves depuis la famine de 1974. Ceci a eu lieu simultanément avec la hausse des prix des aliments et des matières premières dans le monde et une pénurie d’approvisionnement des aliments sans antécédents dans le monde entier.
Le cyclone Sidr et son impact sur la sécurité alimentaire ne sont qu’un exemple des nombreux problèmes auxquels le pays doit faire face en raison du changement climatique. Les changements des patrons climatiques et des températures de chaque saison ont un impact négatif sur la production agricole et sur les coûts de la production2. D’une part le Bangladesh lutte pour produire les aliments nécessaires, et d’autre part les prix des aliments sont toujours trop élevés en raison de l’augmentation des coûts de la production.
Le changement climatique atteint particulièrement des secteurs pauvres qui à l’heure actuelle sont considérés aussi « les zones chaudes du changement climatique ». Les pauvres et les indigents habitant ces zones écologiquement vulnérables font face à une réalité de plus en plus difficile, en raison des patrons climatiques changeants. Par exemple, dans la région nord-ouest du pays la gravité de l’érosion des sols causée par le flux des fleuves a considérablement augmenté, rendant encore plus vulnérable à la pauvreté et à la faim les habitants démunis de la région. De même, dans les bassins versants du nord-ouest, les patrons climatiques d’avancée et de recul de l’eau ont changé et ils ont un impact négatif sur la production des aliments et l’agriculture.
Les prix des aliments. En dehors de la perte massive de la production nationale en 2007 et 2008 à la suite de deux inondations dévastatrices et du cyclone Sidr, un autre facteur d’incidence sur le prix des aliments a été la hausse mondiale des prix des aliments et des matières premières. Le taux d’inflation des aliments pour les pauvres a été bien plus élevé, puisqu’il a dépassé 20 % fin 2007. La grille numéro 1 présente les taux officiels de l’inflation des aliments, y compris le taux total et le taux estimé pour le panier de la ménagère au niveau du seuil de pauvreté. Il est important de mentionner que malgré d’abondantes récoltes en 2008 et 2009 qui ont augmenté l’approvisionnement en aliments, et que grâce au contrôle minutieux du gouvernement leurs prix soient considérablement descendus, notamment ceux du riz et de l’huile, la grosse difficulté reste toujours leur distribution. Le problème de l’insécurité alimentaire des ménages les plus pauvres, spécialement dans les zones écologiquement vulnérables, n’a pas été résolu. Les coûts élevés de la production ont d’ailleurs réduit la marge de bénéfice des cultivateurs. Une étude faite par le groupe d’experts appartenant au Centre pour le Dialogue Politique (CDP) qui siège à Dhâkâ signale que 48,5 % de la population manque d’argent pour acheter des produits alimentaires de base tel que le riz, comparé à 40 % en 20053. Le rapport du CDP remarque que « en conséquence des prix élevés des grains et du haut niveau de l’inflation générale, quelque 12,1 millions de personnes (8,5 % de la population totale) ont franchi le seuil de pauvreté entre les mois de janvier 2005 et mars 2008 ».
L’inflation. Depuis fin 2007 le taux d’inflation, qui avait été pratiquement inexistant pendant la décennie précédente, est parvenu à deux chiffres et a atteint 11,21 % en novembre, d’après le Bureau des Statistiques du Bangladesh. L’inflation est retombée de manière disproportionnée sur les secteurs les plus pauvres de la société. Des études montrent que les ménages les plus démunis et ceux dirigés par des femmes ont été les plus frappés par la hausse des prix des biens essentiels4.
L’augmentation probable de l’extrême pauvreté, de la vulnérabilité et de l’insécurité alimentaire est le résultat concret de tout ce qui vient d’être présenté ci-dessus. On craint que le taux de l’extrême pauvreté puisse avoir augmenté en termes réels, aggravé par la permanente insécurité alimentaire, surtout dans les zones de pauvreté et vulnérabilité extrêmes.
1 Banque Mondiale. Bangladesh: Strategy for Sustained Growth. Bangladesh Development Series, 2007.
2 Parlement Européen (2008). “ Climate Change impacts and Responses in Bangladesh ”. Voir : <www.europarl.europa.eu/activities/committees/studies/download.do?file=19195>.
3 Voir : <www.idsa.in/publications/stratcomments/AnandKumar300708.htm>.
4 UNICEF (2009). “A Matter of Magnitude. The Impact of the Economic Crisis on Women and Children in South Asia”. Voir <www.unicef.org/rosa/Complete_Matter_of_Magnitude.pdf>.
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Les coûts élevés du sauvetage bancaire
Arnaud Zacharie
Secrétaire général
CNCD-11.11.11
Gaspard Denis
Responsable de la recherche
CNCD- 11.11.11
Suite à l'effondrement des actions des banques et des entreprises leaders du pays, le gouvernement a lancé un plan de sauvetage bancaire et de garantie des dépôts. Malgré tout, la crise continue de faire augmenter le taux de chômage, alors que le coût du sauvetage bancaire se fait sentir par la montée radicale de l’endettement public, et se répercutera durement sur les prestations de la sécurité sociale.
En 2008 deux des plus grandes banques belges, Fortis et Dexia, ont commencé à avoir de graves problèmes, la crise financière ayant frappé d’autres banques. Les actions de Fortis et Dexia, ainsi que celles de la plupart des entreprises belges se sont effondrées. Quelle a été la réaction du gouvernement ? Il a lancé un plan de sauvetage bancaire et de garantie des dépôts. Malgré tout, le coût de l'effondrement financier a été très sévère, non seulement à cause du renflouement de fonds par l'État, mais aussi du niveau très élevé de l’endettement public atteint alors que le pays cherchait à le réduire depuis quinze ans environ.
Pour recapitaliser le secteur bancaire, l’État a dépensé près de 20 milliards d’EUR (29,7 milliards d’USD). À cette somme il faut ajouter les 25 milliards d’EUR (37,2 milliards d’USD) fournis par l’État sous forme de garanties ; ainsi, le chiffre total des aides publiques aux banques atteindrait 45 milliards d’EUR environ ( 66,9 milliards d'USD). Outre l’endettement, ce sauvetage a provoqué des problèmes budgétaires, une croissance du chômage et des incertitudes quant à la capacité de l’État à maintenir le financement de son modèle social.
Le coût du sauvetage
Les opérations de sauvetage menées par le Gouvernement fédéral et les Entités fédérées ont conduit aussi bien à la nationalisation de Fortis Banque, qu’à la recapitalisation de Dexia Banque, du groupe KBC et de la compagnie d’assurance Ethias. Dans un délai de trois mois, les pouvoirs publics sont réapparus dans le secteur bancaire belge, après presque vingt ans d’absence. Néanmoins, les conditions requises pour les plans de recapitalisation des institutions financières ont été, en grande partie, faibles et peu transparentes. C’est ainsi que les mesures de sauvetage se sont très bien adaptées au vieil adage libéral : « socialisation des pertes, privatisation des profits ».
Concernant la banque franco-belge-luxembourgeoise Dexia, son capital a été augmenté de 3 milliards d’EUR (4.4 milliards d’USD) par les autorités nationales belges (État Fédéral et Entités Fédérées). À son tour, la France a fourni une somme équivalente (2 milliards d’EUR [2,9 milliards d’USD] à travers la Caisse des Dépôts et Consignations, et 1 milliard d’EUR [1,4 milliard d’USD] à travers l’État), ce qui lui a permis d’augmenter sa participation de 11,5 % à près de 28 % du capital de la banque et d’atteindre, par conséquent, une minorité détenant une capacité de blocage au sein du groupe bancaire. Pour sa part, la banque KBC a bénéficié jusqu’à présent de trois plans de sauvetage successifs. En premier lieu, en octobre 2008, l'État fédéral est intervenu avec une dotation de 3,5 milliards d’EUR (5,2 milliards d’USD). Puis, en janvier 2009, la Région flamande a déboursé 2 milliards d’EUR (2,9 milliards d’USD). Finalement en mai dernier, elle a encore émis des obligations d’État pour un montant de 2 milliards d’EUR (2,9 milliards d’USD) afin de financer le groupe KBC. En tout, ce groupe a reçu jusqu'à présent près de 7,5 milliards d’EUR (11,1 milliards d’USD) des contribuables belges.
En ce qui concerne le sauvetage du groupe belgo-néerlandais Fortis, l’État belge a atteint une participation au capital de 99,93 % en octobre 2008, soit une somme totale de 9,4 milliards d’EUR (14 milliards d’USD). Cependant, dès le début il a exprimé sa volonté de vendre 75 % de la banque au groupe français BNP Paribas. Les actionnaires de Fortis Holding se sont alors opposés au démantèlement de leur groupe en obligeant, à deux reprises, le gouvernement et la BNP à réviser leur contrat de cession de Fortis Banque. La troisième version a été finalement votée par les actionnaires lors de deux assemblées générales ayant eu lieu le 28 et 29 avril 2009 à Gand (Belgique) et à Utrecht (Pays-Bas). En somme, l’État belge a échangé 11,6 % du capital du groupe bancaire français contre le transfert de Fortis Banque à BNP Paribas.
L’envolée de la dette publique
Lorsque la Belgique s’est déclarée en faveur de la monnaie unique européenne au début des années 1990, un problème majeur se posait : le poids de la dette publique. Alors que les critères de Maastricht exigeaient que la dette d’un état membre soit inférieure à 60 % du PIB, la dette publique belge avait dépassé le seuil de 130 % en 1993 et 1994.
Suite à cela, un plan d’austérité a été mis en œuvre avec des résultats pénibles pour le niveau des dépenses publiques ; il a pourtant permis de réduire petit à petit la dette du pays, qui a diminué à 84 % du PIB en 2007.
À l’heure actuelle, du fait du coût des plans de sauvetage bancaire et de l’impact de la crise financière des finances publiques, le taux d'endettement a connu une flambée atteignant 89,7 % en 2008, tandis que la Banque Nationale de Belgique envisage qu’il arrivera à 103 % en 2010, soit une dette de plus de 30.000 EUR ( 44.636 USD) par habitant. Le déficit public a sans doute suivi la même courbe : de 1,2 % du PIB en 2008, on attend qu’il grimpe jusqu’à 5,5 % en 2009.
Sécurité sociale et chômage
En raison du déficit public, le financement de la sécurité sociale a été aussi affecté. En 2009 il a enregistré un déficit de 2,4 milliards d’EUR (3,6 milliards d’USD) provoqué par la chute des recouvrements des cotisations sociales et de la TVA. Le gouvernement prévoit une augmentation du déficit de la sécurité sociale de 5,3 milliards d’EUR (7,8 milliards) en 2010.
Finalement, le chômage ne cesse d’augmenter à cause de la récession économique. En juin 2009, 443.574 personnes étaient au chômage, ce qui équivaut à 43.433 nouveaux chômeurs pour une période d’un an.
Le Conseil Supérieur de l’Emploi, qui dépend du Ministère de l’Emploi et de l’Égalité des Chances, a publié en juin 2009 le rapport « Évolution récente et perspectives du marché du travail »1, consacré à l’analyse de la crise économique globale et de ses conséquences vis-à-vis de l’emploi.
Selon le document, l’activité a reculé de 1,7 % pendant le premier trimestre 2009 par rapport à la même période de 2008. Après une croissance nulle de l’emploi lors du quatrième trimestre 2008, près de 10.000 postes de travail ont disparu au cours du premier trimestre 2009. Les heures travaillées en emplois temporaires ont continué de baisser après le deuxième trimestre 2008. Cette tendance s’est accentuée en avril avec une chute de 28 % en comparaison avec l’année précédente. La Banque Nationale de Belgique prévoit la disparition de 36.000 postes de travail en 2009 plus encore 80.000 en 2010. Compte tenu de la croissance continue de la population active, le nombre de demandeurs d'emploi augmenterait à 68.000 en 2009 et à 111.000 en 2010. Le taux de chômage passerait donc de 7 % en 2008 à 9,2 % en 2010.
1 Voir : <www.emploi.belgique.be/defaultNews.aspx?id=23984>.
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Plusieurs crises sans réponse
Burma Lawyers’ Council
Gouvernée par une Junte Militaire, la population birmane vit en état de crise perpétuelle, qu´elle soit économique, politique, alimentaire ou environnementale. Superposées, ces crises ont créé une situation d´extrême pauvreté, de manque de droits élémentaires et de conditions sociales chaque fois plus dégradées. Les organisations populaires que peut former une partie de la société à l´avenir ont très peu de développement et sont interdites ou persécutées par le Gouvernement. Les droits sont réservés pour l´élite militaire et pour ses alliés tandis que les citoyens les plus vulnérables subissent la crise et les catastrophes de manière disproportionnée.
Le résultat de 47 ans de politiques erronées, d´oppression et de corruption, le Conseil de Développement et de Paix de l´État (CDPE), les crises mondiales actuelles qui affectent les marchés financiers, la disponibilité de biens de base et l´environnement ont frappé les birmans plus rapidement et plus durement que d´autres populations autour du monde.
Fin 2006, avec un revenu annuel per capita de près de 300 USD, le coût des biens alimentaires de base a augmenté entre 30 % et 40 % ce qui représente une forte menace pour ceux qui dépensent 70 % de leurs revenus en aliments1. En août 2007, le Gouvernement a réduit les subventions pour les carburants, entraînant l´augmentation du prix de l´essence. Beaucoup de gens ne pouvaient même pas aller travailler. Comme le prix des biens de base a augmenté quatre ou cinq fois, cela a provoqué dans tout le pays des actions de revendication pacifiques sous le leadership des moines bouddhistes et de quelques membres de la société civile birmane. La réponse du Gouvernement a été de prendre des mesures extrêmes et brutales, tirant sur les foules désarmées et saccageant les monastères pendant la nuit. Environ 2.000 civils sont devenus des prisonniers politiques2. Ceux qui ont participé à ces actions-là, ont reçu des condamnations à de longues années de prison.
Plus tard, en mai 2008, le Gouvernement n´a pas averti la population de l´arrivée imminente du cyclone Nargis, qui a frappé le Delta de l´Irrawaddy avec une force dévastatrice. Environ 140.000 personnes sont mortes et le désastre en a affecté directement au moins 3,4 millions. Le Gouvernement a empêché l´entrée des travailleurs humanitaires dans les régions les plus endommagées et a fermé les camps installés pour les citoyens déplacés, les obligeant à rentrer dans les zones affectées par l´inondation, sans nourriture, sans eau, sans abri et sans assistance médicale3. Le CDPE a aussi réemballé les colis d´aide étrangère pour faire croire que l´aide venait du Gouvernement. Amnesty International a exprimé sa préoccupation pour le fait que le Gouvernement ait utilisé la souffrance des citoyens après le cyclone pour renforcer son contrôle et pour élargir la portée de ses programmes de travail obligatoire, au sein d´une population manquant de ressources pour satisfaire ses besoins les plus élémentaires4.
A la même époque, le Gouvernement a convoqué un referendum, très critiqué, sur la nouvelle constitution, profitant du déplacement des victimes du cyclone. Plusieurs d´entre elles n´ont pas pu voter le 10 mai (le jour prévu du vote) ni par la suite lors du vote supplémentaire qui a eu lieu le 24 mai, sous prétexte de donner la possibilité de s´exprimer aux citoyens qui avaient dû se déplacer. Suivant les informations, des fonctionnaires du Gouvernement ont échangé des colis de l´aide étrangère contre des bulletin de votes et du travail5. Les crises mondiales actuelles, financière, environnementale et alimentaire, ont aggravé les pénuries que subissaient déjà les birmans. Pourtant, face à cette situation extrême, le CDPE n´a pas montré son intention de changer sa politique ou son système de gouvernement.
La crise financière
Pendant longtemps, la Birmanie a subi des crises financières internes. La hausse des prix des biens de base, y compris les aliments et le carburant, a entraîné des actions de revendication généralisées car les gens ne pouvaient plus payer ces biens-là et parce que l´augmentation des prix a entraîné la perte d´emplois. D´autre part, la crise du crédit a affecté indirectement les travailleurs en raison de la réduction de l´investissement dans des industries domestiques. Le marché du crédit n´existe pratiquement plus pour les consommateurs ou pour les petits commerçants. En réalité, le développement d´une économie de marché libre est un mythe dans le pays et le droit de développer des industries est une chasse gardée de la Junte gouvernante, de leurs familles et de leurs alliés6.
La mauvaise utilisation que fait le CDPE des fonds nationaux pour augmenter les dépenses militaires produit en plus de sérieuses conséquences pour les plus pauvres et pour les délaissés. Le Gouvernement a été incapable de porter secours aux citoyens après le cyclone sans une aide étrangère significative, mais il dépense presque la moitié de son budget pour les militaires.
La crise financière mondiale a empiré la réalité économique du pays. Les industries de la pêche, l´industrie minière, de l´habillement, des aliments et de la publicité par exemple en ont subi les conséquences7. Les birmans qui habitent à l´étranger ont eux aussi des problèmes économiques et ne peuvent donc pas envoyer autant d´argent qu´auparavant à leurs familles. Dans les pays développés, la demande de biens fabriqués dans les usines où travaillent des immigrants birmans a diminué et donc également la disponibilité de postes de travail pour des travailleurs immigrants. Les abus des employeurs qui essayent de maximiser leur marge de revenus8 ont par contre augmenté.
La crise environnementale
Alors que la dégradation environnementale augmente, le CDPE met en vente les droits sur les ressources nationales minérales et biologiques. Les pays voisins de la Birmanie, avec l´acquiescement du Gouvernement, exploitent les ressources naturelles du pays sans faire attention aux conséquences environnementales et culturelles. Actuellement, dans l´état de Kachin, les industriels du bois chinois abattent les arbres sans tenir compte des impacts à court ou à long terme, sans employer de travailleurs birmans et sans apporter une quelconque relance à l´économie locale9. Le CDPE a vendu de la même manière et pendant longtemps les droits sur les riches réserves minérales de Birmanie, y compris l´or et les pierres précieuses, sans aucune supervision des effets sur l´environnement.
Pendant les deux dernières décennies, la Birmanie a eu l´un des taux les plus hauts de déboisement, avec une perte de près de 20 % de ses forêts10, et cela malgré les avertissements concernant les dommages environnementaux généralisés lorsque le développement ne tient pas compte de l´interdépendance de l´écosystème11. Actuellement, des corporations et les gouvernements de la Chine, de l´Inde et de Thaïlande conçoivent et construisent de grands barrages sur les principaux fleuves birmans, ce qui menace la biodiversité du pays12. Les bénéfices financiers vont directement dans l’escarcelle des chefs militaires, alors que la population subit les dommages.
La crise alimentaire
La crise alimentaire mondiale a affecté directement la Birmanie, alors que la population a subi pendant des décennies une crise alimentaire localisée, domestique, avec une réduction significative de la dose journalière de protéines13. Bien que la Birmanie soit techniquement un pays avec de « l´excédent alimentaire » car elle produit plus d´aliments qu´elle n’en consomme, les plans inadéquats de distribution ont mis la population en situation de malnutrition profonde (32 % des enfants en insuffisance pondérale14). La plupart de la population court le risque de subir le manque d’aliments quand les catastrophes naturelles et les incidents environnementaux sont mal gérés ; les conséquences du cyclone Nagis en sont un exemple. Dans l´état de Chin, une invasion de rats a mis 100 000 personnes en état de risque d´inanition et pourtant, face à une telle situation, le Gouvernement n´a fourni absolument aucune aide15.
Crise de l´éducation
Le financement de l’éducation, en pourcentage du PIB comme en chiffres absolus, occupe le rang le plus bas au niveau mondial avec un simple 1,2 % du PIB16. Au niveau national, seul à peu près un tiers des étudiants qui commencent l´école primaire ou secondaire termine ses études17.
Crise politique
Au-dessus de tous les autres facteurs il y a le système politique démembré. Le CDPE et ses dictateurs précédents se sont refusés à permettre une vraie transition vers la démocratie, malgré le déclin aigu du pays depuis que les militaires ont pris le pouvoir. Les « Sept Pas vers la Démocratie » du régime sont vus en général comme un chemin de sept pas vers le retranchement militaire permanent. La nouvelle constitution renforce, parmi d´autres questions, le contrôle illimité des militaires sur les opérations du Gouvernement, ne garantit pas une justice indépendante et manque de protection significative des droits humains18. Plusieurs groupes politiques importants comme la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND), le Nouveau Parti de l´État de Mon, le Front Démocratique National de Mon et l´Organisation pour l´Indépendance de Kachin, n´ont pas voulu participer au référendum constitutionnel. Plusieurs groupes d´opposition clés, avec le leadership de la LND, prévoient de boycotter les prochaines élections de 2010.
D´autre part, une crise potentielle commence à se préparer entre le CDPE et l´Armée Unie de l´État de Wa (AUEW), qui contrôle une partie de l´état de Shan. Bien que les groupes se soient mis d’accord pour un cessez-le-feu en 1989, l´ AUEW a refusé l´ordre de rendre les armes et s’est transformée en milice contrôlée par le Gouvernement. L´AUEW a fait imprimer des documents officiels comme « Gouvernement de l´État de Wa, Région Autonome Spéciale, Union de Myanmar » et a déclaré qu´elle ne rendra pas les armes et ne participera pas aux élections de 2010 à moins que ce statut-là ne lui soit accordé19/a>.
Le CDPE continue à arrêter et à emprisonner quiconque ose critiquer la politique du gouvernement, un évident indicateur de son manque de volonté pour permettre des changements significatifs dans le domaine politique. L´année dernière, ils ont prolongé l´assignation à résidence de Daw Aung Suu San Kyi, Prix Nobel et leader élue démocratiquement. Le comédien comique et chroniqueur social Zaganar a été condamné à 45 ans de prison pour avoir critiqué la réponse du Gouvernement lors du passage du cyclone Nargis. Actuellement il y a environ 2.100 prisonniers politiques20.
La société civile soupçonnée
Pendant les crises, les organisations de la société civile sont cruciales pour apporter de l´aide et une voix alternative qui contribue à résoudre les problèmes nationaux les plus urgents. En Birmanie pourtant, ces organisations sont très peu développées et sont interdites ou poursuivies par le CDPE. Les groupes importants qui ont l´autorisation d’exister servent uniquement de soutien aux militaires. La Brigade Auxiliaire des Pompiers, par exemple, sert surtout de force anti-émeutes. De leur côté, les groupes de femmes avec l´approbation du gouvernement favorisent la politique gouvernementale au lieu de discuter pour savoir comment la changer. Il existe quelques organisations communautaires mais elles doivent recevoir l’autorisation du Gouvernement pour entreprendre une quelconque activité21. En plus, si l´on considère qu´un membre de ces organisations a commis un acte « illégal », ce qui bien des fois signifie tout simplement qu´il s´est opposé au Gouvernement, il est souvent puni22.
Conclusion
Sous le Gouvernement de la Junte Militaire, la population birmane vit en crise permanente, qu´elle soit économique, politique ou environnementale. Pendant les dernières années, les crises se sont nourries les unes les autres, pérennisant ainsi un statut quo pernicieux. Pour y répondre, le Gouvernement accroît les mesures de force, arrête les individus et se refuse à fournir un réseau de protection aux citoyens. Cela a créé un pays avec des droits réservés seulement aux élites militaires et à leurs alliés alors que les citoyens les plus vulnérables se voient frappés de manière disproportionnée par la crise et les catastrophes.
1 Head, J. “ The Hardship that Sparked Burma’s Unrest”. BBC News, 2 octobre 2007. Disponible sur : <news.bbc.co.uk/1/hi/world/asia-pacific/7023548.stm>.
2 Head, J. “Burma Leaders Double Fuel Prices”. BBC News, 15 août 2007. Disponible sur : <news.bbc.co.uk/2/hi/asia-pacific/6947251.stm>. Voir aussi : Assistance Association for Political Prisoners. Crackdown in Burma Continues, 31 janvier 2008. Disponible sur : <www.aappb.org/release100.html>.
3 Tun, A. H. “Myanmar Cyclone Toll Rises to 138,000 Dead, Missing”. Reuters, 24 juin 2008. Disponible sur : <uk.reuters.com/article/featuredCrisis/idUKBKK15852620080624?>.
4 Amnesty International. “Myanmar Briefing : Human Right Concerns a Month after Cyclone Nargis”. 2 juin 2008. Disponible sur : <www.amnesty.org/en/library/asset/ASA16/013/2008/en/85931049-32e5-11dd-863f-e9cd398f74da/asa160132008eng.pdf>.
5 Yeni et Min Lwin. “Massive Cheating Reported from Polling Stations”. The Irrawaddy, 10 mai 2008. Disponible sur : <www.irrawaddy.org/article.php?art_id=11923>.
6 Pepper. D. “In Burma, Business Ventures Start with Military”. SFGate, 13 novembre 2008. Disponible sur : <www.sfgate.com/cgi-bin/article.cgi?f=/c/a/2008/11/12/MNNU12SBS8.DTL>.
7 Voir par exemple : Mizzima, “Burmese Fishery Export Hit Hard”, 27 novembre 2008; “China Slowdown Hits Burmese Mining”, 28 janvier 2009 ; “Ad Industry in Burma in Doldrums”, 14 février 2009 ; “Rangoon Factories Begin Cutting Jobs”, 5 février 2009. Disponible sur : <www.mizzima.com/news/global-financial-crisis-a-burma.html>.
8 Entretiens avec les travailleurs des usines dans Mae Sot, Thaïlande, tenus par le personnel du Burma Lawyers’ Council en juin 2008.
9 Kachin News Group. “China Resumes Importing Timber from Northern Burma”. Kachin News, 17 décembre 2008. Disponible sur : <www.kachinnews.com/index.php?option=com_content&view=article&id=678:china-resumes-importing-timber-from-northern-burma&catid=1:latest-news&Itemid=50>.
10 Mongobay.com (s/f). “Myanmar : Environmental Profile”. Disponible sur : <rainforests.mongabay.com/20myanmar.htm>.
11 Curtis, G. “Christian Aid Warns of Burma Environmental Damage”. Christian Today, 15 mai 2007. Disponible sur : <www.christiantoday.com/article/christian.aid.warns.of.burma.environmental.damage/107>.
12 Pichai, U. “Environmentalists Demand Halt to USD 35 billion Burma Dams”. Mizzima, 16 mars 2009. Disponible sur : <www.mizzima.com/news/inside-burma/1844-environmentalists-demand-halt-to-us-35-billion-burma-dams.html>.
13 Suu Kyi, A.S. “Breakfast Blues”. Dans Letters from Burma. 1998, pp. 27-30.
14 WFP (s/f). “Myanmar”. World Food Programme (WFP). Disponible sur: <www.wfp.org/countries/Myanmar>.
15 Carroll, B. “Rampaging Rats Bring Starvation to Burma”. BBC News, 26 septembre 2008. Disponible sur : <news.bbc.co.uk/2/hi/asia-pacific/7633986.stm>.
16 CIA (2009). World Factbook, Burma. Disponible sur : <www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/bm.html>.
17 Asian Tribune “Child Education in Burma”. Asian Tribune,3 septembre 2003. Disponible sur : <www.asiantribune.com/oldsite/show_article.php?id=850>.
18 Voir : Htoo, A.U. “Analysis of the SPDC’s Constitution from the Perspective of Human Rights”. Legal Issues on Burma Journal, Nº 30, 2008; et deux autres publications du Burma Lawyers’ Council. “2010 Elections: No Hope for Human Rights”. Legal Issues on Burma Journal, Nº 30, 2008, et “Statement on the Failure of the 2008 SPDC Constitution to Protect Judicial Independence”. 4 décembre 2008.
19 Weng. L. “UWSP Proposes Autonomous Wa Region”. The Irrawaddy, 5 janvier 2009. Disponible sur : <www.irrawaddy.org/highlight.php?art_id=14874>.
20 France 24. “Online Mobilization for Political Prisoners in Burma”. Disponible sur : <www.france24.com/en/20090319-web-mobilisation-political-prisoners-burma-egypt-activist-rio-wireless-brazil>.
21 Ni Aung, M.A. “Creating Space in Myanmar/Burma”. En Zarni (ed.) Active Citizens Under Political Wraps : Experiences from Myanmar/Burma and Vietnam. Chaing Mai: Heinrich Boll Foundation. 2006.
22 Lorch, J. “Civil Society Actors and Their Room for Maneuver in Myanmar/Burma”. Dans Zarni (2006), ibid.
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Le moment de la vérité
MM. Javier Gómez et Gustavo Luna1
CEDLA
Le pays a vu passer un cycle de croissance globale mais a été incapable d’en tirer profit pour établir son propre rythme de développement. Maintenant que la crise globale s'aggrave, l'économie bolivienne a ressenti à peine les effets de cette croissance et la regarde déjà s’éloigner. Ces tendances indiquent le faible effet de distribution des processus économiques récents. En Bolivie, d’autre part, la réaction de l’entreprenariat face à la crise consiste à encourager les négociations inégales, dont les effets retomberont sur les épaules des travailleurs, réduisant ainsi les avantages et les salaires et augmentant les licenciements.
Le premier résultat de la crise économique a été d’en finir avec le mythe de la capacité du système capitaliste à développer des processus soutenus pour l’amélioration des conditions de vie des travailleurs et de leurs familles. Cette situation, qui se manifeste à présent d’une façon plus concrète dans les pays les plus riches du monde (l'épicentre du dernier tremblement de terre financier) a été plus tenace dans les pays les moins développés, dans la périphérie du monde.
La Bolivie constitue un témoignage irréfutable de l’incapacité du capitalisme, de par sa nature même et sa structure, antérieure à cette dernière manifestation de la crise du capitalisme. En ce sens, l'insertion précoce de la Bolivie sur le marché global comme fournisseur de matières premières n'a pu être modifiée pendant presque 200 ans de vie républicaine, la liant de façon permanente à la vulnérabilité structurelle. Par conséquent, le pays ne profite pas des cycles économiques expansifs de manière adéquate, alors que les « épisodes » critiques ne font qu’exacerber cette vulnérabilité face aux chocs externes.
La crise
De nos jours, la crise économique globale ne constitue pas un « grave épisode » supplémentaire causé par l’absence de règlementation des marchés financiers ; il s’agit d’une crise systémique de la totalité du capitalisme, faisant ressortir toutes les contradictions internes des secteurs de production (énergétique, alimentaire, écologique, social et culturel), concernant la surproduction, la tendance structurelle à la baisse des taux de bénéfices et la dépression générale de la consommation, et provenant du besoin d’obtenir toujours plus de bénéfices par une plus grande exploitation de la force de travail. Avec cette toile de fond, « l’irrationalité » de mise autour de la spéculation financière, véritable porte de sortie du capitalisme monopolistique visant à produire des bénéfices extraordinaires en faisant circuler le capital, dans un contexte global de durcissement de la libéralisation du marché financier, devient plus facile à comprendre.
Il s’agit d’une crise grave, qui s’est installée pour longtemps. Ella a déjà montré la fragilité terrible des économies sous-développées, constituant un exemple du caractère inhérent au développement capitaliste, c’est-à-dire, des économies qui concentrent fortement les bénéfices, entraînant des inégalités entre les pays et à l’intérieur de ceux-ci.
En Bolivie, cette caractéristique se manifeste par le faible développement de sa base industrielle, par une forte concentration de la richesse et une par une énorme majorité de familles vouées à vivre dans la précarité. Par contre, un fort secteur primaire destiné à l'exportation a été développé, avec la collaboration importante de capitaux transnationaux qui ont connu un boom pendant les sept dernières années, notamment pour l’exportation de gaz et de minéraux.
Derrière le mirage
Lorsque l’économie globale s’est relevée après la « crise asiatique » en 1999, le commerce s’est rapidement étendu et la demande de matières premières a augmenté. L’économie bolivienne s’est accrue pendant les quatre dernières années (2005-2008) à un rythme moyen de 5 % environ. Cette situation répond à l’augmentation de la valeur de ses exportations en raison des prix extraordinaires des matières premières (notamment des minéraux et des hydrocarbures) L’administration du Président Evo Morales considère que sa politique économique post-néolibérale a été prospère. Cependant, des pays tels que le Pérou, ayant une politique économique fidèle au néolibéralisme, montraient des tendances plus importantes pour la croissance de leurs produits et de leurs exportations. En fait, l’essor économique cachait plusieurs faiblesses structurelles.
La performance de certains indicateurs sociaux n’a pas accompagné celle des indicateurs macroéconomiques. Par exemple, la réduction de la pauvreté dans la région a été vite neutralisée par la hausse des prix des aliments, se répercutant sévèrement sur les revenus déjà faibles des familles pauvres qui destinent la plupart de leurs revenus à la nourriture.
Avec cette réalité un autre mirage est apparu : les envois de fonds générés par les travailleurs et travailleuses émigrantes, ont atteint des volumes très importants en Bolivie en 2007 et 2008 (ils ont dépassé le milliard d’USD, un peu plus de 6 % du PIB)2. Cela a contribué à l'augmentation de la consommation des foyers et a relancé la croissance de secteurs tels que la construction et les services3.
Néanmoins, la durabilité des envois de fonds depuis l’étranger a toujours été très faible, et cette fragilité est devenue plus évidente lorsque les pays de l’Union Européenne ont mis en place des « politiques de rapatriement » début 2008, avant le début de la crise. Ce processus s’est fortement accéléré à partir de septembre de cette année-là, lorsque la crise a frappé la construction, la manufacture et les services personnels, grands secteurs d’embauche de ces travailleurs.
Le retour des travailleurs émigrants constitue une pression supplémentaire pour le marché de travail bolivien, qui est déjà dévasté par le sous-emploi. De même, ce retour creusera davantage la dépression des salaires en raison de la suroffre de la force de travail, de l’augmentation du taux de chômage débridé et de l’aggravation des conditions de travail.
Les revenus : le talon d’Achille
Le revenu des Boliviens par habitant a augmenté de 34,3 % entre 2002 et 20074 ; par conséquent, du point de vue des coopérateurs internationaux, la Bolivie est devenu un pays à revenus moyens (il s’agissait d’un pays à faibles revenus). Néanmoins, l'inégalité permanente dans la distribution des revenus a empêché la plupart de la population de bénéficier du progrès, comme l’indique les salaires et le taux de l’emploi, entre autres indicateurs.
En raison d’une forte inégalité de la distribution des richesses, la pauvreté continue à affecter 60 % de la population, et la pauvreté extrême a également augmenté de 36,7 % à 37,7 % pendant la période 2005-2007. Dans les zones rurales, où les niveaux de pauvreté sont extrêmes, l'Indice Gini non seulement est très élevé, mais il a subi une hausse de 0,62 à 0,645.
Ces tendances montrent le faible effet de distribution des processus économiques récents. Encore une fois, les effets de la théorie du ruissellement concernant la croissance économique ont mis en évidence son esprit fallacieux. Faute de politiques gouvernementales efficaces favorisant l’amélioration de l'accès aux ressources productives, et permettant qu’une majorité puisse bénéficier de la prospérité économique, il s’avère nécessaire de soutenir la génération d’emploi qualifié, les salaires dignes, l'accès aux ressources de production et à d'autres revenus dérivés du travail.
Ainsi, la relation entre l’expansion du produit et l’emploi indique que, durant la période comprise entre 2001 et 2004, pendant laquelle une croissance moyenne modérée de 3,1 % a été constatée, le taux d'emploi a enregistré une augmentation similaire et une productivité nulle, montrant ainsi que cette expansion s’est produite au détriment de la qualité. En zone urbaine une tendance identique a été constatée. Durant la période 2004-2007, la production a augmenté de manière accélérée, à un rythme annuel moyen de 4,5 %. En outre, le taux d'emploi s’est élevé à 3,9 % annuel, mais situé en-dessous du rythme d'expansion du produit (4,5 %), avec un bénéfice de 0,7 % pour la productivité. Cela signifie que, même si des emplois ont été créés, ils restent ciblés sur ceux de moindre qualité. Cette tendance est la même dans les zones urbaines et rurales.
2008: de nouveau l’essor du secteur minier
D’après l’Institut National de Statistiques (INE), au cours de l’année 2008 le PIB de la Bolivie a enregistré une augmentation extraordinaire de 6,15 %. Une pareille croissance n'avait pas été enregistrée depuis 1976, lorsque le taux avait atteint à l’époque 6,1 %. La croissance de la demande et des prix internationaux ont entraîné l'augmentation exceptionnelle du PIB du secteur minier, qui est passé de 9,98 % en 2007 à 56,26 % en 2008, au-dessus des autres activités économiques du pays, ces dernières ayant augmenté de 4, 33 % en moyenne ; son incidence est passée de 0,41 % à 2,41 %, et la participation au PIB a augmenté de 5,81 % à 8,55 %6.
Ce boom du secteur minier n’est pas dû à un ensemble d’entreprises constituant un secteur solide et se faisant naturellement concurrence pour exporter davantage. Au contraire, il est dû aux agissements d'une seule entreprise à capital transnational. Le Projet Minier « San Cristóbal » (PMSC) est le seul responsable de cette croissance : Le PMSC a représenté 40,7 % de la valeur de production des minéraux du pays. C’est ainsi que le taux de croissance du PIB sans le PMSC aurait à peine atteint 5,13 % ; cela signifie que sans ce projet, la Bolivie n’aurait pas battu le record de l’année 1976. En dehors de la concentration, un autre problème est la faible proportion des recettes fiscales provenant de ce secteur qui restent dans le pays : en 2008, sur la valeur totale de la production minière, représentant 2.011 millions d’USD, seulement 94,14 millions d’USD – à peine 4,64 % du total sont restés dans les caisses fiscales7.
Les plus affectés par la crise et la chute des prix des minéraux ne sont pas précisément les entreprises telles que le PMSC, mais le petit secteur minier coopératif qui embauche la plupart du personnel et qui exploite sans contrôle les veines et les gisements en employant des méthodes archaïques d'organisation du travail, et en perpétuant des cercles vicieux de précarité et de salaires réduits.
Conclusion
Le moment de vérité est arrivé. Un cycle d’essor global s'est écoulé et la Bolivie n'a été qu'un simple spectateur, faisant preuve d’inertie, et ne sachant pas tirer profit de l’opportunité pour se mettre au rythme de cet essor en puisant dans ses propres ressources. Ceci, au sein du capitalisme régnant, ne semble être qu’une chimère, car les cycles de croissance ne reproduisent que l’ordre en vigueur, avec des intégrations très inégales. Alors que la crise globale commence à écrire la pire partie de sa récente histoire, l’économie bolivienne s’est à peine rendue compte qu’une période d'essor a bien existé. Et maintenant elle la regarde s’éloigner.
Cependant, face à l’avènement des conséquences de la crise globale dans ce pays, la réaction de l’entreprenariat au regard de la chute de ses bénéfices extraordinaires se traduit en favorisant des négociations peu équitables, dont le but se centre sur la réduction des bénéfices et des salaires des travailleurs, conjointement avec l'augmentation des licenciements. Tandis que les entreprises font tout pour placer le poids de la crise sur le dos des travailleurs, elles investissent la même énergie pour que les honoraires, les primes et d'autres mécanismes de profit du patronat augmentent ou restent intouchables.
Pour la plupart des travailleurs saisonniers et des « auto-employés » il ne reste plus qu'à attendre que le Gouvernement crée une nouvelle allocation qui les aidera à pallier d’une façon ou d’une autre leurs besoins de base.
1 M. Javier Gómez est économiste et directeur exécutif du CEDLA. M. Gustavo Luna est communicateur et coordinateur général du CEDLA.
2 Banque Centrale de Bolivie. Mémoire 2008. Cet organisme officiel informe que, en 2008, les envois de fonds depuis l’étranger aux familles ont atteint 1,09 milliard d’USD, montrant une croissance de 7,5 % par rapport à 2007. Ce chiffre représente 6,4 % du PIB. Page 87.
3 D’après l’ INE (Institut National de Statistiques), en 2007 l’incidence des dépenses de consommation finale des familles représentait 2,98 % du PIB, atteignant 3,91 % en 2008. Ce chiffre est supérieur à celui atteint pendant la précédente décennie (1998).
4 Mme. Escóbar, Silvia. Chômage, conditions du travail et revenus. Mimeo. CEDLA, 2009.
5 Ibid. À titre comparatif, en 2006 l’Indice Gini en Argentine était de 0,519, au Chili 0,517 et seulement le Brésil avec un indice de 0,593 surpassait celui estimé pour la Bolivie. Ces pays ont tous des revenus moyens, d’après l’indicateur du revenu par habitant.
6 M. Guachalla, Osvaldo. “La Bolivie: le Produit Interne Brut a augmenté de 6,15 %” Mimeo. CEDLA. Mai 2009.
7 Ibid.
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En train de nager en plein tsunami ?
Fernando J. Cardim de Carvalho1
Social Watch Brésil
Le Brésil a dû payer le prix de son « intégration » à l’économie globale. Les investisseurs et les spéculateurs étrangers étant partis, le marché des valeurs s’est effondré et la monnaie a subi une forte dévaluation. Bien que la réponse du Gouvernement ait été un peu timide, il est encore possible que le Brésil puisse surmonter la crise. En même temps, l’économie globale se trouve face à une opportunité unique de promouvoir des stratégies de croissance durables du point de vue de l’environnement, ainsi que de nouvelles normes pour que les systèmes financiers travaillent au profit du développement et de la redistribution des revenus et de la richesse.
De nombreux observateurs ont considéré que le niveau de contagion assez faible des économies émergentes face à la panique financière qui a démarré aux États-Unis en 2007, était un signal qui montrait que ces pays pourraient réussir à « déconnecter » leur avenir de celui des pays développés. Il était prévisible que le Brésil se trouverait parmi les pays les plus chanceux, c’est-à-dire, ceux qui pourraient éviter d’être engloutis par l’onde de choc de la crise financière, conserver un certain niveau de prospérité et freiner le chômage en redirigeant les activités productives vers les marchés internes.
La croissance puissante de l’économie brésilienne tout au long des trois premiers trimestres de l’année 2008 semblait justifier un tel point de vue. Certes, elle n’a pas augmenté au « rythme de la Chine », mais elle a été suffisamment rapide aussi bien pour augmenter les taux d’emploi que pour permettre à un nombre croissant de travailleurs de passer du secteur informel au secteur formel, mieux rémunéré et plus sûr. La consommation dans les foyers a entraîné une croissance générale, nourrie par la croissance du salaire réel (notamment du salaire minimum) et de l’emploi, ainsi que par les politiques sociales qui ont renforcé le pouvoir d’achat des groupes sociaux aux revenus moindres.
Le Gouvernement Fédéral, avec le président Lula à sa tête, a lancé une campagne gouvernementale intensive pour consolider le moral des entrepreneurs et des consommateurs, s’assurant ainsi de conserver un niveau élevé de la demande, et pour encourager les entreprises de continuer à produire et à augmenter leurs investissements. Le Président a fréquemment rappelé à la population que son Plan d’Accélération de la Croissance (PAC) agirait comme un levier pour soutenir le niveau de la demande,essayant ainsi d’éviter la crainte des consommateurs face au chômage, et la capacité oisive des entreprises.
La stratégie avait paru avoir réussi jusqu’à ce que soudainement, au dernier trimestre 2008, le PBI chute de 3,6% par rapport au trimestre précédent. Bien que tous les secteurs de l’économie aient éprouvé une réduction, le secteur industriel a été de loin le plus touché et a diminué de plus de 7 %. Les investissements, qui montraient jusque là une croissance soutenue et prometteuse, se sont réduits de presque 10 %. Ni les consommateurs ni les investisseurs n’ont pu maintenir les niveaux de consommation précédents, et par conséquent c’est toute l’économie qui s’est vue réduite de manière significative.
La réaction timide du Gouvernement
La version brésilienne de la crise internationale a des racines précises. Le système bancaire local n’a pas été exposé aux investissements spéculatifs qui ont ruiné les systèmes financiers des États-Unis, de l’Europe et de certaines régions d’Asie. En raison des taux élevés d’intérêt payés sur la dette publique interne, les banques qui opéraient au Brésil ont préféré investir dans ce genre de valeurs, au lieu de tenter leur chance avec les « innovations financières » créées aux États-Unis. Cependant, le pays n’a pas pu éviter les conséquences de son « intégration » à l’économie globale.
Au cours de ces dernières années, l’économie brésilienne avait reçu une grande quantité de capitaux étrangers, soit en investissements directs, soit sous la forme de capitaux en portefeuilles spéculatifs. La Bourse de Sao Paulo a grimpé de façon vertigineuse et un grand nombre de valeurs de la dette publique ont été placées sur le marché. Lorsque la crise a éclaté aux États-Unis et peu après en Europe Occidentale, plusieurs investisseurs et spéculateurs ont récupéré leurs fonds, souvent pour couvrir des pertes dans les lieux d’origine. En conséquence, non seulement la bourse brésilienne s’est effondrée, mais ce fut également le cas de la monnaie nationale – le « real » – qui a subi un processus de dévaluation inattendu et rapide.
Les conséquences n’ont pas été aussi catastrophiques qu’elles ne l’avaient été au cours des crises précédentes, en bonne mesure parce que les désordres causés n’ont pas provoqué la fugue de capitaux des résidents. En fait, les spéculateurs financiers locaux n’avaient aucune raison de faire sortir leurs capitaux du pays, étant donné que le Gouvernement payait encore les taux d’intérêt les plus élevés du monde. D’autre part, il n’existait pas de place financière sûre vers laquelle ils pouvaient se tourner. En outre, le Brésil conserve toujours une quantité relativement importante de réserves internationales. De cette façon, bien que les investisseurs étrangers n’ont pas eu, en règle générale, d’autre recours que de se retirer, les investisseurs brésiliens ont préféré rester. Par conséquent, les problèmes avec la balance des paiements n’ont pas été aussi sérieux ou paralysants qu’ils ne l’avaient été peu de temps avant.
Cependant, les désordres à la Bourse locale et la dévaluation inattendue du « real » ont suffi pour induire les banques locales à restreindre les crédits accordés aux entreprises et aux consommateurs, malgré quelques tentatives timides de la Banque Centrale pour leur procurer une liquidité supplémentaire. Les restrictions du crédit ont immédiatement entraîné des difficultés dans des secteurs tels que celui des biens de consommation durables, notamment le secteur automobile, dont la demande repose en bonne mesure sur la disponibilité du crédit. Dans l’industrie automobile, des stratégies telles que les congés collectifs ont été menées pour réduire temporairement la production, mais elles n’ont pas suffi pour éviter la transmission de la chute de la demande à d’autres industries. Les menaces conjointes de la capacité oisive et du chômage ont fini par briser le moral des consommateurs et des entreprises. Face à leur capacité oisive, les entreprises ont cessé leurs plans d’investissement, aggravant la répercussion de la chute initiale de la demande. Enfin, seul le Gouvernement a continué à augmenter les dépenses au cours du dernier trimestre de l’année 2008.
Contrairement à l’année précédente, l’année 2009 a démarré avec des perspectives beaucoup plus réduites. Les enquêtes d’opinion montrent que la peur du chômage reste le principal souci de la population, déplaçant la violence urbaine et la sécurité publique. En particulier, le fait de voir avec clarté que, malgré le discours énergique adopté par le Président début 2008, les politiques contre-cycliques ont été beaucoup moins vigoureuses et beaucoup moins efficaces qu’elles n’auraient dû l’être, demeure un autre souci important. Il est bien connu que, lorsque le Président Lula a assumé son mandat, il a pris des mesures pour rassurer les marchés financiers, tout en conservant l’indépendance de facto de la Banque Centrale, gérée majoritairement par des fonctionnaires d’institutions financières privées. Il n’est pas étonnant d’apprendre que la politique monétaire a été très mal gérée pendant la crise par des autorités monétaires se situant tellement plus à droite que toute autre Banque Centrale dans le monde, qu’elle en arrive à gêner les banques privées de par son incapacité à contribuer au redressement économique.
Certes, la vacillante politique de dépenses du Gouvernement constitue un plus grand motif d’étonnement. Les discours du Président appelant à prendre des mesures énergiques semblent être tombés « dans l’oreille d’un sourd » au sein de son groupe ministériel. Le Gouvernement a persisté avec le PAC, élaboré à une époque de normalité et qui s’avère de toute évidence insuffisant au regard de la lutte contre une récession qui sera peut-être encore prolongée et plus profonde qu’elle ne semblait l’être au début. Cependant, le PAC lui-même a été établi de façon incertaine et timide. Les obstacles bureaucratiques retardent la mise en exécution des plans et, par conséquent, les dépenses publique sont moins importantes et plus lentes que prévu. Le manque de décision des autorités dirigeant l’équipe économique du Gouvernement montre un inquiétant manque de compréhension des dommages qu’une crise comme celle-ci peut causer dans un pays en voie de développement tel que le Brésil.
Cependant, vu que l’économie brésilienne poursuivait sa chute au cours du premier trimestre 2009, des politiques plus énergiques ont été mises en place, quoique celles-ci restent très éloignées de celles à mettre en place pour pallier les vagues de restriction arrivant de l’étranger. Les banques nationales ont augmenté l’offre de crédit avec des taux d’intérêt plus faibles. Le transfert des revenus vers les pauvres par le biais du programme de subventions familiales a préservé le niveau de consommation dans les secteurs les plus défavorisés. L’amélioration générale des attentes, après une réaction considérée exagérée au cours du dernier trimestre 2008, a entraîné à présent une certaine reprise, quoique encore vacillante et timide. En y regardant de près, tout semble signaler la même direction : une légère reprise qui, en soi et vu le contexte international, représente toujours un soulagement.
De nos jours, un des plus grands risques auxquels un pays peut s’exposer est celui de confondre l’incapacité d’agir avec la prudence financière et fiscale. En craignant d’augmenter les dépenses, les gouvernements peuvent se résigner à observer de quelle façon la demande privée chute et de quelle façon, par conséquent, la production et l’emploi chutent également. Dans une telle situation, les revenus fiscaux se réduisent, et parallèlement les dépenses de la sécurité sociale augmentent. Donc, le déficit fiscal s’accroît, justement en raison de l’inaction des gouvernements, qui n’ont pas eu assez d’audace pour agir contre la réduction de l’économie. Il est paradoxal qu’en essayant de se montrer prudents, les pays se placent dans une situation fiscale pire encore de ce qu’elle serait si leurs gouvernements avaient agi avec décision pour soutenir la demande, en augmentant ainsi les recettes publiques. Soit dit en passant, c’est justement ce que le président Obama essaie de parvenir à faire aux États-Unis. C’est aussi ce que Dominique Strauss-Kahn, Directeur du Fonds Monétaire International (FMI) 2 a défendu à plusieurs reprises depuis 2007
Recomposer l’économie globale
La crise financière internationale actuelle représente l’altération la plus sérieuse que l’économie globale ait affrontée depuis la Grande Dépression des années 1930. Sa durée même montre le danger qu’elle représente ; les indices de récupération sont imperceptibles. La situation s’aggravera probablement dans le court terme, entraînant l’augmentation du chômage et les altérations sociales que le phénomène produit partout. Le Brésil peut encore réduire de tels risques si le gouvernement fait face au défi.
Cependant, il faut signaler que ce genre de crise transforme toujours, sur une plus ou moins grande échelle, la manière dont l’économie et la société fonctionnent. Ainsi, même si la détérioration économique doit être arrêtée à court terme, la préparation pour l’avenir est très importante, voire essentielle. La Grande Dépression a entraîné l’épanouissement d’un état de bien-être social et la généralisation de l’intervention publique dans l’économie, tous deux combattus avec férocité par la révolution néolibérale de la fin du XXème siècle.
A présent, une nouvelle opportunité se présente pour recomposer la voie de l’économie globale. Tout semble indiquer que ces «investissements verts» deviendront le prochain horizon d’investissement et d’innovation, encourageant des stratégies de croissance durables et respectueuses de l’environnement, qui augmenteront l’efficacité de la génération et de l’utilisation de l’énergie. De même, la réparation des dommages causés par la prédominance des idéologies néolibérales, qui ont encouragé la dérèglementation financière depuis la décennie des années 80 et ont entraîné le monde au bord de la catastrophe, s’avère essentielle. Vu l’échec généralisé de ces idées, l’établissement de nouvelles stratégies de régulation et de supervision sera nécessaire. Cependant, les nouvelles normes devront envisager la manière dont les systèmes financiers travailleront pour la promotion du développement et de la distribution des revenus et de la richesse, au lieu de favoriser les spéculateurs financiers.
Les normes sont actuellement définies lors de forums tels que le Comité de Bâle et le Forum de Stabilité Financière. La crise a contraint les pays les plus riches, qui monopolisaient traditionnellement ces décisions, à ouvrir leurs portes aux économies émergentes, et a transformé le G20 en un pôle d’attention, du moins pour l’instant. Il serait préférable qu’il existe un G20 au lieu d’un G7, mais en réalité, aucun des G n’est capable d’apporter une véritable solution. Ces institutions doivent devenir représentative ─ ce qu’elles ne deviendront jamais en augmentant le nombre de leurs membres ─ pour que ces clubs préexistants conservent leur nature exclusive. La crise actuelle a créé une belle opportunité pour parvenir à la vraie démocratisation des institutions internationales. Une opportunité qu’il ne faut pas rater3.
La menace pour la sécurité alimentaire Suite au programme Famine Zéro et à l’affermissement de quelques politiques gouvernementales, le Brésil est devenu un leader mondial reconnu pour sa lutte contre la famine. Cependant, la crise alimentaire et la crise financière ont eu des répercussions significatives sur la sécurité alimentaire du pays. Au cours de la seconde moitié de l’année 2007, les prix des aliments ont commencé à augmenter, inversant la tendance à la baisse des années précédentes et mettant en danger les réussites obtenues. Les groupes sociaux les plus vulnérables sont ceux qui reçoivent les coups les plus durs lorsque le prix des aliments monte, étant donné que ceux-ci constituent la portion la plus importante de leurs budgets. Préoccupé par cette situation, le Gouvernement a augmenté de 8 % les bénéfices distribués au moyen de la Bolsa Familia(un programme de revenu minimum garanti). Un nombre plus large de familles ont été aussi incorporées au programme et des mesures ont été prises en vue de stimuler la production des aliments par le biais des incitations fiscales et des garanties pour les producteurs ruraux. A cours de la seconde moitié de l’an 2008, le prix des aliments s’est nivelé, voire réduit, suivant la tendance des biens de consommation sur les marchés globaux. Cependant, de nouvelles menaces pour la sécurité alimentaire sont apparues, suite à la réduction des revenus des populations les plus pauvres, à l’augmentation du chômage et à la diminution probable du salaire réel. Le budget pour la sécurité alimentaire est, certes, un indicateur pertinent de la direction à atteindre concernant les fonds qui seront libérés cette année et le projet budgétaire de 2010. security have resulted from lower incomes among the poorest people, increased unemployment and a likely reduction in real wages. It is necessary to follow events very closely in 2009. The food security budget is certainly a relevant indicator of the direction being followed, both in terms of releasing funds for this year and the 2010 budgetary proposal. |
1 Professeur d’Économie à l’Université Fédérale de Rio de Janeiro et consultant à l’Institut Brésilien d’Analyse Sociale et Économique (Ibase).
2 Le Fonds lui-même a refusé d’adopter ce point de vue, tel qu’il est démontré par les conditions imposées aux pays de l’Europe Centrale dont le FMI a assuré le sauvetage.
3 En fait, celui-ci est précisément le but du projet “Libéralisation financière et gouvernance globale : le rôle des institutions internationales”, coordonné par Fernando J.C. Carvalho et Jan Kregel, élaboré par Ibase et sponsorisé par la Fondation Ford. Voir “Crise financière et déficit démocratique”. Disponible sur : <www.ibase.br/modules.php?name=Conteudo&pid=1686>.
4 Spécialiste en sécurité alimentaire et co-directeur de Ibase.
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Inquiétude générale
Bulgarian Gender Resarch Foundation et Bulgarian-European Partnership Association
La Bulgarie, le pays le plus pauvre de l’Union Européenne a bénéficié des avantages économiques provenant de son intégration à l’UE. Cependant, malgré les déclarations du Gouvernement assurant que l´économie est solide, les investissements et les exportations chutent et le PIB va bientôt diminuer. Il est probable que les mesures du Gouvernement pour atténuer les effets de la crise mondiale ne seront pas suffisantes. Les ONG demandent aux employeurs et au Gouvernement de prendre des mesures d´urgence pour juguler l´inflation, convenir d'accords salariaux pour augmenter le revenu réel et d´évaluer l´impact de la crise sur les secteurs les plus vulnérables de la société.
Même si la Bulgarie n´a pas encore subi le plein impact de la crise économique mondiale, il y a déjà eu des protestations sociales en réponse à la décision de la Commission Européenne pour couper le financement de pré-adhésion en raison de la corruption rampante. En janvier 2009, les citoyens ont manifesté devant le Parlement pour exiger des reformes économiques et ont appelé le Gouvernement à agir ou à démissionner. Le même mois, des agriculteurs ont manifesté dans tout le pays et ont bloqué le seul pont vers la Roumanie, exigeant du Gouvernement de fixer un prix minimum pour le lait et de mettre fin aux importations des produits laitiers à bas prix. Les agents de police, qui n’ont pas de droit de grève légal, ont fait depuis décembre des manifestations « silencieuses » pour obtenir une augmentation de salaires et de meilleures conditions de travail.
En dépit du malaise social et d´une crise financière globale qui a incité la révision des politiques économiques actuelles dans le monde entier, la remise en question approfondie du modèle néolibéral et à demander un contrôle renforcé du Gouvernement, le modèle néolibéral est encore à la mode en Bulgarie. Le Premier ministre Sergey Stanishev reconnaît que la Bulgarie connaît sa première crise économique en tant que pays capitaliste et qu´elle n´est pas à l´abri des difficultés affrontées par ses partenaires économiques. Cependant, il continue à insister que les problèmes du pays sont moins graves que ceux des autres membres de l´Union Européenne.
Le boom et la crise
En 1997 le contrôle monétaire a été instauré après une grave crise du système bancaire national ayant entraîné l´hyperinflation, la fermeture des banques, une crise politique aigüe et l´appauvrissement massif. Depuis, chaque gouvernement, indépendamment de son orientation politique, a décidé de le conserver pour éviter une autre crise généralisée. La stratégie du contrôle monétaire a consisté à stabiliser l´environnement macroéconomique empêchant en même temps, toute hausse de salaires – bien que la Bulgarie ait les salaires les plus bas de l´UE.
Depuis 2004, lorsque l´accord d´adhésion à l´UE a été conclu, la Bulgarie a connu une augmentation de l´afflux de capitaux et l´expansion des crédits. L´attente d´une convergence immédiate avec l´UE a stimulée les afflux de capitaux, accrus par l´existence du contrôle monétaire et d´une politique fiscale rigoureuse. La relation crédit / PIB a explosé passant de 36 % en 2004 à 67 % en 2007. Vers 2008 les afflux de capitaux constituaient 30 % du PIB1.
L´augmentation de capitaux externes a produit une forte hausse du PIB mais a accentué les déséquilibres internes et externes. Le PIB a augmenté avec plus du 6% annuel, un des taux les plus rapides d´Europe2. La croissance s´est maintenue à un solide 6,25 % en 2008. Cependant, la croissance de la demande domestique a dépassé celle du PIB accentuant le déficit du compte courant de 5 % du PIB en 2003 à plus de 24 % en 2008. D´après l´Institut National de Statistiques cet écart s´est accentué en raison de la concentration de la croissance dans le bâtiment, l’immobilier et les services financiers.
Parallèlement le chômage a diminué, le marché du travail s’est resserré et la hausse des salaires s´est envolée à 24 % en juin 2008. La surchauffe de l´économie ainsi que la hausse des prix des produits alimentaires et du pétrole, a accéléré l´inflation jusqu’à atteindre un record de 14,7 % en juin 2008 et une flambée des prix des aliments à plus de 25 %. La hausse du prix du gaz naturel, de l´électricité, du chauffage central, de l´eau, du transport routier et de chemin de fer, etc. fera monter le coût de la vie autour d’un 17 % de base annuel, alors que l´inflation pour l’ensemble de l´année sera probablement supérieure à 12 %. L´inflation estimée pour 2009 est d’environ 4 %3. Cependant, les experts du Centre pour le développement économique signalent que le véritable danger à venir est la déflation et non pas l´inflation.
L´agitation financière globale et l´aversion pour le risque des investisseurs vont probablement réduire les afflux de capitaux vers l´Europe Centrale et Orientale,
dont la Bulgarie. Il est peu probable que les filiales locales des banques continuent à recevoir les grands transferts de capital provenant de leurs maisons mères qui avaient financé l´expansion du crédit. Sans compter sur ce financement, les entreprises réduiront leur production et leurs services ou fermeront leurs portes définitivement, augmentant ainsi le chômage. La métallurgie et le bâtiment ont déjà subi une réduction. D´après les données officielles de l´Institut de statistiques, en janvier 2009 la production industrielle a chuté de 19 % par rapport au mois précédent.
En même temps, la réduction de la demande externe et la baisse des prix des matières premières pourraient conduire à la diminution des exportations et du tourisme. Les dernières prévisions du Fonds Monétaire International (FMI) signalent une contraction de plus de 0,5 % du PIB du G-7, laquelle pourrait réduire la croissance et les exportations de l´Europe de l´Est.
Perspectives économiques
Il est probable que la croissance du PIB en 2009 se réduise à environ 2 % ou encore à 0 % (d´après une prévision récente)4. Avec une croissance plus lente, on prévoit une réduction du déficit du compte courant à 15 % du PIB, même si la brusque chute du prix des matières premières devrait modérer l´inflation. Cependant la croissance risque de ralentir encore davantage. Heureusement les finances publiques du pays sont en bonne santé, ayant les excédents commerciaux les plus élevés d´Europe. Cependant, le changement dramatique dans la balance des paiements montre le grave choc que vit le pays.
Dans les cinq mois qui ont suivi le mois d’octobre, l´afflux net de capitaux s´est élevé à seulement 800 millions d’EUR, en comparaison avec les 6100 milliards d’EUR des cinq mois précédents et les 5600 milliards d’EUR de la même période l´année précédente. Les exportations des deux premiers mois de 2009 ont été de 27 % de moins que celles des deux premiers mois de 2008, tandis que la chute des importations a été encore plus dramatique (32 %), laissant supposer que la demande nationale a rapidement diminué. Comme résultat, le déficit du compte courant a baissé d´un taux annuel de 25,8 % du PIB pendant les deux premiers mois de 2008 à 11,6 % pendant les deux premiers mois de 20095. Effectivement, les principaux indicateurs de l´activité économique suggèrent que l´économie peut être en train de se contracter. Le FMI a récemment annoncé que l´économie de la Bulgarie va se contracter autour de 3,5 % en 2009 et de 1 % en 2010, soit 2 % de moins que la projection d´avril 2009.6
En janvier 2009 la crise internationale du gaz a pratiquement effacé toute impulsion positive qui pouvait rester de 2008. Lorsque le conflit entre la Russie et l’Ukraine a coupé l´approvisionnement de gaz en Europe, la Bulgarie se trouvait parmi les pays les moins préparés, sans approvisionnement alternatif de gaz. Le coût des pertes de production a été estimé à plus de 250 millions d’EUR (environ 333 millions d’USD). Le Gouvernement a demandé officiellement une compensation à la Russie, mais même s’il en arrivait une, les effets de l´arrêt de la production peuvent poser des risques à long terme pour l´économie.
Priorités du Gouvernement en politique fiscale
Dans cet environnement difficile, il est crucial de maintenir la confiance tant pour le contrôle monétaire que pour le système financier. Ils sont mutuellement dépendants : il faut un système financier solide avec une capacité de récupération pour soutenir le contrôle monétaire ; et la confiance en celui-ci renforce le système financier. Le FMI croit que le contrôle monétaire permettra au pays de surmonter la turbulence étant donné que Bulgarie a des réserves fiscales et monétaires suffisantes. Le FMI n´a pas jugé bon de considérer des mesures alternatives pour compenser la balance de paiements négative, tels que la dévaluation monétaire ou l´adoption de l´Euro.
Recommandations
Maintenir les excédents
La politique fiscale doit viser à maintenir des excédents importants, non seulement parce qu’ils ont été le pilier du contrôle monétaire mais aussi pour conserver l´équilibre du compte de la réserve fiscale – c´est un bon amortisseur en cas de problèmes. Pour 2008 le Gouvernement a visé un excédent égal à 3,5 % du PIB. Conserver les excédents à un moment où la croissance des revenus est lente exigera de ralentir la croissance des dépenses. Cependant, ni les revenus ni les dépenses projetés dans le budget actuel ne reflètent la baisse prévue du PIB.
Transparence de l’exécution de la règle de 10 % du budget
Le Gouvernement a prévu de stopper la croissance des dépenses en limitant celles-ci à 90 % du montant originellement budgété pour 2009, au lieu de faire la révision du budget. Le 10 % restant sera dégagé selon le développement du budget7. Cette solution peut être pragmatique mais elle n´est pas du tout transparente. En effet, des observateurs étrangers, certainement pas au courant de la règle du 10 %, perçoivent un budget élaboré sur des revenus peu réalistes.
Il est important de s´assurer que les mécanismes d’exécution de la règle du 10 % soient clairement compris. Des plans et des programmes devraient être proposés. Les ministères devraient établir au plus tôt la priorité des dépenses et s´assurer qu´elles soient bien transmises à la population. La rigueur d´exécution du budget est essentielle. La mise en œuvre de la règle du 10 % ne ferait que ralentir la croissance des dépenses initialement budgétées à 17 %, à 11 % en termes réels. Si la croissance du PIB diminue des 2 % projetés, l´excédent fiscal chutera alors probablement à 2 % du PIB8.
Accélérer les reformes
Les réformes fiscales et structurales devraient s´accélérer, malgré la période électorale. Les problèmes concernant le déboursement des fonds de l´UE soulignent la nécessité d´approfondir les systèmes de contrôle. Le Gouvernement a introduit plusieurs changements concernant les apports de la sécurité sociale et les politiques sociales – par exemple, une diminution des taux de contribution à la sécurité sociale payés par les employeurs et une augmentation des allocations de maternité. Au moment de mettre en application les nouvelles réformes, il est essentiel de maintenir la neutralité fiscale pour garantir que les finances publiques9 soient durables à long terme. Pour accélérer la convergence avec les standards de l´UE, l´État doit compléter la réforme de l´éducation, faire des progrès dans le domaine de la réforme de la santé et améliorer l´efficacité des secteurs public et privé.
Augmenter les salaires à mesure que la productivité augmente
Le Gouvernement est conscient qu´il ne pourra pas maintenir le taux élevé de croissance des salaires de 2008. Bien que les salaires soient encore bas en comparaison avec ceux de l´Europe Occidentale, les nouvelles augmentations devront être accompagnées d’une amélioration de la productivité. D´après le FMI le taux actuel de croissance des salaires est trop élevé comparé à la productivité relativement faible. En outre, comme l´expérience dans d´autres pays a pu le montrer, durant une récession, plus les salaires augmentent vite et plus la probabilité d’augmentation du chômage est forte10.
Il est essentiel que les augmentations du coût travail/production soient modérées, étant donné que les ressources devront être déplacées vers les secteurs orientés vers l´exportation. Alors que la croissance du secteur du marché interne ralentit, la croissance du PIB ne peut se maintenir que si les exportations sont relancées, mais les deux secteurs doivent rester compétitifs. Il reste à savoir s’ils le sont réellement, c´est là toute la question. Même si le gouvernement exprime sa confiance en la rentabilité des entreprises, les ONG en sont moins certaines de par le manque de données disponibles.
Le secteur financier
Les politiques rigoureuses vont aider également le secteur financier qui actuellement est bien capitalisé et rentable. Il est probable que dans un futur proche la rentabilité diminue étant donné que le financement étranger se fait rare, la forte concurrence pour les dépôts internes a élevé le coût des fonds et on attend un ralentissement de l´augmentation des prêts. Dans le même temps la dépendance des banques pour le financement étranger concernant les nouveaux prêts les rend vulnérables face aux perturbations des marchés internationaux. Cependant les banques sont bien préparées pour faire face à un ralentissement et possèdent un bonne réserve de capital et de liquidité.
Il est probable que le chômage n´atteigne pas les deux chiffres. Ceux qui ont plus de probabilités d´être chômeurs sont les jeunes en raison de leur manque d´expérience professionnelle, les travailleurs peu qualifiés, les travailleurs âgés, les handicapés et les femmes. Il faut souligner que le nombre de chômeurs non inscrits est au moins égal à celui des inscrits et qu´il pourrait bien encore être supérieur. Les travailleurs immigrés sont en train de revenir et ils ont cessé d’envoyer des fonds à leurs familles. D´après les projections il est estimé qu’environ 20 % des travailleurs immigrés pourrait rentrer à court terme – principalement de Grèce, d’Espagne et de plusieurs autres pays de l’UE où le chômage est en hausse.
La perspective de la société civile
Les ONG et les syndicats ne sont pas d´accord sur le fait que la réduction des dépenses sociales soit acceptable en temps de crise. En effet, les dépenses ont été faibles depuis la création du contrôle monétaire. Une autre réduction pourrait ruiner la paix sociale. Même si les experts des ONG soutiennent l´augmentation de la proportion des investissements affectés à l´infrastructure du transport, ils critiquent fortement l´échec du Gouvernement concernant l´usage des fonds structuraux de l´UE affectés à la Bulgarie pendant ses deux premières années en tant que membre à part entière. Fin 2008, seulement 0,6 % des 2,2 milliards d’EUR avait été dépensé. Le manque de capacité financière, une bureaucratie excessive et des procédures peu transparentes ont empêché les fonds d´arriver jusqu’à leurs destinataires.
Les ONG insistent sur le fait que, aussi bien les employeurs que le Gouvernement doivent prendre des mesures d´urgence pour contrôler l´inflation, négocier des compensations pour la diminution des revenus réels, garantir les salaires, évaluer l´impact de la crise dans les groupes le plus vulnérables de la société et protéger les droits économiques et sociaux de base.
1 FMI, Bulgarie. Consultation sur l´article IV. Report du personnel. Déclaration du personnel ; Note d´information publique sur le débat du comité directeur ; Déclaration du directeur exécutif pour la Bulgarie, février 2009, p.25.
2 Banque Mondiale. Report économique ordinaire UE 10, février 2009.
3 Confédération des syndicats indépendants (2009). « Qualité de vie ». Disponible sur : <www.knsb-bg.org/knsb/>.
4 FMI, Bulgarie – Visite des experts en avril 2009 ; Déclaration finale de la mission du FMI. Voir : <www.imf.org>.
5 Gouvernement de Bulgarie. « Plan de stabilité et de progrès économique pour 2009 ». (seulement en bulgare). Disponible sur : <www.government.bg>.
6 FMI. World Economic Outlook, avril 2009.
7 Ministère des finances. Report to the Draft Law on State Budget for 2009 [seulement en bulgare]. Disponible sur : <www.minfin.bg/>.
8 Gouvernement de Bulgarie (2009), op. Cit., p.1.
9 Confédération des syndicats indépendants, op. cit.
10 Les travailleurs et employés bulgares continuent à recevoir le revenu le plus bas de l´Europe, alors que le niveau des prix en comparation reste élevé, avec un salaire moyen de 255 EUR (339 USD). Cela signifie qu´avec 20 % du salaire moyen européen la population doit se débrouiller avec des niveaux de prix supérieurs d’environ 46 % de la moyenne européenne. Ceci est une des réclamations principales de la Confédération des syndicats indépendants pour un salaire juste et raisonnable, mai 2008.
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La société civile à l´avant-garde
SW Bénin
La crise, aux origines multiples, a eu différentes répercussions sur la productivité et sur l´économie béninoise, augmentant la vulnérabilité de la population principalement la plus pauvre. La société civile a agi en tant que partenaire en liaison avec le gouvernement pour la mise en place de mesures de lutte contre la crise, tout en favorisant entre autres, la révolution verte, l´alimentation scolaire indiscriminée, l´investissement dans la recherche, dans le secteur agricole et sur le changement climatique, ainsi que dans le transfert de technologie.
La crise, aux origines multiples, a eu différents types de répercussions sur la productivité et l´économie béninoises, augmentant la vulnérabilité des villages et des hameaux, surtout pour les plus pauvres. Les marges de manœuvre se sont déjà réduites et les ressources pour le financement des petites et moyennes entreprises, l´aide publique au développement et les flux d´investissements étrangers directs pourraient également se réduire.
Le président Yayi Boni, banquier de son métier, a exprimé son indignation quand le président sortant des États-Unis, George Bush, a cherché à atténuer la crise financière américaine en mettant à la disposition des grandes banques en faillite de son pays 710 milliards d’USD, une mesure imitée par l´Europe, qui dans le même but a injecté plus de 1,3 billions d’EUR (1,7 trillions d’USD). Boni s´est demandé d´où Bush pouvait obtenir cet argent et il a déclaré qu´en fin de compte ce seraient les pays pauvres qui allaient finir par payer le prix de la crise. Il a appelé à une meilleure gouvernance mondiale et à une réforme des Nations Unies comprenant deux sièges pour l´Afrique au Conseil de Sécurité1.
Crise financière et alimentaire
Au Bénin, le panier de la ménagère est hors de portée de la population, le transport des denrées alimentaires provenant des zones rurales vers les villes est devenu rare et le coût des matériaux pour la construction a augmenté. Un certain nombre de projets de construction ont été arrêtés, y compris des travaux publics. L’État a dû faire usage de son pouvoir pour acquérir les matériaux de construction et continuer les chantiers les plus importants, au détriment de ceux des populations rurales, principalement les plus pauvres. Ces populations-là ont été obligées d’épuiser leurs ressources économiques et elles ne peuvent plus investir dans l´éducation et les soins de santé de leurs familles.
La hausse du prix du pétrole, le développement des agro-carburants et la spéculation internationale ont mené le monde entier et surtout l´Afrique, à une crise sans précédent en 2008. Le Bénin s´est vu frappé par une hausse généralisée du prix des produits de base. Celui du maïs par exemple, le produit le plus consommé, a grimpé à 220 %. La crise actuelle se fait sentir encore davantage en raison de l´ajustement des prix et de la rareté des produits locaux. La basse productivité agricole et la demande croissante ont débouché sur une surenchère des produits alimentaires locaux entravant l´arrivée de vivres dans les foyers, principalement les plus vulnérables.
Les mesures de l´État
De même qu´en 2008, le Gouvernement a réagi par des détaxes fiscales et en créant des réserves alimentaires à travers le Bureau National pour la Sécurité Alimentaire, d´un stock bouchon (stock temporaire, utilisé comme une marge de réserve). Ces mesures-là ont permis d´atténuer en partie les effets de la crise en 2008, bien qu´elles aient surtout enrichi les commerçants qui ont continué à vendre cher et qui ont obtenu d´importants bénéfices payés finalement par les consommateurs et par l´État.
Le Gouvernement a aussi supprimé la TVA et a subventionné certains produits alimentaires (le riz, le lait et le sucre par exemple de 25 %). Le contrôle des prix a été instauré, ainsi qu´une campagne de sensibilisation sur tout le territoire national. Le Bureau National pour la Sécurité Alimentaire a choisi des commerces-témoin dans 77 municipalités du pays, et un Comité de gestion du coût de la vie a été créé, décentralisé en Comités départementaux et communaux. Le pays a été favorisé en plus par d´importantes subventions pour les céréales (riz et maïs) et pour le sucre provenant de la Lybie et des pays du Golfe.
Malgré ces mesures-là, les consommateurs les plus pauvres et les plus vulnérables ont toujours du mal à avoir accès aux aliments, sans vraiment voir les bénéfices des subventions. Les Comités mentionnés fonctionnent très peu en raison du peu de fonds disponibles pourtant promis par l´État au moment de leur création. Pour le long terme, deux programmes ont été préparés et appliqués : le Programme Urgent de Soutien à la Sécurité Alimentaire, avec un coût total d´environ 128 millions d’USD et le Programme de Diversification Agricole pour la Valorisation des Vallées qui compte environ sur 20,5 millions d’USD.
Le rôle de la société civile
Les campagnes d´interpellation du Gouvernement par rapport au coût de la vie ont été organisées à travers les organisations de la société civile. Les associations des consommateurs ont accompagné l´État pour une supervision stratégique permanente de l´évolution des prix et ont aidé à élaborer des propositions, au moyen de leur participation dans les travaux des comités de gestion du coût de la vie, la publication de communiqués de presse et l´organisation de conférences de presse.
La crise énergétique
La hausse du prix du pétrole a fait que les populations, habituées à l´utilisation du carburant « kpayo » (frelaté) en aient augmenté la consommation. La fréquentation des stations officielles de produits dérivés du pétrole est rare, ayant pour conséquence une réduction des revenus de l´État.
D´autre part, en 2002 les résultats du recensement général de population et de logement (RGPH-3) ont mis en évidence que seul un peu plus d´un foyer sur 5 (22,4 %) a accès à un service public d´électricité. L´éclairage à pétrole prévaut donc dans 77 % des foyers. Tout semble indiquer que le Bénin n´a tiré aucune leçon de la crise précédente. Après avoir laissé passer un an en attente d´une solution venant de l´étranger – en particulier l´interconnexion entre la Transmission Company of Nigeria et la Communauté Électrique du Bénin – le pays s´est enfin engagé à acheter des turbines à gaz, un engagement qui ne s’est pas encore transformé en réalité.
Pendant ce temps, les activités de la population en général sont paralysées, surtout celles des industries et des micro-entreprises, provoquant la hausse du prix du ciment, l´interruption de la distribution d´eau potable, les pannes fréquentes des appareils (électroménagers, informatiques, etc.) dans les villages, l´impossibilité pour les entrepreneurs de tenir leurs engagements face aux institutions financières et la réduction de la performance dans les administrations publiques et privées.
Pendant longtemps, l´État a subventionné le prix du pétrole, jusqu´à ce qu´il se soit déclaré « désarmé » par le poids de cette subvention sur le budget. Après la chute du prix du pétrole, l´État a renoncé à ses recettes, vendant au prix coûtant afin de décourager la vente informelle du kpayo, car ce carburant est nuisible pour les populations.
Après les engagements de la Communauté Économique des Etats de l´Afrique Occidentale (CEDEAO), lors des sommets de décembre 2001 et de janvier 2002, pour instaurer un système d´échange d´énergie électrique répondant à la demande croissante de la région, les états membres ont créé le Projet d´Interconnexion Électrique 330kV Ghana-Togo-Bénin. Ce projet exige un énorme investissement financier. Il a été conçu pour favoriser la commercialisation de l´électricité, améliorer son approvisionnement, aider à réduire les coûts de production et combler le déficit dans les centrales hydroélectriques pendant les périodes de sécheresse.
D´autre part, dans le cadre de la Stratégie de Réduction de la Pauvreté Croissante (SCRP), le Gouvernement a entamé des réformes dans le secteur de l´électricité qui devraient à long terme, accroître l´efficacité de sa gestion pour permettre une distribution satisfaisante en qualité et en quantité. Il a aussi concédé des avantages fiscaux aux opérateurs privés pour les encourager à se doter d´unités de production de la Société Béninoise d´Énergie Électrique (SBEE).
Crise climatique
La crise climatique se manifeste au Bénin par une plus large variation des pluies, une réduction de la pluviosité par rapport à la moyenne annuelle (réduction prévue de 15 % jusqu´en 2025) dans le nord ouest du pays, une plus fréquente récurrence de phénomènes extrêmes comme de fortes pluies et des orages, une réduction de la saison des pluies, du retard et de l´irrégularité pour le début des pluies, une augmentation à long terme de la température moyenne (+1 à +2 jusqu´à la fin du XXIe siècle). Tout cela retombe sur l´agriculture, les ressources aquifères, les écosystèmes lacustres du Bas-Bénin, le littoral, les parcs et les réserves naturelles du pays. Les trois quarts de la ville de Grand-Popo sont déjà couverts par la mer. La capitale Cotonou, à l´est du port, est en pleine érosion. Pour 2035-2050, des scénarios sont prévus où l´érosion atteindra 40 cm.
Des impacts sur la biodiversité sont également prévisibles : une diminution sensible des précipitations au nord du huitième parallèle modifiera sensiblement le rythme des échanges de nappes (réduction de 20 à 40 %) et la surexploitation des réserves d´eau du plateau de Calavi augmentera l´intrusion saline.
Les projections prévoient que pour 2025, 52 % des Béninois vivront dans les villes (37 % actuellement). Il est nécessaire, dès maintenant, de revoir les moyens de transport urbain et la consommation d´énergie afin de diminuer leur effet polluant. D´autre part, le changement climatique aura une retombée directe sur la production rurale. On prévoit que la production du riz se réduira de 25 % et celle du niébé de 15 %, alors que l´igname, aliment de base au Bénin central, augmenterait de 4 % pour 2050. Avec ce scénario, entre 50 et 60 % des populations du Bénin méridional seraient soumises à l´insécurité alimentaire alors que dans la zone centrale du pays le pourcentage se situerait entre 25,9 et 33 %.
Pour ce qui est des stratégies, en vue d´une adaptation au changement climatique de l´exploitation durable des bassins versants du Nord Ouest, le Gouvernement avec le soutien de la Coopération Technique Allemande, a entamé le projet-pilote du ProCGRN. Les axes d´intervention de ce projet sont les suivants :
Le Bénin a d´autre part élaboré son Programme d´Action Nationale pour l´Adaptation au changement climatique (PANA). Lors de la mise en place des activités prévues dans le programme, le pays a reçu une aide de 3,1 milliards d’USD du Fonds pour l´Environnement Mondial. Dans le cadre de la 15ème réunion du groupe d´experts des Pays les Moins Avancés (PMA) de mars 2009, les participants ont discuté du changement climatique et ont cherché à garantir le succès de l´application des mesures prioritaires, immédiates et urgentes établies dans les PANA sur le sujet. En décembre 2008, il s´est alors avéré que 39 PMA sur 48 avaient fini la préparation de leur PANA mais qu´à ce moment-là, seul le Boutan avait commencé à mettre en place sa première mesure d´adaptation. Cela montre la difficulté et la complexité qui existe pour appliquer les mesures prioritaires d´adaptation. D´après le Ministre béninois de l´Environnement et de Protection de la Nature, Justin Adanmayi, l´un des points critiques pour l´application du PANA c´est l´accès aux ressources du fonds PMA, la mobilisation des financements complémentaires nécessaires et surtout la contrepartie nationale pour garantir la réalisation in situ des activités d´adaptation.
La société civile a fait des campagnes de sensibilisation dans différents villages sur la dégradation des formations de mangroves qui réduisent considérablement la productivité des lacs et menacent leurs écosystèmes.
Recommandations
Crise alimentaire
Crise climatique
1 Voir: <www.togocity.com/article.php3?id_article=3138>.
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Rediriger la croissance économique
SILAKA
Gender and Development of Cambodia
COMFREL
NICFEC
Comité des ONG sur CEDAW
Forum des ONG
CEDAC
Thida C. Khus
Après deux décennies de guerre, le Cambodge est en train de reconstruire les institutions de l´État. La croissance économique a été élevée mais le pays a besoin d´investissements significatifs en matière de ressources humaines, spécialement pour l´éducation et la santé. La crise économique a des effets dévastateurs et met en situation de risque la réalisation de certains programmes de développement. Certaines ONG soutiennent les droits des peuples indigènes menacés en raison de la concession de terres par le Gouvernement pour des plantations et de l´infrastructure de développement. D´autres ONG exigent une majeure transparence budgétaire.
Entre 1997 et 2007 le Cambodge a eu une croissance économique moyenne de 9,5 % annuel, avec une augmentation de deux chiffres en 2005-2007. Même si le produit interne brut (PIB) a continué à croître rapidement pendant la première moitié de 2008, au cours des derniers mois de l´année l´économie a reçu l´impact de l’effondrement mondial. Le marché immobilier local s´est effondré et les exportations de vêtements et le tourisme étranger ont diminué, entraînant la croissance de 2008 dans une chute à 5,5 %. Pour 2008 le Gouvernement avait prévu une augmentation de 6 % du PIB, mais les institutions internationales sont beaucoup plus pessimistes concernant les perspectives du pays. La Banque Asiatique du Développement anticipe une croissance de 2,5%, le Fonds Monétaire International un petit 0,5 % ; la Banque Mondiale pronostique une contraction de 1 %.
L´économie nationale dépend surtout du tourisme, des exportations de vêtements, du bâtiment et de l´agriculture, toutes des industries extrêmement vulnérables face à la crise mondiale. Les industries de services, spécialement le tourisme, ont été la principale source de revenus mais à partir de la diminution du nombre de touristes étrangers – en janvier 2009 de 2 % par rapport à l´année précédente – on s´attend à ce que la situation empire au cours des deux ou trois prochaines années1.
Le Cambodge dépend aussi des envois de fonds des travailleurs à l´étranger, principalement ceux provenant de Thaïlande, de Malaysie et de Corée du Sud. A partir du premier trimestre de 2009 la Thaïlande et la Malaysie ont annulé toutes les exportations de travail et la Corée a rabaissé le quota des travailleurs cambodgiens à 1.000 pour 2009, soit 25 % du taux de 20082. L´emploi dans l´industrie du vêtement a également diminué radicalement. En mars 2009, sur le nombre total de 400.000 postes de travail, 51.000 avaient disparu. Plus de 90% des travailleurs licenciés sont des femmes provenant des communautés rurales, envoyant généralement chez elles la plupart de leurs revenus afin d´aider leurs frères et sœurs dans leur scolarité. Les usines de vêtements fonctionnent à 40-50 % de leur capacité et plus de 80 usines ont déjà fermé leurs portes définitivement. Le Gouvernement a distribué des aides très généreuses aux fabricants de vêtements afin de maintenir le secteur en fonctionnement, mais il n´a pas offert d’aide suffisante aux travailleurs dans l´industrie. Dans l´impossibilité de survivre avec un salaire minimum trop bas pour couvrir leurs nécessités, beaucoup sont rentrés chez eux dans les fermes.
Pendant la première moitié de l’année 2008, les prix des aliments et du pétrole se sont envolés accélérant l´augmentation de l´Indice des Prix à la Consommation (IPC) de 13,7% en janvier 2008 à 25,7% en mai. Cependant, les prix des biens de base ont baissé pendant la deuxième moitié de l´année et l´inflation de l´IPC a lentement suivi, pour arriver à 13,5% en décembre.
La hausse soudaine du prix mondial du riz a rapporté d´excellents bénéfices aux commerçants disposant des excédents de riz mais a frappé profondément la sécurité alimentaire pour 31% de la population3 – presque 4 millions de personnes dont la production du riz ne suffit pas à couvrir leurs propres besoins4. Les personnes qui habitent autour du Tonle Sap, le plus grand lac du pays, sont spécialement vulnérables parce qu´elles s´étaient déjà endettées pour arriver à joindre les deux bouts. En 2008 ils ont dû vendre leurs actifs de production et retirer les enfants de l´école pour aller travailler. Le Gouvernement a réagi avec un programme alimentaire d´urgence d’un montant de 40 millions d’USD pour aider les populations vulnérables de ces provinces.
De 2005 à 2008 le marché immobilier était hors de prix. Le Gouvernement a répondu par une augmentation du taux des réserves obligatoires de 8 % à 16 % (plus tard il l’a réduit à 12 % lorsque la crise mondiale a commencé à se faire sentir) et a introduit des mesures monétaires pour dissuader les banques d´accorder des crédits pour le développement des propriétés. Depuis 2008 les biens immobiliers à Phom Penh s´effondrent et ils sont déjà 30 %-40 % en dessous de leur apogée de 2008, ayant provoqué de graves pertes aux investisseurs5.
Les banques cambodgiennes semblent fonctionner assez bien en comparaison avec les institutions financières des autres parties de la région et de l´Occident. Leurs taux d´intérêt varient entre 3 % et 7 % dépendant du montant et de la durée de l´investissement. Cependant, quelques économistes ont exprimé leur préoccupation à propos des prêts non productifs (ceux en risque de faillite) qui arrivent à 3,4 % au Cambodge, par rapport à 5,7 % dans le Pacifique asiatique et à 1,8 % dans les pays développés6, ainsi que du caractère inadéquat de l´infrastructure pour développer des crédits dans le secteur agricole.
Défis au développement humain
En dépit du progrès socio-économique récent, le Cambodge est toujours un des pays les plus pauvres d´Asie. Durant la décennie achevée en 2007, le taux national de pauvreté a diminué légèrement, de 34,8 % à 30,1 %, mais étant donné les niveaux élevés et croissants d´inégalité et de vulnérabilité, il est probable que les crises alimentaire et énergétique de 2008 aient retardé les efforts pour atténuer la pauvreté.
En raison de la faiblesse des services publics de santé, même des familles aux moyens modestes peuvent tomber dans la pauvreté lorsqu´un de ses membres tombe malade. Le Gouvernement a introduit plusieurs programmes pour offrir une assistance médicale gratuite aux pauvres, mais ils ont tendance à être inadéquats et peu fiables. Les responsables de ces politiques ont abordé plusieurs options de réseaux de sécurité pour la population en général, aucun d´eux n´ayant été mis en œuvre.
D´autres indicateurs du développement sont angoissants, particulièrement le taux de mortalité des mères. Selon l´Enquête de Démographie et de Santé du Cambodge il s´est maintenu à un niveau élevé : de 432 pour 10.000 nés vivants en 2000 à 472 pour 10.000 en 2005. Cinq femmes par jour meurent au moment de l´accouchement, la même quantité qu´il y a neuf ans. Le Dr Te Kuy Seang, secrétaire d´État du Ministère de la Santé, déclare que son administration n´a pas de fonds pour mettre en application son plan d’augmentation de 300 sage-femmes supplémentaires, qui s´ajouteraient aux 3000 existantes actuellement, ni pour construire des centres de suivi médical pour les mères enceintes des communautés rurales.
Les filles sont encore discriminées, aussi bien par leurs familles que par le système d´éducation publique. En 2007 elles représentaient 47 % des inscriptions de l´enseignement primaire, 46 % du cycle base de l´enseignement secondaire, 40 % de l´enseignement secondaire supérieur et seulement 35 % de l´éducation tertiaire. Afin de contrecarrer cette inégalité, le Gouvernement et les organisations internationales ont introduit un programme pour offrir des repas dans les écoles, la pension gratuite, des bourses et autres stimulations pour les filles. Cependant, ces programmes ne sont pas encore parvenus à toute la population.
Avec le taux de croissance projeté pour 2009, la probabilité de percevoir des revenus suffisants pour le financement des programmes sociaux planifiés semble très limitée. Pour des raisons diverses, des catastrophes naturelles aux politiques agricoles inadéquates, aussi bien la distribution que l´accès aux aliments sont en train de devenir un problème pour une partie importante et croissante de la population. Le Gouvernement a fourni des aliments au Programme Alimentaire Mondial qui secoure actuellement plus d´un million de cambodgiens. De même il est en train de modifier le budget pour augmenter l´allocation à la Banque du Développement Rural destinée aux crédits pour les fermiers. Néanmoins, jusqu´à présent il a fourni très peu d´information sur les sommes affectées et sur son contrôle de la distribution vers les plus nécessiteux.
Les communautés indigènes et le travail des ONG
Les concessions de terres du Gouvernement pour les plantations de caoutchouc ont usurpé les terres ancestrales des communautés indigènes de Stung Treng, Rattanakiri et Mondulkiri. Malgré l´approbation d´une loi communale en 2001, aucune de ces communautés n’est en mesure d’enregistrer leurs terres communales. Cette saisie viole leur droit à leur seule source de survivance et d`identité. Il existe aussi des plans pour installer des usines hydroélectriques qui menacent la nourriture de beaucoup de communautés indigènes dans tout le pays. Les communautés n´ont pas été consultées sur la plupart de ces projets. Las ONG locales et les organisations internationales travaillent avec ces communautés pour les aider à connaître leurs droits et la loi concernant la propriété de leurs terres.
Tandis que certaines organisations de la société civile fournissent de l’information pour protéger les populations vulnérables, d´autres surveillent l´appropriation des terres des communautés rurales qui violent les droits humains. Quelques ONG surveillent le budget national, identifient les divergences entre les priorités politiques et les affectations correspondantes et exigent plus de transparence. D´autres se concentrent sur la formation des organisations de la société civile pour promouvoir la participation des citoyens dans le gouvernement local et national. Un groupe d´organisations de la société civile exige que le pétrole, le gaz et l´industrie minière soient gérés d´une façon plus efficace pour assurer la transparence des revenus et leur viabilité pour les générations futures.
Le Cambodge est encore en train de reconstruire ses institutions économiques et politiques, lesquelles ont été détruites au cours de deux décades de guerres. Le pays a atteint une haute croissance économique mais il n´a pas réussi à diversifier les investissements économiques ou faire les investissements d´urgence nécessaires pour améliorer les services d´éducation et de la santé. Malgré le progrès lent de la réduction de la pauvreté, le manque de transparence des décisions politiques et la mauvaise gestion des affaires de l´État demeurent une préoccupation.
1 Tith Chinda, directeur général du Ministère de tourisme, 12 mars 2009.
2 Ministère de l´emploi et de la formation professionnelle, interview à la radio Asia libre, 7 avril 2009.
3 Chan Sophal. “Impact of High Food Prices in Cambodia”. Annual Development Review 2008-09.
4 Dans neuf petits villages étudiés par l´Institut Cambodgien de Ressources du Développement entre 2001 et 2004, jusqu´à 65% des foyers ne cultivait pas suffisamment de riz pour leur propre consommation.
5 Réalité cambodgienne. Seng Bunna, Bunna Reality, 20 mars 2009.
6 Ibid.
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Relance économique 2009 : une occasion ratée
Canadian Feminist Alliance for International Action
Nancy Baroni
Nancy Peckford
North South Institute
John Foster
Canadian Centre for Policy Alternatives
Armine Yalnizyan
Le budget 2009 a été l’opportunité pour le Gouvernement de s’occuper des citoyens les plus vulnérables. Tout a été fixé dans un plan de relance économique à court terme pour répondre aux besoins des milliers de citoyens qui supportent les pires effets de la crise. Les emplois créés grâce à l’investissement public sont destinés aux hommes alors que les femmes se contentent des emplois précaires ou à temps partiel et sont fréquemment les premières à être licenciées. Les organisations de la société civile s’inquiètent de la flexibilité des normes environnementales et de durabilité alors que le Canada s’emploie à corriger le faux-pas économique.
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Lors des élections générales d’octobre 2008, qui coïncidaient avec une meilleure prise de conscience du Canada se confrontant à une probable récession, le premier ministre Stephen Harper a assuré aux électeurs que l’économie était immunisée contre les difficultés mondiales, que leurs économies, retraites et capitaux seraient en sécurité et que le gouvernement ne serait jamais en déficit. Il faisait cette déclaration en se basant sur le fait que le système bancaire du Canada était bien régulé et stable, mais il a passé sous silence en grande partie les fortes conséquences inévitables puisque que les États-Unis constituent le premier partenaire commercial du pays.
Ce que le Premier Ministre n’a pas voulu dire c’est que le chômage allait probablement augmenter ou que les Canadiens aux revenus les plus faibles souffriraient le plus durement l’affaiblissement de l’économie, en particulier en raison du peu d’investissement réalisé sur les programmes sociaux au cours de la décennie précédente. Il n’en a pas dit plus à propos des options que son gouvernement – en cas d’élection – prendrait pour compenser les conséquences les plus lourdes d’une éventuelle récession. Bien que de nombreux Canadiens considéraient cette approche comme la politique de l’autruche, le Parti Conservateur en place a été réélu avec 37,6% des votes (sur un total inférieur à 60% de l’électorat, la plus faible participation enregistrée dans l’histoire)1.
Lorsque le Gouvernement nouvellement élu a fixé ses priorités, les Canadiens attendaient un solide plan de relance économique pour protéger leurs emplois, investir sur un réseau de sécurité sociale renforcé pour les citoyens aux revenus les plus modestes et effectuer des investissements stratégiques permettant de minimiser l’impact de la récession. En revanche, c'est un programme de parti qui a été présenté, avec une vision idéologique qui, entre autres mesures, devrait éliminer le soutien financier aux partis politiques et ne soutiendrait plus l’équité salariale dans l’emploi public comme un droit universel, laissant la voie libre aux syndicats de négocier par processus de négociation collective.
Réponse du Parlement
Dans un mouvement sans précédent, les trois partis de l’opposition ont négocié un accord visant à former un gouvernement de coalition. De nombreuses organisations de la société civile ont apporté leur soutien à ce mouvement pour remplacer le Gouvernement conservateur par un autre plus progressiste qui représenterait effectivement la majorité des Canadiens. Cependant, alors que la proposition d’un gouvernement de coalition prenait de l’ampleur et menaçait de prendre le pouvoir par un vote de censure au Parlement, le Premier Ministre a demandé au Gouverneur général (le Chef de l’État au Canada) un prolongement (en essence, une pause parlementaire prolongée), qui lui a été accordé. Le Gouvernement s’est engagé à convoquer le Parlement six semaines plus tard avec un budget complet proposant un plan de relance économique. Au cours de ces six semaines de prolongement, le leader du parti de l’opposition a jeté l’éponge, un nouveau leader a été désigné et la proposition de coalition a été retirée.
Le budget 2009 et la société civile
Au cours de ce prolongement du Parlement, le Ministère des Finances a invité les particuliers et organisations à présenter des propositions sur les objectifs du budget. Pendant cette période, le Canadian Centre for Policy Alternatives (CCPA) a présenté son Budget Fédéral Alternatif (AFB) annuel, un budget participatif créé par la Société Civile avec une forte insistance sur la création et le maintien des emplois favorables à l’écologie, l’investissement sur des infrastructures sociales et physiques, le renforcement de l’assurance chômage et l’apport d’un soutien aux Canadiens ayant les revenus les plus modestes. Les participants ont proposé cinq examens testant l’efficacité du budget fédéral2 :
Le budget 2009 n’a réussi aucun des cinq examens.
L’aide aux travailleurs licenciés
Concernant l’assurance chômage, le budget 2009 a annoncé des changements qui permettent, à ceux qui le réclament, cinq semaines supplémentaires de bénéfices sur les deux prochaines années. Ceci est tout à fait insuffisant au regard des pertes d’emplois records qui ont été enregistrées. De plus, relativement peu de Canadiens sont admis pour recevoir ces bénéfices bien que tous les travailleurs générant des revenus imposables versent les cotisations obligatoires. Environ 44 % de ceux qui sont actuellement au chômage reçoivent l’assurance chômage. Ce chiffre s’élevait en 1989 à 83 %3.
Les larges coupes opérées dans les dépenses publiques au cours de la décennie 1990 ont fortement affaibli le plan d’assurance chômage. Même si face à la récession, le Canada a connu pratiquement une décennie complète de croissance économique et d’excédents gouvernementaux, les dépenses sur les programmes sociaux n’ont jamais été réinstaurées. L’ensemble de la classe politique et la plupart des analystes, s’accordent à dire qu’il est nécessaire de réformer l’assurance chômage afin d’en améliorer l’accès à tous les canadiens. Les partis de l’opposition ont soutenu à l’unanimité une motion déposée à la Chambre des Communes pour réformer le système. Seuls les conservateurs, en minorité, s’y opposent.
Le réseau d’assurance sociale du Canada affaibli
Même s’il a été présenté comme le plan de relance économique du Gouvernement, le Budget 2009 ne s’est pas engagé à diminuer la pauvreté et n’a pas avancé d’autres mesures d’aide aux Canadiens les plus exposés. En novembre 2008, le Comité des Nations Unies pour l’Élimination de la Discrimination à l’égard des Femmes a demandé au Canada d’agir immédiatement pour modifier les tarifs d’assistance sociale, insuffisants et en diminution4. Alors que des emplois disparaissent et que les travailleurs ne réunissent pas les conditions pour toucher les indemnités de chômage, de plus en plus de Canadiens doivent avoir recours à l’assistance sociale. De sérieux investissements font défaut pour améliorer les tarifs et entreprendre la réforme du système d’assistance sociale pour que les conditions soient assouplies, que soient éliminées les récupérations des bénéfices d’état versés aux récepteurs et que les récepteurs puissent obtenir davantage de revenus. Ceci permettrait à un plus grand nombre de Canadiens de sortir de la pauvreté où ils ont été poussés par le système actuel d’assistance sociale depuis les compressions effectuées sur les dépenses mentionnées précédemment.
Budget 2009 et infrastructure
Le budget 2009 a prévu des investissements sur des projets d’infrastructure physique. Le Canada présente un déficit d’infrastructure municipal évalué à 123 milliards d’USD conséquence de plusieurs années de sous-financement et le montant annoncé ne représente qu’une simple goutte d’eau. Celui-ci dépend également fortement de l’association État et Secteur privé5. Dans la majorité des cas, les communes doivent verser la même somme que les instances fédérales pour avoir accès à ces aides d’infrastructure.
Le budget a prévu certains investissements dans des secteurs clés même si de nombreux représentants de ces secteurs prétendent que ceux-ci ne sont pas stratégiques et ne relancent pas la croissance d’une économie durable et écologique. Les organisations de la société civile s’inquiètent de la flexibilité des normes environnementales et de durabilité alors que le Canada s’emploie à corriger ce faux-pas économique. De plus les emplois sont créés dans des secteurs dominés par les hommes. Les femmes supportent le pire de cette crise économique. Elles sont excessivement présentes dans les emplois précaires et à temps partiel et sont fréquemment les premières cibles des licenciements. En raison de ce modèle d’assistance, il est plus que probable qu’elles ne soient pas admises pour toucher l’assurance chômage.
AOD : bonnes et mauvaises nouvelles
Une des avancées les plus significatives de 2008 a été l’approbation de la Loi sur les Comptes de l’Aide Officielle au Développement, qui demande au Gouvernement de rendre des comptes au Parlement sur la façon dont l’aide canadienne répond aux engagements officiels des droits de l’homme, s’efforce de réduire la pauvreté et répond aux besoins exprimés par les plus démunis. Tous les partis ont soutenu cette motion. Néanmoins, cette même année, le Gouvernement a annoncé qu’il retirerait plusieurs pays africains de la liste des priorités (le Cameroun, le Kenya, le Malawi et la Zambie) et qu’il se concentrerait sur plusieurs pays de l’hémisphère occidental, la Bolivie, la Colombie, Haïti, le Honduras et le Pérou. Les conséquences radicales du changement ne sont pas encore visibles mais sur des terrains comme le VIH, le SIDA et la baisse de la pauvreté, cela signifie le passage de la catégorie de pays à incidence élevée à la catégorie de pays à faible incidence. Le Gouvernement assure aux Canadiens que son engagement à augmenter les aides en direction de l’Afrique est toujours d’actualité normalement.
Compressions fiscales pour les riches au-delà de l’investissement social.
Les organisations de la société civile demandent depuis longtemps au gouvernement d’effectuer des investissements sociaux durables qui bénéficieraient davantage les Canadiens aux revenus les plus faibles, mais le budget 2009 a confirmé la tendance des compressions fiscales et des crédits destinés aux Canadiens ayant les revenus les plus confortables et aux entreprises. Presque 40 % des femmes et 24 % des hommes au Canada ont généré si peu de revenus en 2007 qu’ils sont exempts d’impôt sur le revenu6, ils ne peuvent donc accéder à aucun crédit ou exonération fiscale proposés et destinés à relancer l’économie. Certaines compressions fiscales sont permanentes. En revanche, toutes les mesures sur les dépenses sont temporaires avec une échéance ne dépassant pas deux ans après adoption du budget.
La situation du Canada après son entrée en récession était de plus en plus précaire en raison des fortes compressions fiscales. La crise économique a été l’occasion d’utiliser les relances gouvernementales visant à améliorer l’axe donné à plusieurs points comme l’inégalité, le changement climatique et l’infrastructure publique (y compris la santé et la petite enfance). Le Gouvernement a alors décidé de faire face aux circonstances en minimisant constamment la gravité et l’éventuelle durée de la récession et en abordant le plan de relance comme un moyen de retour à la normale pour l’économie. Ceci révèle une certaine myopie et ne parvient pas à satisfaire les besoins de milliers de Canadiens sentant le poids de la crise économique.
1 CBC. “Voter Turnout Drops to Record Low”. 15 octobre 2008. Disponible sur : <www.cbc.ca/news/canadavotes/story/2008/10/15/voter-turnout.html>.
2 Canadian Centre for Policy Alternatives (CCPA) “Five Tests for Canada’s Next Federal Budget”. Communiqué de presse, 23.01.09. Disponible sur : <www.policyalternatives.ca/news/2009/01/pressrelease2080/>.
3 Towards a New Architecture for Canada’s Adult Benefits.Ottawa:Caledon Institute of Social Policy (2006).
4 Canadian Feminist Alliance for International Action (FAFIA). “UN Asks Canada to Report Back on Poverty and Murdered Aboriginal Women”. Communiqué de presse, 24 novembre 2008. Disponible sur : <www.fafia-afai.org/files/CEDAW_PR_EN.pdf>.
5 “Federal Budget 2009 and Municipal Infrastructure”. Syndicat Canadien de Fonctionnaires Publics (CUPE). 29 janvier 2009. Disponible sur : <cupe.ca/budget/2009-budget-municipal-infrastructure>.
6 Direction des Douanes et Revenus du Canada. “Tax Statistics”. 2007.
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CHILI
Les répercussions sociales de la crise et les réponses de la société civile
Hugo Fazio y Martín Pascual
Centro de Estudios Nacionales de Desarrollo Alternativo (CENDA)
Tandis que la récession et le chômage augmentent, les fonds de pensions se vident, les revenus diminuent et le Gouvernement fait pression sur les revenus pour décontracter l’économie, les syndicats et la société civile proposent d’autres solutions. Alors que les travailleurs insistent sur la défense salariale, des droits, des fonds et du travail digne pour tous les travailleurs, les ONG, elles, expriment le besoin de commencer à construire, ensemble, une économie centrée principalement sur les personnes et l’environnement.
Le Chili subit durement le coup, pendant cette année 2009, de la crise internationale qui a commencé à la mi-2007 quand la « bulle » de l’immobilier aux États-Unis a éclaté, conduisant à une crise financière qui s’est rapidement mondialisée. Comme l’économie du Chili est particulièrement ouverte, permettant que les évènements extérieurs se fassent sentir de façon très forte, la crise économique mondiale a différents effets dans le pays. La chute de la plupart des produits de base sur les marchés internationaux, à partir de 2008, a eu un effet très important puisque la structure économique et l’exportation du pays dépend énormément des débouchés sur les marchés extérieurs de quelques matières premières à faible valeur ajoutée.
La livre de cuivre est arrivée à son prix nominal le plus élevé début juillet 2008 quand elle dépassait 4 USD la livre. A la fin de cette année la moyenne était de 1,40 USD, avec un léger rebondissement pendant les premiers mois de 2009. La diminution du prix du cuivre se transmet parmi d’autres variables sur la parité du change, les termes d’échanges, la balance de paiement et l’activité économique, entraînant des conséquences sociales négatives.
Pendant le dernier trimestre de 2008 l’économie du Chili est entrée clairement et ouvertement en récession, quand son activité s’est effondrée suivant la même tendance mondiale, ce qui a clairement démontré la correspondance entre la réalité nationale et l’évolution générale de la crise. Pendant la période d’octobre à décembre 2008 les chiffres corrigés des variations saisonnières et annualisés sont tombés pour le deuxième trimestre consécutif, par rapport aux trois mois précédents. Pendant le troisième trimestre sa diminution d’après les chiffres des Comptes Nationaux a été de 0,1 %. Pour le dernier trimestre en faisant le même calcul on estime que la contraction a été de 5 %.
La production industrielle s’est contractée en douze mois pendant le quatrième trimestre de 3,6 %, la plus grande chute depuis 1999. En décembre, la diminution calculée pour l’année a été encore plus grande : 4,3 %. Pendant le dernier trimestre les ventes totales ont diminué, par rapport aux mêmes mois de 2007, de 4 %, alors que les ventes du marché intérieur ont diminué de 4,7 %1.
La consommation et l’inflation
Lors du quatrième trimestre la consommation a sensiblement diminué et s’est accentuée jusqu’à atteindre, en décembre, 9 % annuel. La diminution de la consommation s’est produite fondamentalement parmi les familles à plus faibles revenus.
En contrepartie, la diminution du cours des produits de base a permis que le taux d’inflation élevé, un des plus importants problèmes sociaux de 2008, surtout pour la population la plus défavorisée, s’atténue. En octobre 2008, le taux d’inflation est arrivé à 9,9 % sur un an. Ce pourcentage a été plus élevé pour les deux quintiles de la population au revenu le plus faible à cause d’une hausse du prix des aliments plus élevée que la moyenne, au détriment de leur niveau de vie. Comme il s’est également produit une diminution de la demande intérieure, les pressions inflationnistes se sont affaiblies, entraînant en partie à partir de novembre 2008 le début de la diminution de l’Indice des Prix à la Consommation (IPC) se poursuivant jusqu’à la fin de l’année.
Une autre très forte raison qui explique la diminution inflationniste est la diminution internationale des cours du pétrole qui représente en pourcentage la part la plus importante des importations du pays. Par contre, en raison de la politique du gouvernement pour relancer les investissements sectoriels en transférant les charges sur les consommateurs, les tarifs d’électricité continuent à être élevés. Ainsi que ceux de l’eau potable et des services d’assainissement.
Le chômage
Une des plus graves conséquences sociales de la récession est l’augmentation du taux de chômage. D’après les statistiques du Département d’Economie de l’Université du Chili, dans le « Gran Santiago » (la capitale et sa zone métropolitaine) pendant le trimestre décembre-février, le chômage a frôlé les deux chiffres quand il est passé de 7,7 % à 9,7 %, bien que la période estivale soit plus favorable pour l’emploi. Il faut en plus ajouter les chiffres officiels récents de chômage national pour le même trimestre : 8,5 % – 0,5 points de pourcentage plus élevé que le trimestre précédent2.
Les fonds de pension
Une autre conséquence sociale très forte de la crise a été la chute des fonds de pensions dont les ressources sont placées en actifs financiers au Chili et à l’étranger. La détérioration des marchés financiers pendant la crise a représenté une diminution considérable de l’épargne de prévoyance de la population qui a atteint 27 milliards d’USD de pertes fin 2008, ce qui représente plus du 26 % du fonds total.
Un rapport de la Banque Asiatique de Développement, qui analyse les effets de la crise de 2008, place le Chili comme le pays latino-américain où il s’est produit la plus grande perte de richesse pour les ménages. Une grande responsabilité est imputable à la gestion des fonds de pensions. En dépit des nombreuses mesures de protestation réalisées par ceux qui ont subi les dommages, ni les administrations privées des fonds de pensions ni le Gouvernement n’ont fait quoi que ce soit pour les indemniser.
Les rémunérations
Les politiques officielles pour confronter la contraction de l’économie, erronées, ont fait pression – malheureusement avec succès – pour réduire les rémunérations réelles. Si avec une forte inflation sur l’année comme celle en vigueur jusqu’à octobre, et quand il était évident qu’elle devait nettement diminuer en raison de la forte chute des produits de base sur les marchés internationaux et l’évidente décélération de l’économie intérieure, introduire l’idée de réajustement en fonction de l’inflation officielle dans le futur – comme cela se faisait continuellement depuis 1990 pendant les Gouvernements de « la Concertación » (concertation) – et non pas en fonction des pertes effectives des rémunérations, est une atteinte aux revenus des travailleurs.
Les tentatives officielles de mettre en oeuvre cette politique se sont heurtées fin 2008 à un gigantesque mouvement de protestation des travailleurs du secteur public. Néanmoins, l’augmentation réelle des rémunérations des fonctionnaires d’état, par rapport à l’année 2007, a été légèrement supérieure à 1 %.
L’évolution de l’indice général des rémunérations horaires et du coût de la main-d’oeuvre, que l’Institut National de Statistiques élabore chaque mois, montre clairement les conséquences. Le premier, négatif depuis juin 2008, après avoir été stable pendant le mois de mai, a cependant été moins négatif que le deuxième, dont le point de vue de l’évolution des rémunérations est celui du patronat.
A la diminution présente dans les tableaux des rémunérations il faut rajouter la diminution sur les crédits qui touchent toute la population, mais particulièrement les plus défavorisés et les PME.
Les propositions civiles
La Central Unitaria de Trabajadores de Chile (Centrale Unitaire des Travailleurs du Chili), pendant cette crise, a concentré ses propositions pour “Un Chili juste” dans 5 revendications principales:
a) empêcher une perte des droits acquis par les travailleurs en utilisant la crise comme excuse,
b) défense de l’emploi,
c) défense des salaires,
d) défense des fonds de prévoyance touchés par la crise et la demande de compensations et de l’intervention de l’état dans le système de prévoyance et
e) défense du travail digne dans tout son ensemble.
A un niveau social plus étendu et hors frontières, ACCIÒN, l’Association Chilienne d’ONG qui regroupe plus de 70 organisations de développement, a envoyé une lettre adressée aux principaux dirigeants du monde qui se réuniront au G-20, où elle propose 4 grands axes pour confronter la crise :
a. Assurer que l’économie soit gouvernable démocratiquement par le biais de la régulation des activités financières, de la création de nouvelles mesures fiscales, de la mise en oeuvre d’actions de découragement et de restriction à la spéculation, de l’interdiction des produits financiers « de casino » et de la garantie que les ressources de l’épargne privée ou publique soient effectivement destinées à la production. Insister sur la réforme de la gouvernance de la Banque Mondiale et du FMI pour garantir qu’ils soient convenablement démocratisés. Faire que toutes les institutions financières, les produits financiers, et les multinationales agissent avec transparence et rendent des comptes publiquement. Pour cela il faut éliminer le secret bancaire et les paradis fiscaux et introduire des contrôles publics dans tous les pays par le biais de normes comptables internationales.
b .Créer du travail digne et des services publics pour tous assurant un investissement massif sur un green new deal afin de construire une économie verte soutenue par le travail digne et une rémunération juste, investissant et renforçant les services essentiels publics, et travailler pour assurer le financement au développement à tous les pays qui en ont besoin, sans conditions préjudiciables connexes.
c. En finir avec la pauvreté mondiale et l’inégalité, en consacrant 0,7 % du revenu national à la coopération au développement pour l’année 2013, faire en sorte que ces ressources soient plus efficaces et faire pression pour annuler toutes les dettes illégitimes et impayables des pays en développement.
d. Construire une Economie Verte en faisant pression pour un accord sur le changement climatique lors du sommet de Copenhague pour convenir de réductions substantielles et vérifiables des gaz à effet de serre et en s’engageant à de nouveaux et substantiels transferts de ressources du Nord vers le Sud soutenant l’adaptation et le développement durable dans les pays pauvres. La mise en place urgente de politiques opposées aux mesures de libéralisme et de manque de régulations qui ont caractérisé les années 1990. On appelle les Gouvernements du G-20 et d’autres pays à profiter de cette occasion pour commencer à construire une économie qui soit centrée sur les personnes et l’environnement afin d’obtenir une société plus juste.
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Voici venu le temps d’évaluer les politiques
CARDET
Charalambos Vrasidas
Sotiris Themistokleous
Michalinos Zembylas
La crise économique mondiale portera préjudice au tourisme et au secteur immobilier, deux des secteurs d’activité les plus importants du pays, cette crise augmentera aussi le taux de chômage des classes sociales les plus vulnérables de la société, en particulier les immigrés et les femmes. Le Gouvernement devrait permettre les contributions de la société civile, en particulier des ONG qui entretiennent des contacts étroits avec tous les secteurs de la société. Ceci demanderait de mener une réforme du cadre légal réglementant les ONG, ce projet est à l’heure actuelle en cours de concrétisation.
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L’effondrement des marchés mondiaux a porté un coup difficile aux économies émergentes. Les gouvernements font face à la tâche complexe d’assurer l’accès équitable aux besoins de base, sans oublier la protection des droits de l’homme de tous ceux et celles qui vivent dans le pays. La crise économique commence tout juste à se faire sentir à Chypre ; on prévoit que ses effets deviendront plus importants fin 2009. Les groupes les plus marginalisés de la société seront les plus touchés par la récession économique.
Chypre a toujours eu une économie mixte où l’État joue un rôle important, en particulier pour l’apport de services de base comme l'approvisionnement en électricité, eau potable, télécommunications, santé, éducation et transports. Ces dernières années, la croissance a été très forte et le Ministère des Finances a annoncé que le budget 2009 de l’État dégagera un excédent qui sera investi dans les services publics1. Il est néanmoins de plus en plus évident que les principales sources de revenus de l’État – la TVA et d’autres impôts indirects – diminuent lorsque l’économie vacille, limitant la capacité du Gouvernement à financer des investissements publics et des programmes destinés à atténuer l’impact de la crise2. Une faible productivité chronique dans le secteur public affectera également la capacité du Gouvernement à répondre rapidement et efficacement à la crise économique qui avance à pas de géant3.
L’impact de la crise
Inévitablement, Chypre devra lutter contre le problème du chômage qui, selon les pronostics, passera de 3,9 % en 2008 à 4,5 % en 2009. On s’attend à ce que la croissance continue à être positive en 2009, aux alentours de 2,1 %4. Ce taux est cependant bien supérieur à celui de l’Union Européenne dans son ensemble, où on s’attend à un taux de chômage de 8 % et une croissance économique négative dans la plupart des pays 5.
Le tourisme et le secteur immobilier, les deux industries les plus importantes, ressentent encore les effets de la crise mondiale. Les prévisions pour le tourisme, qui contribue à hauteur de 20 % au PIB du pays, sont passées de pessimistes à très critiques6. Les secteurs immobilier et de la construction sont également touchés durement. Ces deux secteurs emploient une quantité importante d’immigrés et de femmes7, ayant comme résultat que ces deux groupes vulnérables subiront davantage les effets de la crise que le reste de la population.
Les femmes sont, par tradition, mises en marge de la vie socio-économique du pays, elles sont absentes des organismes décisionnels, une situation qui ne s’améliorera certainement pas pendant la crise économique8. En tant que secteur de services utilisant des travailleurs saisonniers, le tourisme emploie principalement des femmes, un bon nombre d’entre elles perdront probablement leur emploi9. Même avant la récession économique, la main d’œuvre féminine était employée à seulement 62,4 %, contre 80 % pour la main d’oeuvre masculine. De plus, l’écart salarial de 20 % existant entre les salariés homme et femme est un des plus importants d’Europe10.
Au cours de la précédente décennie, la population immigrante a augmenté de 15 % par an. En 2007, les étrangers composaient 25 % de la main d’œuvre du pays11. En plus de la hausse progressive des disparités économiques, ceci a contribué à la perte de confiance croissante des Chypriotes vis-à-vis des immigrés. Les employeurs tendent à embaucher des immigrés sans-papiers afin de réduire leurs coûts et les travailleurs migrateurs supportent les pires conditions de travail. Pour décourager les demandes d’asile, le Gouvernement a adopté plusieurs politiques comme par exemple, les emplois pour les immigrés et les candidats à la demande d’asile limités à certains secteurs comme les services à domicile, l’agriculture ou les cultures. Même si les écoles ont fait des progrès pour l’intégration des enfants immigrés, les chances qu’ont les immigrés adultes d’apprendre le grec sont restreintes.
Très souvent, les médias ont pris les immigrés comme bouc émissaire, les faisant passer pour responsables des problèmes économiques et sociaux12. Les stéréotypes attirent les lecteurs et les téléspectateurs ; à Chypre les médias présentent souvent des informations tendencieuses sur les incidents impliquant des immigrés et ils ne laissent que peu de place à l’expression de leur opinion. Malgré leur contribution à l’économie nationale, les travailleurs immigrés continuent à être exclus des bénéfices publics. Leurs droits professionnels et sociaux sont limités et il n’ont aucun droit politique dans l’absolu. Au cours des cinq dernières années, on a recensé 700 cas de racisme et de xénophobie13. Même si ces dernières années, le Gouvernement a tenté de faire respecter plusieurs directives européennes sur l’immigration, ces mesures n’ont pas prouvé jusqu’à présent leur réelle efficacité14.
Réponses à la crise
Le Gouvernement a annoncé plusieurs mesures conçues pour relancer l’économie. Avec une tendance économique Keynésienne classique15, le Gouvernement tente d’accélérer plusieurs projets de développement de nouvelles constructions, routes et infrastructures. Il a également décidé d’engager une dépense de 470 millions d’EUR (environ 622 millions d’USD) pour soutenir le secteur touristique. L’objectif de ces mesures est de maintenir un faible taux de chômage et d’assurer une croissance positive du PIB. Une bonne part de ces dépenses contra cycliques est destinée à protéger les Chypriotes les plus vulnérables et marginalisés. Ces dépenses comprennent des augmentations des retraites, une aide financière pour les étudiants universitaires et un soutien financier au logement pour les familles aux revenus les plus faibles. De plus, une nouvelle loi a été adoptée qui augmentera les charges sociales des employeurs et des salariés de 1,3% sur les cinq prochaines années.
Le Gouvernement, les syndicats et la fédération des chefs d’entreprises ont également décidé il y a peu de mettre en place un programme pour combattre l’embauche de travailleurs illégaux, un numéro de téléphone vert permet de dénoncer les immigrés clandestins et les employeurs qui leur offrent du travail. Cependant, ceci ouvre la voie à une plus grande discrimination et à l’exploitation du travail « bon marché », parce que les employeurs chercheront à optimiser leurs bénéfices en adhérant à l’accord de manière sélective afin de satisfaire leurs intérêts.
Les critiques soutiennent que les mesures proposées jusqu’alors sont inadaptées et seront insuffisantes pour relancer l’économie, elles ne permettront pas davantage de protéger toutes les personnes vivant et travaillant à l’intérieur du pays. Par exemple, la mesure visant à apporter un soutien financier aux étudiants universitaires exclut les étrangers et les immigrés. Les étudiants étrangers disposent d’un permis de travail de 20 heures par semaine et seulement pour les secteurs de l’agriculture, du travail domestique, de la construction et de la restauration.
Le rôle de la société civile
Etant donné les nombreuses facettes de la crise actuelle, les Gouvernements devraient réévaluer toutes les politiques et les pratiques afin de protéger les Droits de l’Homme et les droits civils de tous les habitants du pays. Une mesure immédiate visant à atteindre cet objectif serait d’inviter tous les acteurs de la société civile à prendre part à un débat public sur la crise économique et les réponses adaptées pour la combattre. Etant donné que le travail des ONG les maintient en contact étroit avec la base et les besoins sociaux, elles sont plus flexibles que le Gouvernement et peuvent par conséquent se montrer plus efficaces pour toucher les groupes marginalisés. Leur expérience pourrait être mise à profit par les institutions publiques pour atteindre leurs objectifs stratégiques. De plus, les ONG pourraient recommander des pratiques innovantes et créatives pour encourager l’éducation, la propriété, l’égalité hommes-femmes, les droits de l’homme et le droit au travail de ceux qui en sont dépourvus actuellement.
Rendre autonome la société civile est un aspect crucial pour atténuer l’impact de la crise économique. Un des principaux défis auxquels font face les ONG à Chypre consiste à attirer l’attention de la société sur leur travail. Malgré le progrès substantiel de ces dernières années, les ONG qui soutiennent les groupes marginalisés de la société doivent encore surmonter la méfiance et les préjugés. Le fait qu’il n’y ait pas de cadre de coopération cohérent et transparent entre les acteurs de la société civile et les organismes publics réduit considérablement l’efficacité des politiques nationales.
Les études spécialisées du cadre légal et de régulation actuelle qui touche les ONG sont arrivées à la conclusion que ce cadre doit être réformé et modernisé pour répondre aux exigences européennes de meilleures pratiques et conforme aux lois internationales. En 2008, l’Agence de Planification, via CyprusAid, a entamé ce processus en invitant les ONG à participer et à exprimer leur opinion. L’organisme a pressé le gouvernement de mettre en place un cadre légal et politique cohérent pour la coopération tout en soutenant le fait que ce cadre permettrait le renforcement de la société civile et rendrait possible la mise en place efficace de politiques publiques nationales.
En ces temps de crise économique, le Gouvernement doit engager la participation de l’ensemble des groupes intéressés par le développement et la mise en place de mesures palliatives. L’absence d’un cadre légal pose des difficultés aux ONG au moment de prendre des mesures garantissant les droits de l’ensemble de la population. Les ONG et le Gouvernement doivent mettre en place une meilleure communication et davantage d’échanges d’information pour que les ONG puissent devenir des vecteurs de mise en place des politiques nationales dans les moindres recoins de l’île. De plus, alors que la crise augmente la xénophobie dans les pays européens, il est essentiel que le Gouvernement et les ONG se mettent d’accord pour mener une campagne d’information et d’éducation expliquant les causes du chômage et les effets de la crise afin d’aider à lutter contre la discrimination envers les immigrés.
Références
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1 KIPE (2008). “The Most Stable Bank System in Europe”. Cyprus News Agency (KIPE), 13 octobre 2008. Consultation du 25 février 2009 sur<www.singmalive.com>.
2 Antoniadou, C. (2009). “Falling Psychology in the Cyprus Market”. Simerini. Consultation du 25 février 2009 sur <www.sigmalive.com>.
3 Hadjiloe, T. (2008). “Financial Crisis and Development”. Simerini. Consultation du 25 février 2009 sur <www.sigmalive.com>.
4 Ministère des Finances (2009). Cyprus Economy, Overview and Potentials. Ministère des Finances. Présenté par Charilaos Stavrakis en conférence de presse. Consultation du 25 février 2009 sur <www.mof.gov.cy>.
5 ECEFA (2009). Interim Forecast January 2009. European Commission on Economic and Financial Affairs. Consultation du 25 février 2009 sur <ec.europa.eu/economy_finance/>.
6 Polemitou, M. (2009). “Fears for Massive Redundancies in Hotels by April”. Simerini. Consultation du 25 février 2009 sur <www.sigmalive.com>.
7 Pallala Charidi, N. (2009). “Red Card on Unemployment”. Simerini. Consultation du 25 février 2009 sur <www.sigmalive.com>.
8 EWL (2008). “Women and the Economic Crisis - An opportunity to assert another vision of the world?”, European Women’s Lobby, Consultation du 25 avril 2009 sur <www.womenlobby.org>.
9 Nicolaou-Pavlidi, E (2009). “Wage Gap between Genders”. Consultation du 25 février 2009 sur <www.sigmalive.com>.
10 Lokar, S. (2009).“Women’s Lobby of Cyprus 50-50 campaign for EU elections”. Consultation du 25 février 2009 sur <www.europeanforum.net>.
11 Michail, M, Hadjigiannis, K, Stafanidis, M, Christoforidis, L, Kliridis, S and Mixalakopoullou, M. (2008). “The Effects of Immigration on Unemployment, Part-Time Jobs and Participation in Workforce”. Essays of Economic Policies, 08-08. Consultation du 25 février 2009 sur <www.erc.ucy.ac.cy>.
12 ENAR (2008). “Communication consultation on Opportunities, Access and Solidarity Towards a New Social Vision for 21st Century Europe”. European Network Against Racism. Consultation du 25 février 2009 sur <www.enar-eu.org>.
13 Tsiartas, A. (2009). Au cours des cinq dernières années, on a recensé 700 cas de racisme et xénophobie . Présentation lors de la conférence Living Together (Vivre ensemble). Nicosie, Chypre, 6 mars 2009.
14 Demetriou, O. (2009). Living Together. Migrant Cities Research: Nicosia South. Nicosia: British Council.
15 L’économiste britannique John Maynard Keynes plaide pour les politiques interventionnistes (par exemple,relancer la consommation par l’augmentation de l’investissement public) comme moyen d’atténuer les effets des récessions économiques.
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Une crise, deux visions du pays
Programa de Participación Ciudadana
CEP-Alforja1
Mario Céspedes y Carmen Chacón
La société du Costa Rica a été témoin d’une confrontation entre deux façons antagoniques de percevoir et de projeter le pays. Alors que des secteurs plaident pour un modèle de marché, d'autres réclament celui de l'État Providence pour faire face à des questions comme celles, entre autres, des droits sociaux, économiques et culturelles des gens. La crise, et ses échappatoires possibles, ont créé une nouvelle arène où se heurtent ces deux visions. Alors que le Gouvernement propose un ensemble de mesures qui paraît timide et tardif, la société civile recherche l'inclusion sociale et la productivité.
Au Costa Rica l’impact de la crise mondiale a commencé à se faire sentir à partir du deuxième semestre 2008. Certaines données significatives de cet impact sont comprises dans la baisse (d’une année à l’autre) de l'Indice Mensuel d'Activité Économique (IMAE) publié avec -1,0 % en octobre 2008, -2,5 % en novembre, -3,7 % en décembre et -4,5 % en janvier 2009. « Une analyse par secteurs, sur la base de ce même IMAE, indiquerait que les secteurs de l’agriculture, de l’industrie manufacturière, du commerce et hôtelier sont déjà en récession puisque le pourcentage de l'IMAE au mois de décembre 2008 était inférieur à celui de décembre 20072 ».
En juillet 2008 la Caisse de l'Assurance Sociale du Costa Rica (CCSS) a enregistré 1.376.667 travailleurs (euses) assurés; six mois plus tard elle en a enregistré 1.385.350, ce qui représente une augmentation de seulement de 0,1 % de moyenne mensuelle. Au total il y a eu 8.683 nouveaux travailleurs. Cela signifie que la réduction de la croissance de production a déjà eu un impact sur la génération de sources d'emploi pendant le second semestre 20083.
L'emploi étant l’une des principales inquiétudes de la population, voyons deux exemples concrets en rapport avec les personnes migrantes et les femmes. Le rapport de la CCSS précise qu'il existait presque 90.000 travailleurs assurés dans la construction, mais en janvier 2009 il y avait à peine 74.000 employés4, c'est-à-dire une perte de 16.000 emplois en 6 mois.
Une étude du Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale, de son département migrations, conclut qu'il y a deux ans, 65 % des 150.000 travailleurs de la construction étaient nicaraguayens5. Il convient de souligner que les chiffres enregistrés à la CCSS se trouvent très en-dessous des chiffres réels, parce que la majorité de la population migrante embauchée dans la construction ne cotise pas à la CSSS, la mettant dans une situation d'extrême vulnérabilité.
Crise et genre
Quant à l’impact sur les femmes, le chômage augmente et l’écart salarial entre les sexes s’accentue. Un rapport de l’OIT publié le 8 mai 2009 assure que presque cinq cent mille personnes – des femmes pour la plupart - perdront leurs emplois en Amérique Centrale en 2009, et par conséquent le taux de chômage féminin augmentera de 3,5 points en pourcentage, et atteindra 14 %.
Le salaire horaire moyen des femmes par rapport à celui des hommes est tombé de 99,1 % en 1999 à 83,9 % en 2007. L'écart salarial est plus grand dans les activités agricoles et la pêche – où elles consacrent 13 heures de plus au travail non rémunéré –, suivies par les activités professionnelles et les travailleuses non qualifiées, avec une différence de 10 heures. C'est-à-dire que, bien que le temps effectif des femmes dans le travail rémunéré soit identique à celui des hommes et malgré leur participation croissante sur le marché du travail, la dimension non rémunérée du travail socialement nécessaire à la procréation et aux soins apportés à la force de travail, aux personnes âgées et aux malades, continue à chuter de manière disproportionnée chez les femmes, qui consacrent ainsi une journée supplémentaire de travail plus une heure pour répondre à cette demande sociale6.
La réponse du Gouvernement
En janvier 2009, le Président Oscar Arias a lancé le plan dénominé « Plan Escudo » (Plan Bouclier) en réponse – tardive et insuffisante – à la crise. Le projet, qui a pour but de soutenir les familles, les travailleurs, les entreprises et le secteur financier, consiste à mettre en oeuvre de nouvelles mesures – comme la Loi de Protection de l'Emploi en Temps de Crise – faisant suite à d'autres déjà en vigueur – parmi elles, l'augmentation de 15 % pour les pensions du régime non contributif de la CCSS, le programme d'alimentation pour les enfants les plus vulnérables pendant le week-end, le Programme « Allons de l’Avant 7 », la subvention de logement et l’annulation de dettes en souffrance pour 2.100 familles à faibles revenus.
Certaines de ces propositions renforcent les stratégies centrées sur la pauvreté, qui consolident l'assistancialisme et qui risquent de se transformer en clientélisme pendant la période électorale. Les omissions du Plan concernant les besoins des femmes sont particulièrement graves. En effet, on ne mentionne aucune mesure éliminant la discrimination sexuelle sur le marché du travail et l'exploitation des femmes dans le cadre de la procréation et des soins sociaux, ou améliorant la qualité de leurs emplois8.
Le projet de Loi de Protection à l'Emploi en Périodes de Crise, qui incite les entreprises à réduire les heures de travail sans réduire les salaires ou licencier le personnel, mérite une mention spéciale.
D'autres mesures annoncées sont liées à la promotion de micro, petites et moyennes entreprises, à la capitalisation des banques nationales et aux investissements en infrastructure publique, particulièrement dans l’éducation et dans le réseau routier national, pour lesquelles des prêts sont en négociation auprès de la Banque Interaméricaine de Développement et d'autres organismes financiers internationaux.
Selon le Dr. Luis Paulino Vargas9, la dette extérieure contractée pour faire face à la crise conformément au Plan atteindra 1.400 millions USD seulement pour les dépenses de travaux publics. « Cela implique une augmentation d’un coup d’environ 25 % du montant de la dette extérieure (…). Cela exige au minimum une planification méticuleuse des demandes pour l'utilisation de telles ressources10 ». Un autre problème est le contraste entre l'urgence de ces ressources,la complexité et la lenteur du processus de négociation de prêts, l’approbation parlementaire et la concession de travaux publics.
Les secteurs sociaux, politiques et d’entreprises – peut-être en désaccord avec la manière dont le Gouvernement a présenté l'initiative – disent que, jusqu'à présent, les résultats du Plan Escudo sont en-dessous de leurs attentes. Le président Arias n'a pas joué le rôle d’instigateur d’un processus de dialogue national permettant d’établir un large consensus social. En outre, l'initiative a été lancée précisément en année pré-électorale, rendant l'exécution des mesures plus complexe, dénaturant le débat parlementaire et augmentant la méfiance des citoyens sur les « bonnes intentions » du président et de son gouvernement.
La proposition des organisations sociales
Trois mois après la présentation « du Plan Escudo », diverses organisations sociales ont présenté à l'opinion publique nationale une proposition appelée « Dix mesures pour faire face à la Crise avec Inclusion Sociale et Productive 11
Cette proposition s'inscrit dans un contexte dans lequel les organisations sociales ont réussi à renforcer leurs capacités de résistance face au modèle néolibéral comme, par exemple, dans la résistance contre le Traité de libre Commerce avec les États Unis, une plus grande capacité d'incidence dans le débat national sur l'orientation du pays, et une plus grande capacité de proposition. Ses points sont les suivants :
Dans l'attente du dialogue national
La société du Costa Rica est divisée en deux visions du pays opposées – par exemple, la résistance et les mobilisations contre le groupe ICE12 (2000), contre le processus électoral 2006 et avec la lutte contre l'ALE par le référendum de 2007. D'une part il y a des secteurs qui soutiennent le modèle du libre-échange, d'autre part, il y a ceux qui soutiennent le modèle de l'État Providence mais qui souhaitent aussi voir des progrès dans l'augmentation des droits sociaux, économiques et culturels et un degré plus élevé de la démocratie.
Quant aux réponses timides du Gouvernement, les organisations sociales signalent que « … si ces défis ne sont pas relevés sur la base du dialogue social et avec un véritable changement de société, la persistance des solutions traditionnelles (assistancialisme et diminution des dépenses publiques, et diminution des droits) se traduiront certainement par une plus grande inégalité et pauvreté, et par le risque, que nous avons déjà souligné, de transformer la pauvreté conjoncturelle en raison de perte de revenus, en pauvreté structurelle, ainsi que par une augmentation de la violence contre les femmes, les enfants et les personnes âgées13 ».
Il reste encore à voir si les propositions des organisations sociales sont capables de surmonter les interprétations économicistes de la crise, en se concentrant sur la vie des gens, comment ils se situent et sont comptabilisés dans la production, le travail, les loisirs ou l'administration du ménage, entre autres domaines. Si une telle approche n’était pas incluse, la soit-disant vision alternative coïnciderait avec les modèles économiques dominants qui excluent une diversité d'activités traditionnellement considérées comme typiques de la « sphère privée ». Dans celle-ci, les femmes sont constamment rendues invisibles dans leur rôle de développement et de procréation en multipliant leur exclusion, leur subordination et l'utilisation de leur travail productif et de procréation pour le fonctionnement du système lui-même.
.
2 Helio Fallas. Crisis Económica Mundial y la economía política en CR (Crise économique mondiale et l’économie politique au Costa Rica), 23 janvier 2009.
3 Journal La Nación, 5 mars 2009.
4 Ibidem.
5 Journal El Centroamericano, 9 mars 2009.
6 Ibidem.
7 Programme du Gouvernement de Transferts Économiques Conditionnés pour inciter les familles à maintenir leurs enfants dans le cycle éducatif.
8 Msc. María Flores-Estrada. Coordinatrice Técnique de l’ Agenda Economique des Femmes. “El Plan Escudo: por qué es insuficiente para las mujeres”, 2009.
9 Vargas, Luis. “El Plan Escudo”. Extrait de l'Article présenté dans le cycle Crise globale et impact au CR organisé par le CEP-Alforja et le Réseau de Social Watch en mars 2009.
10 Ibidem.
11 “Diez medidas para enfrentar la crisis económica con inclusión social y productiva” (Dix mesures pour faire face à la crise économique avec inclusion sociale et productive). Plusieurs auteurs, 2009.
12Tentative de lois visant à la privatisation des télécommunications au CR, monopolisées avec une projection sociale par l'Institut d'Électricité du Costa Rica.
13 “Diez medidas para enfrentar la crisis económica con inclusión social y productiva” (Dix mesures pour faire face à la crise économique avec inclusion sociale et productive). Plusieurs auteurs, 2009.
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La crise et les changements encourageants
Social Watch El Salvador
Mario Paniagua
Armando Pérez
Scarlett Cortez1
Deux décennies d'application de recettes économiques néolibérales ont laissé le pays en situation de grande vulnérabilité pour faire face aux conséquences de la crise économique globale. La détérioration des conditions sociales, économiques, politiques et environnementales, l'exclusion sociale et de travail, la diminution du montant des envois de fonds et la hausse des prix des produits de base sont quelques-uns des effets dévastateurs de la crise actuelle. Bien que la forte dépendance des États-Unis ait été une partie du problème, les changements politiques dans les deux pays pourraient faire que cette dépendance même facilite une sortie.
Le Salvador est en train de clore deux décennies de gouvernements néolibéraux qui ont mené le pays à la détérioration des conditions sociales, économiques, politiques et environnementales. Cette situation se complique encore davantage du fait qu’aucune mesure n’a été prise pour résister aux effets de la récession aux États-Unis, de la crise environnementale, ni ceux du prix du carburant et des aliments.
Détérioration des services publics et des conditions d'emploi
Le pays souffre d’une détérioration de la qualité et de la couverture des services publics – associés à l'érosion des fonctions de l'État et à la réduction relative des assignations budgétaires pour les entreprises publiques qui les fournissent – et de l'imposition d'une logique marchande pour la fourniture des services publics. Les droits économiques et sociaux, le logement, la santé, l'éducation et l'eau, font l'objet d'une pression chaque fois plus grande et, si la crise économique devait se prolonger, cela provoquera encore plus de tension sociale, affaiblissant l'État et augmentant de ce fait le risque d’instabilité et de violence. Parmi les populations les plus vulnérables restent préoccupants l'augmentation du nombre d'enfants qui travaillent, l'augmentation des maladies gastro-intestinales et respiratoires, le taux d’augmentation de personnes avec leVIH, l'augmentation de l'insécurité des citoyens et l'incorporation des enfants et adolescents aux « maras » ou gangs urbains2.
A l'exclusion sociale on ajoute celle du travail, promue par la flexibilisation du marché du travail comme un « incentive d’entreprise » afin de réduire les coûts de travail et qui mène à la détérioration des conditions d'emploi, à la perte de la capacité acquisitive des salaires, à la génération d'un type d'emploi à faible productivité et d'un emploi productif effectué dans des conditions précaires3. A la privation de l'accès aux services publics et des moyens de vie pour les personnes au chômage on ajoute le manque d'accès à des postes de travail productifs et de bonne qualité, qui résultent suffisamment attrayants pour maintenir la population active occupée4. Pour le dernier quinquennat on estime que la population au chômage est inférieure à 7 % de la PEA (Population économiquement active). Selon le PNUD seulement 20 % de la population d'âge économiquement actif a un travail permanent, bien rémunéré et bénéficiant de toutes les prestations sociales5.
Une économie dépendante des États-Unis
Bien que divers organismes financiers mondiaux argumentent que l'économie du Salvador était la plus solide d'Amérique Centrale, les effets de la crise n'ont pas tardé à apparaître. Selon les registres de la BCR du Salvador, 51 % des exportations salvadoriennes en 2007 ont eu comme destin le marché américain. En octobre 2008, les banques ont augmenté les taux d'intérêt et ont commencé à restreindre l'accès au crédit déclenchant une grande incertitude. Les exportations, le tourisme et les envois de fonds aux familles restés au pays ont commencé à chuter6.
Plus de 300.000 familles sont réceptrices d'argent de l'extérieur, 26,7 % de la population ayant à charge des frais d’alimentation, vêtement et services de base. La Banque Centrale de Réserve (BCR) a reporté que, entre 1998 et 2008, les envois de fonds ont été triplés jusqu'à arriver pratiquement à 3.788 millions d’USD, la majorité en provenance des États-Unis. Les flux des envois de fonds ont augmenté en 2008, de 2,5 % par rapport à 2007, baisse notoire si on les compare à 2004, quand ils ont augmenté de 17 % par rapport à l'année précédente. On peut déjà prévoir que les envois de fonds diminueront en 2009 et 2010 de 3 % environ du total reçu jusqu'à présent. Un des secteurs les plus touchés par la décélération américaine a été celui de la construction, dans lequel travaille une importante fraction de la population salvadorienne résidant aux États-Unis7. Ceci aura un impact significatif sur l'envoi de fonds.
Crise des aliments et des carburants
Les schémas de privatisation mis en oeuvre par le Gouvernement, qui ont rejeté la production agricole garantissant la sécurité alimentaire, se sont concentrés sur l'importation de grains de base. Le libre commerce, générateur d'inflation et le manque de capacité acquisitive de la population de par l'absence de règlementation de l'État en ce qui concerne le marché, affaiblit encore plus le pays pour faire face à la crise mondiale.
Des estimations faites par la Commission Economique pour l'Amérique latine (CEPAL) indiquent que, pour chaque augmentation de 15 % sur le prix des aliments, la pauvreté dans les pays de la région augmente de 2,8 %. Dans ce sens, en considérant qu'au Salvador la hausse des prix a été plus importante, l'augmentation de la pauvreté est plus importante également..
L'impact de la hausse sur les prix du pétrole s’est vérifié avec l'augmentation des prix des produits alimentaires de base, produisant une détérioration rapide du pouvoir d'achat de larges segments de la population et donc son appauvrissement.. Depuis 2007 les prix des aliments a subi une hausse continue. La moyenne inflationniste des quatre dernières années a été de 4,9 % ; l'inflation d'avril 2008 est arrivée à 6,8 % . Pendant cette période, l'inflation accumulée a été de 19,5 %. Le salaire minimum se trouve entre 85,58 SVC (10 USD) et 183 SVC (21 USD) mensuels. En février 2008 le panier de la ménagère était de 163 SVC (19 USD), le panier de la ménagère élargi qui inclut tous les besoins d'une famille type (alimentation, santé, éducation, logement, habillement) était de 703 SVC (82 USD) 8.
Selon l'Enquête Nationale de Revenus et de Dépenses de 2006 les aliments représentent près du 30 % du budget des foyers à revenus plus faibles. En juin 2008, le coût du panier type urbain a enregistré une hausse d'environ 22 % par rapport à juin 2007, tandis que le panier rural a subi dans les récents mois des hausses proches de 25 % par rapport à la période équivalente de l'année précédente ; la situation décrite mène à une augmentation rapide des taux nationaux de pauvreté et d'extrême pauvreté9.
Il est important d'indiquer que, bien que l'impact de la hausse des prix des aliments, du carburant et d’autres produits de base soit plus grand et plus dramatique dans les foyers à plus faibles revenus, il affecte aussi fortement les foyers à revenus moyens, par le fait que les aliments, l'électricité et le transport, qui sont les trois rubriques les plus touchées par les changements dans l'environnement international, constituent autour de 50 % de la composition des dépenses mensuelles moyennes des familles salvadoriennes10.
En raison de cette situation, des politiques sociales et économiques pour relancer la production nationale, en particulier la production agricole, sont nécessaires. La sécurité alimentaire doit être l'axe central de l'action gouvernementale. Il faut donc mettre l’accent sur la règlementation des prix, l’investissement productif, l’augmentation de salaires, la génération d'emplois et l'intervention de l'État dans le contrôle des imperfections du marché.
Inégalités aggravées par la crise
La crise climatique (augmentation de la température, changements des patrons des pluies, augmentation de la fréquence et de l'intensité des sécheresses, inondations, glissements, effondrements et vents violents) a exacerbé les inégalités économiques, de genre et ethniques, entre autres. Elle a approfondi, en outre, les fragilités déjà existantes associées aux groupes démographiques les plus vulnérables, comme les femmes, les enfants, les personnes âgées, les peuples originaires, les familles pauvres rurales et urbaines marginales.
Le système économique mis en oeuvre dans le pays multiplie les effets de la vulnérabilité environnementale dans les populations pauvres ; les phénomènes comme la déforestation et la dégradation des forêts, la pollution des rivières et les manteaux aquifères, entre autres, ont eu pour conséquence l’abandon de l'agriculture campagnarde la livrant à un environnement économique défavorable et conduisant la population pauvre rurale et urbaine marginale à un déficit de logement et de services de base qui la placent dans une situation de risque permanent.
Année après année, les familles rurales perdent leurs récoltes et leurs parcelles agricoles, diminuant leur accès à la terre et aux eaux destinées à la consommation humaine. Par conséquent, leurs revenus économiques diminuent et elles abandonnent leurs lieux d'origine, émigrant vers les villes principales ou à l'étranger. Les maladies infectieuses et transmises par des vecteurs sont en augmentation.
De cette situation environnementale on peut évaluer que l'objectif 10 des OMD : « Réduire de moitié, pour 2015, le pourcentage de personnes qui manquent d’un accès durable à l’eau potable et à l'assainissement de base » sera presque impossible à réaliser, et il en sera de même pour la plupart des OMD.
Toutefois, le manque d'information claire et objective sur les indicateurs pour les OMD relatifs à l’eau potable et l’assainissement compliquent le calcul d’une mesure concrète des avancées et des reculs dans ce secteur. Les chiffres officiels montrent des statistiques différentes par rapport à des données de couverture, à la qualité et la disponibilité en eau potable et à l’assainissement par rapport à celles que présentent les institutions environnementalistes, avec de surcroît le fait de ne pas reconnaître qu’un fournisseur public d’eau ne signifie pas l’accès à l’eau dans des conditions de qualité.
D'une part, l'Enquête des Foyers à Buts Multiples (EHPM, en espagnol)11 informe que pour 2007 la couverture totale des foyers avec un approvisionnement en eau par canalisation privée a été de 74 %, tandis que l'Administration Nationale des Aqueducs et des Egouts (ANDA, en espagnol)12 informe qu'elle a été de 54,2 % . L'EHPM indique que la couverture par le biais des fournisseurs publics a été de 4,2 % et ANDA informe qu'elle a été de 6,2 %. Ces chiffres s'avèrent alarmants, surtout quand il y a des secteurs de la population à revenus moyens et élevés qui ne subissent pas le désapprovisionnement d'eau potable comme c’est le cas pour les secteurs populaires.
Le rapport de progrès sur les OMD élaboré par le PNUD en 2007 présente des avancées pour cet objectif, qui selon les organisations des environnementalistes et de protection au consommateur sont discutables, si l’on prend en considération que le Gouvernement a utilisé comme indicateur d'avancée d'accès durable à une source améliorée d'eau, les approvisionnements de : connexion domiciliaire, fournisseur public, eau de puits, des sources et réservoirs d'eau de pluie. Toutefois, on ne spécifie pas et il n'existe pas d'information fiable qui assure que ces ressources soient réellement protégées et répondent à des normes de qualité pour que l'eau soit apte à la consommation humaine.
Conclusion
Le changement dans les directions politiques aux États-Unis et au Salvador permettent de visualiser un chemin d'espoir pour surmonter les effets de la crise en raison des liens commerciaux proches entre les deux pays, mais il est impératif qu'on assure, sans restriction, l'autonomie, le respect et la recherche de nouvelles relations d’équité et de solidarité.
Avec le nouveau scénario politique que vivra le pays à partir de 2009, Social Watch El Salvador assume une position vigilante vis-à-vis de la réalisation des DESC et des OMD, non seulement en raison du changement de gouvernement, mais parce qu'il y a une dette en suspens des précédents gouvernements à ce sujet, qui a déjà été ressentie comme un manque de volonté de les réaliser13.
1 Membres des organisations qui conforment Social Watch El Salvador (APSAL, CIDEP, CODEFAM, FUMA, MEC). Remercient le soutien d’Yvette Aguilar, Ana Ella Gómez, Carolina Constanza, Jeannette Alvarado, Ana María Galdámez y Karen Martínez.
2 Atelier de Concertation pour la Lutte contre la Pauvreté (MCLCP) et Save the Children, organisateurs du forum « l'impact de la crise sur les filles et les garçons du Pérou et de l'Amérique latine », alertent sur l'augmentation du travail des enfants en Amérique latine.
3 Weller, Jürgen. “Procesos de exclusión e inclusión laboral: la expansión del empleo del sector terciario” (“Processus d’exclusion et d’inclusion du travail : l'expansion de l'emploi du secteur tertiaire”). Serie Macroeconomía del Desarrollo, 6. CEPAL: Santiago, Chili. 2001.
4 “El empleo en uno de los pueblos más trabajadores del mundo” (“L'emploi chez un des peuples les plus travailleurs du monde”). Informe sobre Desarrollo Humano El Salvador PNUD 2007-2008.
5 Ibidem.
6 “Economías centroamericanas reciben impacto de la crisis financiera” (« Des économies d'Amérique centrale reçoivent l’impact de la crise financière »). El Periódico. Mexique, 24 janvier 2009.
7 PNUD (2005-2006). Informe sobre Desarrollo Humano El Salvador.
8 Goitia, Alfonso. Crisis alimentaria y crisis del modelo neoliberal en El Salvador, p.15. 2008.
9 PNUD. “Contrarrestando el impacto de la crisis internacional sobre la economía de los Hogares Salvadoreños”. ( Contrecarrant l'impact de la crise internationale sur l'économie des foyers Salvadoriens ). Rapport final de la Commission Multidisciplinaire. 2008.
10 Goitia, Alfonso, Op. cit.
11 Ministère de l'Économie. Direction Générale des Statistiques et Recensements. Encuesta de Hogares y Propósitos Múltiples 2007.
12 ANDA. Informe de cobertura a nivel nacional de agua potable y saneamiento 2003-2007.
13 “Derechos Económicos y Sociales: no hay voluntad política” (Droits économiques et sociales: il n’y a pas de volonté politique). Rapport de Social Watch 2008. El Salvador.
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Une prison en plein air face à la crise mondiale
Eritrean Movement for Democracy and Human Rights (EMDHR)
Daniel R Mekonnen
Sans constitution ni Parlement qui fonctionnent, sans système judiciaire indépendant ni presse libre et sans transparence administrative, l’Erythrée, le pays le plus militarisé du monde, manque de mécanismes nécessaires pour aborder la crise mondiale. La récession de l'économie mondiale a fait chuter les envois de fonds vers le pays, tandis que les prix des aliments et du carburant ont subi une montée fulgurante. L'Erythrée a besoin d'une transition immédiate à un système démocratique de gouvernance avec le soutien de la Communauté internationale. L'aide humanitaire supervisée par les ONG internationales indépendantes semble être le plan d'urgence le plus efficace pour sauver les vies de la population sans défense.
Bien avant que la crise financière mondiale ne s’aggrave, vers fin 2008, l'Erythrée était déjà plongée dans un profond chaos économique, social et politique. Le pays possède un des historiques mondiaux les plus lourds en ce qui concerne la protection des droits humains, comme l'affirment divers organismes de surveillance des droits humains régionaux et internationaux, y compris la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et le Groupe de Travail de l'ONU sur la Détention Arbitraire. La crise des droits humains s’est aggravée après le choc frontalier avec l'Ethiopie, entre 1998 et 2000. Depuis lors, le Gouvernement a utilisé les suites du conflit comme prétexte pour supprimer les droits et les libertés fondamentales.
Une prison en plein air
L'Erythrée est indépendante depuis 1991, mais elle n'a pas encore offert à ses citoyens de véritable liberté. De fait, on peut à peine entrevoir des caractéristiques de gouvernement libre et démocratique conventionnelles1. De part le monde, presque tous les pays ont réussi à ériger un pacte, un document national obligatoire ou une constitution. La plupart d’entre eux ont également des Parlements en activité et font appel à des élections régulières et périodiques, indépendamment de leur liberté ou leur impartialité réelles. D’un autre côté, ils autorisent l'existence de moyens de communication privés, même si, parfois, les contrôles sont tellement restrictifs que la liberté de presse est annulée. En Erythrée, le Gouvernement a adopté une Constitution en 1997 mais ne l'a jamais mise en pratique. Le Parlement a cessé de fonctionner en février 2002. Les moyens de communication privés (radio, télévision, presse écrite et électronique) ont disparu entre 1997 et 2001; seuls subsistent les moyens officiels, qui sont toujours plus fidèles à l'élite dirigeante qu'à la vérité. Et pire encore, depuis son indépendance, le pays n'a jamais jouit d'élections libres et impartiales.
Aujourd'hui, quand on voit les longues queues dans les rues d'Asmara pour aller chercher son pain, on réalise que la vie est devenue très difficile pour les Erythréens. Comme les anciennes autorités d'occupation du Derg (le comité coordinateur des forces armées, policières et de l'armée de terre) durant les années 1970 et 1980, le Gouvernement paraît avoir, lui aussi, déclaré la guerre à son propre peuple. Un propos très répandu entre les Erythréens signale que la seule différence entre le régime du Derg et celui de l’actuel Front Populaire pour la Démocratie et la Justice (FPDJ), c’est que les fonctionnaires du Derg s’exprimaient généralement en amharique (la langue officielle éthiopienne) tandis que ceux du FPDJ parlent le tigré, un dialecte national qui a un statut officiel de facto.
Les personnes qui n'adhèrent pas à l'idéologie de l'État ou qui ont des croyances religieuses non acceptables officiellement par le Gouvernement, souffrent de persécutions systématiques et sont punies sévèrement par le système sécuritaire et militaire. Ceci ayant pour résultat, les violations des droits humain, devenues endémiques ; la violation est la norme et la protection l'exception. Quelques estimations conservatrices suggèrent que plus de 20.000 personnes sont enfermées sans avoir eu de procès et sans avoir de contact avec l'extérieur. Elles sont réparties dans plus de 300 prisons formelles et informelles réparties un peu partout dans le pays. La plupart de ces centres de rétentions sont dirigés par des Généraux de l'armée, qui n’ont de comptes à rendre ni à la police ni aux tribunaux ordinaires. En résumé, le pays a été transformé en une prison en plein air où les droits et les libertés fondamentales sont totalement bâillonnés par des pratiques dominantes et abusives, qui sont devenues cauchemardesques et kafkaïennes.
Les indicateurs sociaux et de développement
Les indicateurs de développement sont contradictoires. Certaines sources soulignent dans leurs rapports, des « progrès » dans certains secteurs comme la mortalité infantile et la morbidité maternelle. Toutefois, étant donné l'atmosphère politique extrêmement répressive et l'impossibilité d'obtenir des données fiables, il est difficile de prendre ces rapports au pied de la lettre. En réalité, les politiques économiques erronées de l’autoritaire FPDJ ont totalement vidé l'économie nationale et locale bien avant que ne survienne la crise financière globale, fin 2008.
L'Erythrée est qualifié de manière désastreuse dans plusieurs rapports provenant de sources indépendantes. Par exemple, l'Indice de la Faim place le pays à l’antépénultième position, c.-à-d. au 116ème rang sur 118 pays classés par le rapport2. Le pays reçoit une très mauvaise qualification dans l'Indice de Capacités de base (ICB), dans lequel il laisse entrevoir de sérieuses difficultés dans chaque dimension du développement social. Selon Journalistes Sans Frontières3, l'Erythrée est le pire pays au monde en ce qui concerne la liberté de la presse, volant la place de la Corée du Nord dans le classement. En dépit de sa faible population de 4 millions d'habitants, l'historique alarmant du pays en ce qui concerne les violations des droits humains, le place en 4ème source émettrice de réfugiés dans le monde. Les dernières 19.400 demandes réalisées en 2005-2006 le situe à peine au-dessus d'états détruits et chaotiques comme la Somalie, l’Iraq et le Zimbabwe4.
Le pays le plus militarisé
La militarisation excessive est un autre de ses graves problèmes. Les élèves de l'enseignement secondaire sont obligés de s’inscrire à des camps militaires pour recevoir une « éducation formelle ». Le Camp d'Entraînement Militaire Sawa, tristement célèbre, est un des endroits où les étudiants sont disciplinés conformément au strict règlement militaire. L'abusif Programme de Service Militaire National (PSMN), qui commence à dix-huit ans et qui ne se termine jamais, fait partie de l’étape préparatoire de l'endoctrinement. Les nombreux et détestables abus des droits humains perpétrés sous le PSMN incluent des viols et autres genres de violence sexuelle contre les recrues. Durant les dernières années, la totalité des institutions académiques ont été placées sous le contrôle effectif de commandants militaires. En 2003, le pays se considérait comme l'état le plus militarisé au monde ; en outre, il avait le troisième pourcentage le plus élevé de Produit National Brut destiné aux dépenses militaires5, après la Corée du Nord et l'Angola. Vers la moitié de l’année 2000, les forces armées comptaient dans leurs rangs 300.000 personnes, plus que dans toute autre période de leur histoire. Depuis lors on croit que la quantité d'effectifs a augmenté de manière exponentielle. Les recrues constituent 45,27 % du total de l'armée nationale, et sa vulnérabilité est proportionnelle à sa quantité.
La crise qui domine le pays a été exacerbée par la récession de l'économie mondiale, qui a provoqué l’arrêt des envois de fonds provenant de l'étranger. Les coûts des aliments et du carburant sont montés en flèche. On dit que les prix du carburant dans les stations service strictement contrôlées par le Gouvernement sont les plus élevés au monde. De fait, il est pratiquement impossible de trouver du carburant. Les aliments peuvent être achetés seulement de manière légale dans les magasins du Gouvernement et les agriculteurs doivent vendre leur grain à ces magasins à un prix préétabli. La vente de grains sur les marchés locaux est punie, comme le président lui-même l’a déclaré dans une conférence de presse en janvier 2009.
La réponse du Gouvernement
Le Gouvernement rejette catégoriquement les rapports sur les problèmes économiques ou sur la répression politique, et il les qualifie de « propagande ennemie ». De fait, le président a expliqué que les rapports qui font part des pénuries économiques du pays sont l’expression des frustrations « de personnes suralimentées et capricieuses » qui ne savent pas administrer leurs ressources. En réalité, les gens meurent littéralement de faim – à cause de la famine provoquée par le FPDJ.
L'Erythrée ne possède pas d'outils législatifs, administratifs ou institutionnels qui permettent de répondre adéquatement à la crise mondiale actuelle car le pays n’a pas de Constitution ni de Parlement qui fonctionnent adéquatement, pas de système judiciaire indépendant ni de presse libre, pas de transparence administrative et encore moins un budget national publié officiellement. En outre, les mécanismes traditionnels pour faire face à des problèmes comme celui de l'émigration sont, pratiquement, inexistants. Sous une suffocante loi martiale, les points d’entrée et de sortie sont fermés de manière hermétique. Après avoir consommé les faibles ressources dont peut disposer la population affamée – spécialement les femmes, les personnes âgées et les enfants – cette population ne peut se déplacer nulle part ailleurs et doit se résigner à mourir dans les villages. Le Gouvernement n'a pas encore adopté de programme pour protéger la population la plus vulnérable.
Les ONG manipulées par le Gouvernement
Un agenda de développement solide qui se base sur les Droits, doit donner une préférence stratégique à l'autonomisation et à la responsabilisation des communautés locales. Cette perspective doit accorder aux personnes le pouvoir et la capacité de devenir les principaux acteurs de leurs vies. Une manière éventuelle d’y parvenir serait la participation d'organisations de la société civile et d'ONG locales indépendantes représentant les intérêts de leurs communautés. Mais malheureusement, l'atmosphère répressive rend le travail de la société civile indépendante impossible. Le pays a seulement trois organisations locales compromises avec l'agenda de développement national pour le prétendu bénéfice de la population en général : le Syndicat National de Femmes Erythréennes, le Syndicat National de la Jeunesse et des Etudiants Erythréens et la Confédération Nationale des Travailleurs Erythréens. Il y existe d'autres « organisations de la société civile » plus redoutables, mais dont on ne connait que le nom.
Cependant, comme tout le monde le sait, ces trois organisations actives ne sont ni authentiques ni suffisamment indépendantes pour représenter les intérêts de leurs membres. Elles fonctionnent comme des ligues (branches) féminine, juvénile et de travailleurs du parti au gouvernement, qui choisit ses chefs et qui exige leur loyauté. Autrement dit, ce sont des exemples typiques d'ONG manipulées par le Gouvernement, conçues pour dissimuler la dépendance du pays de l'aide externe et pour feindre une participation de la société civile qui n'existe pas. Les seules organisations de la société civile indépendantes, comme le Mouvement Erythréen pour la Démocratie et les Droits Humains, travaillent depuis l'exil et sont accusées par le Gouvernement de « marionnettes de l'ennemi » ; s'ils sont attrapés dans le pays, leurs membres sont emprisonnés et torturés.
La coopération internationale
La coopération internationale est cruciale pour résoudre les multiples crises mondiales qui frappent de manière disproportionnée les populations des pays en développement. Pendant de nombreuses années, le déficit alimentaire de l'Erythrée a été couvert par l'aide alimentaire donnée par la Communauté internationale (même si le Gouvernement ne le reconnaît pas). Les organisations d’aide et les ONG internationales ont joué un rôle fondamental dans cet aspect. Toutefois, beaucoup d’entre elles ont été expulsées à la suite de la politique du Gouvernement d'« autosuffisance », politique illusoire. Bien qu'il ne rejette pas l'aide alimentaire, le Gouvernement complique les démarches pour qu'elle puisse entrer dans le pays. Il préfère l'aide internationale en espèces.
L'Union Européenne demeure toujours l’un des principaux fournisseurs internationaux d'aliments et d'aide au développement de l’Erythrée. Elle a récemment approuvé un lot d'aide au développement pour 122 millions d’EUR (approximativement 161 millions d’USD) du 10ème Fonds de Développement Européen, mais elle a des préoccupations légitimes quant au dédain montré par le gouvernement érythréen envers les exigences légales qu'entraîne tout plan d'aide au développement responsable. Ces exigences consistent à s’engager pour les principes de bonne gouvernance, de reddition de comptes et de respect des droits humains ainsi que de l'état de droit, des principes qui n’existent pas en Erythrée. Le pays n'a ni la volonté politique, ni les moyens d'assurer une véritable politique de développement et il n’y a pas de processus transparent de prise de décisions qui permette de formuler et de mettre en pratique les politiques étatiques pouvant aider à surmonter la crise mondiale actuelle.
Il est immédiatement nécessaire de mener le pays vers un système démocratique de gouvernance et soutenu par la Communauté internationale. En même temps, l'aide humanitaire contrôlée par des ONG internationales indépendantes se présente comme la façon la plus efficace de sauver la vie de la population sans défense, asphyxiée par la grave répression politique et l'effondrement économique.
1 Voir Mekonnen, D.R. (2009). Transitional Justice: Framing a Model for Eritrea. VDM Publishing: Saarbrucken, Allemagne.
2 Welt Hunger Ilfe (2007). The Challenge of Hunger 2007. Disponible sur : <www.welthungerhilfe.de/fileadmin/media/pdf/Pressemitteilungen/DWHH_GHI_english.pdf>. Consulté le 4 janvier 2008.
3 Reporters Without Borders (2007). Annual Worldwide Press Freedom Index. Disponible sur : <www.rsf.org/article.php3?id_article=24025>. Consultado el 16 de octubre de 2007.
4 Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (2007). Global Trends: Refugees, Asylum Seekers, Returnees, Internally Displaced and Stateless Persons. Genève. Disponible sur : <www.unhcr.dk/Pdf/statistics/global_trends_2006.pdf>.
5 Awate Team (2003). Defending Indefensible, Indulging Incompetence. Disponible sur : <www.unhcr.dk/pdf/statistics/global_trends_2006.pdf>.
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On ne s’attaque pas à l’essentiel
Plataforma 2015 y más
Pablo José Martínez Osés
IntermonOxfam1
Deborah Itriago
L'économie espagnole, qui a retardé trop longtemps ses ajustements, laisse entrevoir des déficiences prononcées. Face à la montée fulgurante du chômage et à la diminution du crédit, le Gouvernement se porte garant mais il ne traite pas les problèmes fondamentaux, comme la fragilité et la précarité de l'emploi, l'accès au logement et l'extension de nombreux droits sociaux de base. Quelque chose de semblable se passe avec l'aide internationale : bien que l'Espagne se réaffirme dans son rôle de pays solidaire, des sujets essentiels comme le réchauffement de la planète ou les subventions agricoles ne sont pas abordées comme ils le devraient.
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La crise en Espagne possède des caractéristiques propres au pays qui indiquent que ses causes ne résident pas uniquement dans les « failles » du système financier international ou dans leurs mauvaises pratiques. En septembre 2008, alors que le président José Luis Rodríguez Zapatero se trouvait à New York à l'Assemblée Générale de l'ONU où il réaffirmait sa confiance en la robustesse du système financier espagnol, il a assisté en même temps, à l’effondrement des grandes compagnies financières américaines. En dépit de cela, son gouvernement s’est empressé d’accorder une garantie publique à ses risques, en accord avec le Trésor public, pour un montant de 3 milliards d’EUR, ce qui suppose plus de 650 EUR par personne, alors que le pays consacre 30 EUR par personne à l'Aide au Développement. Dans le contexte actuel de crise, on tente de gagner du temps au lieu de voir en elle une opportunité de réel changement.
La destruction de l’emploi
Les chiffres actuels concernant l’effondrement et la destruction de l'emploi sont terrifiants. Sur un an, de janvier 2008 à janvier 2009, le chômage a augmenté de plus d’un million de personnes ce qui constitue plus de trois millions et demi de personnes (des niveaux similaires à 1996). Ceci représente 14 % de la population active ainsi que près de deux fois la moyenne européenne. En 2008, plus de 840.000 postes de travail ont disparu et la tendance ne semble pas s’inverser.
Le Gouvernement a cherché à pallier la diminution du pouvoir d'achat en octroyant des diminutions fiscales aux travailleurs et en facilitant les démarches pour la création de nouvelles activités économiques. Il a aussi diminué les intérêts en cas de non-paiements ou d’ajournements pour éviter l’asphyxie économique définitive des entreprises. Ces mesures prétendent, tout au plus, fournir aux travailleurs des moyens pour subsister pendant un certain temps dans l'attente d’une récupération de l'activité économique et de la confiance dans les marchés. Il est nécessaire de constater d'autre part, que jusqu'à présent le Gouvernement a su résister aux demandes opportunistes des patrons qui ont exigé, comme d’habitude, une majeure précarisation du travail par l'assouplissement et la diminution des coûts de licenciements comme condition à la création d'emploi.
La diminution du crédit
Bien que le taux d'intérêt de référence pour l'Union Européenne (Euribor) ait diminué et ait atteint des minimums historiques, les organismes financiers ne paraissent pas décidés à assumer de nouveaux risques, par conséquent l’accès au crédit reste faible. Il est évident que la garantie publique de 3 milliards d’EUR octroyée par le Gouvernement et les autres mesures de réassurance des opérations sous garantie publique, n'ont pas produit jusqu'à présent, la relance du crédit par le secteur financier afin que les capitaux circulent pour relancer l'activité économique. D'autre part, en décembre 2008, selon des données de la Banque d'Espagne, le portefeuille de crédits aux familles a diminué pour la première fois depuis huit ans, ce qui contraste avec la croissance des portefeuilles de crédits approuvés auprès des administrations publiques. Ce paradoxe s’explique par la prédilection pour les garanties publiques qu'ont les organismes financiers au moment de choisir les risques et par les énormes difficultés de financement que présentent les administrations locales (municipalités).
En ce sens, le Gouvernement s’est donné pour priorité de servir de garant public afin de maintenir la confiance dans l'équilibre et dans la stabilité du système financier, duquel dépendent une grande quantité de dépôts et d’épargnes de citoyens. Mais le problème exige une plus grande décision car, tandis que les organismes financiers continuent à présenter des profits spectaculaires dans leurs résultats trimestriels, la dévaluation incontrôlable des actifs financiers et hypothécaires a fait que, jusqu'à présent, la citoyenneté n’a pas pu prendre part à la stabilité attendue. Différents acteurs provenant de nombreux mouvements sociaux, mais aussi de secteurs académiques et politiques, commencent à parler de la nécessité de recréer des organismes financiers à caractère public qui permettent, en ces temps de crise, de donner la priorité aux fonctions du service public au lieu de maintenir des marges de bénéfices.
Le retard des ajustements
Il est frappant de constater que le Gouvernement a répondu aux nécessités du secteur bancaire et financier de manière très rapide alors que sa réaction a été tardive et limitée quand il s’est agi de résoudre les problèmes de l'économie réelle, où le processus d'ajustement est abrupt et tardif – et où il était le plus nécessaire de réagir avant la crise déjà.
Les trois principaux problèmes, largement mentionnés dans diverses analyses pendant le cycle expansif précédent, étaient : les dimensions spectaculaires de la « bulle immobilière » et l'importance relative du secteur de la construction dans le PIB et dans la croissance de l'emploi, l'excessif endettement des particuliers et des chefs d'entreprise et les taux de compétitivité et d’épargnes peu élevés au niveau national. Durant la période précédente, très peu de mesures avaient été prises pour faire face aux processus d'ajustements, peut-être pour ne pas devoir assumer les coûts sociaux et politiques inhérents à ceux-ci. La crise financière internationale a maintenant accéléré et synchronisé ces processus qui étaient restés en suspens, en affectant de manière très grave la viabilité des affaires requérant un endettement élevé à court terme ainsi que l'emploi.
Le Gouvernement a répondu en combinant deux axes. D'une part, il maintient sa résistance aux pressions des secteurs politiques conservateurs et des secteurs patronaux qui souhaitent l’octroi de diminutions fiscales sur les gros revenus, la diminution des impôts des sociétés et des mesures d'assouplissement des licenciements. D'autre part, il adopte des mesures à caractère social, puisqu'elles sont fondamentalement destinées aux chômeurs, aux personnes à faibles revenus et aux secteurs à haut risque. Cette double réaction, qui vise à ne pas détériorer le système des garanties sociales (de sorte qu’il serve à amortir les coups de la crise) est loin, toutefois, d’inverser les tendances et d’offrir des résultats en ce qui concerne la récupération du crédit, de l'emploi ou de l'indice des prix.
On constate que le pari du Gouvernement consiste à contenir les pressions et les conséquences, jusqu'à ce que la confiance sur les marchés financiers internationaux soit revenue et que ceux-ci amortissent un nouveau cycle expansif. Toutefois, la question ne se réduit pas à savoir quand la récupération surviendra-t-elle, ni jusqu'à quel point il est possible de grossir le déficit public qui supporte les mesures entreprises (les premières mesures ont déjà épuisé l'excédent accumulé durant les années précédentes et l'Union Européenne a déjà donné ses premiers avertissements). Il s’agit, en outre, de savoir comment aborder les problèmes fondamentaux de l'économie espagnole, qui sont principalement liés à la fragilité et à la précarité de l'emploi, aux difficultés d'accès au logement et à l'accès, pour une grande partie de la population, à de nombreux droits sociaux de base.
L’Espagne à l’extérieur
L’année 2009 est celle des transformations profondes en matière de développement économique, et entre autres dans la manière dont la coopération est menée dans la lutte contre la pauvreté. Tout au long de 2007 et 2008, l'Espagne a su montrer sa vocation de pays solidaire, non seulement dans la gestion de la crise mondiale qui affecte surtout les pays en développement mais aussi, de manière générale, dans les compromis établis en matière d'Aide Officielle au Développement (AOD). Toutefois, on observe que bien que des initiatives très importantes ont été entreprises, il subsiste une timidité excessive pour aborder les questions plus fondamentales. Parmi les quelques aspects à souligner, nous notons :
AOD : Entre l'année 2004 et 2007, l'AOD espagnole a augmenté de plus de 20 % (chiffres en valeurs courantes). Bien que la situation économique actuelle n’a pas permis d’augmenter le budget 2009 alloué à la coopération (il s’est maintenu à 5,5 milliards, c.-à-d. le même niveau que 2008), l'Espagne se maintient parmi les donneurs les plus solidaires. En décembre 2007, le Pacte de l'État contre la Pauvreté a été signé, et tous les partis politiques espagnols se sont engagés à respecter le compromis international qui destine 0,7 % du PNB à l'AOD à partir de 2012.
Action humanitaire : Pendant 2008, une série de processus qui ont pris fin aideront à affirmer l'Espagne en tant qu’acteur mondial dans l'action humanitaire. Le pays dispose maintenant d’une stratégie cohérente qui respecte des paramètres et des normes acceptées internationalement. Le pays s’est renforcé institutionnellement afin d’augmenter sa capacité de gestion face aux crises humanitaires2. En ce qui concerne ce sujet, l'Espagne devra éviter la pression médiatique exercée pour faire la sélection des crises humanitaires auxquelles elle prendra part.
Crise des aliments : Lors du sommet de la FAO en juin 2008, l’Espagne a fait part de sa volonté d’octroyer 500 millions d’ EUR afin de répondre à la crise actuelle. Ainsi, en janvier 2009, l’Espagne a organisé à Madrid, avec le Secrétariat Général de l'ONU, la Réunion de haut niveau sur la sécurité alimentaire (RANSA), dans le but de contribuer au processus de coordination des différentes institutions impliquées dans le sujet (la FAO, le Programme alimentaire mondial, le Fond International pour le Développement de l'Agriculture, la Banque Mondiale, le FMI), et promouvoir l'initiative du Partenariat mondial pour l'agriculture et la sécurité alimentaire (GPAFS, sigles en Anglais). Lors de la Réunion, le Président Rodriguez Zapatero a accordé 1 milliard d’EUR supplémentaire à ces fins, qui sera versé sur cinq ans. Cette somme de 1,5 milliard d’EUR ne constitue pas de nouvelles ressources mais elle fait partie du compromis d'assignation du budget prévu pour l'AOD. Cependant, il semble bizarre que l’on ne s’interroge pas sur l'impact négatif des politiques agricoles de l'Union Européenne sur la sécurité alimentaire mondiale, qui mettent en risque les possibilités de succès de ces initiatives.
Dans le cadre du G20 et en accord avec ce qui précède, l'Espagne s'est prononcée pour que les Banques multilatérales de développement augmentent leurs flux nets destinés aux pays à faibles et moyens revenus pendant les périodes de basse croissance, mesure faisant partie du plan de mesures qu'il propose pour gérer la crise financière.
La solidarité n’est pas suffisante
Bien que toutes ces initiatives reflètent une certaine solidarité espagnole, elles contrastent toutefois avec sa position dans les matières cruciales pour les pays en développement comme le commerce, l'agriculture, les migrations internationales ou le changement climatique :
Commerce : En ce qui concerne la réponse internationale à la crise financière actuelle, un des risques qui pourrait se produire serait que les pays optent pour le protectionnisme commercial comme stratégie unilatérale de sortie de crise. Contrairement à d'autres pays de l'UE, l'Espagne a toujours maintenu une position plus rigide et a eu plus de mal à incorporer le développement comme élément principal des négociations commerciales. Lors de la réunion du G20 tenu fin 2008, on a demandé que les États s'abstiennent d'augmenter leurs tarifs douaniers. Rien n’a été dit sur la possibilité d'utiliser des subventions et des plans étatiques de sauvetage. De cette manière, on a remis en question les seuls outils de protection à la portée de la majorité des pays en développement et on a permis qu’ils deviennent inaccessibles pour ceux-ci (qui peuvent, en outre, s'avérer dévastateurs pour leurs agricultures).
Agriculture : De la même manière, il est préoccupant de constater l'incohérence entre les initiatives globales que l'Espagne soutient et celles que le Secrétariat d'État du milieu rural prétend conduire pour promouvoir une plate-forme européenne visant à bloquer les réformes nécessaires de la Politique Agricole Commune (PAC). Cette initiative a été présentée avec l'intention de la transformer en porte-drapeau de la présidence espagnole de l'UE, en ignorant que les impacts des politiques agricoles des pays riches sont par ailleurs responsables de la dégradation de l'agriculture des pays pauvres et de la crise des prix alimentaires.
Immigration : La crise économique internationale a durement frappé le travail de millions de migrants qui sont directement menacés par le chômage (dans les secteurs de la construction et de l'hôtellerie, les plus touchés par la crise en Espagne, et les principaux employeurs de travailleurs d'origine étrangère). Elle a également eu un fort impact sur les envois de fonds que ces travailleurs envoient à leurs familles et qui constituent un salaire transnational en pleine décroissance3. Face à cette réalité, la réaction du gouvernement espagnol a été décevante : il a proposé des mesures telles que le « plan de retour volontaire » qui n'a pas eu l'accueil attendu parmi la population étrangère parce que les politiques migratrices très fermées font que les immigrants, une fois franchies les nombreuses barrières pour résider en Espagne, ne renoncent pas facilement à ce droit4. En outre, on a éliminé radicalement les places disponibles pour la migration régulière et on a intensifié les contrôles pour détecter, arrêter et déporter les travailleurs en situation irrégulière. En exemple de cela, l'approbation en décembre 2008, de la nouvelle Loi sur l’Asile et le Refuge qui, après la directive européenne approuvée dans le même esprit en juillet 2008, comme l’affirme la Commission Espagnole d'Aide au Réfugié, « renforcera en Europe, le préoccupant développement de politiques non-solidaires et même xénophobes, plus préoccupées par les intérêts des États que par le droit a l’asile » 5.
Changement climatique : Fin 2009 il faudra arriver à la conclusion d’un accord mondial sur le climat qui puisse succéder à l'actuel Protocole de Kyoto. Pour cela il faudra arriver à des consensus en ce qui concerne les principaux sujets en discussion: le partage des efforts pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre et le financement de l'adaptation dans les pays en développement. L'Espagne contribue avec les fonds internationaux déjà existants, bien que comme cela ce passe dans le reste de la Communauté internationale, on soit très loin des nécessités qu’Oxfam chiffre à 50 milliards d’ USD annuels6. En outre, l'Espagne se résiste à assumer de nouveaux compromis de financement pour l‘atténuation et l'adaptation dans les pays en développement. Dans le cadre de l'Union Européenne, on utilise la crise financière comme excuse pour diluer le plan de financement déjà assez limité. On n'est pas arrivé non plus, à un accord sur des mécanismes innovateurs qui permettent de rassembler les fonds nécessaires, comme l’attribution des droits d'émission de gaz, ni sur les compromis qui sont en mesure d’être acquis dans le cadre d'un accord mondial.
1 La contribution d’Intermon/Oxfam à ce document a été réalisé par son équipe de recherche, sous la coordination de Deborah Itriago, et se circonscrit au deuxième point du document: “ l’Espagne à l’extérieur”.
2 En 2008, un Bureau d’Action Humanitaire a été créé au sein de l’Agence Espagnole de Coopération Internationale pour le Développement (AECID).
3 Dans le cas de l’Equateur ou du Mexique, la chute est estimée à 20% environ pour 2008.
4 Le plan consiste à donner aux immigrants la possibilité de toucher la totalité de leur chômage accumulé dans leur pays d’origine, dans le cas ou ils décident de rentrer, et de soutenir les possibles initiatives entrepreneuriales qu’ils pourraient commencer.
En février 2009, seulement 2.000 immigrants environ (alors qu’il y a 200 000 étrangers environ de l’espace non-européen en situation de chômage) avaient souscrit à ce plan.
5 Commission Espagnole d’Aide au Réfugié (CEAR).
6 Oxfam (2008). “Credibility Crunch, Poverty and Climate Change: An Agenda for Rich-Country Leaders”. Juin. Disponible sur : <www.oxfam.org.uk/resources/policy/debt_aid/downloads/bp113_credibility_crucnh.pdf>.
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Chômage, marginalisation et aide inefficace
Coordination SUD
Katia Hergott
Secours Catholique
Yves Casalis
La crise a frappé de plein fouet aussi bien le peuple français que celui des autres pays développés où elle est née. Les conséquences les plus évidentes sont la croissance du chômage, l'exclusion sociale, voire les problèmes d'alimentation subis par les secteurs de la société qui jouissait, il n'y a pas longtemps, d'une situation aisée. En outre, comme conséquence de la crise et de l'incapacité du pays à créer de nouvelles ressources pour l'Aide Publique au Développement (APD), cette organisation en sera sévèrement affectée. Il est peu probable que la France puisse respecter ses engagements vis-à-vis de cette association.
Le présent rapport analyse tout d'abord les conséquences de la crise économique sur la vie des Français, à savoir le chômage, la marginalisation et même les problèmes de nutrition, ainsi que leur retentissement sur l'Aide Publique au Développement frappant les pays qui en bénéficient.
Chômage et exclusion : le visage de la crise
Depuis le dernier trimestre 2008, du fait d’une structure socioéconomique chancelante, les plans sociaux dans les entreprises se sont multipliés. En décembre la banque Natixis a annoncé la suppression de 450 postes de travail, sans compter les 850 éliminés en mai. En novembre 2008, PSA Peugeot Citroën a lancé un plan de « départs volontaires » parmi ses 3.550 employés en France. En octobre le groupe informatique Hewlett-Packard a annoncé le licenciement de 580 salariés, tandis qu'en décembre le fabricant d'équipements automobiles Valeo a annoncé la suppression de 1.600 postes de travail.
Lors du premier semestre 2009, Sanofi-Aventis, le premier groupe pharmaceutique français, a également annoncé un programme initial de « départs volontaires » pour environ 1.300 salariés et l'intention de fermer quatre centres de recherche en France. Le groupe spécialiste en télécommunications Alcatel-Lucent a décidé, en février 2009, de supprimer 200 postes de l'effectif et 400 sous-traitants. D'après l'Observatoire Français des Conjonctures Économiques (OFCE) « l'économie française pourrait perdre quelque 800.000 emplois en 2009 et 2010 ».
Selon le Secours Catholique/Caritas France, « 492.000 EUR (732.400 USD environ) d'aide supplémentaire ont été assignés en tout pendant les huit premiers mois 2008. En Savoie (au sud-est), des journaliers sans travail arrivent dans nos refuges. En Eure (à l'ouest), dans une zone rurale, les agences d'intérim étant saturées doivent refuser des inscriptions. Les habitants de la Côte d'Or (au sud-est de Paris) ont dû faire face, au début de l’année, aux prix élevés du pétrole et des produits alimentaires. Dans ce secteur, les personnes ayant besoin d'aide viennent nous voir de plus en plus souvent, rien que pour boucler le mois. En Val-de-Marne, dans la région parisienne, le nombre de paquets alimentaires à distribuer a beaucoup augmenté ».
Pendant ce temps, une étude du Centre de Recherche pour l'Étude et l'Observation des Conditions de Vie (CRÉDOC) de janvier 2009 a mis en évidence l'impact de la crise économique sur les aliments : 66 % des foyers qui vivaient sous le seuil de pauvreté (880 EUR [1.312 USD] par mois pour une seule personne) ont dû réduire leur consommation de viande et de poisson, de fruits et légumes, et ils ont même été obligés de se priver de déjeuner ou de dîner.
Mettre son amour propre dans sa poche
Le nombre de personnes qui demandent des aliments, de chômeurs, de personnes endettées et/ou privées de l'accès au soutien, s'est multiplié. Le baromètre du surendettement appliqué par la Banque de France en 2009 indique le dépôt de 20.225 dossiers en février et 21.247 en mars, ce qui représente 16 % d’augmentation sur la même période de l’an 2008. 85 % d’entre eux sont des crédits renouvelables. Ces prêts sans échéance s'avèrent très coûteux et incontrôlables pour les prestataires.
Dans son domaine, l'association Médecins du Monde établit un diagnostic identique : « On voit réapparaître dans nos centres des travailleurs à revenus modestes, très souvent non déclarés, des bénéficiaires des aides sociales, des gens n’ayant pas les moyens de payer une assurance santé. La plupart n'ont pas pu accéder à ce type de services en raison des problèmes économiques ». Il s’agit de l'effet de bascule. « Pour que les gens inclus socialement mais ayant du mal à joindre les deux bouts viennent nous demander de l’aide, cela veut dire qu'ils ont dû mettre leur amour propre dans leur poche », témoigne la responsable d'une association de charité. « Il y en a beaucoup qui nous le disent ».
La réponse
Il existe une urgence face à la pérennité, voire l'élargissement du fossé social. Il est nécessaire d'agir le plus près possible des exclus en établissant des priorités politiques claires en leur faveur. Les initiatives gouvernementales s’inclinent-elles dans ce sens ? Afin d'aider 434.300 jeunes chômeurs de moins de 25 ans, les autorités ont lancé un « plan d'urgence » : environ 100.000 contrats alternatifs supplémentaires (d'apprentissage, de formation professionnelle) et des primes exceptionnelles ont été créées dans le secteur privé. Pour chaque contrat d'aide créé, les entreprises recevront 1.000 EUR (1.500 USD) et 2.000 EUR (3.000 USD). La principale mesure, le Revenu de Solidarité Active (RSA) est entrée en vigueur en juin 2009. Les travailleurs à revenus modestes (quelque 800.000) touchent un salaire complémentaire - et un niveau de revenus acceptable – lors de la reprise d’une activité professionnelle.
Mais bien que le RSA fonctionne pour ceux qui se trouvent plus près du marché du travail et pour ceux ayant une qualification minimale, les résultats ne sont pas les mêmes parmi les personnes les plus touchées après des années d'exclusion du système.
Crise et APD
Bien que la France insiste sur son engagement pour augmenter l'Aide Publique au Développement (APD) à l’occasion d’un quelconque sommet international – récemment à l'occasion du dernier G8 –, la crédibilité de ses promesses serait remise en cause. Après une forte chute en 2007, l'APD française a légèrement progressé en 2008. Suivant la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, la France ne respectera pas ses engagements européens en 20101 : avec une APD proche de 0,41 % du Revenu National Brut (RNB) en 2010, la France serait loin du 0,51 % pour lequel elle s'est engagé au sein de l'Union Européenne.
Pour que la France puisse tenir son engagement à destiner 0,7 % du RNB à l'APD en 2015, il faudrait une augmentation annuelle de 1.500 millions d’EUR (2.235 millions d’USD). Compte-tenu des restrictions financières auxquelles le pays fait face – aggravées par la crise globale – il est peu probable que cette aide puisse être matérialisée sans une forte volonté politique pour la soutenir. Étant donné que la politique de coopération française manque de stratégie globale, cette aide dépendra des priorités des gouvernements au pouvoir. De plus, une partie importante de l'aide française ne crée pas de ressources fraîches pour financer le développement.
Une augmentation trompeuse
À l'échelle mondiale, la France est l'un des pays qui contribue le plus avec l'APD. En 2008 avec 7.600 millions d’EUR (11.327 millions d’USD), elle a occupé le quatrième rang parmi les pays du Comité d'Aide au Développement (CAD) appartenant à l'OCDE2, conformément au montant net de l'APD, et le 13ème d'après le pourcentage du RNB consacré à l'aide (0,39 %). Malgré la forte chute de 2007 (-16 %), l'aide officielle française a augmenté de manière significative depuis 2002.
Cependant, une partie importante de cette augmentation s'explique par une inflation statistique des chiffres – et non pas par la création rare ou nulle de ressources fraîches pour financer le développement – notamment par la mise en oeuvre de plans multilatéraux d'annulation de dette. Malgré une chute supérieure à 50 % enregistrée en 2007, les réductions de dette représentent, en moyenne pour la période 2001-2007, 27 % de l'APD français.
Or la plupart de ces annulations n'ont été qu'un simple assainissement comptable de crédits impayables, raison pour laquelle elles ont eu un impact très limité dans les pays bénéficiaires. Ces pays très pauvres étaient entrés dans une spirale de surendettement et n'étaient pas à même de payer une grande partie de leur dette. Par ailleurs, une partie importante de la dette honorée a été générée par une activité politique de soutien aux exportations françaises par le biais de la garantie publique aux exportations gérée par la Compagnie Française pour le Commerce Extérieur (COFACE). Cette logique de promotion des exportations est nettement différente de celle de promotion du développement. Rien ne justifie sa comptabilisation en tant que partie de l'APD.
Pour évaluer l'APD « réelle » de la France, Coordination SUD se base sur les conseils de Daniel Cohen3. Compte tenu que la plupart des réductions de dette constitue une liquidité comptable de crédits impayables, il conseille en effet que seulement 10 % de ces annulations soient comptabilisées par l'APD, tandis que les 90 % restants devraient figurer comme les pertes découlant de la réduction de la dette.
En dehors de l'annulation de dette, depuis des années l'APD est marquée par la forte croissance de certains agrégats statistiques ex post, qui ne correspondent pas à de nouvelles ressources pour le développement – telles que « l’accueil des réfugiés » (275 millions d’EUR [410 millions d’USD] en 2007) ou les frais pour étudiants étrangers en France (879 millions d’EUR [1.310 millions d’USD]). Cela comprend aussi des dépenses (345 millions d’EUR [514 millions d’USD]) destinées aux territoires d'outre-mer : Mayotte – le premier bénéficiaire de l'aide française en dehors de l'annulation de dette – et Wallis-et-Futuna, ainsi que des crédits pour transmettre la culture et diffuser la langue française à l'étranger.
Lorsque les principaux montants de l'APD « artificielle » ont été éliminés des statistiques, le niveau de contribution de la France au financement du développement a été considérablement réduit. En 2007 alors que l'APD a atteint, selon le gouvernement, 7.200 millions d’EUR (10.738 millions d’USD) soit 0,38 % du RNB, l'APD « réelle » n’a atteint que 4.700 millions d’EUR (7.011 millions d’USD) soit 0,25 % du RNB.
Une APD au service des intérêts commerciaux et stratégiques français
Même au sein de l'APD considérée comme « réelle », un certain volume de frais correspond en fait à des objectifs non liés à la lutte contre la pauvreté et les inégalités. Notamment dans le cadre de sa politique de secours, la France octroie de plus en plus de prêts à des pays émergents, dans une logique diplomatique de transmission et de diffusion culturelle du pays4.
Dans le but de développer ses activités, dans un contexte où les ressources budgétaires sont limitées, l'Agence Française de Développement (AFD), opérateur de base de la politique nationale de coopération au développement, a orienté ses activités visant à encourager des prêts, surtout en faveur du secteur privé, à un moindre coût pour l'État. C'est ainsi que le volume de prêts comptabilisé par l'APD atteindrait 98 % entre 2008 et 2009 passant de 469 millions d’EUR (698 millions d’USD) à 927 millions d’EUR (1.381 millions d’USD).
Dans le but de réduire le coût de ces prêts, l'État, qui participe avec une allocation visant à baisser le taux d'intérêt de la ressource financière proposée par l'AFD aux pays en développement, cherche à maximiser l'effet de levier5. Il augmente ainsi les prêts avec des taux d'intérêt les plus proches possible de ceux du marché des pays émergents et aux revenus moyens, et destinés notamment au secteur privé.
Le CAD souligne que « l'objectif de la lutte contre la pauvreté poursuivi dans les pays les plus pauvres de la zone de solidarité prioritaire se trouve donc limité par les ressources sous forme de donations tandis que l'objectif de préservation des biens publics mondiaux poursuivi dans les pays émergents et de revenus moyens peut faire appel à des instruments de prêt, pour lesquels les autorisations d'engagements sont plus importantes »6. Cependant, tel que le rappelle le CAD, l'assignation géographique et sectorielle de l'aide doit être définie sur la base d'une vision stratégique et non pas sur la base de la pertinence des instruments. Le développement de prêts à des pays émergents et aux revenus moyens repose sur une logique de coopération économique. Dans ce sens, il n'y a aucune raison pour qu'ils soient comptabilisés par l'APD française.
D'autre part, l'instauration du Ministère de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité Nationale et du Développement Solidaire (MIIDS) consacre l'entrelacement croissant entre la coopération au développement des pays du sud et le contrôle des flux migratoires – une tendance qui, aussi bien à l'échelle française qu'européenne, commence à se faire sentir. Ceci se traduit notamment par la participation du MIIDS dans les différentes instances de décision sur la politique de coopération au développement et la négociation des accords de gestion « concertée » de flux migratoires, y compris un programme d'aide au développement peu transparent du MIIDS, sans aucune concertation avec le Ministère des Affaires Étrangères7.
Tandis que les pays les plus pauvres sont aussi les plus frappés par la crise alimentaire, climatique, financière et économique, une grande partie de l'aide française ne répond pas, à l'heure actuelle, à l'objectif primordial de lutte contre la pauvreté et les inégalités. En outre, bien que la France ait su trouver des sommes considérables pour affronter les conséquences nationales de la crise économique et financière, elle a déjà confirmé le non-respect de son engagement européen en 2010. S'il est vrai que les moyens budgétaires destinés à l'APD n'ont pas diminué en 2009, leur niveau ne permet pas à la France de faire face aux défis imposés par les différentes crises mondiales dans les pays pauvres.
1 Les pays membres de l'Union Européenne se sont engagés à destiner de façon collective 0,56 % du RNB européen à l'APD, ce qui se traduit par un objectif de 0,51 % pour la France et les 14 autres anciens membres de l'UE.
2 Le CAD englobe vingt-trois parmi les principaux donateurs de fonds bilatéraux « traditionnels », les donateurs émergents tels que la Chine et l'Inde n’étant pas membres du CAD. Les nouveaux états membres de l'Union Européenne ne le sont pas non plus. Pour ces pays la coopération au développement représente souvent une politique récente.
3 Cohen, Daniel. Centre de Développement de l'OCDE, Technical paper nº166, The HIPC initiative :true and false promises, octobre 2000.
4 Coordination SUD. Analyses, PLF 2009 et budget pluriannuel 2009-2011, 3 novembre 2008.
5 Le montant de prêt généré par un euro de subvention de l'État.
6 CAD/OCDE, op. cit. p.48.
7 Pour en savoir plus, voir le volet du rapport Social Watch Europe sur les migrations consacré à la France.
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L’inégalité : le principal défi
Coalition Social Watch du Ghana
La crise mondiale a déjà largement affecté l'économie du Ghana. Parmi les premiers affectés, la réduction des exportations et des transferts de fonds de l’étranger ainsi qu’une dévaluation soutenue. La crise menace de compromettre les efforts de réduction de la pauvreté qui commençaient à porter ses fruits. Les tentatives du gouvernement pour atténuer l’impact de la crise s'avèrent insuffisantes. Le principal défi consiste à améliorer la distribution des revenus, les zones rurales enregistrant le taux de pauvreté le plus important. Il devient urgent de prendre des mesures pour renforcer l'agriculture, un secteur qui rapportait presque 40 % du PIB.
Les vents rigoureux de la crise financière mondiale ont déjà commencé leur œuvre au Ghana. En 2008, le cedi, la monnaie nationale, a perdu 23 % de sa valeur face au dollar, et 19 % face à l’euro. Les flux de capitaux privés perdent de la vitesse et les projets importants d’investissement sont laissés en suspens en raison des problèmes de flux de liquidités et des doutes concernant leur véritable rentabilité. Les donations se font de plus en plus rares, tant pour le Gouvernement que pour les organisations de la société civile. Les secteurs vulnérables de la société, notamment les femmes et enfants en milieux ruraux et urbains dont la survie dépend d’organismes de charité, philanthropiques ou de programmes de sécurité d’ONG, sont en danger. Selon l’Enquête sur les Niveaux de Vie au Ghana, le pourcentage de la population qui vit en-dessous du seuil de pauvreté a largement diminué, tombant de 51,7 % en 1991/92 à 28,5 % en 2005/06, dont une chute de 17 % en zone urbaine et de 24 % dans les communautés rurales1. S’il est vrai que l’évolution a été plus lente dans les trois régions du nord du pays, cette tendance a tout de même suscité de grands espoirs de voir le Ghana atteindre en quelques années son premier objectif OMD de réduction de la pauvreté.
Cet optimisme a été voilé par l’ombre croissante de la crise mondiale. Les pronostics prévoyaient pour le Produit Intérieur Brut (PIB) une croissance de l’ordre de 7 % en 2008, mais le taux n’a atteint que 6,2 %. L’objectif moins élevé de 5,9 % reflète la conviction qu'une baisse de la croissance économique mondiale fera probablement également baisser le prix mondial du marché du cacao, une des principales exportations du pays.
Pour aggraver les dommages provoqués par la baisse anticipée en quantité et en prix des exportations du Ghana, les économistes prévoient pour 2009 une chute de 20 % des transferts de fonds provenant des Ghanéens qui travaillent à l’étranger2. Ce serait là un coup très dur, puisqu’ils se montent actuellement à 30 % des exportations. Lors d’un discours au Royal Institute of International Affairs de Londres en mars 2009, le président Atta Mills a admis que l’économie du Ghana se retrouvait face à d’importants défis, et a ajouté que « l’évolution négative de l’économie aura des répercussions extrêmement sérieuses sur notre économie ». Il a également annoncé que la réduction des transferts venant de l’étranger serait suivie d’un effondrement du soutien des donateurs et également du commerce.
La diminution des transferts de fonds augmenterait la pression sur le cedi, qui a enregistré une chute de sa valeur en raison de l’augmentation de la demande en monnaie étrangère pour faire face aux dettes du pétrole et aux prix des aliments, pour garantir les besoins en développement d'infrastructures et le paiement des dettes extérieures. Le cedi a perdu du terrain face à toutes les principales valeurs au cours du deuxième trimestre 2008, avec un taux annuel de 31 %. Au premier trimestre 2009, la dépréciation a atteint 10 %. Cela devrait accélérer l'inflation, qui est déjà bien supérieure aux projections en raison de la flambée des prix internationaux des denrées alimentaires et du pétrole brut. En 2008, au lieu d'augmenter entre 6 % et 8 % comme cela avait été prévu, les prix se sont envolés entre 16,5 % et 18,1 %. Les dépréciations de la monnaie ont contribué à la hausse du taux pour atteindre 20,53 % en mars 2009. La hausse du prix des importations de carburant pourrait faire du transport une cause principale de l'inflation pour avril 20093.
Pour répondre au ralentissement de la croissance et à l’inégalité de ses bénéfices, il est probable que le Gouvernement adopte une « stratégie de développement croissant et stable de la distribution » qui s'adresserait aux régions et aux groupes défavorisés. Rien ne permet d’assurer que ses objectifs soient atteints. Pour le moment, il est difficile de dire quelle sera la direction de la politique économique du Gouvernement.
Le budget 2009 a trois objectifs principaux : fournir un premier effort pour mettre en pratique les idées inscrites dans le manifeste du parti du gouvernement, le Congrès National Démocratique (NDC), répondre aux différentes crises mondiales – financière, de carburant et de denrées alimentaires – et aborder les défis socio-économiques actuels. La force motrice se situe au niveau des quatre sujets fondamentaux abordés dans le manifeste du NDC : un gouvernement transparent, une économie forte créatrice d’emplois, un investissement dans la population et une expansion de l’infrastructure pour la croissance. Mais les quelques initiatives du Gouvernement pour ébaucher des politiques qui atténuent les effets de la crise mondiale semblent inadéquates. Il convient également de signaler que les mesures gouvernementales pour stimuler et subventionner la production agricole sont minimes. Selon le FMI, le secteur agricole contribue à hauteur de 40 % du PIB, et emploie plus de la moitié de la population économiquement active, mais c'est aussi le secteur qui subit le plus les effets de la pauvreté. Près de 70 % de la population rurale participe aux activités agricoles4. Malgré cela, le pays importe plus de 40 % de ses aliments, mais il est possible de renverser cette tendance. Le Ghana a en effet la capacité de mener une « révolution verte » en Afrique. Seules 16 % des terres arables du pays sont actuellement labourées5. Pour impulser l’agriculture et contribuer à la création d’emplois, à la croissance économique et au bien-être général de la population, les agriculteurs ont besoin d’un soutien pour investir en produits agricoles, en fertilisants, en formation et accès aux marchés. Pourtant, en cette époque critique, le budget 2009 ne destine que 10 % de ses fonds à l’agriculture.
Le principal défi
Une réduction radicale de la pauvreté exigera, outre une hausse de la croissance, une distribution plus équitable. En ce moment le pays souffre d’inégalités croissantes, de grandes disparités régionales et d’une profonde pauvreté. Dans la savane rurale par exemple, 60 % de la population continue d’être pauvre, et la pauvreté y diminue à un rythme moindre que dans n’importe quel autre endroit du pays. Dans les régions du Haut Ghana oriental et Haut Ghana occidental, le taux de pauvreté n’a pas du tout diminué entre 1991/92 et 2005/06, et dans les régions du Grand Accra et du Haut Ghana occidental, il a même augmenté.
L’Analyse Intégrale de Sécurité et Vulnérabilité Alimentaire pour le Ghana du Programme Alimentaire Mondial a révélé qu’environ 1,2 million de personnes, soit 5 % de la population, souffre d’insécurité alimentaire. Pourtant, la moyenne nationale ne montre pas les différences entre les régions, où 34 % de la population de la région du Haut Ghana occidental, 15 % dans le Haut Ghana oriental et 10 % dans la région Nord souffrent d'insécurité alimentaire, soit un total de 435.000 personnes. De plus, l'étude a identifié environ 2 millions de Ghanéens dont les patrons de consommation alimentaire étaient à peine acceptables au moment de l’étude, et qui pourraient se détériorer rapidement après un impact naturel ou d’origine humaine. Parmi eux, 1,5 million vit en zone rurale dans les régions du Haut Ghana occidental, Haut Ghana oriental et Nord.
A moyen terme, la crise mondiale aura un impact sérieux sur l’économie du Ghana. La question fondamentale pour les citoyens est de décider si le pays doit se reposer sur l'aide de la communauté internationale pour lutter contre la chute de l’économie, ou s’il doit introduire des mesures fiscales et monétaires fortes. Les agricultrices ghanéennes ont besoin d’un soutien urgent sous forme d'investissements en produits agricoles comme les fertilisants, et également en formations et accès aux marchés. L'agriculture serait ainsi relancée et cela contribuerait dans le même temps à la création d’emplois, à la croissance économique et au bien-être de la population.
1 Daily Graphic, 23 avril 2009.
2 Programme Alimentaire Mondial des Nations-Unies (PAM). (2009). Assessing the Impacts of the Global Economic and Financial Crisis on Vulnerable Households in Ghana. Disponible sur
3 Business & Financial Times, 14 avril 2009.
4 L’agriculture continue de dominer l’économie avec 33,59 % d’incidence sur le PIB de 2008. La croissance du secteur a été de 5,1 %, impulsée par les sous-secteurs culture et bétail, qui ont augmenté de 5,82 %.
5 Données de l’Initiative Economie Verte. “Ghana goes biofuel, despite global food crisis”. Disponible sur : <www.greeneconomyinitiative.com/news/176/ARTICLE/1205/2008-12-06.html>.
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Un pays riche, un peuple pauvre
Coordinación de ONG y Cooperativas de Guatemala
CONGCOOP
Zully Morales
Helmer Velásquez
la récurrente crise alimentaire que subit le pays, dont 121 des 133 communes qui le composent sombrent dans la famine, rend indispensable une intervention structurelle dans les campagnes. En finir avec le déplacement des communautés paysannes, en leur permettant d´être propriétaires de leurs terres, rendra possible une répartition des possessions plus équitable et un retour à une autosuffisance alimentaire. Pour cela, il est urgent de renverser l´actuel modèle féodal de la production agricole et l´application de la Réforme Agraire Intégrale promise est impérative.
Au Guatémala, moins de 2 % des producteurs possède presque 57 % des terres cultivables. Les 18.937 Km2 compatibles avec la culture du maïs, 7.235 Km2 – dans des propriétés privées de grande extension – se trouvent sous-utilisés, couverts d´arbustes, de broussailles, d’herbages plantés ou non plantés ou de mauvaises herbes. Cet état de fait, avec les politiques d´ajustement structurel et l´ouverture commerciale des années 80, a fait passer le Guatémala de la situation d´un pays autosuffisant dans le domaine alimentaire à celle d´un pays importateur de 70 % de ses aliments.
Inégalité structurelle dans l´agriculture :
La crise alimentaire mondiale s´est révélée plus intense au Guatémala au cours du dernier semestre 2007, engendrant une profonde réflexion sur les rares progrès dans la lutte contre la faim et la pauvreté. Les actions conçues par l´État dans le but d’accomplir l´ODM1 (éradiquer l'extrême pauvreté et la faim) consolidaient depuis quelque temps une tendance légèrement positive. Cependant il s´avère que la crise alimentaire actuelle menace sérieusement la réalisation de cet objectif.
Le Programme Mondial d´Aliments pour le Guatémala estime que la pauvreté et l’extrême pauvreté concernent plus de la moitié de la population. A peu près 6 sur 13 millions d´habitants sont tombés sous le seuil de pauvreté (56,4 % d´entre eux au stade de la pauvreté, 19,7 % à celui d’extrême pauvreté). L´indice est monté entre 2008 et 2009 de 5,4 et 4,5 points respectivement et le Programme des Nations Unies pour le Développement a estimé cette hausse à 700.000 nouveaux pauvres entre 2007 et 2008. 1.300.000 foyers pauvres se trouvent dans les campagnes, 51 % d´entre eux manquent de terre ou possède moins d´un hectare de terre.
Le salaire minimal pour le travailleur de la campagne ou de la ville équivaut à 6,50 USD par jour. Cependant ce salaire n´est pas respecté à la campagne, d´après une estimation de la Coordination Nationale des Organisations Paysannes, et le paysan reçoit en réalité entre 3 USD et 5 USD par jour pour une journée de travail de 8 à 10h, selon le lieu et le type de culture. La pauvreté affecte surtout la population indigène et paysanne. La pauvreté générale (vivre avec moins de 2 USD par jour) est deux fois plus importante pour la population indigène que pour les non indigènes, une tendance qui s’affermit, selon l´Enquête Nationale sur les Conditions de Vie (ENCOVI) 20061. Quant à l’ extrême pauvreté (vivre avec moins d’1 USD par jour), la situation est beaucoup plus grave puisqu´elle est trois fois plus forte pour les indigènes que pour les non indigènes. Pendant le premier semestre 2008 les prix des produits qui composent le Panier de Base Alimentaire ont subi une forte croissance qui a obligé les personnes aux revenus les plus faibles à restreindre leurs niveaux de consommation. Cette situation a atteint et affecté la classe moyenne.
Désarticulation de l´appareil productif
Jusqu´aux années 70 l´appareil public agricole, qui offrait au paysan et au petit producteur les services d´extension, de crédit, de dotation de terre, de recherche et de transfert technologique, encourageait des programmes et des projets de développement de la culture des graines basiques, la protection des forêts et l´élevage. Cet appareil, associé à la non importation d´aliments, maintenait le pays comme agent producteur de ses propres aliments. L´ajustement structurel a entraîné la clôture finale des services d´extension en ce début de 21ème siècle, en démantelant l´appareil public agricole, avec un nombre de travailleurs qui est passé de 18.000 à 1.200.
Une action parallèle a été de confier la gestion des silos nationaux (stockage de graines basiques) en concession à « l´initiative privée », laissant ainsi le pays sans réserves alimentaires en cas de catastrophes ou de périodes de pénurie. En outre, comme l´État a cessé d´intervenir dans le commerce des grains et que les frontières se sont ouvertes aux grains produits dans le nord du continent à prix subventionnés, l´appareil productif national a succombé. L´une des conséquences les plus graves est que 49 % des enfants souffrent de malnutrition chronique et que 24 % de la population en général est sous-alimentée, ce qui provoque un retard dans pratiquement tous les indicateurs liés au développement physiologique de l´individu.
L´importance du maïs
Sur le Haut Plateau guatémaltèque (une région où 90 % de la population est indigène comprenant les zones les plus pauvres du pays), 100 % de la population consomme du maïs dans son régime alimentaire quotidien2, avec une moyenne de 310 grammes par personne, 110 kilos annuels pour une consommation nationale de presque 3 millions de tonnes, ce qui entraîne un déficit d’à peu près 1,5 million de tonnes de maïs auquel nous suppléons en achetant sur le marché international, notamment aux États-Unis, pour une somme de plus de 73 millions d’USD en 2002.
Entre janvier 2006 et janvier 2009 la dépendance internationale des grains a généré une hausse des prix de 62 % pour le maïs jaune, 70 % pour le riz et 39 % pour la farine de blé. Cependant, malgré une baisse des prix au niveau international en 2007 et 2008, les prix restent aujourd’hui les mêmes au Guatémala et s´ajustent au prix international à sa valeur la plus haute, à l´exception du prix du riz qui est revenu aux valeurs de l’année 2006.
De nouvelles menaces pour la population rurale
L´industrie minière est en hausse depuis la Réforme de la Loi des Industries Minières de 1996, réalisée sur la requête de la Banque Nationale. Ainsi, 17 départements du pays sont l´objet d´exploration et/ou d´exploitation minière. L´industrie touristique menace la propriété paysanne et indigène dans le Nord et le Sud du pays. L´urbanisation et la construction de pôles commerciaux déplacent le territoire rural, en expulsant ses habitants et en affaiblissant la capacité de production, particulièrement celle des ressources alimentaires. L´industrie de l´élevage extensif abîme la terre productive et dévaste les forêts d´énormes extensions, en expulsant des paysans et indigènes, que ce soit au moyen d´arguments « légaux » ou par la pression des armes. Les expulsions ont même lieu dans les zones déclarées protégées (pour la protection et le maintien de la diversité biologique et des ressources naturelles), de connivence avec la bureaucratie du secteur.
Sont maintenant encouragés l´instauration et l´élargissement de méga-monocultures agricoles orientées vers l´exportation, telles que la canne à sucre, le palmier africain et le pignon, qui expulsent de manière implicite la population paysanne des campagnes. Les plantations de canne à sucre occupaient 6 % de la superficie totale en 1995 et 11 % en 2007. La zone réservée à la culture de la canne a augmenté en moyenne de 3,6 % entre 1990 et 2005, alors que pendant la seule période entre 2005 et 2007 la croissance a été de 17,7 %. Le Syndicat des Huiles a estimé pour 2012 à 150.000 le nombre d´hectares semés de canne, soit un investissement de 32,5 millions d’USD pour l´achat de terres qui expulsent de manière implicite la population paysanne des campagnes, un nombre qui peut désormais être facilement dépassé.
Ces nouvelles extensions destinées à l´exportation détruisent de vastes zones de culture alimentaire et expulsent au quotidien des centaines de familles de paysans puisque, par ailleurs, elles ne demandent pas d´emploi massif. Rompre les schémas culturels de la population expulsée génère non seulement la pauvreté économique, sociale, culturelle et spirituelle, mais aussi du désespoir et de la violence.
Le trafic de drogues est une nouvelle menace, parfois associée à l´élevage extensif qui repose sur la protection des forces de l´État pour expulser des paysans et opérer sur leurs terres. Les familles de paysans sont sans défense face aux pressions pour acheter la terre provenant du trafic de drogue et du latifundio mono-cultivateur.
Réponses de l´État
Parmi les politiques et les actions que propose le Gouvernement dans le cadre de son Programme d´Urgence et de Récupération Economique on distingue une politique fiscale contre-cyclique, une politique de protection sociale et d´autres politiques sectorielles prioritaires (développement rural, programmes d´agriculture compétitive amplifiée, développement agricole et assistance alimentaire, durabilité des Ressources Naturelles et renforcement de la location des terres).
La priorité reste de maintenir la stabilité macroéconomique à n´importe quel prix. Ceci comporte des réserves internationales élevées, de faibles salaires, attirer des industries par la suppression d´impôts, entre autres mesures. Le paradigme fondamental pour l´État et les secteurs oligarchiques est d´élargir la zone des traités de libre échange. Deux d´entre eux sont considérés comme les plus importants : le Traité de Libre Echange avec l´Amérique du Nord, en vigueur depuis déjà trois ans et l´Accord d´Association avec l´Union Européenne (en négociation). Aucun de ces deux schémas ne propose de lignes de bénéfices pour le petit producteur.
D´autre part le Gouvernement a instauré des programmes de transferts monétaires et de bourses solidaires qui génèrent un changement qualitatif dans la formation du capital humain – ce qui aurait un impact plus important si, en outre, des politiques de développement rural et fiscal étaient mises en place et si l´institutionnalisme de l´État se consolidait. Ces mesures, ainsi que le développement de modèles internationaux adaptés à la réalité nationale sont en vogue dans divers pays de la région.
L´un des mécanismes gouvernementaux pour atténuer les effets de la crise a été l´élargissement de contingents d’importation bénéficiant d’un tarif douanier zéro pour des produits comme le maïs jaune, la farine de blé et le riz courant. Cependant l’un des groupes importateurs, le Groupe Buena, a obtenu à lui seul 82 % des quotas d´importation, du fait de la structure oligopolistique de l’importation d’aliments dans le pays. Cette situation, qui n´a pas entraîné de baisse des prix, s´est réduite dans la pratique à un subside pour cette entreprise qui ne partage pas avec le consommateur les bénéfices des tarifs douaniers non payés.
D´autre part, le déficit fiscal est couvert prioritairement par la dette extérieure et intérieure. Les possibilités de réforme fiscale n´existent pas. 20 % des impôts sont directs et 80 % indirects. La promesse du Gouvernement de commencer un processus de réforme fiscale qui renverserait ce modèle n´est pas tenue. Dans le cadre de cette crise, la réforme projetée s´est réduite aux réformes qui favorisent le cycle macroéconomique et les programmes d´assistance pour la population en situation d’extrême pauvreté.
Quant à la production agricole, il y a des programmes d´assistance pour la location de terres. Ce n´est pas le cas pour l´accès à la propriété et pour le crédit accordé aux paysans. Le nouveau Gouvernement a eu davantage recours aux expulsions forcées de paysans (50 expulsions au 31 mars 2009) ce qui a généré instabilité et mécontentement au sein des organisations indigènes et paysannes qui espéraient l´approbation et la mise en place de la Politique Agraire de Développement Rural promise. Le leadership communautaire est actuellement coopté par le Gouvernement et les transnationales d’extraction, qui génèrent leur propre mouvement social parallèle de style clientéliste, en finançant des représentants des bases sociales très discutés. Ceci a entraîné une substitution du leadership traditionnel par le leadership financé et des affrontements entre les organisations paysannes de base. A cela s’ajoute la criminalisation et la persécution des dirigeants paysans qui luttent pour accéder à la terre afin de produire leurs propres aliments.
Alternatives sociales
En accord avec la Constitution Politique de la République du Guatémala, « la propriété privée est un droit inhérent à la personne humaine », c´est à dire que tous les guatémaltèques ont le droit d´accéder à la propriété. A cet effet, « la propriété pourra être expropriée dans des cas concrets pour des raisons d’utilité collective, de bénéfice social ou d´intérêt public dûment démontrées ». La malnutrition, la pauvreté et l’extrême pauvreté, le chômage et à présent l´approfondissement de la crise alimentaire récurrente trouvent leur origine dans l´impossibilité pour la population de se procurer des moyens de subsistance, par manque d´actifs, en particulier de terre. Voici un cas évident d’utilité et de nécessité publique démontré ; en d´autres termes, il s´agit d´une proposition qui s´inscrit dans l’ordonnance juridique nationale.
L´agriculture est une issue de secours pour le développement et il faut abandonner le modèle féodal de production. La distribution équitable de la terre est une stratégie adéquate pour le développement de l’emploi rural et pour accroître la productivité dans les campagnes, ce qui entraînerait la croissance de l´économie, de la capacité de prévision et de provision alimentaires. La réforme agraire ne peut plus attendre. Il s´agit d´un instrument de paix sociale et de possibilité de gouvernement qui mettra fin aux conflits provoqués par l´usurpation de la terre indigène et paysanne et qui évitera la déprédation des forêts, faisant émerger en même temps de vastes secteurs ayant une capacité de production et d´investissement. À partir de cette réforme, les générations futures pourront disposer de meilleures et plus nombreuses opportunités d’auto-développement et augmentera leur pouvoir d´achat, ce qui dynamisera la chaîne de production3.
1 L’ENCOVI 2006 définit l’extrême pauvreté de ceux qui n’accèdent pas aux aliments à leur valeur minimale.
2 Selon le Popol Wuj – livre sacré des Mayas – “ D’épis jaunes et d’épis blancs son corps a été fait, les bras et les jambes de l’homme sont faits de pâte de maïs, rien que de la pâte de maïs a été utilisée pour faire la chair de nos parents ”.
3 Avec des données et des analyses de la Coordination d’ONG et Coopératives, par l’intermédiaire de ses deux instituts d’analyse : l’Institut d’Etudes pour la Démocratie en formation et l’Institut d’Etudes Agraires et de Développement Rural. Guatemala, 2009
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APRÈS LA CRISE, LA DICTATURE
Centre d’Études sur la Femme - Honduras (CEM-H)
Suyapa Martínez
Ana Ferrera
Mauricio Aguilar
Le Honduras est l’un des pays les plus pauvres d’Amérique latine. La crise financière internationale augurait déjà que la vie des Honduriens allait être encore plus difficile, mais le coup d’État, soutenu par les milieux les plus réactionnaires de la société – en particulier les défenseurs de la culture patriarcale – a intensifié les problèmes. Les organisations sociales, en particulier les mouvements féministes, organisent la résistance contre le régime de facto.
Le présent travail est composé de deux sections. La première, concernant les impacts de la crise mondiale sur l’économie et la société honduriennes, a été rédigée avant le coup d’État du 28 juin 2009. La seconde présente la réponse des différents mouvements sociaux, et en particulier les mouvements féministes, face au coup d’État.
Le Honduras est le troisième pays le plus pauvre d’Amérique latineaprès Haïti et le Nicaragua. Si la pauvreté a reculé de 63,7 % en 2005 à 59,2 % en 2008, et la pauvreté extrême de 46 % à 36,2 % pendant la même période1, cette diminution ne représente pas un grand progrès. En valeur absolue, 73 831 foyers ne sont plus classés comme des foyers en situation d’extrême pauvreté, mais l’on note qu’il existe 121 390 nouveaux foyers en situation de pauvreté relative2. On peut donc parler à la rigueur d’un passage de certains foyers d’un état d’extrême pauvreté à une pauvreté relative.
Selon les données fournies par les Stratégies de Réduction de la Pauvreté (SRP) développées pour répondre aux Objectifs du Millénaire, en 2015, la pauvreté relative devrait se situer autour de 42 % et l’extrême pauvreté autour de 19 %3. Il est clair que le but ne sera pas atteint car, aux situations présentes dans le pays, s’ajoutent celles qui dérivent de la crise mondiale actuelle. Entre fin 2008 et début 2009, plus de 10 745 licenciements ont été enregistrés par le Secrétariat au Travail. On estime, en outre, que l’inflation a dépassé le chiffre de 11 % en 2008.
Les envois de fonds en provenance des États-Unis ou d’Espagne ont commencé à se restreindre diminuant leur contribution au Produit Intérieur Brut, passant de 21 % en 2007 à 20 % en 2008, et selon les projections il devrait arriver à 18 % en 20094.
Le plan Zelaya
Le gouvernement de Manuel Zelaya Rosales a poursuivi ses politiques d’assistanat d’inspiration populiste – selon la Banque Mondiale, des programmes avec une couverture sociale limitée, la plupart sans système de contrôle et d’évaluation – tout en maintenant la confrontation entre les trois pouvoirs de l’État. C’est le cas des actions entamées par le pouvoir exécutif pour économiser du carburant, qui ont été récusées car anticonstitutionnelles, recours qui a été accepté par la Cour Suprême de Justice. Ceci a créé une polarisation entre le pouvoir exécutif et les pouvoirs législatif et judiciaire que l’on remarque également dans la signature de l’Alliance Bolivarienne pour les Amériques (ALBA) promue par le Vénézuela sans le soutien du Congrès. Il en est résulté une intensification des principaux problèmes du pays, comme la crise énergétique et l’insécurité urbaine.
Depuis l’approbation des SRP en 1999, après l’ouragan Mitch, chaque gouvernement a procédé à ses propres reformulations du document. Le président Zelaya, lui, a affaibli le cadre institutionnel de l’initiative, donnant une tournure favorable au Réseau Solidaire qui au début s’est appelé “Manuel Zelaya Rosales”. Il a en plus créé sans aucune concertation, un Ministère du Développement Social et du Réseau Solidaire, ce qui a automatiquement relégué le Conseil Consultatif des SRP, où sont représentées les organisations de la société civile et du gouvernement, à un niveau inférieur.
Certains espoirs, mais plus de reculs
Malgré la forte opposition des entreprises privées, le gouvernement a augmenté le salaire minimum à 5 500 lempiras, la monnaie nationale (297 USD), sans compter les maquilas et le personnel domestique, pour lesquels il n’est pas appliqué. Par ailleurs, en août 2008 l’ALBA a été signée, suscitant de grands espoirs chez les Honduriens, surtout dans les milieux les plus vulnérables. La convention inclut l’assistance médicale et éducative, la donation de matériel et d’équipements et l’initiative «Petrocaribe» qui permettra l’achat de pétrole avec un financement à long terme avec un intérêt très faible5 . L’économie générée par cette transaction inaugure un fonds en fidéicommis qui sera utilisé pour financer des projets de développement social.
Ni coup d’État, ni coups aux Femmes” Le 28 juin 2009, l’armée hondurienne a perpétré un coup d’État contre le président élu constitutionnellement, Manuel Zelaya Rosales, l’envoyant en exil et nommant comme successeur ou “président provisoire” Roberto Micheletti, jusque-là président du Congrès National du Honduras. Ce coup d’État a reçu, entre autres, l’appui des partis politiques traditionnels, du secteur des entreprises, de la Cour Suprême de Justice, de l’Eglise Catholique et de la plupart des médias. Le coup d’État a également porté un coup aux organisations sociales honduriennes. La répression exercée par le gouvernement de facto a provoqué des morts, des centaines de blessés et la violation des droits fondamentaux de la population. Traditionnellement, les femmes Honduriennes souffrent de grands désavantages. Bien qu’elles possèdent un niveau d’éducation plus élevé que les hommes et qu’elles représentent 52,6 % du total de la population en âge de travailler, seulement 34,3 % d’entre elles font partie de la Population Economiquement Active (PEA). La pauvreté des foyers dont le chef de famille est une femme (64,1 %) est proportionnellement plus importante que celle des foyers dont le chef de famille est un homme (58,8 %)11, brèche plus profonde encore dans les cas d’extrême pauvreté, où 38,8 % sont des femmes et 34,9 % des hommes. Entre fin 2008 et début 2009, des décrets ont été présentés devant le Congrès de la Nation allant à l’encontre du droit des femmes de disposer de leur propre corps ; tel était le cas du décret numéro 54-2009 qui pénalise la vente, l’utilisation et la promotion des pilules du lendemain. En janvier 2009, on a présenté une réforme du code pénal pour que le droit à la vie soit reconnu dès la fécondation, mais elle était encore en discussion lorsque les forces réactionnaires ont pris le pouvoir. La crise internationale avait déjà créé un cadre propice à l’augmentation de la délinquance, de la violence sexuelle contre les femmes et les filles – on rapporte plus de 540 cas par an12 – et les féminicides – plus de 1.000 pendant les six dernières années13. A ceci s’ajoutait l’avancée des fondamentalismes religieux qui, en accédant au Pouvoir Législatif, y ont fait entrer des députées liées à l’Opus Dei et aux sphères les plus conservatrices de l’Eglise catholique : elles ont fait reculer les droits des femmes et ont encouragé le coup d’État. La répression exercée par le gouvernement a provoqué des morts, des centaines de blessés ainsi que la violation des droits fondamentaux de la population. On a limité, entre autres, le droit à la libre circulation et la liberté d’expression, notamment de la population constituant la résistance populaire. Dans ce contexte de violence et de perte quasi totale de l’institutionnalité, la violence contre les femmes s’est accrue, catalysée par la culture patriarcale qui considère le corps féminin comme sa propriété. Des femmes appartenant à la résistance populaire et d’autres femmes qui, sans y participer, se sont trouvées dans des contextes de résistance, ont vécu dans leur propre chair la répression de la police et de l’armée. Depuis le moment où l’on a su que le coup d’État s’était produit, les membres des mouvements de femmes et des mouvements féministes se sont mobilisés contre cette action, en se joignant aux milieux populaires de tout le pays. C’est dans ce cadre qu’est né Féministes en Résistance, entité qui englobe, entre autres, des organisations de femmes et de féministes organisées et indépendantes. Les Féministes en Résistance travaillent pour la défense et la visibilité des droits et des causes des femmes. Avec des messages tel que « Ni coup d’État, ni coups aux femmes », elles ont réussi à relier entre eux deux grands problèmes du pays apportant ainsi une vision plus complète de la problématique vécue en ce moment. Les Féministes en Résistance du Honduras ont réalisé et planifié différentes actions aux côtés des femmes mobilisées du Costa Rica, du Guatémala et d’autres organisations d’Amérique centrale et d’autres pays. Cette initiative compte sur la participation des diverses organisations qui composent la coalition nationale de Social Watch au Honduras, y compris le Centre d’Etudes sur la Femme et le Centre d’Etudes et d’Action pour le Développement du Honduras. |
Dans la présente administration, le budget du Secrétariat à la Sécurité est passé de 140,6 millions d’USD à 156,6 millions d’USD. Le narcotrafic a augmenté toutefois, tout comme la corruption. Ainsi, au mois de mars 2008, les organisations sociales de défense des droits de l’homme, les mouvements des femmes et des féministes, les églises et le mouvement populaire se sont joints à la grève de la faim initiée par un groupe de procureurs qui dénonçaient la corruption au sein du Ministère Public. Ceci a entraîné une série de plaintes contre d’autres institutions de l’État. Parmi les cas les plus significatifs on peut citer les nominations du procureur général de l’État, des magistrats de la Cour Suprême de Justice, du commissaire national aux droits de l’homme et des magistrats du Tribunal Suprême Electoral.
Par ailleurs, le retard dans la présentation du budget général de 2007, envoyé au Congrès National en avril 2008, et de celui de 2008 – qui n’avait toujours pas été présenté en avril 2009 – permet des manipulations de fonds publics et retarde la mise en place de projets pour combattre la crise.
L’impact de la crise et les mesures palliatives
La récession qui résulte de la crise globale accentue encore plus les problèmes qui existaient déjà. L’impact le plus fort se voit sur :
La crise énergétique
La hausse – de plus de 100 % – des prix internationaux du brut et des produits dérivés du pétrole en 2008 a fait augmenter les prix du transport de marchandises et de la production de biens et d’aliments. Ceci a provoqué à la fois une claire augmentation du panier de la ménagère et une baisse du pouvoir d’achat de la population hondurienne. Les coûts de production de l’énergie électrique ont également augmenté – aujourd’hui, plus de 70 % de l’énergie consommée dans le pays est générée par des centrales qui utilisent du fuel. Les tarifs de l’énergie électrique ont augmenté de 30 %, touchant notamment les plus pauvres, la classe moyenne, les petits commerçants et les petits producteurs. Le Gouvernement a essayé d’endiguer ces effets en allouant quelque 6 millions d’USD en subventions qui ont uniquement bénéficié 3,3 % du cinquième le plus pauvre de la population6 – soit environ 100 000 familles7. En dépit de la chute postérieure des prix du brut sur le marché mondial, les tarifs de l’énergie électrique au Honduras sont restés très élevés comme au pire moment de la crise énergétique.
Début 2009, le président du Congrès National a présenté un projet de décret qui visait à baisser considérablement les tarifs de l’énergie électrique. Cette mesure, qui ne prévoyait aucun contrôle, pourrait accentuer encore plus la crise de l’Entreprise Nationale d’Energie Electrique et bénéficierait substantiellement les centrales privées. En réponse à cela, les organisations sociales et populaires ont organisé un ensemble de manifestations publiques pour exiger du gouvernement de nationaliser toutes les centrales électriques.
La crise financière
L’économie hondurienne est très dépendante du marché américain. Plus de 85 % de la production est exportée vers les États-Unis. L’un des secteurs qui a été touché directement est celui des zones franches (ou maquilas). En conséquence, l’Association Nationale des Maquiladores a annoncé, en novembre 2008, une perte de 25 000 postes – dont 85 % concernant des femmes – en raison de la fermeture d’usines.
Dans le contexte du plan anti-crise, le gouvernement a annoncé la création à court terme d’un nombre important d’emplois dans tout le pays ; l’une des principales ressources sera le programme Caminos por Mano de Obra (Les Chemins de la Main d’Oeuvre), pour l’exécution de projets de chemins vicinaux8. La réalisation de ces projets semble très compromise étant donné que 2009 est la dernière année de Zelaya au pouvoir et que chaque nouveau gouvernement néglige ce qui a été planifié par le gouvernement précédent9.
Dans le secteur bancaire, les secteurs productifs de biens d’exportation ne sollicitent pas de financements auprès de la banque commerciale. Cela a figé les flux d’argent et a produit un manque de liquidité dans le système. Un autre problème est l’accaparement de capitaux par les partenaires des banques, qui ne veulent pas risquer leur capital et préfèrent que ce soit le gouvernement qui fasse les investissements. Cette pratique est apparue clairement quand les grands investisseurs de capitaux bancaires ont décidé de faire sortir du pays, sur une période d’un mois environ, quelque 200 millions d’USD10. La situation a été fermement dénoncée auprès de la Commission Nationale de la Banque et des Assurances, dont le président a été licencié. Pour générer des liquidités, le gouvernement a réduit la réserve bancaire et a accru le financement des secteurs productifs à un taux non supérieur à 10 %.
La crise alimentaire
Au Honduras, la montée du prix du blé a provoqué une augmentation directe de 40 % du prix de la farine, entraînant à son tour une augmentation du prix du pain. Les produits de consommation courante comme le riz et la farine de maïs, ont subi une augmentation de 110 % pendant le dernier semestre 2008. La rareté des aliments n’est pas uniquement due au manque de production des agriculteurs, elle est aussi liée à la crise énergétique mondiale. A la suite de la crise, le maïs cultivé pour la consommation humaine a suivi la voie de l’exportation avec la fabrication d’éthanol. L’inévitable hausse du prix de ce produit a entraîné à la hausse tous les produits dérivés de la farine de maïs. Par ailleurs, on a observé une crise de la production des graines de base comme conséquence directe de la montée des prix des intrants agricoles, qui ont augmenté de 80 %.
Pour diminuer l’impact de la crise, le gouvernement a mis en place quelques mesures d’assistance sociale telles que la Prime de Maternité et de l’Enfance distribué à 61,4 % du cinquième le plus pauvre de la population, la Prime d’Education à 41,6 % du cinquième le plus pauvre, le Cartable scolaire et le Goûter scolaire à 29,8 % du cinquième le plus pauvre.
1 Base de données de l’Institut National de Statistiques.
2 Díaz Burdett, M. Honduras: ¿Cómo afrontar la crisis financiera internacional?
3 Banque Mondiale (2007). Rapport sur les dépenses publiques.
4 Plan du gouvernement du Honduras pour faire face aux effets des la crise économique et financière internationale. Mars 2009.
5 Rapport de la Commission pour la gestion du pétrole du mois de novembre 2008.
6Banque Mondiale (2007).
7 Forum de crise énergétique et de développement au Honduras, UNAH, septembre 2008.
8 Plan du Gouvernement du Honduras pour faire face aux effets de la Crise économique et financière internationale.
9 Entretien avec le Député du Congrès National Marvin Ponce.
10 Entretien avec l’économiste Martín Barahona.
11 INE (2007). Encuesta Permanente de Hogares de Propósitos Múltiples.
12 Direction Générale de Médecine légale.
13 Base de données du Centre d’Études sur la Femme et rapport de l’Observatoire de la Violence UNAH, janvier 2009.
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HONGRIE
Une révision de la structure de gouvernement
ATTAC HONGRIE
Matyas Benyik
La crise mondiale a entraîné la Hongrie dans la pire récession économique qu’elle ait connu depuis deux décennies. Celle-ci a été en partie responsable de la démission du Premier ministre Ferenc Gyucsany cette année. L’économie dépendant des exportations a souffert du ralentissement de ses principaux partenaires commerciaux. Le système social est paralysé par la corruption, la monnaie nationale s’est effondrée et les finances publiques supportent la lourde charge des retraites. Le nouveau Premier ministre projette de réduire les retraites, les bonus du secteur public et les allocations maternité, d’hypothéquer l’énergie et les subventions pour le transport, et d’élever l’âge de la retraite.
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Jusqu’à il y a quelques années, la Hongrie avait l’un des plus importants déficits budgétaires de l’Union Européenne, supérieur à 9 % du PIB. Or les mesures d’austérité prises en 2006 l’ont réduit à l’un des plus bas de l’UE (inférieur à 3 % du PIB). Toutefois, des années de mauvaise gestion ont laissé l’économie au bord de la faillite, et à partir de septembre 2008, la situation s'est progressivement aggravée. Les effets de la crise financière mondiale sur l’économie réelle se sont particulièrement aggravés pendant le dernier trimestre de cette année, lorsque l’effondrement de la demande intérieure et extérieure a entraîné dans sa chute la production, la consommation, l’investissement et l’emploi. En même temps, les attaques spéculatives contre le florin, la monnaie hongroise, l’ont fait baisser de 19 % par rapport au dollar américain et de 13 % par rapport à l’euro, ce qui a fait monter l’inflation en flèche. Pour éviter l’effondrement total, le gouvernement a obtenu un secours financier de 25,1 milliards d’USD de l’UE et du Fonds Monétaire International (FMI)1.
Performance économique
Suite à la faible croissance de 1,1 % en 2007, l’économie hongroise a été relancée au cours du premier semestre 2008, et puis elle s'est vue entraînée par la chute de ses principaux partenaires économiques. La croissance du PIB a atteint environ 2 % pendant la première moitié de 2008 et 0,8 % au troisième trimestre. Au quatrième trimestre, elle a baissé de 2,3 %. C’est la pire performance depuis les années 1990, quand la transition vers l’économie de marché a généré un considérable remous économique.
En février 2009, la production industrielle brute a baissé de 28,9 % par rapport à l’année précédente (25,4 % si l’on tient compte des jours effectivement ouvrés). Dans les deux premiers mois de 2009, le volume de production a été inférieur de 26,1 % par rapport à la même période en 2008. En février le volume de production industrielle a chuté de 4,1 % par rapport au mois précédent, si l'on ne prend en compte que les jours ouvrés.
La crise mondiale a fait stopper la croissance des exportations industrielles qui étaient jusque là en augmentation constante. En janvier 2009, le volume des exportations et des importations a baissé respectivement de 28 % et de 27 % par rapport à janvier 2008. Les exportations de produits industriels ont chuté de 30,4 % au cours des premiers mois de 2009 ; en février, elles ont baissé de 31,1 % par rapport à février 2008. De décembre 2008 à février 2009, le chômage est passé de 1,1 % à 9,1 %, laissant 378 000 personnes sans emploi.
La crise politique et économique
L’ex-Premier ministre Gyurcsany ne s’est jamais remis des troubles déclenchés pendant l’automne boréal 2006 après avoir avoué que son administration avait menti à plusieurs reprises à propos de l’état de l’économie afin de gagner les élections. Bien qu’il se soit maintenu au pouvoir et qu’il ait fait baisser le déficit de 9 % du PIB en 2006 à 3,3 % en 2008, grâce à une augmentation des impôts et une réduction des dépenses, il n’a pas reçu l’appui du public pour réaliser des réformes économiques plus importantes. Quand la crise économique a frappé, le gouvernement a renforcé encore plus son programme d’austérité, consolidant sa position de Premier ministre le plus impopulaire de l’ère de la démocratie électorale et de l’économie de marché. En outre, les cercles financiers ne partageaient pas les hésitations du cabinet au moment de prendre des mesures décisives face à la crise économique. Harcelé de toutes parts, Gyurcsany a annoncé sa démission lors de la convention du Parti Socialiste (MSZP) en mars 2009.
Le déficit budgétaire hongrois complique la réforme fiscale. Alors que beaucoup de pays injectent des fonds pour relancer leur économie, la Hongrie se concentre sur la réduction des coûts. En dépit de leurs divergences, et sous la pression du FMI, la gauche bourgeoise comme les partis de droite défendent des politiques économiques néolibérales : la réduction des impôts sur le capital et la restriction du déficit budgétaire au moyen de réductions draconiennes des dépenses sociales.
Malgré le plan de sauvetage du FMI, le florin a connu son plus bas niveau historique en mars 2009. Selon les derniers chiffres d’Eurostat, le PIB hongrois a baissé de 1 % par trimestre2. Le gouvernement prévoit une baisse de 3,5 % cette année, mais d’autres prévoient une chute de 5 à 6 %. Par ailleurs, la Hongrie reste paralysée par la corruption, la dette élevée et un marché noir qui pourrait représenter un cinquième du PIB. Elle ne l’assume pas politiquement. Les intellectuels nationalistes utilisent le langage des années 1930 pour tonner contre les capitaux étrangers et les influences « cosmopolites ». Viktor Orban, leader du parti de droite Fidesz, se plaint du fait que plus de 80 % du système financier soit « entre les mains d’étrangers ». C’est son parti qui remporte aujourd’hui le plus large soutien.
La chute du florin est particulièrement dévastatrice pour les foyers : près de 60 % du total des prêts ont été contractés en monnaies étrangères, principalement en francs suisses. La pression constante sur le florin augmente le danger que ces prêts et hypothèques personnels restent impayés. L’augmentation des impayés pourrait intensifier la pression sur le système bancaire et la crise du crédit.
Quelles que soient ses erreurs, la Hongrie est aussi victime du système capitaliste mondial. Le ralentissement en Allemagne et sur d’autres marchés récepteurs des exportations hongroises est beaucoup plus profond et durera probablement bien plus que prévu dans un premier temps3. Les banques européennes font face à leur propre crise des surprimes, car elles détiennent la plus grande partie de la dette d’Europe centrale et orientale. Dans toute l’Europe orientale et centrale, on accuse les banques autrichiennes de la débâcle financière.
Les impacts de la crise
Après la chute de l’Union Soviétique, les anciennes républiques socialistes ont démantelé leurs systèmes étatiques. La Hongrie a embrassé le capitalisme avec enthousiasme et a défendu la privatisation de ses biens. Malgré tout, les gouvernements successifs ont tâché de conserver le réseau de sécurité sociale. Les gouvernements du MSZP ont spécialement protégé les retraités, craignant que la moindre réduction budgétaire ne cause des souffrances aux Hongrois les plus âgés, qui constituent un secteur clé de l’électorat socialiste. Le nombre de bénéficiaires a augmenté au début des années 1990 lorsque les entreprises récemment privatisées se sont défaites des ouvriers qui avaient figuré sur les listes de l’État. Recevoir une retraite est devenu un choix séduisant face au chômage car les retraites des travailleurs ayant les plus hauts revenus représentent un pourcentage plus élevé de leur salaire que dans beaucoup d’autres pays. La retraite moyenne après impôts est d’un peu plus de 350 USD par mois. Cela représente beaucoup dans un pays où le salaire moyen après impôts s'élève à un peu plus de 500 USD par mois. Les hommes atteignent l’âge de la retraite à 62 ans, mais ils peuvent se retirer avant s’ils ont travaillé pendant 40 ans, et il y a peu d’incitations financières pour continuer à travailler. Le Hongrois moyen part à la retraite à 58 ans et, actuellement, seulement 1 % des Hongrois de 60-64 ans travaillent. L’OCDE calcule que les dépenses de retraite en Hongrie seront parmi celles qui augmenteront le plus en Europe dans les prochaines décennies. Le pays compte déjà 3 millions de retraités sur une population totale d'environ 10 millions d’habitants.
Tant les entreprises que les employés font des contributions au plan de retraites l’État, mais celles-ci ne couvrent pas toutes les sommes versées. Le gouvernement solde la différence avec le budget central. Pendant des années, la Hongrie a soutenu des déficits fiscaux pour payer ses programmes sociaux ; les retraites à elles seules dépassent 10 % du PIB. Pour financer ces dépenses, le gouvernement a vendu des bons. En octobre 2008, les investisseurs ont cessé d’acheter des bons publics. Même si le FMI a fourni un plan de sauvetage d’urgence pour que la Hongrie puisse solder ses comptes, de nombreux investisseurs internationaux se sont retirés, ce qui a fait chuter la monnaie hongroise et a assombri ses perspectives économiques.
Les détracteurs signalent que le pays ne peut se permettre le luxe d’un système de retraite qui incite les salariés à prendre leur retraite alors qu’ils sont encore jeunes ou à abandonner le marché du travail quand ils ont des maladies relativement mineures. Le FMI, avec l’appui des réformateurs hongrois, fait spécialement pression pour que l’on élimine la bonification supplémentaire d'un mois versée à tous les retraités et qui a été adoptée en 2003 par le prédécesseur de Gyurcsany.
Après sa réélection en 2006, Gyurcsany a proposé la réforme du système de retraite, qui a inclus la suppression de cette bonification mais il voulait que les retraités reçoivent le même montant qu’avant, étalé sur douze mois. Il a proposé également d’élever l’âge de la retraite des femmes à 65 ans en 2020 et celle des hommes à 68-69 ans en 2050. Gordon Bajnai, le nouveau Premier ministre, se verra probablement obligé de proposer des réductions plus profondes qui auront des effets désastreux sur les Hongrois les plus âgés. Les retraités accusent déjà les hommes politiques de détruire les promesses de la génération antérieure, en les laissant à la dérive.
En 2003, les dépenses pour la protection sociale ont représenté 21,4 % du PIB, un chiffre inférieur à la moyenne de 28 % de l’UE. Les services dérivés des aides familiales ont représenté 2,7 % du PIB, l’équivalent seulement de 25 % de la moyenne par habitant de l’UE. Le système social est diversifié et inclut l’assistance sociale, les allocations familiales, les sommes versées aux personnes handicapées ou malades, le système des retraites et les services sociaux.
En 2006, le système s’est standardisé, il est devenu plus efficace et a amélioré son objectif. La valeur réelle des prestations sociales sous condition de ressources a baissé jusqu’en 2004, mais les systèmes de distribution pour l’assistance sociale commune et les allocations pour les plus âgés se sont modifiés en 2005-06. Depuis, les plus pauvres ont bénéficié d’aides plus généreuses. Le système de base et spécialisé d’assistance sociale et à l'enfance mis en place dans les dernières décennies est complexe. Les programmes pour les services individuels laissent voir des brèches importantes en ce qui concerne la capacité et l’accès, principalement dans les collectivités les plus petites.
Le taux de pauvreté infantile est environ 1,5 fois supérieure à la moyenne de l’UE. Presque 20 % des enfants hongrois vivent dans des foyers dont les revenus par tête sont inférieurs de 60 % à la moyenne. La pauvreté infantile est en générale causée par le chômage des parents et les désavantages géographiques. En outre, les mécanismes de sélection du système d’enseignement et de formation accroissent l’impact de l’origine sociale dans la performance des enfants au lieu de la contrecarrer. Quand les parents ont un bas niveau d’éducation, une position médiocre sur le marché du travail et vivent isolés, ils transmettent ces handicaps à leurs enfants.
Le programme d’austérité de Bajnai
Le Premier ministre Bajnai a pris ses fonctions dans le contexte du pire déclin économique connu par le pays en presque deux décennies. Pour sauver le budget, respecter les exigences du FMI et rendre la confiance aux investisseurs, il projette d’opérer des coupes dans les retraites, les bonifications du secteur public, les allocations maternité, les subventions pour les hypothèques et les subventions pour l’énergie et le transport public.
La caractéristique la plus remarquable du programme initial de Bajnai – appelé « Manifeste politique » – est son insistance sur le fait que l’urgence de la situation exige une « action immédiate et décidée ». Il prévient qu’il présentera en juillet des « mesures inévitables et douloureuses ». Son objectif principal est de sauver le plus grand nombre d’emplois afin d’éviter le malaise social et le clivage ultérieur de la société hongroise en puissants et démunis. Il veut également parvenir à une stabilité relative du florin, réduire le déficit et entrer dans la zone euro le plus vite possible. Pour atteindre ces objectifs, il souligne que « l’on doit réviser la totalité de la structure gouvernementale afin de dépenser moins dans l’administration ». Ceci est censé geler les salaires des fonctionnaires pendant deux ans et éliminer les bonifications supplémentaires des employés publics à partir de 2010. Il couperait également les contributions nationales aux gouvernements locaux.
Les autres points de son programme sont :
Augmenter l’âge de la retraite : actuellement, il est de 62 ans mais la moyenne réelle se situe autour de 58 ans. Bajnai commencerait les réformes en 2010, en incluant l’élimination de la bonification.
Réduction des allocations maladies : désormais, si un médecin certifie qu’une personne ne peut pas travailler à cause d’une maladie, celle-ci reçoit 70 % de son salaire pendant six mois. La moitié est payée par son entreprise.
Gel des aides à l’enfance : elles ont connu une croissance pendant des années. Bajnai projette de réduire le soutien aux enfants à l’âge de trois ans et les allocations familiales jusqu’à deux enfants.
Coupe dans les subventions : Bajnai dit vouloir suspendre temporairement l’aide financière aux jeunes couples avec enfants qui achètent leur première maison et baisser les subventions pour la consommation de gaz et de chauffage. Toutes les subventions seraient suspendues après 2010. Il pense réduire également les allocations pour le transport public, spécialement pour le transport ferroviaire, la radio et la télévision publiques. L’aide de l’État aux agriculteurs se rétrécira également de manière considérable.
Pendant qu’il réduit les dépenses du gouvernement, Bajnai veut donner les « premiers secours aux petites et moyennes entreprises hongroises qui fournissent les deux tiers des emplois du pays » en limitant la charge fiscale qui pèse sur les entreprises et les employés. Enfin, il projette un ensemble de relances économiques financé par des subventions de l’UE pour aider le pays à calmer les effets de la crise et finalement à la surmonter.
1 Ministère des Finances, 29 octobre 2009.
2 Voir : <epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/2-15052009-BP/EN/2-15052009-BP-EN.PDF>.
3 Après l’Allemagne, les plus grands consommateurs de produits hongrois sont l’Autriche, l’Italie, la France, le Royaume Uni, la Roumanie, la Pologne et les États-Unis.
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Haltes en chemin et occasions perdues
Himanshu Jha
Social Watch India
Bien qu’il existe des indicateurs qui prouvent que la situation de l’Inde n’est pas la pire, de nombreux secteurs se sont retrouvés affaiblis suite à la détérioration de l’économie mondiale et d’autres n’ont pas maintenu leur niveau de croissance. Par exemple, la croissance en prêts personnels, en prêts à la consommation et à la production a été freinée. L’inflation, la hausse du chômage et la dégradation des investissements directs étrangers sont autant d’impacts ajoutés. Le Gouvernement doit trouver un équilibre entre les réformes économiques visant à stimuler la croissance et le besoin de soulager les 250 millions d’Indiens vivant dans une misère extrême.
En dépit de l’hypothèse de « déconnexion » selon laquelle les économies émergentes seraient à peine touchées par la crise financière mondiale grâce à leurs réserves de devises, à la stabilité des bilans des entreprises et à la relative solidité des secteurs bancaires, nombreuses sont celles qui en ressentent déjà les effets1. Parmi ces économies se trouve celle de l’Inde dont la croissance s’est fortement ralentie – passant d’un solide 9,3 % en 2007 à 7,3 % en 2008. Pour 2009 le FMI prévoit une croissance de 4,5 %2.
L’effondrement de la bourse des valeurs en 2008 a prouvé que la crise s’accentuait encore et les marchés n’ont pas encore réussi à s’en remettre. Bien qu’il soit difficile de prévoir le dénouement de cette situation, il est clair que les pronostics initiaux du Gouvernement sur l’immunité du pays face à la crise ont péché de prévoyance. Il est important d’en étudier les retombées sur les populations pauvres et marginalisées de l’Inde, ainsi que l’efficacité des réponses gouvernementales données jusqu’à présent.
Impacts de la crise économique
On peut facilement en observer l’impact avec le ralentissement de la croissance industrielle, l’inflation, la croissance du déficit de compte courant, l’effondrement de la bourse des valeurs et la dévaluation de la monnaie nationale, la roupie. La crise financière a été accompagnée également d’une hausse des prix de certains aliments. Selon l’Indice des Prix de Gros (IPG), le riz coûtait 12,8 % de plus en mars 2009 qu’en mars 2008 face à une diminution mondiale de 1 %, alors que le blé a augmenté de 5,2 % face à une diminution mondiale de 47,5 %. L’inflation est passée de 7,7 % en mars 2008 pour atteindre un sommet de 12,9 % en août 2008 (il convient de signaler que l’IPG a brusquement chuté à 0,3 % au mois de mars de cette année). L’inflation annuelle des prix des matières premières de base met en évidence la gravité du problème. L’inflation des prix à la consommation s’est située entre 9,6 % et 10,8 % en janvier/février 2009, face à 7,3 % - 8,8 % en juin 2008 et 5,2 % - 6,4 % en février 20083.
L’impact le plus immédiat de la crise s’est répercuté sur les fonds d’investissements étrangers (Foreign Institutional Investment : FII). Entre avril 2008 et mars 2009 une fuite de 15 milliards d’USD du marché des valeurs a été enregistrée, contre une entrée de 20.300 milliards d’USD pendant la même période en 2007-2008. Cette même tendance a été enregistrée dans d’autres investissements de portefeuille d’actions tels que les American Depository Receipts (certificats nominatifs négociables émis par une banque des États-Unis) /Global Depository Receipts (transactions hors des États-Unis)4.
Le recul du FFI, qui atteignait 66,5 milliards d’USD début 2008, déclencha l’effondrement de la bourse des valeurs et par voie de conséquence le sensex, l’index des entreprises les plus importantes du pays, « tombant d’un point maximum de clôture de 20.873 le 8 janvier 2008 à moins de 10.000 le 17 octobre 2008 »5. Les évasions de FFI entraînèrent à leur tour une brusque dévaluation de la roupie, qui a chuté de 39,99 par USD en mars 2008 à 52,09 par USD en mars 2009. La roupie est devenue également plus faible face à d’autres monnaies, dont l’euro (6,5 %), le yen (22,8 %) et le yuan (23,6 %)6. Même si ces dévaluations pouvaient sembler bénéfiques aux exportations de l’Inde, la détérioration des économies des États-Unis, de l’Union européenne et du Moyen Orient – qui constituent les trois quarts du commerce en biens et services de l’Inde – a provoqué une carence de la demande. D’une croissance de 24,5 % entre avril 2007 et novembre 2008, les exportations ont chuté à 17,6 % pendant les mêmes mois en 2008 et 20097.
Il est vraisemblable que le ralentissement de l’exportation de services s’accentue aussi « à mesure que la récession s’aggrave et que se restructurent les entreprises financières – traditionnellement les principales utilisatrices de services de sous-traitance »8. D’autre part, pour ceux qui se sont engagés à effectuer leur paiement en devises, la dévaluation de la roupie n’est pas une bonne nouvelle et ne favorise pas non plus les efforts du Gouvernement pour freiner l’inflation9.
Le ralentissement de la croissance de la production industrielle est un fait indéniable puisque le taux annuel d’expansion, qui s’élevait à 8,8 % entre avril 2007 et février 2008, est descendu brusquement à 2,8 % pendant la période 2008-200910. L’Indice de la Production Industrielle (IPI) a enregistré une croissance moyenne de 5,6 % entre avril et juillet 2008, il est tombé à 1,7 % en août puis il s’est rétabli, atteignant un taux comparativement solide de 6 % en septembre. Cependant, l’IPI a de nouveau enregistré une croissance négative entre décembre 2008 et février 2009. Le rythme de croissance du secteur manufacturier a chuté, passant de 9,3 % pendant la période 2007-2008 (d’avril à février) au taux escompté de 2,8 % pour la même période en 2008-2009. Le secteur fondamental de l’infrastructure a progressé à un rythme de 3 % pendant la période 2008-2009 (d’avril à février), contre 5,8 % pendant la même période en 2007-200811.
De plus, les banques sont en train de réduire les crédits qu’elles accordent. Entre février 2008 et février 2009, le taux de croissance a chuté de façon considérable, passant de 12 % à 7,5 % pour le logement, de 13,2 % à 8,5 % pour les prêts personnels et de 5,9 % à -14,5 % pour les biens d’équipement des ménages12.
Interventions pour freiner la chute
Suite au sommet du G-20 de novembre 2008 le premier ministre a désigné un groupe, placé sous sa propre présidence, chargé d’élaborer un plan détaillé pour une intervention de l’État appropriée et opportune. Les autres membres de ce groupe étaient le ministre des Finances, le ministre de l’Industrie et du Commerce, le vice-président de la Commission de Planification et le directeur de la Banque de la Réserve de l’Inde (RBI). Les mesures furent regroupées en « séries de programmes de relance » ; la première fut annoncée en décembre 2008 et la seconde en janvier 200913. Parmi les mesures annoncées figuraient des déboursements de 20 milliards d’INR (4,15 milliards d’USD) pour mener à bien des plans essentiels à l’infrastructure rurale et la Sécurité Sociale, une diminution globale de 4 % de la taxe sur la valeur ajoutée centrale (CENVAT en anglais), des mesures spécifiques visant les tarifs douaniers pour des secteurs tels que l’acier et le ciment, ainsi que des exonérations d’impôts et des augmentations des taxes de remboursement d’impôts pour les exportations.
Certaines mesures supplémentaires ont également été adoptées, comme la subvention des taux d’intérêt et des crédits pré et post embarquement pour les exportations employant beaucoup de main d’œuvre ; des facilités pour le refinancement de 40 milliards d’INR (831 millions d’USD), quant au secteur du logement, pour la Banque Nationale du Logement et de 70 milliards d’INR (1,5 milliard d’USD) pour la Banque de Développement de la Petite Industrie de l’Inde quant aux micros, petites et moyennes entreprises, et l’agrément nécessaire pour que l’India Infrastructure Finance Company Limited (une compagnie financière pour l’infrastructure) puisse percevoir 100 milliards d’INR (2,1 milliards D’USD) sous forme de bons exonérés d’impôts14. Le RBI a adopté aussi quelques mesures monétaires telles que l’abattement du taux d’intérêt de la prise en pension livrée (taux auquel le RBI prête des roupies aux banques de l’Inde) de 9 % en août 2008 à 5 % en janvier 2009, la réduction de la cession temporaire et la réduction du coefficient de trésorerie obligatoire de 9 % en août 2008 à 5 % depuis janvier 200915.
Cependant, il existe certains problèmes de base en ce qui concerne la nature, la direction y les effets escomptés de ces séries de programmes. Entre autres, il s’avère que les engagements de prêts sont totalement insuffisants si l’on tient compte du fait que la subvention totale de la relance de 311 milliards INR (6,5 milliards d’USD) constitue à peine 0,8 % du PIB. Qui plus est, il existe une certaine ambiguïté sur les secteurs qui bénéficieront d’un déboursement de prêt supplémentaire de 200 milliards INR (4,2 milliards d’USD). Un retard de presque huit mois s’est déjà produit dans les déboursements effectués. L’ajout de fonds supplémentaires à un tel arriéré rend les déboursements difficilement opportuns16.
Las allocations budgétaires centrales pour le développement ont chuté de 7,5 % pendant la période 2002-2003 à 6,0 % pendant la période 2007-2008 en application des normes de la Loi de Responsabilité Fiscale et de Gestion du Budget. L’allocation budgétaire pour le développement pour 2008-2009 représente environ 6,8 % du PIB ; si un contrecoup général se faisait sentir, cette allocation devra être augmentée au moins jusqu’à un seuil minimal de 7,5 %, ce qui veut dire que « les déboursements supplémentaires doivent atteindre environ 400 milliards INR (8,3 milliards d’USD) au lieu de 200 milliards INR (4,1 milliards d’USD) »17.
Cette baisse de 4 % du CENVAT ne pourra donc être appliquée que sur les produits dont les taxes douanières dépassent 4 %, ce qui implique un encouragement de la demande de la consommation de biens d’équipement des ménages et des biens de luxe, surtout. On a signalé notamment que cela « ne provoquera d’impact sur le soutien porté à l’activité économique que si les producteurs répondent par une baisse des prix et si ces réductions génèrent des réponses à la demande »18. Cela ne semble pas fonctionner ainsi. Par exemple dans l’industrie de l’aviation la diminution des prix de combustible ne s’est pas traduite par la réduction des prix à la consommation escomptée.
On a insisté maintes fois sur la nécessité de mettre en place un programme d’investissement public en masse destiné à l’infrastructure sociale et économique, favorisant la création d’emplois et relançant la demande interne.
La disparition d’emplois et le défi pour la Sécurité sociale.
La disparition d’emplois dans de nombreux secteurs-clé suppose un défi important pour une politique de sécurité sociale qui n’était déjà guère ambitieuse. Un sondage sur un échantillon d’industries liées à l’exportation effectué par le Département du Commerce révèle la perte de 109.513 emplois pendant la période allant d’août 2008 à janvier de 2009. Le Ministère du Travail a effectué un sondage similaire parmi des secteurs importants tel que celui des industries automobile, manufacturière, minière, textile, métallurgique et celui des pierres précieuses et de la bijouterie, qui conjointement contribuent pour plus de 60 % au PIB en 2007-2008. Le sondage a révélé que 500.000 travailleurs environ ont perdu leur emploi entre octobre et décembre 2008.
Cette situation constitue un défi important pour la sécurité sociale étant donné que sur les 457,5 millions de travailleurs formant l’effectif total, 422,6 millions entrent dans la catégorie des non organisés ou non protégés. Parmi ceux-ci, 393,5 millions font partie du secteur non structuré et à peine 29,2 millions appartiennent au secteur structuré. Environ 38 % de l’effectif des travailleurs non protégés sont des femmes19.
Conclusions
Les habitants de l’Inde ont démontré leur confiance en votant pour un deuxième mandat de l’Alliance Unie pour le Progrès. Cependant, le défi pour le Gouvernement actuel est de réussir à trouver un équilibre prudent entre l’accomplissement de ses projets de réforme économique en cours et le besoin impérieux d’offrir une aide sociale et économique aux 250 millions d’habitants qui, d’après les statistiques de la Banque Mondiale, vivent encore dans une pauvreté extrême20. La crise actuelle pose une nouvelle série de problèmes à ce pays qui souffrait déjà d’inégalités énormes et des ravages causés par la faim et la malnutrition21.
1 Subbarao, D. “ Inde : La gestion de l’impact de la crise financière mondiale ”. Discours prononcé lors de la séance annuelle de la Confédération de l’industrie indienne, 26 mars 2009.
2 Outlook India (revue hebdomadaire d’informations). IMF Lowers India’s Growth Estimate to 4.5 % for 2009 [Le FMI réduit l’estimation de la croissance de l’Inde à 4,5 % pour 2009], 22 avril 2009. Disponible sur : <news.outlookindia.com/item.aspx?658780>.
3 RBI. Macroeconomic and Monetary Development in 2008-09 [Développement macroéconomique et monétaire en 2008-09]. Banque de Réserves de l’Inde. Disponible sur : <rbidocs.rbi.org.in/rdocs/Publications/PDFs/MMDAPRFull2004.pdf>.
4 Ibid.
5 Chandrashekhar C. P. y Ghosh, J., India and the Global Financial Crisis [l’Inde et la crise financière mondiale]. Macroscan, 2008. Disponible sur : <www.macroscan.org/the/trade/oct08/trd15102008Crisis.htm>.
6 Ibid.
7 Développement macroéconomique et monétaire en 2008-09.
8 Subbarao, D., op. cit.
9 Ibid.
10 Ibid.
11 “ Inde : la gestion de l’impact de la crise financière mondiale ”.
12 Ibid.
13 Voir Gouvernement de l’Inde. “ Mesures gouvernementales supplémentaires pour relancer l’économie.” Communiqué de presse, 2 janvier 2009; et “ Exonérations supplémentaires annoncées pour l’Impôt Central des Douanes et Services. ” Communiqué de presse, 24 février 2009.
14 Ibid.
15 Ibid.
16 Fondation pour la Recherche EPW. Stimulus Packages Facing Institutional Constraints [Des séries de programmes de relance confrontées aux restrictions institutionnelles]. Economic and Political Weekly 44(04), 24 janvier 2009.
17 Ibid.
18 Ghosh, J. Weak Stimulus [Stimulation faible]. Frontline, 22 janvier 2009.
19 Gouvernement de l’Inde. Unorganized Manufacturing Sector in India : Input, Output and Value Added [Secteur manufacturier non structuré de l’Inde : intrants, extrants et valeur ajoutée] Rapport sur le sondage national par échantillons 526. Ministère de la Statistique et de Mise en oeuvre de Programmes, 2009.
20 Chen, S. et Ravallion, M. “ Le monde en développement est plus pauvre que l’on ne pensait mais sa lutte contre la pauvreté n’en remporte pas moins de succès ”, in Document de Travail de Recherche sur les Politiques 4703. Washington, D.C. : Banque Mondiale.
21 Selon l’IFPRI (Institut International de Recherche sur les Politiques Alimentaires) (2008), l’Inde abrite la plus grande population du monde en situation d’insécurité alimentaire, avec plus de 200 millions de personnes souffrant de la faim. Le rapport démontre que la forte croissance économique ne s’est pas traduite par une baisse des niveaux de la faim.
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L’autonomisation de la femme : une démarche mal comprise
Amal Shlash1
La Constitution iraquienne de 2005 a tâché d’inclure des mesures visant à encourager l’autonomisation de la femme ; or, la législation doit se doubler aussi d’une culture de l’égalité des chances. Pendant la période actuelle de transition, la femme non seulement a perdu la plupart des avantages offerts jusqu’ici par l’État, mais elle subit de façon disproportionnée le recul du pouvoir de l’État, l’insécurité découlant de l’instabilité politique, le collapsus des activités économiques dû à la guerre et la détérioration des structures sociales. L’augmentation de la violence à l’égard de la femme requiert l’intervention urgente de tous les acteurs sociaux.
On a pu voir à travers les expériences recueillies dans de nombreux pays que le passage à un gouvernement démocratique peut aider à rompre les entraves institutionnelles et culturelles freinant l’autonomisation de la femme. Or, pour en arriver là, il incombe aux femmes elles-mêmes de revendiquer l’égalité de leurs droits. Qui plus est, alors que les démocraties naissantes ont la possibilité de réformer les sociétés en instaurant les libertés élémentaires, un gouvernement démocratique, un marché libre et les droits de la personne humaine, il s’avère que l’insécurité liée au conflit peut saper à la base de si beaux résultats. Quand la transition s’effectue pendant un conflit, la mise en place d’un système démocratique constitue la priorité suprême et peut reléguer à un deuxième plan l’impératif de l’égalité. S’il en est ainsi, il est probable que lors de cette transition, l’inégalité des sexes tende à s’accroître au lieu de diminuer.
Le rôle de l’État et la transition
Depuis l’établissement de l’Iraq moderne, l’État a favorisé l’autonomisation institutionnelle de la femme en lui ouvrant plus grand les portes de l’éducation, des services de santé et du monde du travail qualifié. Le niveau professionnel de la femme a fait un bond en avant, principalement dans les domaines socialement mieux acceptés de l’Éducation et de la Santé. Par exemple, pendant la période 1997-2004, 68 % du corps enseignant étaient des femmes et le taux global de participation de la femme dans le service médical se situait entre 30 % et 60 %. Avant 2003, les femmes représentaient 46 % des employés du secteur public et elles étaient les principales prestataires de services et d’aide sociale dans les secteurs de l’Éducation et de la Santé, particulièrement dans les domaines utiles à la femme. Cependant, l’État n’a pas vraiment été conscient que l’autonomisation ne s’obtient pas par la seule promulgation de lois et qu’elle n’est possible que lorsque la société respecte ces lois – ce qui à son tour exige des changements culturels. L’autonomisation de la femme ne peut prospérer que s’il existe une culture d’égalité des chances dans tous les domaines.
Les étapes de transition impliquent souvent une révision du rôle joué par les institutions et les mécanismes de l’État afin de mieux les ajuster à la réalité et de promouvoir l’égalité entre les citoyens des deux sexes. Mais en Iraq les réformes se sont accompagnées du démantèlement de l’État qui, de ce fait, fut incapable d’assumer plus avant ses responsabilités et d’offrir les services-clés nécessaires à l’économie de la transition. Ni le secteur privé ni la société civile n’ont été capables d’assumer ce rôle et d’offrir de tels services et les femmes ont perdu alors la plupart de leurs avantages sociaux ; entre autres, le système des crèches mis en place par l’État.
Indicateurs du développement, emploi et biens
L’imposition de sanctions et la crise politique et économique grandissante, de même que l’insécurité et le conflit générés depuis 1990, ont aggravé la situation des femmes par rapport aux hommes dans les dernières décennies. D’après différents indicateurs-clés du développement humain, elles se retrouvent dans une situation pire qu’avant. En 2007, alors que l’espérance de vie de la femme (62 ans) était nettement plus élevée que celle de l’homme (55 ans), 30 % des femmes de plus de 15 ans étaient analphabètes contre 14% pour les hommes. Sur la totalité des inscriptions scolaires, tous chiffres mélangés (école primaire, intermédiaire et secondaire) 55 % concernaient les filles et 68 % les garçons. Le taux de chômage était également plus élevé chez les femmes : 23 % contre 16 %. Les salaires perçus par les femmes atteignaient seulement 11% du montant des salaires que percevaient les hommes. Le travail agricole représente 60% des heures totales de travail hebdomadaire pour la femme et seulement 22 % pour l’homme, ce qui aide à expliquer les faibles revenus de la femme puisque, comme on le sait, celle-ci ne touche généralement pas de rémunération pour le travail agricole qu’elle fournit, et cela met en relief une faible productivité. En 2007 l’Indicateur du Développement Humain de l’Iraq était de 0,627 alors que l’Indicateur Sexospécifique du Développement Humain était de 0,584.
En général, le taux de participation de la femme dans l’activité économique est considérablement plus faible que celui de l’homme (21 % contre 79 % en 2004). La transition vers une économie de marché ouvert offrira peut-être plus d’opportunités, ainsi que des défis plus importants pour la femme irakienne. L’ouverture du marché offrira peut-être de nouvelles possibilités dans le secteur privé, ce qui entraînera un redoublement de la concurrence au niveau de l’emploi et des compétences exigées, alors que le système éducatif n’offre pas une formation égalitaire. En plus, il y aura moins d’emplois pour la femme dans le secteur public. L’article 23 de la Constitution de 2005 garantit « le droit des Iraquiens à la propriété » sans aucune discrimination de sexe. Bien qu’il n’existe pas de données qui évaluent la possession de biens tels que la terre, les propriétés et les entreprises, il est possible d’affirmer qu’en général, les femmes possèdent moins de biens financiers que les hommes. Par exemple, l’immense majorité des parcelles de terre et des logements figure sur les registres au nom de l’homme et ce sont les hommes qui prévalent clairement quant à la propriété et l’administration du secteur privé. De plus, les femmes qui sont chef de famille – soit 11 % des familles – sont propriétaires d’une quantité de biens moindre en comparaison d’autres femmes.
Le statut personnel de la femme
La nouvelle Constitution de 2005 a essayé d’inclure différentes mesures positives pour la femme. Par exemple, la femme peut désormais transmettre sa nationalité à ses enfants (article 18). Cependant, elle contient aussi plusieurs articles, clauses et conséquences qui peuvent être considérées discriminatoires. C’est le cas de l’article 41 qui établit que « les Iraquiens sont libres d’agir en fonction de leur statut personnel selon leur religion, leurs croyances, leurs doctrines ou leurs choix », ce qui permet des interprétations variées de la sharia islamique et de mettre des barrières en termes d’égalité juridique, surtout dans des questions ayant trait au Code Civil comme le mariage et le divorce. La variété des interprétations peut donner lieu à des procédures distinctes dans les différentes provinces, dans les populations urbaines ou rurales ou entre les membres de différentes religions. Ces prévisions sont considérées comme un retour en arrière si on les compare avec les prévisions de la Loi Nº 188/1959 qui règlementait toutes les questions concernant le mariage, le divorce, la succession, la tutelle et la garde de l’enfant pour tous les Iraquiens, quelle que soit leur secte2. De fait, l’article 41 de la Constitution contredit la garantie fondamentale contenue dans l’article 14 de la loi, qui établit que « les Iraquiens sont égaux devant la loi sans discrimination aucune de sexe ou de race ». Une telle contradiction compromet l’unité de la législation applicable de manière universelle.
À l’heure d’offrir une protection à la femme et d’interdire la violence exercée contre elle, les stipulations constitutionnelles aussi bien que les juridiques peuvent s’avérer insuffisantes. La Constitution, par exemple, ne se réfère pas de façon spécifique à la femme quand elle aborde le thème de la violence dans le chapitre sur les droits. L’article 4 ne considère pas la violence conjugale comme un délit spécifique. L’article 44 établit que « les Iraquiens sont libres de se déplacer, de voyager et de résider en Iraq ou en dehors », mais dans la pratique la loi ne permet pas qu’une femme de moins de 40 ans obtienne un passeport sans l’autorisation d’un tuteur. Pour prendre un autre exemple, la femme a droit à l’égalité des salaires, mais la loi ne prévoit pas les mesures associées nécessaires qui garantissent l’égalité en matière de promotions professionnelles. De sorte que même si la Constitution prévoit la non discrimination de jure contre la femme, il existe des facteurs juridiques, sociaux et culturels qui représentent souvent autant de barrières de facto pour son application. Le climat juridique et législatif dans la région du Kurdistan semble être assez positif. Par exemple, là-bas on applique la Loi Nº 188 sur le Statut Personnel, rédigée en 1959, mais considérée progressiste pour l’époque, et la Commission de la condition de la femme a réussi à introduire quelques amendements. En 2007 des conditions supplémentaires ont été imposées pour les cas de polygamie, la circoncision féminine a été interdite et les règlementations relatives au divorce ont été changées afin de favoriser davantage la femme.
En 1986 l’Iraq a ratifié la Convention sur l’Élimination de toutes les Formes de Discrimination à l’égard des Femmes (CEDAW), sous réserve des articles 2, 9 et 29. De telles réserves, en effet, annulent les dispositions de la Convention sur l’égalité des femmes et des hommes. Depuis le début de la transition en 2003, les organisations de femmes ont vainement essayé que ces réserves soient retirées. D’autre part, la Constitution ne comprend aucun article qui reconnaisse que la ratification des conventions internationales est contraignante pour l’État. De toutes manières, le nouveau régime a rejeté les compromis ratifiés par son antécesseur vis-à-vis des conventions internationales, particulièrement la CEDAW, sous prétexte qu’elles sont en contradiction avec la sharia3.
Participation dans la prise de décision
En 2003 un système de quotas à été introduit pour la participation de la femme dans la vie politique et la nouvelle Constitution prévoit aussi des mesures favorisant les minorités, en décrétant dans l’article 49 un quota pour la femme non inférieur à 25 % des sièges du Parlement. La Loi Électorale Nº 6 de 2005 stipule que les listes des candidats pour les élections doivent également respecter ce quota. Lors des élections de 2005, les femmes ont obtenu 87 sur les 275 sièges de l’Assemblée Nationale (31 %). Lors des élections aux Conseils régionaux, par listes électorales fermées, elles ont obtenu 28 % des postes.
De plus, l’adhésion au système de quotas a considérablement augmenté le nombre de femmes élues dans les Conseils gouvernementaux. Depuis 2003 la quantité de femmes occupant des postes administratifs à responsabilité, où l’on doit prendre des décisions, est passée de 12,7 % à 22,4 %. Alors que dans la magistrature elles ne représentaient que 2% en 2006, dans l’exécutif elles ont eu plus de chance. En 2006 il y avait quatre ministres d’État et 342 hauts-fonctionnaires ; parmi elles, 8 sous-secrétaires, 22 conseillères et inspectrices générales, 86 directrices générales et 215 sous-directrices générales. Cependant il convient de signaler que les obstacles à franchir pour atteindre et conserver de tels postes sont plus grands et plus nombreux pour les femmes.
Un héritage de restrictions culturelles
Pour la femme, le patrimoine culturel – fondé sur la tradition plus que sur des motifs religieux – est une des références de base de son apprentissage des conduites acceptables. L’image stéréotypée de la femme s’est maintenue pendant des siècles du fait que l’État a contribué, tout au long de son histoire, à la perpétuer afin d’éviter d’entrer en conflit avec la société et ses leaders religieux et culturels. Cette image est si bien enracinée que, comme le démontrent plusieurs études, la perception que certaines femmes ont vis-à-vis de leur propre sexe ne s’éloigne guère de celle que les hommes soutiennent.
L’acceptation par la femme de cette fausse image d’elle-même offre à l’État une excuse pour repousser la promulgation d’une législation qui améliorerait la situation dans laquelle elle se trouve. La société justifie également l’isolement de la femme comme étant une façon de garantir sa protection. De ce fait, le plus fort bastion d’intolérance culturelle à l’égard de la femme continue à être la famille, au sein de laquelle la violence masculine est acceptée en tant que droit disciplinaire ou préventif. Par exemple, un rapport du ministère des Droits Humains de la région du Kurdistan signale que pendant les huit premiers mois de l’année 2006, 239 femmes furent poussées à s’immoler par le feu. Cette situation ne change pas beaucoup dans d’autres domaines et les assassinats associés à l’honneur sont habituels dans le centre et le sud de l’Iraq. Il est probable que le nombre de plaintes déposées pour de telles pratiques soit inférieur au nombre réel d’incidents en raison de la faible capacité de contrôle des organisations de femmes, ainsi qu’aux préjugés des médias.
Conclusions
L’autonomisation des Iraquiennes doit constituer un objectif global et non pas une simple cible secondaire, car la femme a un rôle égalitaire à remplir dans le développement général économique, politique et social. Des preuves existent pourtant, qui démontrent que les Iraquiennes subissent de façon exagérée les contrecoups de la rétraction du pouvoir de l’État, de l’insécurité découlant de l’instabilité politique, de l’effondrement des activités économiques et de la détérioration des structures sociales, tout cela comme conséquence des conflits en cours. L’augmentation de la violence à l’encontre des femmes constitue, en ce moment, la répercussion la plus dangereuse de la transition et requiert l’intervention d’urgence de tous les acteurs de la société. La femme s’est réfugiée au sein de sa communauté, de sa secte ou de sa tribu, en quête de protection, faisant chavirer ainsi les progrès de près d’un siècle de modernisation entrepris par l’État.
Le manque de sécurité a entravé la progression du développement humain et a endommagé les mécanismes pour l’autonomisation véritable. Ceci dit, il reste encore une chance pour améliorer la situation. Parmi les responsabilités spécifiques de l’État s’inscrivent les suivantes :
* Amender les lois (et la Constitution) pour supprimer les dispositions, omissions et contradictions qui perpétuent la discrimination.
* Garantir la liberté d’opinion afin d’encourager le débat et le dialogue publics ; amplifier les campagnes de sensibilisation publique qui produisent de profonds changements quant aux stéréotypes de la femme diffusés par les médias.
* Créer un nouveau climat dans le domaine du travail qui s’éloigne de la division actuelle basée sur les rôles limités de la femme et qui visent à la cantonner, en tant que travailleuse, aux secteurs à faible productivité.
* Combattre la culture de la domination et de la marginalisation et diffuser une culture de paix et de tolérance pour éliminer sous toutes ses formes la violence à l’égard de la femme et mettre fin à sa perpétuation comme partie de la culture acceptée.
* Offrir de nouvelles chances par le biais de la réforme du système de prêts dans les banques publiques, en éliminant la clause qui exige la possession de biens immobiliers comme garantie subsidiaire et en promouvant les services bancaires qui favorisent la femme.
* Réformer les systèmes éducatifs et les programmes d’enseignement pour changer le regard de la société vis-à-vis de la violence à l’égard des femmes et, dans le but d’y mettre fin, inculquer le sens de la responsabilité partagée.
* Elargir l’accès aux projets de micro-crédit et au travail effectué depuis leur domicile aux femmes n’ayant reçu qu’une instruction et une formation précaires, aux femmes du milieu rural, aux femmes âgées et aux veuves ayant famille à charge.
Par l’adoption d’une attitude ferme en ce qui concerne la culture des droits humains, de l’égalité des chances et de l’égalité entre les deux sexes, le Gouvernement pourrait mettre fin une fois pour toutes dans le pays à la culture centenaire de la discrimination à l’égard des femmes.
1 Auteur principal de : Irak: National Report on the Status of Human Development 2008 [Iraq : rapport national 2008 sur la situation du développement humain]. Cet article est basé sur les faits et les analyses de ce rapport, disponible sur : <www.iauIrak.org/reports/NRSHD-English.pdf>.
2 Cette loi – qui comprenait le droit de conserver le logement familial après le divorce pendant une période de trois ans, la même limite d’âge de mariage pour l’homme ou la femme, l’équivalence lors du divorce de la dot de la femme au prix de l’or au moment du divorce et l’exigence pour le mari de prouver sa capacité financière pour subvenir aux besoins d’une deuxième femme avant de conclure un mariage polygame – a été sujette à différents amendements au cours des années en détriment de la situation des femmes.
3 Un même rejet s’applique à la Résolution 1325 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, à l’égard de la femme, de la paix et de la sécurité.
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Une réponse faible et inappropriée
Coalition Italienne de Social Watch
Jason Nardi, Tommaso Rondinella (Lunaria), Elisa Bacciotti (Ucodep), Andrea Baranes (CRBM), Sergio Giovagnoli (ARCI), Giulio Sensi (Mani Tese), Sabina Siniscalchi (FCRE)
Le soutien apporté par le Gouvernement aux institutions financières exposées aux fluctuations des marchés internationaux confirme que les banques italiennes ont connu des difficultés depuis le début de la crise financière mondiale. Pour le moment, la pire conséquence de la crise a été la compression du marché des crédits. Dans un pays où 90 % des entreprises sont des PME, la réponse du Gouvernement a été quantitativement et qualitativement insuffisante. Il est nécessaire de mettre en place des politiques différentes qui distribuent les ressources de manière appropriée pour lutter contre la pauvreté et protéger les travailleurs.
Bien que le Gouvernement italien ait essayé d’inspirer confiance en alléguant que le pays ne fera pas seulement que souffrir des conséquences de la crise mais qu’il en sortira renforcé, il existe des preuves incontestables indiquant le contraire. Si le gouvernement n’a pas encore eu à aider les banques, cela ne signifie pas pour autant que les restrictions de crédits n’ont pas affecté les familles et les entreprises. Les chiffres de l'Istat, l’Institut National de la Statistique, démontrent qu’en 2008 le chômage a atteint 7,1 % – une augmentation par rapport aux 6,4 % de l’année précédente – et qu’entre janvier et février 2009, 370.561 travailleurs ont perdu leur emploi ; une augmentation de 46 % si l’on compare avec la même période en 2008.
Quant au secteur industriel, le rapport 2008 de la Confédération Italienne Syndicale des Travailleurs (en italien, CISL) souligne que 900.000 emplois sont en danger1, alors que les études de la Confédération Générale Italienne du Travail (CGIL) projettent un taux de chômage de 9 % pour fin 2009 et de jusqu'à de 10,1 % pour 20102. Un autre indicateur de l’impact de la crise est que, pour la première fois en Italie, les immigrants connaissent des difficultés à trouver du travail, surtout dans le nord-est. Selon la CGIA (association d’artisans et de petits industriels), en Vénétie, 24 % des chômeurs en janvier 2009 étaient des immigrants n’appartenant pas à l’Union Européenne3.
Les fissures du système financier
Cela fait des mois que les hommes politiques et les agents financiers répètent, pour rassurer les épargnants et les marchés, que les banques italiennes et le système financier sont solides et ne courent pas le risque de faire faillite ou d’échouer. Cependant, à y regarder de plus près, la situation est plus complexe. En 2008, la bourse des valeurs italiennes a perdu 49 % de sa valeur et a maintenu une tendance à la baisse en 20094. Ce sont les organismes de crédit, représentant presque 30 % de la capitalisation de la bourse des valeurs italiennes, qui ont reçu le coup le plus fort.
Bien que le système financier italien ne se soit pas engagé dans des activités spéculatives comme les États-Unis et la Grande-Bretagne, les banques italiennes poursuivaient des politiques d’expansion énergique, surtout par le biais de l’achat d’établissements financiers en Europe orientale. Les difficultés rencontrées actuellement ont été confirmées par l’intervention du gouvernement en faveur des principaux groupes bancaires qui sont les plus exposés aux marchés internationaux. Ces dernières années, il s’est produit un transfert constant du système des pensions vers un système administré pas des fonds de pension privés. En raison de la crise financière, 5,9 % de l’épargne gérée par les fonds de pension ont été annulés en 2008. Les fonds d’investissement, qui représentent en général des risques plus importants, ont enregistré des pertes de 8,6 %5. Dans la plupart des cas, l’épargne des travailleurs a tout simplement disparu.
La réduction du crédit
Pour le moment, la pire conséquence de la crise financière a été la chute du crédit : de nombreuses banques ont réduit l’accès au crédit de manière significative, surtout pour les petites entreprises qui constituent le secteur le plus important du système de production italien. La situation est aggravée par le fait que beaucoup de banques ont progressivement transféré leurs affaires, leur activité consistant à réunir l’épargne pour le financement d’activités productives, vers des opérations financières : la moitié seulement de leurs revenus provient désormais de l’activité de crédit, alors que l’autre moitié est composée de commissions et d’affaires financières.
Les groupes les plus affectés par ces restrictions sont les immigrants, les travailleurs précaires, les jeunes et les autres secteurs de la société qui, avant la crise déjà, n’étaient pas considérés comme faisant partie du marché bancaire. Les familles sont également affectées, ce qui a produit une soudaine augmentation des prêts non bancaires à taux d’intérêt élevés, surtout dans le sud, où les familles surendettées ont augmenté de 69,4 % l’an dernier, alors que le recours à ce type de prêt a augmenté de 48,2 %6.
Apparemment, les mesures gouvernementales pour redynamiser le système des prêts n'ont pas eu de succès. Les banques les utilisent aujourd'hui pour augmenter leurs profits et leurs actifs sans élargir le canal des prêts. De la même façon, la réduction des taux d’intérêts par la Banque Centrale Européenne s’est traduite par une augmentation des bénéfices pour les banques italiennes au lieu d’améliorer l’accès au crédit pour leurs clients.
Le transfert des revenus entre travail et bénéfices a été absolument évident. Cette tendance, commune à une grande partie des économies occidentales, s’est traduite par un transfert de 8 points du PIB italien (120.000 millions d’EUR)7 des travailleurs vers les bénéfices des entreprises, dérivant en une « financialisation » progressive de l’économie.
Des réponses gouvernementales
Suite à un bref débat parlementaire, le 29 janvier 2009 il a été voté un « décret anticrise ». Les mesures adoptées sont absolument déficientes, pour deux raisons. En premier lieu, les ressources allouées sont insuffisantes, surtout quand on les compare à celles des autres pays européens (5 milliards d’EUR en Italie contre 60 milliards d’EUR en Allemagne, 38 milliards d’EUR en Espagne, 26 milliards d’ EUR en France et 22 milliards d’ EUR au Royaume Uni). En second lieu, elles ne renforceront pas le système de production. L’évasion fiscale prend des proportions inquiétantes en Italie : autour de 18 % du PIB, ce qui signifie que plus de 100 milliards de revenus sont perdus chaque année8.
Familles : Les mesures les plus importantes sont les rétributions uniques et les chèques pour les familles à bas revenus. Toute augmentation du revenu de la famille est bienvenue pour le foyer qui la reçoit, mais la somme de 40 EUR par mois (la valeur de ce que l’on appelle la « carte sociale ») ne suffit pas à couvrir ses dépenses et ne la protège pas non plus des problèmes actuels et futurs.
Travail : Le Gouvernement propose des aides au crédit et des fonds d’indemnisation pour licenciement pour les entreprises de taille plus importante. Cependant, comme 90 % des firmes italiennes sont des PME, la plus grande partie des entreprises et des travailleurs n'auront pas accès à ce bénéfice. En outre, le secteur qui en tirera le plus d’avantages est l’industrie automobile. Le Gouvernement aurait dû coupler ces transferts à des investissements dans la durabilité environnementale et l’innovation. De plus, il existe d’autres secteurs, comme le vêtement, qui ont besoin d'une aide urgente pour ne pas perdre leur compétitivité.
Bien-être social : Aucune politique de transferts de fonds pour le bien être social n’a été définie ; le gouvernement distribue l’argent sans mettre en place de réseaux de sécurité, de politiques d'emploi actives, d’inclusion sociale, de promotion, de formation professionnelle, etc. Il y aura bientôt des dizaines de chômeurs qui ne bénéficieront d’aucune structure capable de leur assurer les services essentiels nécessaires à une vie décente. En même temps, et pour ne pas avoir à faire face à des problèmes budgétaires, le gouvernement a réduit les fonds spécifiques alloués aux politiques sociales, à l’autonomie, au transport public local et à l’intégration des immigrants.
Economie : Les obligations dénommées Tremonti, émises par le Ministère de l’Economie et des Finances, sont essentiellement des prêts publics que les banques peuvent utiliser pour renforcer leurs états financiers. Leur but est de relancer le système de crédit, surtout pour les PME. Il faudra voir quels en sont les effets.
D'autres mesures : Les plans du Gouvernement pour l'avenir incluent des réductions du budget alloué à la recherche et développement et aux investissements dans l’énergie nucléaire. Les mesures qui sont censées relancer la demande comportent des investissements dans le transport à grande vitesse et dans l'immense pont sur le détroit de Messine, comme l’assouplissement de la législation sur l’environnement et les permis pour l’industrie privée de la construction. Les sujets tels que l’énergie renouvelable, ou la réduction des émissions, ou les centaines de petits projets d’infrastructure que le pays nécessite d’urgence n’ont fait l’objet d’aucune attention.
Outre les mesures anticrise, le Gouvernement propose une consultation très réduite à propos du modèle de bien-être social. Le programme inclut des propositions inquiétantes, a savoir une plus grande flexibilité de l'emploi, la mise en place de modèles « workfare » (des programmes de travail en échange d’assistance sociale), la vision de l’immigration comme un problème et non comme une ressource, et le manque de reconnaissance du secteur sans but lucratif comme acteur essentiel du système de bien-être social italien, en se référant seulement aux volontaires et en passant sous silence le rôle des milliers d’initiatives sociales existantes.
Les propositions de la Coalition Italienne de Social Watch
Afin d’apporter une réponse différente à la crise et de relancer l’économie du pays du point de vue des plus affectés, la Coalition Italienne de Social Watch propose une série de mesures :
Famille et bien-être social : Les mots-clefs devaient être « lutter contre la pauvreté et redistribuer les ressources ». Une véritable politique de bien-être social qui fasse bénéficier des services publics ceux qui ont réellement besoin d'aide, au lieu de transférer de l’argent directement, constitue l’outil principal pour assurer la redistribution des ressources dans la société. Le Gouvernement, à niveau central et local, doit améliorer les services essentiels, la santé, l’assistance, les crèches, les écoles publiques, l’intégration des immigrants et les politiques de logement, car de telles mesures représentent la véritable lutte contre la pauvreté et la vulnérabilité, ainsi qu’une politique économique contra-cyclique pour travailler contre les impacts de la crise.
Travail : L’impératif moral de tout gouvernement est d’éviter que les principales conséquences de la crise ne retombent sur les travailleurs. Parmi les mesures prioritaires se trouve la défense des travailleurs les plus démunis du point de vue contractuel par la mise en place d’un plan de sécurité sociale pour les travailleurs précaires, ainsi que des mesures d'incitation pour les entreprises qui décident de garder leurs employés.
Pour façonner une économie différente il faut une aide urgente pour permettre aux secteurs de la recherche publique et privée d’initier des processus innovants. Plus encore, il est essentiel de mettre en place un plan à grande échelle en matière d’énergie renouvelable pour réduire la dépendance à l’égard des hydrocarbures, pour combattre le changement climatique et pour appuyer les secteurs économiques durables et tournés vers le futur.
En réponse à la crise, les propriétaires de comptes bancaires en Italie font de plus en plus incursion dans le monde de la finance éthique. Le client qui soutient la finance éthique s'intéresse à la manière d’utiliser l’argent et au fait que sa banque ne fasse pas faillite. C’est ainsi que beaucoup de banques redoublent aujourd’hui leurs efforts pour améliorer leur image. Le retour à la mission originelle du système bancaire de soutenir l’économie réelle doit être un point de référence constant dans la recherche d'issues de la crise.
Le démantèlement de l’APD
Les directives 2009-2011 du Ministère des Affaires Etrangères de coopération pour le développement établissent des priorités claires9. L’Afrique subsaharienne recevra 50 % du financement bilatéral et des pays prioritaires seront identifiés dans toutes les régions. Au cœur de la coopération internationale figureront, dans l’ordre, l’agriculture, l’eau et l’environnement, la santé mondiale, l’éducation et la gouvernance. Les questions relatives aux femmes et aux droits des enfants et des personnes handicapées seront établies de manière transversale.
De tels sujets constituent le cœur du programme pour le développement de l’Italie pour la réunion du G8 de 2009, dont elle est l’hôte10. En dépit de ces affirmations ambitieuses, la coopération italienne pour le développement se trouve au plus bas niveau de son histoire. Si l’Aide Publique au Développement (APD) a obtenu 0,20 % du PIB en 200811, selon le budget de 2009 les ressources baisseront de 56 % ; elles passeront de 733 millions d’EUR en 2008 à 322 millions d’EUR en 2009 ; et elles baisseront encore plus dans les deux prochaines années, jusqu'à atteindre 215 millions d’EUR en 201112. Les ONG comme les analystes considèrent que les ressources consacrées à l’APD en 2009 pourraient tomber à un niveau aussi bas que 0,09 % du PIB si l’on n’y adjoint pas d’autres ressources13, ce qui s’éloigne beaucoup non seulement de l’objectif général des 0,7 % mais aussi de l’engagement européen de 0,51 % que l’Italie devrait atteindre en 2010. Dans la perspective du G8, l’Italie a également essayé de mettre sur le tapis un nouveau concept pour rendre compte de l’aide, qui tente de prendre en considération les contributions effectuées par « le système italien en général » (l’État, les autorités locales, les agents à but non lucratif, les fondations et les entreprises privées), minimisant ainsi l’importance de l’APD afin de cacher la trajectoire déficiente du pays dans l’accomplissement de ses promesses.
Les ONG subiront particulièrement les conséquences de cette tendance, car leurs ressources seront réduites de moitié. De plus, les fonds pour les organisations internationales ont été réduits de 68 %, ce qui met en danger l’accomplissement de la plus grande partie des engagements italiens auprès des Nations Unies. Le danger concerne surtout le financement du Fonds Mondial pour la lutte contre le SIDA, la tuberculose et la malaria, que le Gouvernement a promu lors de la réunion du G8 à Gênes en 2001.
En plus, l’aide limitée apportée par l’Italie est loin d’être efficiente et continue d’être profondément liée à l’achat de biens et de services italiens, comme l’a clairement révélé le récent bilan de l’Aide OCDE-CAD par des groupes paritaires. Les politiques étrangères de l'Italie doivent être sérieusement révisées. Le Gouvernement doit comprendre le rôle fondamental que joue la coopération au développement dans la construction de la renommée d’un pays.
1 Voir : <www.cisl.it/sito.nsf/Documenti/130BF9D1BE670162C125751300380E3D/$File/Industria2008.pdf>.
2 Voir : <www.ires.it/>.
3 CGIA. Disponible sur : <www.gazzettino.it/articolo.php?id=49282&sez=REGIONI>.
4 Voir : <www.borsaitaliana.it/chi-siamo/ufficio-stampa/comunicati-stampa/2008/081230fineanno.htm>.
5 Felice Roberto Pizzuti, sur des données du COVIP. Disponible sur : <www.sbilanciamoci.info/Sezioni/italie/Se-la-bolla-scoppia-sulle-pensioni>.
6 Associazione Contribuenti Italiani.Sportello Antiusura. Voir : <www.contribuenti.it.>.
7 Données de AMECO, recueillis à Travaglino (2009).
8 Pisani, S. y Polito, C. (éd.). Analisi dell'evasione fondata sui dati IRAP Anni 1998-2002. Agenzia delle Entrate. 2006.
9 Ministère des Affaires Étrangères (2008). La cooperazione italiana allo sviluppo nel triennio 2009-2011.
10 Voir : <www.g8italia2009.it>.
11 OCDE-CAD, “Aide au développement en 2008 à son plus haut niveau”, Paris, 30 mars 2009.
12 La cooperazione italiana allo sviluppo nel triennio 2009-2011.
13 Voir : Viciani, I. et de Fraia, L. (éd.). Aiuto pubblico allo sviluppo italiano nel 2009. Previsione dopo la finanziaria. ActionAid. 2009 <www.actionaid.it>.
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L’orthodoxie néolibérale et le jeu de l’autruche
Social Development Network
Prof. Edward Oyugi
Philip Thigo
SEATINI KENYA
Oduor Ongwen
Kenya Debt Relief Network
Wahu Kaara
BEACON
Rebecca Tanui
Daraja-Civic Initiatives Forum
Don Bonyo
Futa Magendo Chapters
Ayoma Matunga
Mazira Foundation
Eddy Orinda
Haki Elimu
Opiata Odindo
Kenya Land Alliance
Odenda Lumumba
Migori Clan
William Janak
KETAM
James Kamau
Kenya-Cuba Friendship Association
Mwandawiro Mganga
Bunge la Mwananchi
George Nyongesa
ChildFund Africa Region
Andiwo Obondoh
Undugu Society of Kenya
Alloys Opiyo
Le capitalisme néolibéral a perdu sa raison d’être. Il s'agit d'une crise structurelle de la démocratie libérale, mais au Kenya le Gouvernement refuse de voir la réalité et fait l'autruche qui met la tête dans le sable. L’élite gouvernante affirme que la crise est circonstancielle et que l’économie nationale est suffisamment protégée en raison de la faiblesse de ses liens avec le capital international. La société civile kényane continue à avertir que, contrairement aux prédictions du gouvernement, le pays est sur le point de plonger dans les eaux turbulentes du néolibéralisme.
Après trente ans de capitalisme de marché libre, sans obstacles et fondé sur un modèle néolibéral, les défaillances d’un système obsolète ne peuvent plus être cachées.
La marchandisation et la privatisation des actifs publics, considérés essentiels jusqu’à présent pour assurer la prospérité, ont provoqué le transfert des actifs du domaine public et populaire aux domaines privés des classes privilégiées. Par conséquent, la « financiarisation1 » rapace et spéculative des transactions commerciales a provoqué une forte augmentation des transactions financières quotidiennes sur les marchés internationaux, qui sont passées de 2.300 millions d’USD en 1983 à 130.000 d’USD millions en 2001. Il n’est pas étonnant alors de constater que la dérèglementation ait permis que les systèmes financiers assument un rôle protagoniste dans la redistribution par le biais de la spéculation, la déprédation, la fraude effrontée et le vol. Les plans visant à la relance peuvent représenter un chemin technique dans la direction correcte, notamment si ceux-ci peuvent fonctionner depuis le bas vers le haut et non le contraire par un système bancaire inerte. Néanmoins, ces plans sont encore –essentiellement– des solutions techniques conçues pour relancer la demande et parvenir à ce que les consommateurs continuent à acheter au lieu de leur permettre de remettre en question la prétendue efficacité du capitalisme néolibéral.
Le Kenya est très familiarisé avec les promotions des valeurs, les pyramides financières (schémas Ponzi), la destruction des actifs structurés par l’inflation qui a été fortement lié à l’anéantissement des actifs provoqué par la privatisation frauduleuse, l’esclavage des débiteurs, les escroqueries corporatives et le dépossession effrontée des actifs, tel que dans le cas de l’anéantissement débridé du Fonds National de la Sécurité Sociale (FNSS). Cette situation a enfin mené à des effondrements para-étatiques et à l'anéantissement des valeurs à cause de la manipulation du crédit et les manipulations malhonnêtes des personnes liées au marché du capital, tels que Suntra Investments, Nyaga Brokers Ltd., Francis Thuo Ltd. et d’autres.
Le FNSS a été créé en 1966 comme un fonds provisoire obligatoire pour la totalité des travailleurs du pays. Bien que les travailleurs et les employeurs ne contribuent qu’avec 400 KES (5,4 USD) par mois, le Fonds dispose –par la force de son énorme taille– d’un portefeuille cumulé qui s’élève à plus de 80 KES milliards (1.079 millions d’USD) ce qui équivaut à 8,2 % environ du PIB du pays. Le Gouvernement continue à faire usage du Fonds pour ses partenaires les plus proches, en oubliant qu’il s’agit d’un plan contractuel d’épargne et d’investissement destiné au soutien de la retraite. À l’origine, le FNSS n’était qu’un département au sein du Ministère du Travail, mais en 1987 il est devenu un service para-étatique autonome. Depuis ce moment-là, les retraités n’ont éprouvé que de la mélancolie.
Au cours de la campagne des premières élections multipartites des années 1991-1992, le FNSS a été utilisé comme source principale de fonds pour payer des subornations destinées à huiler la machinerie de la campagne électorale du parti officiel Kenya African National Union (KANU). L’argent des retraités a été retiré du Fonds afin de financer des affaires immobilières suspectes qui faisant naître des millionnaires du jour au lendemain parmi les jeunes connus à cette époque-là comme la Jeunesse pour KANU ’92 . Le FNSS a continué à être utilisé comme vache à lait par des individus ayant des liens politiques, et cette situation n'a été publiée par la presse que 10 ans plus tard, lorsqu’au cours d’un accord préélectoral en 2002 le Fonds a perdu un montant de 256 millions de KES (3,45 millions d’USD) pour une escroquerie avec l’Euro Bank dans le financement de la campagne présidentielle.
Fidèle à ses habitudes, le FNSS a retrouvé son célèbre profil lors des élections suivantes. Un terrain commercial adjacent au Laico (ancien Grand) Regency Hotel, également en proie au scandale, a été vendu au moins offrant. D’après ce qui a été divulgué, le FNSS a rejeté une offre pour un montant de 1.400 millions de KES (18,88 millions d’USD) pour ce terrain et en a accepté une autre pour un montant de 1.300 millions de KES (17,53 millions d’USD) après que le moins offrant ait offert une « enveloppe » aux syndics pour un montant de 650 millions de KES ( 8,77 millions d’USD). La Direction du Fonds l’a nié, mais au mois de juillet 2008 le Ministre du Travail a dissous le Directoire et a renvoyé le Syndic Général afin de préparer le terrain pour enquêter sur ce scandale et sur d’autres également. En septembre 2008 le FNSS était sur le point de perdre 1 milliard de KES ( 13,49 millions d’USD) chez Discount Security –une société de courtage de valeurs s'étant effondré et liée à un ancien syndic général du FNSS, d'après les informations. Le fait que l’État néolibéral doive éviter le marché pour des raisons d’efficacité stratégique est une supercherie mise à nue car, au lieu de maximiser son efficacité hors du marché, il a acquis le rôle d'agent principal des politiques de redistribution, investissant le flux des ressources de la classe dominante à la classe ouvrière, ce qui ne peut être associé qu’à l'ère du libéralisme enraciné ; et subventionnant les personnes riches de la société d'une manière efficace par des pratiques de déflation confiscatoire2.
Traitement de faveur pour les criminels
Nulle part cette idée n’est démontrée avec autant de crudeur que comme dans le cas de la fraude publique de l'Offre Publique Initiale (OPI) des actions de Safaricom. En dépit du désaccord des organisations de surveillance de la société civile et du Mouvement Démocratique Orange – le partenaire principal de la coalition de l’administration Kibaki – le Gouvernement du Kenya a décidé de se défaire de 25 % de ses actions à Safaricom, une compagnie de téléphonie mobile, pour percevoir 50 milliards de KES (674 millions d’USD), montant nécessaire pour couvrir son déficit budgétaire.
Deux inquiétudes surgissent. Premièrement : comment est-il possible qu’une compagnie anonyme et étrangère, connue sous le nom de Mobitelea, puisse avoir 10 % et après 5 % d’une entreprise publique au Kenya et, ce qui est plus le déconcertant encore : pourquoi cette compagnie étrangère n’a jamais payé un centime pour acquérir des actions à Safaricom ? Deuxièmement : lorsque le Gouvernement a offert la vente de 25 % de ses actions à Safaricom, il a fait croire aux citoyens que ces actions rendraient publique la propriété de cette entreprise. Néanmoins, lorsque Safaricom a enfin été mise en vente, la citoyenneté n’a pas eu le droit de disposer de la première option pour donner une réponse négative. Ils ont dû se mettre en concurrence avec le reste de l'Afrique Orientale tandis que 35 % sur les 25 % des actions offertes par le Gouvernement était réservé à certains investisseurs étrangers anonymes. D’après les rumeurs, ces investisseurs appartiennent à l’oligarchie locale, ayant des intérêts très forts dans des compagnies offshore. Comme si cette escroquerie n’était pas suffisante, l’OPI (la première offre au public des actions de la compagnie en bourse) a été effrontément survendue. Enfin, les courtiers en bourse de Safaricom ont dû rembourser une somme équivalente à 236 milliards de KES ( 3.183 millions d’USD) dont 119 milliards de KES (1.605 millions d’USD) appartenaient à la population locale. Presque un an plus tard, la plupart des candidats (dont l'énorme majorité correspond à des gens ordinaires qui ont obtenu des prêts bancaires) n’a pas encore reçu ses remboursements, et les actions de Safaricom sont tombées de plus de 50 % pendant la semaine du 9 mars 2009.
La Bourse de Nairobi a été récemment témoin d'une croissance soudaine des courtiers malhonnêtes en valeurs immobilières à la bourse. En moins de deux ans, quatre de ces sociétés de courtage ont dû fermer leurs portes après que des activités frauduleuses et des vols effrontés des fonds d’investissements des clients ont été mis à découvert. Parmi ces sociétés, la première dont la situation a être mise en lumière fut Francis Thuo Stock Brokers, que la Bourse a suspendu en 2007. Il convient de remarquer que son propriétaire, M. Francis Thou, a été le président de la Bourse pendant longtemps. A l’époque où cette entreprise était suspendue, plusieurs plaintes ont été déposées contre une autre société Nyaga Stock Brokers auprès de l’organisme régulateur, l’Autorité du Marché du Capital (AMC). Mais aucune mesure n’a été prise à ce sujet. Enfin, la presse locale a publié en mars 2008 que le capital opérationnel de Nyaga non seulement était négatif mais que l’entreprise avait utilisé les profits obtenus par la commercialisation illégale des actions des clients pour étayer son capital opérationnel. La Bourse a fait semblant d’être surprise, et a créé tout de suite un plan de rachat pour un montant de 100 millions de KES (1,4 millions d’USD) afin de protéger les clients affectés. Après cet événement, personne n'a plus rien dit. Jusqu’à présent, ni Nyaga ni Francis Thuo n’ont eu à répondre d’accusations criminelles.
Ensuite, Discount Securities et Suntra Investments ont suivi le même chemin. Le traitement faveur accordé à ces entreprises criminelles donne l’aval non seulement au caractère débridé des mauvaises pratiques de la Bourse mais aussi à l’abus du célèbre marché libre et efficace, ce qui est encore plus grave. Une partie de la société civile exige sans cesse qu’un marché gérant des fonds publics d’une telle envergure doit avoir une entité régulatrice forte, efficace et indépendante. L’AMC n’est pas qualifiée pour cela : cette autorité est obsédée par le maintien du statu quo, en permettant que les courtiers en bourse malhonnêtes gardent le contrôle avec leurs jeux perpétuels et leurs manipulations de pouvoir.
Au cours des 20 dernières années, pas moins de 20 banques commerciales privées ont fait faillite avec les fortunes des déposants – notamment celles des retraités et des épargnants du secteur informel – estimées à 70.000 millions de KES (944 millions d’USD). Parmi les banques privées et les institutions financières qui se sont effondrées entraînant la perte des fonds des déposants se trouvent : Rural Urban Finance Company, Jimba Credit Finance (propriété de la Bourse de Nairobi, Jimna Mbaru), Trade Bank, Trust Bank, Continental Bank (propriété de certaines personnes proches du président Kibaki) et Euro Bank. Au Kenya, ces criminels continuent à être désignés à de hautes fonctions publiques. Le 16 décembre 2008 – en plein milieu de la crise financière mondiale croissante – le Cabinet a décidé de privatiser d’autres institutions financières, y compris le National Bank of Kenya et le Consolidated Bank.
Le jeu de l’autruche
Tandis que les doutes concernant l’efficacité immuable des forces du marché dans les principales économies capitalistes ne cessent d’augmenter, les économies du Sud – leurs clients – refusent toujours de voir la réalité et gardent une confiance aveugle en la nature cyclique des crises capitalistes. Lorsque les principes économiques qui nourrissent les économies de marché libre ont commencé à s’effondrer, l’élite politique kényane, telle l’autruche légendaire du désert, a enfoui sa tête dans le sable en attendant que la crise se passe. Face à ce silence, les organisations de la société civile préviennent que le navire économique du Kenya prend l’eau et que les mesures de sauvetage s’avèrent urgentes.
Les occasions de provoquer un désaccord augmentent, et celles-ci doivent être prises en compte avant que le pays ne subisse une résurgence néoconservatrice. Pendant ce temps, l’illusion affirmant que les économies du Sud seront protégées de l’effondrement car n’étant absolument pas intégrées à l’économie capitaliste globale, et qu’elles peuvent même en bénéficier grâce à l’escalade de la demande interne, est une idée qui doit être rejetée. La descente cyclique (bien que sévère) des fortunes historiques du capitalisme est confondue avec la crise fondamentale. L’élite kényane gouvernante ne s'est pas encore aperçue de l’imminence du désastre: l’insécurité alimentaire massive, le désastre environnemental imminent (de la Forêt Mau, du Mont Kenya, du Lac Victoria, etc.), le chômage/sous-emploi, l’escalade des délits, la disparité entre les riches et les pauvres, la diminution du tourisme et du volume des fonds provenant de l'étranger.
Au lieu de prendre garde, la récente Conférence Nationale « Le Kenya Que Nous Désirons », ainsi que l'instrument politique actuel pour transformer le Kenya en une économie de revenus moyens pour l'année 2030 (« Vision 2030 »), adhèrent toujours au Consensus de Washington, totalement discrédité. Même si les économies occidentales injectent de nouveaux fonds de rachat massif dans leurs institutions financières, et dans certains cas étatisent à nouveau leurs banques, le Parlement kényan légifère à présent la privatisation des maigres actifs sociaux stratégiques qui restent encore, afin de fournir au gouvernement une injection unique de revenus3.
Il est probable que les plans préférés par les gouvernements occidentaux visant à la relance et au sauvetage n'établiront pas de différence remarquable, au-delà de l’harmonisation des réponses à la crise du Gouvernement et des entreprises. En tant que mesures provisoires, ces plans ne peuvent que retarder ce qui est inévitable. Si la propriété des moyens de production n’est pas démocratisée, et si les mécanismes internes de l’économie nationale ne sont pas renforcés, l'initiative de restructure globale de Klaus Schwab, lancée à Davos au mois de février 2009, ne pourra rien faire pour résoudre le problème de la crise. Face à cette situation, même les traités commerciaux aujourd'hui en discussion, ainsi que les Accords d'Association Économique (AAE) doivent être renégociés.
Souvent, un moment épique dans l’histoire de la pratique sociale est catalysé par des catastrophes comme celle que nous expérimentons à présent, notamment celles qui entraînent des changements substantiels en ce qui concerne les attitudes et les conduites sociales. On pouvait apercevoir les signes de difficultés du capitalisme depuis très longtemps, mais de manière progressive. Maintenant ils sont évidents. Le système capitaliste mondial ne mérite aucune remise à niveau. Il exige une reconstruction faite par de nouveaux acteurs, favorisés par l’histoire. C’est la crise de la démocratie libérale, dont la tentative d'offrir justice économique et équité a échoué.
1 N. du T.: financialisation : mot anglais qui définit l’acheminement de l’investissement vers la spéculation financière.
2 Voir : Wade, R. Governing the Market: Economic Theory and the Role of Government in East Asian Industrialization. Princeton : Princeton University Press, 1992.
3 Organisations devant être privatisées : Compagnie de Génération d’Électricité du Kenya (KENGEN) ; Kenya Pipeline Company ; Compagnie Sucrière Chemelil; Compagnie Sucrière Sony ; Compagnie Sucrière Nzoia ; Compagnie Sucrière Miwani ; Compagnie Sucrière Muhoroni ; Autorité pour le Développement du Tourisme du Kenya et certains hôtels ; Banque Nationale du Kenya ; Consolidated Bank ; Banque pour le Développement du Kenya ; Kenya Wine Agencies Ltd ; East African Portland Cement Company ; Commission de la Viande du Kenya ; New Kenya Cooperative Creameries ; Autorité Portuaire du Kenya, par le biais d’un terminal à conteneurs à Eldoret, la sous-traitance des services d’arrimage et la construction de nouvelles amarres.
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Absence de dialogue sur la crise
Arab NGO Network for Development (ANND)
Ziad Abdel-Samad, Directeur Exécutif
La crise économique et financière mondiale attire une attention croissante dans les discours officiels car le Gouvernement est arrivé à la conclusion qu’à moins d’être traitée de façon responsable et sérieuse, ses impacts seront très sévères. Bien que les effets directs de la crise n’aient pas été encore ressentis dans le pays, la nature de son économie le rend très vulnérable. Néanmoins, même si un dialogue national s’avère nécessaire, le Gouvernement n’est entré en concertation avec aucune ONG ou aucun autre organisme concerné.
En dépit de la crise financière mondiale, l'année 2008 a été marquée par des indicateurs positifs. En fait, d’après la Banque Centrale du Liban et la Corporation Financière Internationale, le pays a bénéficié d’une croissance de 8 %, provenant notamment des secteurs immobilier, touristique, de la construction et des services financiers (secteur bancaire). Le facteur d'incidence le plus important a été celui des envois de fonds des travailleurs depuis l'étranger. Ceux-ci, d’un montant de 8 milliards d’USD environ, ont été équivalents à plus de 10 % de la totalité des dépôts dans les banques commerciales et d’investissement du pays. En outre, la relation entre dette et PIB a chuté de 180 % à 162%1.
Parmi les raisons pour lesquelles le Liban n’a senti que lègèrement les effets de la crise jusqu’à présent, il y a l’envergure réduite de son économie, de son secteur financier et de ses opérations; les taux modestes de croissance enregistrés pendant les années précédentes; la situation satisfaisante du secteur bancaire, qui dispose d'une solvabilité de 95 milliards d’USD – équivalente à 322 % du PIB – et activement réglementé par la Banque Centrale ; et l’aide externe, qui contribue à surmonter les défis économiques et financiers du pays.
Toutefois, l’économie présente de nombreux déséquilibres structuraux qui la rendent vulnérable face aux répercussions de la crise, y compris un déficit budgétaire de 30 %, un déficit de deux tiers de la balance des paiements, la relation dette/PIB mentionnée ci-dessus (162 %), et un taux d’inflation supérieur à 10 %. L’année prochaine, les envois de fonds depuis l’étranger pourraient diminuer et -en même temps- la migration inverse se traduirait par une plus grande demande d'emploi. La crise mondiale a déjà commencé à affecter les pays du Golfe, notamment les Émirats Arabes Unis.
Compte tenu de ce contexte, les prédictions les plus optimistes (du Fonds Monétaire International et du Ministère des Finances) prévoient une croissance pour l'année 2009 ne dépassant pas 5 %. En outre, la relation dette/PIB devrait augmenter en raison du déficit budgétaire et du besoin d'obtenir de nouveaux prêts pour couvrir les dépenses. Le Ministère des Finances estime une augmentation de la dette publique de 4 milliards d’USD.
En outre, l'approfondissement de la crise globale entraînera une chute des investissements et de l'investissement direct étranger (IDE) dans les pays arabes, ainsi qu’une réduction des montants de l’aide promise lors de la conférence des pays donneurs à Paris au mois de janvier 2007 (Paris III)2. Bien que le secteur bancaire soit le moteur principal de l'économie du Liban, il peut perdre sa capacité de récupération en raison de la crise de confiance des marchés financiers et de leurs relations avec les banques internationales et régionales3.
Panorama économique et social
Le rapport du PNUD "La pauvreté croissante et la distribution des revenus au Liban" montre que 28,5 % de la population est en-dessous du seuil supérieur de pauvreté, et 8,1 % en dessous du seuil inférieur4, indiquant un grand déséquilibre dans la distribution géographique de la pauvreté concentrée dans les zones rurales et dans la périphérie des villes principales. Cela se confirme encore davantage par le coefficient de Gini libanais de 0,375. Les raisons principales en sont les politiques économiques adoptées par les gouvernements successifs – la plus significative étant celle de la recherche de croissance en relançant l’IDE et la création d’un paradis fiscal. Dans le même temps, les politiques orientées vers la redistribution équitable des dividendes issus de la croissance par le biais d'une structure fiscale équilibrée et de la prestation des services de base, ont été ignorées.
Les autorités libanaises, y compris le Premier Ministre, encouragent le système de marché sans mentionner le rôle que devrait jouer le Gouvernement quant au contrôle des mécanismes du marché et à la relance des investissements dans les secteurs productifs ou générateurs d’emploi5. Les investisseurs se sont concentrés dans la construction, les biens immobiliers et les finances, en négligeant l’industrie et l’agriculture.
On devrait mentionner que M. Pierre El Gemayel6, l’ancien Ministre de l’Industrie décédé, avait fait parvenir au Cabinet des Ministres en 2006 une proposition dénominée « Industrie pour la Jeunesse 2010 ». Ce plan de 10 ans avait été créé dans le but de relancer et de renforcer le secteur, mettant l’accent sur son rôle clé pour la promotion de la croissance économique et de la création d’emploi7 ; il soulignait la nécessité d’un engagement national face au développement de l’industrie et dénonçait le manque de cohérence des politiques nationales. Cependant, ce plan n'a pas été mis en œuvre par le Gouvernement. L’économie s’est donc orientée de plus en plus vers les services financiers et bancaires, et vers une économie de rentes, tandis que les investissements dans les secteurs productifs du pays brillaient par leur absence.
Le plan du Gouvernement
Plusieurs mois après le début de la crise financière –et compte tenu des avertissements sur ses conséquences au niveau national, régional et mondial– le Gouvernement a enfin compris l'envergure du problème et a présenté un plan de prévention de deux ans dans le but d'atténuer ses effets sur l'économie nationale. Le plan s’articule autour de trois points principaux : (1) injecter des liquidités sur les marchés moyennant une augmentation des salaires publics et privés, et commencer des projets de construction et d’infrastructure avec l’aide du Conseil de Développement et de Reconstruction (CDR)8 et d’autres agences gouvernementales ; (2) relancer les projets nécessaires pour obtenir les fonds promis lors de la conférence Paris III ; et (3) encourager les investissements et favoriser le secteur privé en abaissant les impôts et les tarifs et en établissant trois zones franches dans différentes régions du pays.
Néanmoins, cet ensemble de mesures n’a pas réussi à conformer un plan national intégral, ainsi que l’exige un défi de cette envergure. Les projets du Gouvernement visant à injecter des liquidités dans l’économie s'élèvent à 10 % du PIB, en accord avec les mesures adoptées par les pays industrialisés pour faire face à la crise9, mais le déficit budgétaire accumulé limite sa capacité de dépense. Par conséquent, il devra avoir recours au prêt, et augmentera par conséquent la dette publique et le service de la dette.
En outre, bien que les plans du Gouvernement comprennent une augmentation des salaires et l’abandon des charges de la sécurité sociale pour encourager de nouveaux investissements, ces mesures ne montrent pas sa volonté de jouer un rôle dans la relance de l’économie. L’augmentation ne fait qu’éliminer le gel des salaires qui a duré plus d’une décennie. Le plan compte aussi sur une baisse des prix du pétrole, ce qui entraînerait une réduction des coûts dans la production d’électricité et dans le transport public. En outre, l’abandon des charges de la sécurité sociale se fait au détriment des droits des travailleurs à la protection sociale, notamment parce que le déficit budgétaire du Fonds National de la Sécurité Sociale menace sa capacité de satisfaire aux besoins des bénéficiaires. L’injection des liquidités, l’augmentation de la dette publique ainsi que la diminution des envois de fonds depuis l’étranger entraîneront une pression plus forte sur l'économie et sur les finances publiques10.
En plus, bien que le Gouvernement fasse confiance au calendrier de Paris III en tant que base de son plan de travail, cela a d’abord été conçu comme un ensemble de mesures pour réduire, d’une part, la dette en freinant les dépenses et l’augmentation des revenus, et d’autre part, le service de la dette en privatisant les secteurs des télécommunications et de l’énergie. Dans le but d’accroître les recettes, le plan cherche à augmenter la TVA et les impôts sur d’autres produits de consommation. En ce qui concerne les services de base, Paris III a été la première conférence des « Amis du Liban » qui a traité les sujets sociaux ; cependant les solutions proposées se bornent à quelques programmes fondés sur des réseaux de protection sociale et non pas sur une stratégie nationale pour le développement social. Il convient de souligner que Paris III a mentionné le besoin d’introduire des réformes administratives au sein de l’administration publique et des ministères.
Aussi bien le Premier Ministre que le Ministre des Finances ont reconnu les conséquences négatives attendues de la crise mondiale, ainsi que la nécessité de protéger l’économie nationale11. Néanmoins, à titre de réponse, ils répètent leur engagement de respecter le calendrier de Paris III sans réaliser aucune révision ni reconsidérer les mesures établies. Bien qu’en théorie le calendrier ait été conçu pour assumer les défis financiers et économiques du Liban, dans la pratique il accélère les procédures nécessaires pour que ce pays s'affilie à l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC), notamment lorsque ce calendrier arrivera aux étapes finales de la table-ronde bilatérale et multilatérale de négociations sur les services et les produits agricoles et non agricoles.
Le Gouvernement devra réévaluer le calendrier de Paris III, y compris la portée des mesures de dérèglementation des entreprises et les exigences concernant l'OMC. Il devrait réviser et élargir les considérations sociales de son plan et les mécanismes pour relancer l’économie, en investissant dans les secteurs productifs et en traitant le sujet de la monopolisation du marché national, qui rend difficile l'apparition de nouveaux entrepreneurs et de petites et moyennes entreprises12.
Le rôle de la société civile
Le Forum de Haut Niveau III sur l’Efficacité de l’Aide, qui a eu lieu à Accra en 2008, a souligné le principe de « l’appropriation démocratique ». Cela devrait se refléter dans des processus de concertation au niveau national, y compris parmi les représentants de la société civile, afin de pouvoir formuler des stratégies nationales et définir les priorités pour faire face aux défis économiques et financiers et aux besoins sociaux du pays.
À son tour, la Conférence sur le Financement du Développement qui a eu lieu à Doha au mois de novembre 2008 a souligné la nécessité des apports de la société civile en ce qui concerne la formulation et l’adoption de politiques nationales pour le développement économique et social. L’importance des liens entre la démocratie, le développement social et la participation active de la société civile, a été soulignée également. En outre, la conférence a également conclu que les pays en voie de développement seraient spécialement vulnérables à la crise mondiale à moins que les politiques actuelles ne soient revues, que des objectifs ne soient établis et que des actions collectives et responsables ne soient développées pour les atteindre.
Les organisations de la société civile (OSC) jouent un rôle important dans l’élaboration de stratégies de développement sensées répondant aux priorités et aux droits des communautés locales. Le travail des activistes apporte une valeur ajoutée au processus d’adoption de politiques économiques, financières et sociales adéquates et au contrôle de ses conséquences. Les OSC agissent en faveur des lois qui protègent les droits économiques, sociaux et culturels de la citoyenneté. Sa lutte permanente pour contrôler, par exemple, la mise en place de la Convention pour l'Élimination de Toutes les Formes de Discrimination contre les Femmes et la Convention sur les Droits de l'Enfant, a remporté un énorme succès. De plus, et parmi d'autres exemples remarquables, les OSC ont réalisé d'importantes contributions à la réforme des lois électorales parlementaires et municipales, ainsi qu'à l’élaboration de plusieurs lois contre la corruption.
Au Liban, les mécanismes de concertation visant à l’élaboration de politiques entre le Gouvernement et les OSC ne sont pas efficaces. Toutefois, les OSC sont de bons partenaires pour la prestation des services sociaux, soit à titre particulier en offrant des services avec des centres répandus dans tout le pays, ou bien en association avec des institutions appartenant au secteur public. En revanche, en ce qui concerne les activités de lobby pour obtenir des réformes économiques et financières, les OSC ne sont pas très actives, notamment en raison de leur manque d'expérience dans ce domaine. Vu que ce processus devient chaque fois plus important, les OSC doivent s'impliquer davantage et développer des stratégies et des objectifs clairs dans le but d’un soutien réussi.
Dans une conjoncture où atteindre les défis demande une convergence d’efforts pour former des alliances nationales et régionales, certaines OSC ont essayé d’établir un dialogue à propos de la crise, de ses causes et ses conséquences, et sur les différentes manières de l’aborder. Malgré cela, le Gouvernement persiste à ignorer ces efforts et à prendre des décisions sans concertation efficace avec les parties concernées.
1 Ministère des Finances. Debt And Debt Markets, 7, Quatrième trimestre, 2008.
2 Paris III est la troisième des « Conférences des Amis du Liban pour l’Investissement et le Financement », qui ont eu lieu à Paris en février 2001, en novembre 2002 et en janvier 2007. La dernière a eu lieu quelques mois après la guerre d’Israël contre le Liban en 2006; son programme a été établi autour de trois objectifs principaux: (1) répondre aux résultats de la guerre israélienne en ce qui concerne la réhabilitation et la reconstruction, (2) répondre à la crise économique et financière à laquelle le Liban faisait face, (3) adopter le Plan d’Action Social présenté par le Gouvernement libanais. ANND a analysé le document de Paris III dans le rapport national compris dans Social Watch 2007.
3 Hamdan, K. (2008). “Primary Reading in the Implications of the Financial and Economic Crisis”.Al-Safir, N° 11146, le 10 novembre.
4 Laithy, H., Abu-Ismail, K. et Hamdan, K. (2008). Poverty Growth and Income Distribution in Lebanon. IPC Country Study N° 13. Brasilia : International Poverty Centre (IPC) et Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD).
5 Plus récemment, lors de son discours d’ouverture au 17ème Forum Économique Arabe qui a eu lieu à Beyrouth du 2 au 3 avril 2009, le Premier Ministre Fouad Siniora a remarqué l’absence d’alternatives pour l’économie de marché.
6 Gemayel a été assassiné à Beyrouth en novembre 2006.
7 Voir : <www.industry.gov.lb>.
8 Le CDR est une structure autonome responsable de la planification et de la mise en œuvre des grands projets d’infrastructure dans tout le pays. Le Premier Ministre supervise directement son fonctionnement.
9 Iskandar, M. “Mr. Prime Minister, Your Plan 2009–2010 is Not Convincing”. Al-Nahar, N° 23612, le 15 février 2009.
10 Le Ministère des Finances estime que le coût de cette politique entraînera une augmentation de la dette publique de 4.000 milliards d’USD.
11 Le premier ministre actuel a été ministre des Finances pendant la période 1992-1998 et 2000-2004. Le ministre des Finances actuel a travaillé au FMI avant de devenir le conseiller principal du Premier Ministre en 2005; il a assumé ses fonctions au mois de juin 2008.
12 Hamdan, K. “ Primary Reading in the Implications of the Financial and Economic Crisis ”. Al-Safir, N° 11146, le 10 novembre 2008.
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Une perspective sombre
Chee Yoke Heong
Third World Network
La Malaisie, dont la croissance économique dépend en grande mesure de ses exportations et qui importe la plupart de ses aliments, devra se préparer pour affronter des années de difficultés économiques. Il existe une forte chute de la production industrielle, le chômage est au plus haut et les analystes prévoient que la récession pourrait être pire que celle de 1997. Le Gouvernement a été critiqué parce qu’il a réagi tardivement et qu’il s’est consacré au sauvetage des entreprises. Les organisations de la société civile manifestent et font des débats publics pour conscientiser le public sur les répercussions négatives de cette crise, spécialement par rapport aux secteurs vulnérables de la société.
Comme beaucoup de pays, la Malaisie n’a pas été épargnée par la crise financière, économique, énergétique et alimentaire qui a sévi dans la plupart des pays du monde en 2008, et dont les effets perdurent encore. Cette situation ainsi que les changements radicaux dans le paysage politique malaisien à la suite des résultats inattendus des élections nationales de mars 2008, ont absorbé l’attention de tous les Malaisiens alors qu’ils devaient faire face aux conséquences de la crise. Avec l’avènement d’un nouveau premier ministre et l’entrée du pays dans une période d’incertitude économique, beaucoup des Malaisiens évaluent leur futur avec beaucoup d’attention.
Sur la voie de la décélération économique
Pendant une grande partie de l’année, la Malaisie a nié que le pays pourrait être touché par la crise financière et économique qui ravageait la plupart des pays du monde, alors qu’un pays après l’autre, même son voisin Singapour, annonçait que la récession était déjà là. Les autorités malaisiennes soutenaient que les bases du pays étaient solides et que par conséquent il n’était pas nécessaire de prendre de mesures. Ceci aurait pu être vrai pendant la première étape de la crise financière, qui a commencé aux États-Unis et en Europe en 2007 et qui s’est aggravée pendant les premiers six mois de 2008 ayant eu jusqu’alors peu de conséquences pour la Malaisie. Mais quand la crise financière a commencé à toucher l’économie réelle de la production et des revenus des pays occidentaux pendant la deuxième moitié de 2008, les répercussions se sont transmises à la Malaisie de façon croissante vers la fin de l’année. Cette situation a fait que nombreux sont ceux qui ont considéré que le plan de relance de 2 milliards d’USD, pas encore été dépensés en grande mesure, annoncé par le Gouvernement en novembre était une réponse insuffisante et tardive. (Sur le 1,8 milliard d’USD canalisé, seulement 400 millions d’USD ont été utilisés pour la mise en oeuvre de projets).
Les statistiques officielles montrent que la récession qui a touché les pays occidentaux a porté un sérieux coup à des pays comme la Malaisie pendant les derniers mois de 2008. La diminution des indicateurs clés a été d’une dimension surprenante, montrant d’abord que l’économie malaisienne commençait à stagner, puis à décliner, pendant les trois ou quatre derniers mois de 2008 et les premiers mois de 2009. L’économie s’est contractée de 6,2 % par rapport à l’année 2008 pendant le premier trimestre, et cela plus rapidement que prévu, obligeant le Gouvernement à recouper sévèrement ses projections avec un resserrement économique d’environ 4 % à 5 % pour l’année 2009.
Il n’y a pas de doute que la crise mondiale est responsable de la décélération, puisque la Malaisie est une des économies les plus ouvertes de l’Asie du point de vue commercial, avec des exportations qui représentaient plus de 90 % de son PIB en 2007, par rapport à 14 % en Inde, 16 % au Japon, 36 % en Chine et environ 60 % en Thaïlande et à Taiwan. Seulement Singapour (avec 186 %) et Hong Kong (166 %) ont un rapport entre les exportations et le PIB plus élevé que la Malaisie.
Les conséquences du resserrement économique de ses principaux associés commerciaux peuvent se voir dans la chute radicale de la demande extérieure. Bien que les exportations de la Malaisie soient très diversifiées, avec de nombreuses matières premières et des produits industrialisés, le problème est que presque tous les articles d’exportation sont touchés en même temps. Les exportations brutes ont baissé de 18 % au dernier trimestre 2008 par rapport au trimestre précédent. La diminution la plus inquiétante s’est produite avec les exportations industrielles, spécialement celles de produits électroniques, de machinerie et d’appareils électriques, qui représentent le gros des exportations industrielles ou environ 35 à 40 % du total des exportations. Les matières premières, qui au début de 2008 étaient encore prospères, avant que n’éclate la bulle des prix, n’ont pas été épargnées puisque les exportations de pétrole, d’huile de palme et de caoutchouc ont chuté au même moment. C’est pour cela que les moteurs de la croissance des exportations se trouvent au point mort ou en marche arrière. Un autre signal inquiétant est la forte chute constante de la production industrielle depuis juillet 2008, les dernières statistiques montrent qu’en janvier 2009 la production a diminué de 20 % par rapport à l’année précédente.
Le chômage
La décélération du commerce international donne une perspective de la situation du travail de plus en plus difficile. Il est prévu que le taux de chômage de la Malaisie atteigne 4,5 % en 2009, par rapport à 3,8 % en 2008. En 2008, environ 33.000 postes de travail ont été perdus, la plupart pendant les derniers mois de l’année, à mesure que la crise internationale s’aggravait avec l’entrée en récession des marchés clés de l’Asie. Depuis octobre 2008, sur presque 26.000 emplois perdus, 85 % appartenaient au secteur industriel, avec l’industrie de l’électronique et de l’électricité particulièrement touchée. Les exportations de ce secteur sont tombées de 34 % en janvier 2009 par rapport à 2008. La Fédération des Entrepreneurs de Malaisie fait les projections les plus sévères, prévoyant une pointe de 200.000 emplois perdus, ce qui dépasse de loin les 85.000 emplois perdus pendant la crise financière de 1997 et 1998.
Cette tendance négative n’échappe pas à l’interprétation des analystes comme la Banque Suisse d’Investissements, le Crédit Suisse, signalant que les risques de resserrement économique de la Malaisie sont « les plus élevés d’Asie, après Hong Kong et Singapour, spécialement à cause de la forte diminution du prix des matières premières ». C’est pourquoi certains disent qu’il est nécessaire que le pays réévalue ses politiques industrielle et d’exportation, voire même toute sa politique économique. Il existe une forte sensation que le pays doit sérieusement réduire sa dépendance aux exportations et préparer le marché intérieur pour la croissance.
Le Gouvernement a reconnu que la crise était très grave et a annoncé un deuxième plan de relance plus profond qui s’étendra sur les deux années à venir. Cela représentera un grand effort d’arrêter la décélération et d’empêcher que le pays entre dans une récession grave qui, si elle n’est pas abordée, aurait de sérieuses répercussions sur la stabilité sociale et politique. Le plan de 17 milliards d’USD sera destiné à une injection fiscale, aux fonds de garantie et d’autres instruments d’aide pour l’industrie, aux investissements en actifs et aux relances fiscales. Les quatre objectifs principaux du plan de relance sont la protection et la création d’emplois, la réduction du poids de la crise sur la population, l’assistance au secteur privé et la formation pour l’avenir.
Avec l’augmentation de la perte d’emplois et la perspective de davantage de licenciements, le Gouvernement a commencé à revoir sa politique par rapport aux travailleurs étrangers qui ont représenté une source indispensable pour beaucoup de secteurs. Inquiet du grand nombre de licenciements, le gouvernement a annoncé que les entreprises qui souhaitent réduire leur personnel devront licencier les travailleurs étrangers avant les Malaisiens.
La Malaisie – un des plus grands importateurs de main-d’œuvre d’Asie – compte deux millions de travailleurs étrangers (venant principalement de son voisin l’Indonésie – 66 % – suivi du Népal et de l’Inde) qui sont le principal soutien des plantations et du secteur manufacturier. Mais à présent que le chômage augmente, le Gouvernement a interdit l’embauche de travailleurs étrangers dans les secteurs des produits et des services. Les permis de travail auraient été réduits de plus de 70 % cette année. Le Gouvernement a aussi approuvé une proposition pour doubler la charge que les entreprises doivent payer pour les travailleurs étrangers afin de décourager leur embauche.
Cependant les activistes craignent que les entreprises transfèrent l’augmentation de ces coûts sur leurs travailleurs étrangers, leur portant d’autant plus préjudice qu’ils se trouvent déjà accablés par les tarifs considérables que leur imposent les agents de travail. Ils proposent à la place l’établissement de salaires minimums pour réduire l’engagement de travailleurs étrangers puisque les entreprises ont tendance à les engager car moins chers à l’embauche que les Malaisiens. En conséquence de quoi leurs salaires sont généralement en dessous du seuil de pauvreté.
Le plan de relance et son résultat incertain
Le budget infime du Gouvernement comprend plusieurs mesures à moyen et long terme, mais certains observateurs signalent le manque d’initiatives qui permettent d’aborder la nécessité immédiate et urgente d’affronter la chute de l’économie, de relancer la demande et d’augmenter les affaires, qui sont considérés des facteurs critiques de tout “budget de relance” prévu pour surmonter une crise. Par contre, le budget a été critiqué parce qu’il se concentre sur ce qui semble être le sauvetage des entreprises, car presque la moitié de l’argent sera destiné à l’assistance du secteur privé et que seulement 17 % le sera à l’aide de la population, qui subit dans son ensemble les conséquences du coût de la vie élevé. L’inquiétude portant sur le fait que pendant la crise économique les besoins spécifiques des femmes, à l'exception des mères célibataires, ne soient pas pris en compte existe également, puisque seulement 1,4 % du budget a été destiné aux moins favorisés.
Le succès du plan de relance économique dépendra de son exécution, de son instrumentation et de sa transparence pour le déboursement des fonds. Ce qui déterminera si l’effet compte-gouttes et multiplicateur du plan de relance comprend une grande partie de la population sans favoriser seulement les entreprises et les individus qui entretiennent de bons rapports avec le Gouvernement comme par le passé.
En réponse aux demandes de transparence et d’élaboration d’un compte rendu, le Gouvernement a annoncé qu’il mettra en place un site web spécial pour superviser les dépenses des fonds du plan de relance économique. Ce site offrira au public l’information sur les postes attribués et le montant dépensé, les programmes et les projets mis en place et leur progression. Ce genre d’initiative est quelque chose de relativement nouveau et correspond à une réponse à la pression croissante exigeant que le gouvernement rende davantage de comptes alors qu’il se caractérisait jusque là par sa corruption et son clientélisme politique. Mais comme pour tout ce qui se passe avec les politiques du Gouvernement, la mise en place de ce site est en instance.
Un scénario incertain
En dépit du panorama plutôt sombre, les économistes signalent souvent les solides bases économiques de la Malaisie et son expérience après la crise financière asiatique de 1997, pensant qu’elles lui permettront de surmonter la crise actuelle. Mais cette crise internationale continue à se développer et personne ne connaît réellement quelles en seront la profondeur et la durée. Tandis que le secteur bancaire, pour l’instant, se montre résilient, il sera éventuellement touché à mesure que les entreprises présenteront des difficultés pour amortir leurs prêts. Et bien que les prêts non recouvrables puissent être gérés, pour le moment encore, il n’en sera pas de même dans l’avenir puisque déjà certains analystes prévoient que la récession qui viendra pourrait être pire que celle issue de la crise asiatique de 1997.
La crainte que le chômage cause des problèmes sociaux est présente. Ces problèmes comprennent un taux de délinquance plus élevé à cause de la détérioration des valeurs que provoque la pauvreté et une plus grande inégalité du revenu au fur et à mesure que beaucoup de travailleurs perdent leurs emplois. Sur la base de l’expérience de la récession qui a eu lieu pendant la deuxième moitié des années 1980, encore présente dans la mémoire collective, une proposition pour un plan intégral de sécurité sociale a été présentée. De plus en plus de voix réclament un fonds national contre les licenciements, protègeant les travailleurs contre la perte de leurs emplois. Le Gouvernement a déclaré qu’il considèrait la question.
La crise et l’insécurité alimentaire
Alors que les prix élevés des matières premières en ont favorisé certains, les prix élevés des aliments ont causé des ravages parmi la plupart des Malaisiens qui ont du faire face aux coûts élevés des aliments et d’autres articles de base, causés par la forte hausse du prix du pétrole en 2008. L’inflation a diminué pendant les derniers mois lorsque la bulle des prix agricoles a éclaté et que le prix du pétrole a chuté de son point culminant. Cependant les prix des aliments continuent a être élevés et l’indice des prix à la consommation des aliments montre une forte hausse de 9,2 % en février 2009. Le riz, le pain et d’autres céréales ont augmenté sensiblement, avec une énorme hausse de leurs indices de 18 %. Le prix du pétrole, bien qu’il soit descendu plusieurs fois pendant les derniers mois de 2008 en accord avec la chute des prix internationaux du pétrole, continue à être plus élevé qu’avant la crise.
Une grande partie de l’augmentation des prix des aliments est due au fait que la Malaisie en est un grand importateur, et la laisse par conséquent à la merci de la hausse des prix et de la spéculation. La rapidité du développement pendant les dernières décennies a déplacé l’objectif de la planification économique vers l’industrialisation et l’agriculture industrielle au détriment de la production d’aliments, puisqu’il était moins cher d’en acheter ailleurs. Outre le riz, la Malaisie importe aussi des légumes, des fruits, de la viande et des céréales.
Actuellement en ce qui concerne le riz, la Malaisie est autosuffisante à environ 60 %. Le Gouvernement prévoit d’injecter quelque 2 milliards d’USD pour augmenter sa production et atteindre de nouveau le niveau d’autosuffisance de 90 %. La politique de sécurité alimentaire a été présentée en avril 2008 et des subventions et des primes d’incitation ont été versées pour renforcer la production de riz dans tout le pays. En même temps la campagne Bumi Hijau (Terre verte), une initiative semblable à celle lancée pendant les années 1970, cherche à encourager la culture de légumes d’autres comestibles verts par les Malaisiens, en plus de l’élevage de poulets et de poissons pour leur propre consommation.
En dépit de ces initiatives, une planification à long terme plus efficace est nécessaire pour atteindre la récupération économique. Le Gouvernement doit sérieusement considérer les différents aspects du problème – une utilisation plus efficace de la terre, de la
main-d’oeuvre et de la technologie – qui pourraient entraver la réussite des objectifs envisagés.
La réponse de la société civile
Différentes organisations et ONG de la société civile ont réalisé une série de manifestations et d’activités, qui comprennent des débats publics, pour faire prendre conscience des conséquences négatives de cette crise, spécialement dans les groupes les plus vulnérables.
Le réseau des peuples opprimés (JERIT, dont l’acronyme signifie « cri »), une coalition de groupes de la société civile, a été spécialement actif. Le groupe a réalisé une manifestation contre l’augmentation du prix du pétrole en janvier 2008 et a fini l’année avec une campagne cycliste
« Le peuple : la force du changement », pour exprimer son inquiétude sur les droits et les épreuves de la classe ouvrière face à la décélération de l’économie.
La campagne consistait en différents groupes de cyclistes partis de trois points de concentration sur les côtes Nord, Sud et Est de la Malaisie péninsulaire, et qui avaient pédalé ensemble jusqu’au parlement à Kuala Lumpur, la capitale, pour présenter au gouvernement et au parti de l’opposition leurs inquiétudes et revendications.
Leurs principales revendications sont l’adoption du salaire minimum, le logement digne, le contrôle des prix pour les articles de base et la fin des privatisations des services de base. Ils ont aussi rattaché ces demandes à celles de droits civils et politiques plus étendus. Ceci comprend le rétablissement des élections de gouvernements locaux et la révocation de la loi de sécurité intérieure, qui permet une détention illimitée sans droit à un procès.
Sur leur chemin ils ont remis des brochures au public et ils ont présenté leurs revendications devant le chef des ministres des différents états (la Malaisie possède un système de gouvernement fédéral). En dépit des nombreux obstacles interposés par la police, y compris des interpellations, ils sont parvenus au bout. Pendant ces deux semaines de décembre 2008, la campagne a bénéficié de beaucoup de publicité et du soutien du public le long de son parcours.
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Impact directs, réponses faibles
Espace Associatif1
La forte dépendance du Maroc vis-à-vis de l´économie mondiale a rendu le pays vulnérable face à la crise. La chute de la demande des exportations marocaines, la forte diminution du montant des envois de fonds des migrants et un grave processus inflationniste comptent parmi les effets les plus notoires de la crise. Le faible succès des politiques « anti-crise » encouragées par le Gouvernement aggrave la situation et augmente l´instabilité sociale. Les syndicats et la société civile formulent de nouvelles propositions pour créer les conditions favorisant un modèle économique et social plus juste.
Même si l´impact de la crise systémique est évident sur le plan économique, il ne faut pas négliger son coût social et humain, lequel pourrait être assez élevé quoique difficile à évaluer pour au moins deux raisons : en premier lieu, les effets négatifs de la crise mondiale sur l´économie marocaine commencent à peine à se faire sentir mais risquent de s´intensifier dans un futur proche, avec des conséquences sociales de plus en plus importantes ; en second lieu, on ne dispose pas pour l´instant de données officielles fiables et détaillées sur les impacts sociaux.
L´aspect social de la crise
L´impact social va se faire sentir par plusieurs voies de type macro-économiques. Selon les prévisions sur la croissance économique pour l´année 2009, les activités non agraires vont nettement diminuer (3,9 % en 2009 contre 5 % en 2008, selon le Haut Commissariat de Planification). En raison de la récession mondiale, la demande internationale de produits marocains diminuera de 1,2 % en 2009, après une hausse de 2 % en 2008. Les exportations ont diminué de 31,8 % en janvier-février 2009, comparativement à la même période de l´année précédente, alors que le coût des importations a diminué de 15,7 % à cause de la chute des prix des matières premières qui a eu lieu au cours des derniers mois. Les rentrées du tourisme et les investissements étrangers ont diminué respectivement de 25,5 % et 71,9 % entre janvier-février 2008 et la même période en 2009.
L´impact au niveau de l´emploi se fait déjà sentir. Par exemple, depuis quelques mois, l´industrie textile et de l’habillement a licencié des milliers de travailleurs, notamment des femmes, et considérablement réduit les heures de travail. De la même manière, plusieurs entreprises commencent à considérer la possibilité de réduire les salaires, suspendre les promotions du personnel et les primes de formation, et couper le budget destiné à la formation. D´autres entreprises mettent fin à leurs projets d´engager du personnel et/ou privilégient les contrats à durée déterminée.
Une autre voie importante de transfert de la crise vers les foyers pauvres est constituée par les envois de fonds des marocains résidant à l´étranger (MRE), qui en 2008 représentaient plus de 8 % du PIB du Maroc. Selon certaines enquêtes, ces envois ont contribué à la réduction du pourcentage de la pauvreté de 4,2 points, passant de 23 % vers la fin des années 1990 à 19 % à l´époque actuelle. Ceci dit, les envois de fonds des MRE ont diminué de 15 % environ, passant de 8,2 milliards de MAD (1 milliard d’USD environ) en janvier-février 2008 à un peu plus de 7 milliards de MAD (870 millions d’USD environ) en janvier-février 2009. Il est donc à prévoir une réduction importante des sources de revenus et du pouvoir d´achat des familles de marocains émigrées, lesquelles appartiennent, pour la plupart, aux couches les plus pauvres de la population. L´impact négatif de la réduction des envois de fonds des MRE risque de se faire sentir également dans le secteur immobilier qui emploie des milliers des marocains dans de nombreuses régions du pays, notamment la région orientale2.
D´autre part, la crise se traduirait en une augmentation du chômage pour certains MRE risquant ainsi de tomber dans la pauvreté. En Espagne, par exemple, où la première communauté étrangère, hormis les pays de l´UE, est la population marocaine, le taux du chômage est de plus de 21 % parmi les MRE contre 14 % parmi les espagnols. Il est également à prévoir une augmentation de la violence et des expressions de racisme et de xénophobie contre les étrangers d´origine magrébine dans plusieurs pays européens.
Le troisième vecteur d´affaiblissement des couches sociales vulnérables de la population est l´inflation, dont le taux a augmenté considérablement au cours des deux dernières années, passant d´une moyenne inférieure à 2 % au cours de la période 1996-2007 à 3,9 % en 2008. De toute façon, ce taux cache l´ampleur de la hausse des produits essentiels au cours des deux dernières années (voir encadré). L´impact de ces augmentations sera plus nocif pour les couches sociales défavorisées, parmi lesquelles les denrées alimentaires de base (comme les céréales, le sucre et l´huile) représentent plus de 50 % du budget familial3.
En conséquence, la perte de pouvoir d´achat se traduira en une réduction de la qualité et la quantité d´aliments consommés et/ou la suppression d´autres dépenses (en santé, éducation et transport, par exemple). Les enfants, les femmes enceintes et les mères allaitantes risquent de se voir particulièrement touchés. D´autre part, il est possible que persiste le problème chronique de malnutrition dû au manque de micronutriments, comme les vitamines et les minéraux, touchant un tiers de la population environ, surtout les enfants de moins de 3 ans et les femmes.
Crise énergétique et environnementale
La crise énergétique a accentué les difficultés quotidiennes des couches sociales les plus défavorisées et même des classes moyennes, à cause notamment de la hausse des tarifs de l´eau, l´électricité et l´assainissement, ainsi que par l´augmentation du prix des transports publics (ceux-ci représentent autour de 15 % du salaire minimal interprofessionnel garanti).
La crise environnementale engendrée par la pression démographique et par un modèle de développement orienté vers la croissance et l´urbanisation risque de se traduire en un épuisement des ressources et en la dégradation des moyens de subsistance et des conditions d´hygiène. Un exemple frappant de ceci sont les récentes inondations, les fortes pluies et les chutes de neige qui se sont produites dans plusieurs régions du pays, provoquant la mort de plus de 40 personnes et exposant des milliers de personnes à l´indigence et à la pauvreté.
En bref, l´impact de la crise multilatérale du capitalisme néolibéral met en danger la réalisation des droits économiques et sociaux, notamment le droit à l´alimentation, le travail, la santé et l´accès à l´eau, ainsi que le droit à la mobilité. D´autre part, de nouvelles franges de la population risquent de tomber dans la pauvreté. C´est-à-dire qu`au Maroc la réalisation des Objectifs du Millénaire peut se voire compromise si la crise actuelle persiste et s´aggrave.
Les mesures prises par le Gouvernement pour répondre à la crise
Pour faire face à la crise, le Gouvernement a pris des mesures visant à aider certains secteurs particulièrement exposés, comme l´industrie textile et du vêtement, le cuir et l´équipement automobile. Ce plan anti-crise s´articule autour de trois axes :
Au niveau social et pour limiter l´impact négatif de la hausse mondiale des prix des denrées de base sur la population, le Gouvernement a pris les mesures suivantes : augmentation de la dotation de la Caisse de Compensation destinée aux produits subventionnés, suspension provisoire des impôts sur les importations de blé et légère augmentation du salaire minimum.
La dimension sociale du plan contre la crise a favorisé les exportateurs du secteur textile et du vêtement, sans que cela évite des réductions des salaires des travailleurs ou de leurs horaires de travail. Par contre, les mesures financières et commerciales n´ont pas eu un grand retentissement en raison de la réticence des banques et du manque de dynamisme des entreprises exportatrices. D´ailleurs, les licenciements et les restrictions des conditions de travail concernent plusieurs secteurs qui sont à peine concernés par ce plan (par exemple, le tourisme, le secteur agricole orienté vers l´exportation, et le bâtiment). Les mesures censées avoir un caractère social ont à peine empêché la hausse des prix des denrées de base, dont la plupart sont libéralisés, alors que l´augmentation du salaire minimum a difficilement compensé l’augmentation du coût de la vie. C’est pourquoi des milliers de travailleurs et de travailleuses ont vu leur pouvoir d´achat se réduire. On pourrait en conclure que le Gouvernement continue à être plus enclin à protéger le capital qu´à défendre les droits économiques et sociaux des couches sociales les plus défavorisées.
Réactions de la société civile
Dans ces conditions, il n´est pas surprenant de voir une recrudescence des luttes syndicales et sociales. Ces dernières sont conduites par les syndicats, par certaines associations de la société civile et par des coalitions des deux groupes, auxquelles s´ajoutent des membres de partis politiques de la gauche, etc. La combativité renouvelée des syndicats s´explique par la détérioration des droits économiques et sociaux et par l´échec du dialogue social à partir du refus du Gouvernement de satisfaire les revendications syndicales de revalorisation des salaires et des allocations familiales, des promotions des fonctionnaires publics et de respect des libertés syndicales ainsi que du droit de grève, de développement et de protection sociale.
Jusqu´à présent, diverses actions collectives ont été entamées, notamment des grèves sectorielles (éducation, santé, collectivités locales, etc.), ainsi qu´une grève générale. Parmi d´autres mouvements sociaux particulièrement dynamiques, il faut mentionner les diverses luttes promues par les « Associations coordonnées contre l’augmentation du coût de la vie », ainsi que par les « Associations nationales de professionnels au chômage ». Plusieurs stratégies d´action collective ont été déployées : grèves de bras croisés, manifestations populaires spontanées, journées de mobilisation nationale contre la pauvreté, etc. Les revendications concernent le blocage de l’augmentation des prix, le maintien de la Caisse des Compensations, la mise en place de l´échelle mobile des salaires, la rénovation des services publics et la fin des privatisations des contrôles de distribution d´eau et d´électricité, le droit à travailler dans le secteur public. Le Gouvernement a réprimé violemment certaines manifestations, par exemple dans les villes de Sefrou et Sidi Ifni. Cependant, ces mouvements commencent à manifester de l’épuisement, et manifestent des désaccords internes, ils poursuivent peu d´actions de proximité face aux populations vulnérables et ils manquent de perspectives politiques.
Ceci ne signifie pas qu´il n´existe pas de nouvelles propositions pour faire face à la crise et promouvoir les droits économiques et sociaux des classes sociales les plus défavorisées. Suivant le principe selon lequel il appartient à l´État de garantir les droits économiques et sociaux, les mouvements sociaux proposent la création d´une caisse d´assurance contre le chômage, la défense et la démocratisation du service public, la lutte contre les monopoles et les rentes économiques pures, la mise en place d´un revenu minimal garanti, la création de cellules de surveillance de l´impact social de la crise dont la fonction serait de fournir de l´information et des données à la société civile afin de sensibiliser l´opinion publique et de mobiliser les populations vulnérables. A long terme, il s´agit de récupérer le rôle central de l´État démocratique au niveau de la promotion des droits économiques et sociaux à travers l´établissement d´une relation de forces citoyennes en faveur d´un nouveau modèle économique et social fondé sur la justice sociale, la priorité étant donnée à la satisfaction des besoins premiers, la souveraineté alimentaire, l´économie sociale, la protection de l´environnement et la diversité culturelle.
1 Participent à ce rapport : associations, syndicats, chercheurs et représentants des mouvements sociaux et d´Espace Associatif. Said Saadi (universitaire et acteur associatif) a été chargé de la rédaction.
2 Bourchachen, J. “Apports des transferts des résidents à l’étranger à la réduction de la pauvreté : cas du Maroc ”, SessionI-Pa 5c, Montreux, septembre 2000.
3 HCP. Journée africaine de la statistique on “ Défis de l’augmentation des prix des denrées alimentaires ”. Rabat, 2009.
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L´aggravation de la crise et les défis à relever pour les droits sociaux
Laura Becerra Pozos1
Areli Sandoval Terán2
Adhesión d´Espacio DESC3
Le Mexique présente le pire des scénarios possibles pour affronter une crise en gestation depuis des années. La crise systémique a aggravé des problèmes préexistants, comme la pauvreté croissante, la réduction de l´activité du secteur agricole, la création insuffisante d´emplois et la diminution du PIB. Alors que les mesures annoncées par le Gouvernement soutiennent le modèle économique néolibéral, l´insatisfaction des citoyens augmente et la société civile ne cesse de faire des propositions. Il est impératif de trouver des alternatives et des stratégies capables d’affronter cette crise multiple, afin d´en minimiser les impacts et de poser les bases d’un nouveau modèle.
Différentes organisations de la société civile mexicaine considèrent que la crise actuelle est systémique et s´exprime non seulement sur le plan financier, mais également sur le plan alimentaire, du travail, de l´environnement et de l´énergie, entre autres ; cette crise est également provoquée par le modèle économique capitaliste néolibéral fondé sur la dérégulation financière et l´ouverture commerciale, ainsi que par son propre épuisement. Cette crise touche tous les pays de la planète, mais elle est particulièrement sévère dans les pays du Sud4.
Comme l’explique le chercheur mexicain Arturo Guillén5, la crise a suivi un parcours complexe, sa dernière étape étant déclenchée par la crise immobilière aux États-Unis et la récession économique qui s’en est suivie. Celle-ci s´est « rapidement mondialisée », provoquant des diminutions du PIB même dans des économies importantes d´Europe et d´Asie. La crise s´est également propagée en Amérique latine, son développement étant variable selon les pays, régions et secteurs. On s´accorde à dire que cette crise n´a pas uniquement des causes externes ; en effet, elle dérive également de certains facteurs endogènes6.
La crise au Mexique7
Sans négliger les effets de la crise globale sur notre pays, il faut dire qu´un grand nombre des problèmes actuels étaient déjà présents dans l´économie mexicaine, comme la croissance de la pauvreté en termes absolus8, la réduction de l´activité du secteur agricole, la création insuffisante d´emplois (malgré les résultats légèrement favorables des exportations et importations avant la crise) et la diminution du PIB (Produit Intérieur Brut), entre autres. On ne peut que constater que la crise systémique n’a fait qu’aggraver les problèmes.
Les chiffres ci-après illustrent les effets de la crise au Mexique :
En février 2009, le taux du chômage s´est situé à 5,3 %14 et l´activité industrielle a diminué de 13,2 %15 ; il s´agit des pires chiffres depuis l’ « effet tequila » qui s´est déclenché au Mexique vers le milieu des années 90. C´est pour cela que les analystes partagent le diagnostic selon lequel le pays subira une récession encore plus profonde après la crise actuelle.
Les graves impacts de la crise sur le plan du travail seront les prétextes pour geler ou réduire les salaires, ainsi que pour précariser, flexibiliser et externaliser encore plus le travail, tout en réduisant les droits et limitant la marge d´action des syndicats.16
En ce qui concerne le secteur agricole mexicain, l´absence d´une politique agraire juste, voire l´indifférence, ont provoqué depuis des années trois types d´impacts aggravés par la crise : 1) la spéculation sur les aliments dans les bourses de valeurs, les rendant inaccessibles aux familles les plus pauvres ; 2) l´invasion des marchés nationaux par des aliments produits et commercialisés par les compagnies trans-nationales, dont la forte productivité provoque la détérioration des sols, des forêts et des réserves d´eau, leur permettant de l´emporter dans la folle course à la production et au libre commerce (le dumping détruisant d´ailleurs les systèmes productifs nationaux, notamment les systèmes traditionnels) ; et 3) l´irruption massive des semences génétiquement modifiées qui détruit les semences naturelles et les anciens écosystèmes17. Face à la crise du secteur agraire mexicain, la campagne nationale « Sin maíz no hay país » (Pas de pays sans maïs)18, à laquelle nous adhérons, propose parmi d´autres mesures de passer d´un modèle d´agriculture fondé sur de grandes unités de production de monocultures, impliquant une utilisation croissante de l´eau, d´équipement et d´intrants polluants, à une agriculture paysanne durable à petite et moyenne échelle qui n´a pas seulement le potentiel pour répondre aux besoins alimentaires des femmes et des hommes mexicains, mais possède aussi des vertus écologiques additionnelles.
Ce qui précède nous permet d´affirmer que le Mexique présentait le pire des scénarios possibles pour affronter une crise imminente en gestation depuis plusieurs années. Le Gouvernement s´est soumis au modèle économique néolibéral sans le remettre en question, et plusieurs mesures annoncées ne sont que des ajustements mineurs qui le maintiennent et l´accentuent.
Le Gouvernement et la société civile face à la crise
Lors du dernier Sommet des Amériques, la CEPAL a confirmé que les pays du continent manquent de stratégie commune pour sortir de la crise et qu´ils ont annoncé et mis en place des mesures très diverses19.
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En octobre 2008, peu après avoir minimisé les impacts que la crise américaine aurait au Mexique, étant donné « la solidité des finances publiques », le Gouvernement fédéral a annoncé le Programme d´encouragement de la croissance et de l´emploi (PICE, sigle en espagnol), un plan anti-crise énoncé en cinq points : 1) augmenter les dépenses publiques en infrastructure pour encourager la croissance économique ; 2) changer les règles concernant l´exercice de ces dépenses en infrastructure par le secteur public, afin de le flexibiliser ; 3) entamer la construction d´une nouvelle raffinerie ; 4) lancer un programme extraordinaire de soutien aux PME au Mexique ; 5) rendre plus compétitif l´appareil productif national à travers un nouveau programme de dérégulation et de détaxe fiscale.
A ce moment-là, le Gouvernement fédéral a soutenu que depuis des années notre dette extérieure diminuait, que notre inflation était la plus basse en Amérique latine et que nos réserves étaient de plus de 90 milliards de USD, ce qui nous permettrait de résister aux pressions de la balance commerciale21. Six mois après, lors du Sommet du G-20 au début du mois d´avril 2009, le Gouvernement a reçu l´aide du FMI, qui lui a accordé un prêt de 47 milliards d’USD. Lors de ce même Sommet, il a été annoncé que les économies émergentes, dont le Mexique, recevraient 850 milliards d’USD additionnels pour financer, entre autres, les dépenses contra-cycliques, la recapitalisation des banques et les dépenses en infrastructure 22.
Sans avoir touché les 7 milliards d’USD reçus du FMI, de la Banque Mondiale et de la Banque Interaméricaine de Développement, l´administration du président Felipe Calderón a augmenté la dette publique à un niveau de 968.477 milliards de MXN (72.744 milliards d’USD environ) au cours des deux premières années de gestion seulement (2007-2008). Ce montant équivaut à 12 fois l´endettement pris au cours des deux premières années du gouvernement d´Ernesto Zedillo (1995-1996), lorsque le pays a dû faire face à la plus grave crise économique de ces soixante dernières années23. Il est extrêmement préoccupant que ces mesures, en plus d´augmenter la dette publique mexicaine, réaffirment l´adhésion au modèle économique néolibéral et ses institutions, dont les limitations et les contradictions ont été signalées dans des forums très divers. Il est également surprenant de constater cette adhésion alors que plusieurs pays d´Amérique latine sont en train d´essayer de prendre des mesures ou des processus différents de ceux préconisés par le modèle néolibéral.
Face à la crise, l´insatisfaction des citoyens n´a fait que s´accentuer, mais plusieurs propositions ont été formulées, comme celle du Mouvement national pour la souveraineté alimentaire et énergétique, les droits des travailleurs et les libertés démocratiques, exprimées dans une lettre du 16 avril 2009 à l´intention du président des États-Unis, Barack Obama. Dans cette lettre, nous proposons d´entamer « le dialogue au plus haut niveau pour aborder les questions incluses dans l´agenda visant à renégocier de manière urgente les termes du TLCAN et sauvegarder les droits du travail, sociaux et humains des citoyens de notre région ». Il s´agirait de créer un Fonds de Compensation Asymétrique pour l´Amérique du Nord, de négocier un accord binational sur la question migratoire et de signer un accord pour encourager le Traité pour le développement économique et social de l´Amérique du Nord.
Certains pensent que les crises offrent une opportunité pour de nouvelles conceptions théoriques. Dans tous les cas, il est urgent de proposer de nouvelles idées, des alternatives et des stratégies susceptibles de faire face « aux crises », que ce soit pour en minimiser l’impact ou pour reformuler le modèle.
Surveiller les dépenses publiques
A court et moyen termes, une question importante pour les organisations civiles travaillant, comme nous, sur le développement social et les droits de l´homme, sera la surveillance des dépenses publiques à partir de l´obligation de l´État d´accorder le maximum des ressources disponibles pour atteindre progressivement les droits économiques, sociaux et culturels et soutenir l´idée selon laquelle « même en temps de grave pénurie de ressources dû à un processus d'ajustement, à une récession économique ou à d'autres facteurs, les éléments vulnérables de la société peuvent et doivent être protégés grâce à la mise en oeuvre de programmes spécifiques relativement peu coûteux. »24. Il faut mentionner que le Gouvernement mexicain a répondu à la crise de 1995 par des réductions de dépenses, ce qui a gravement nui aux secteurs de l´éducation, de la santé et de l’énergie électrique, empêchant en ce sens de réaliser les DESC. Le Gouvernement fédéral a assuré qu´il maintiendra ses niveaux de dépenses, mais il est tout à fait nécessaire de garantir que le budget priorisera « son approche sociale de manière efficace et soutenue, en réduisant les coûts d´exploitation, en se donnant de nouvelles priorités et en réduisant les frais d´administration dans certains de ses services »25.
Du point de vue des droits, il sera également fondamental de suivre l´investissement en infrastructure, dans le cadre du PICE, afin d´assurer notamment que s´il est décidé d´investir dans de grands projets d´infrastructure (des barrages, par exemple), cela devra être dûment communiqué aux communautés qui pourraient se voir atteintes par cette construction. Par ailleurs, des études d´impact social et environnemental devront être réalisés afin d´évaluer la faisabilité et la capacité du projet dans le cas de promouvoir véritablement la réalisation.
A long terme, l´opportunité qui se présente à nous ne nous oblige pas seulement à résister, mais aussi à élaborer et encourager un modèle économique et social plus juste, pour sortir de cette crise et pour en éviter des nouvelles26. Dans tous les cas, nous considérons que le respect des normes internationales des droits de l´homme est la clé pour rendre possible un pays meilleur, un monde meilleur.
1 Directrice Exécutive de DECA Equipo Pueblo, A.C., point focal de Social Watch au Mexique depuis 1996, <laurabecerra@equipopueblo.org.mx>.
2 Coordinatrice du Programme Diplomacia Ciudadana, DESCA et Social Watch México <arelisandoval@equipopueblo.org.mx>.
3 Groupe de référence pour Social Watch au Mexique.
4 “Para un nuevo modelo económico y social ¡Pongamos la finanza en su sitio!” (Pour un nouveau modèle économique et social. Remettons les finances à leur place !). Appel résultant d´une série de séminaires du Forum Social Mondial de Belem 2009.
5 Arturo Guillén, Professeur et chercheur titulaire du Département de l´Économie de l´UAM. La Crisis Global y la Recesión Generalizada. Version préliminaire. Mars 2009, UIztapalapa, Mexique.
6 Déclaration du Colloque international “La Crisis Global y América Latina” à l´UAM-U Iztapalapa du Mexique, janvier 2009.
7 Les estimations sur la réalité nationale se fondent sur des documents recueillis par le Mouvement national pour la souveraineté alimentaire et énergétique, les droits des travailleurs et les libertés démocratiques ; l´Alliance démocratique des organisations civiles (ADOC) ; ainsi que sur les résultats de la séance “Análisis y Estrategia sobre la Crisis” (Analyse et Stratégie de la Crise) de l´Espace DESC (23 avril 2009), dont l´équipe Pueblo fait partie.
8 Alberto Serdán Rosales. “México: Pobreza y presupuesto social en el contexto de la crisis financiera 2008-2009” (Mexique : Pauvreté et budget social dans le contexte de la crise financière 2008-2009), présentation lors de la séance de l´Espace DESC du 23 avril 2009. Informations complémentaires sur : <alserdan.blogspot.com>.
9 Alberto Serdán Rosales, d’après des données de la Banque du Mexique (2009) et de l´Enquête nationale des revenus et dépenses des foyers (ENIGH 2006).
10 Chiffres tirés de l´Enquête nationale du travail et de l´emploi (ENOE) correspondant au troisième trimestre 2008, publiées dans El Financiero, journal national, 18 novembre 2008.
11 Alberto Serdán Rosales, d’après des données de la Banque du Mexique, 2009.
12 Ibid.
13 Alberto Serdán Rosales. "México: Pobreza y presupuesto social en el contexto de la crisis financiera 2008-2009", présentation lors de la séance de l´Espace DESC du 23 avril 2009.
14 ENOE, mars 2009 à : <www.inegi.org.mx/inegi/contenidos/espanol/prensa/comunicados/ocupbol.asp>.
15 Voir : <www.cnnexpansion.com/economia/2009/04/17/la-produccion-industrial-cae-132>.
16 Héctor de la Cueva(2009). Otra Integración es posible y otra salida a la crisis también: Escenarios de las Américas en el 2009 y los retos del Movimiento Sindical. (Une autre intégration est possible et une autre porte de sortie de la crise également : Scènes des Amériques en 2009 et les défis du Mouvement Syndical.) Mexique.
17 "La guerra que Obama ignora" (la guerre qu’Obame ignore), Víctor Quintana, député fédéral de l´état de Chihuahua, Mexique, La Jornada, 17 avril 2009.
18 Informations complémentaires à : <www.sinmaiznohaypais.org/>.
19 « La reacción de los gobiernos de las Américas frente a la crisis internacional: una presentación sintética de las medidas de política anunciadas hasta el 31 de marzo de 2009 » (La réaction des gouvernements des continents américains face la crise internationale : une présentation synthétique des mesures politiques annoncées jusqu'au 31 mars 2009). Vème Sommet des Amérique, Port d´Espagne, 17 – 19 avril 2009. Disponible sur : <www.eclac.org>.
20 Ibídem.
21 ”Anuncia Calderón plan anticrisis de 5 puntos " (Calderón annonce un plan anticrise en 5 points). El Universal, 8 octobre 2008. Disponible sur : <www.eluniversal.com.mx/notas/545274.html>.
22 La Jornada, 3 avril 2009, p. 3.
23 Susana González et Israel Rodríguez. "Calderón elevó la deuda pública casi en un billón de pesos en 2 años" (Calderón a augmenté la dette publique à quasiment un billion de pesos en 2 ans). La Jornada, 13 avril 2009.
24 ONU, Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale no. 3 "La nature des obligations des États parties", alinéa 12.
25 Alberto Serdán Rosales. "México: Pobreza y presupuesto social en el contexto de la crisis financiera 2008-2009", présentation lors de la séance de l´Espace DESC du 23 avril 2009.
26 Héctor de la Cueva (2009), Op. cit.
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MOZAMBIQUE
Pas de développement humain sans dialogue
Custódio Duma1
Social Watch Mozambique
Les exportations et probablement l’industrie touristique locale diminueront comme conséquence de la crise mondiale. La sécurité alimentaire et le développement rural sont en danger en raison de l’absence d’investissements directs et de l’encouragement aux cultures qui servent à la fabrication des biocombustibles. Le Gouvernement ne maintient pas de dialogue avec les citoyens ; de ce fait, il est presque impossible de faire des progrès concernant le développement humain à court et à moyen terme. Le renforcement de la démocratie et une administration publique plus juste et transparente sont toujours les principaux défis.
Le Gouvernement du Mozambique affirme que la crise financière globale n’affectera pas l’économie nationale. Il a donc adopté une politique de suivi du secteur économique et de supervision directe des banques commerciales ; il a porté une attention spéciale aux secteurs pouvant résister à la crise, comme par exemple les projets de production d’énergie ou de gaz. Le gouvernement, par le biais du Ministère de la Planification et du Développement annonce, en outre, que le pays a besoin de 120 millions d’USD pour financer la balance des paiements en 2009, ce qui permettrait d’assurer la stabilité des indicateurs macroéconomiques.
Cependant, la Banque Internationale du Mozambique, Millennium Bim, a publié un rapport où il est prévu que l’économie mondiale décroîtra du fait que les pays qui contribuent au financement du Budget Général de l’État, connu comme G-19, ainsi que ceux qui réalisent des investissements externes directs auront une croissance économique négative. Plus précisément, on prévoit que la chute des prix de l’aluminium, du tabac, du sucre, du thé, de la noix de cajou et des gambas affectera le volume des exportations, ce qui diminuera certaines activités favorisant la croissance économique et réduira le niveau de promotion du tourisme international.
Inégalité croissante
D’après les données officielles, entre 2000 et 2007 le pays a enregistré une moyenne de croissance annuelle du PIB dépassant 8,5 %. Cette croissance a connu une stagnation en 2008, année où elle a atteint 6,2 % et, pour l’an 2009, on prévoit une croissance proche de 4 %. Cependant, du point de vue du niveau de développement humain et du processus d’amélioration de la qualité de vie de ses citoyens, l’évolution du pays est encore truffée de contradictions. Le PIB évolue positivement (mesuré en pourcentage), alors que le coût de la vie augmente progressivement ; par conséquent, les revenus réels des citoyens diminuent et les inégalités sociales deviennent de plus en plus visibles. Le rapport du PNUD situe le Mozambique au 172ème rang sur une liste de 177 pays classés suivant leur niveau de développement humain2.
Concernant les Objectifs du Millénaire, les Nations Unies reconnaissent les progrès ayant été atteints dans différents secteurs, à savoir la pauvreté, la mortalité infantile et la santé maternelle. Cependant, malgré la réduction du taux de pauvreté (presque 4 % entre 2000 et 2007), plus de la moitié de la population demeure pauvre. D’autre part, il existe des disparités entre les régions nord, centre et sud du pays. Au sud, où se trouve la capitale, Maputo, la pauvreté augmente lorsqu’on s’éloigne de cette grande ville vers le nord ; il en est de même quand on s’éloigne de la ville vers la campagne. Le recensement de la population de 2007 montre que 70 % de la population mozambicaine habite à la campagne et que plus de 50 % appartient aux régions centre et nord du pays3. Dans les principales villes du pays, de nombreuses familles et groupes de jeunes vivent à ciel ouvert, dans les espaces publics, dans les rues, dans des maisons en ruines et des décharges. Le taux de chômage atteint entre 30 % et 35 % de la population économiquement active. Une organisation juvénile affirme que le nombre de travailleuses sexuelles entre 14 et 25 ans s’est accru depuis les cinq dernières années.
En février 2008, l’augmentation radicale du coût de la vie a entraîné une révolte populaire dont le rôle principal appartient aux femmes et aux enfants d’âge scolaire à Maputo. Plus tard, ce conflit s’est répandu à la province de Gaza et à la ville de Manica, où les principaux services publics ont été paralysés pendant deux jours. L’État, en réduisant le prix des carburants et les subventions aux entreprises de transport, a réussi à éviter des conséquences graves.
Sans transparence
Le Mozambique se prépare pour les quatrièmes élections multipartistes et le gouvernement, élu en 2004, vise à la réélection d’Armando Guebuza. En 2004, Guebuza a utilisé le combat contre la pauvreté comme cheval de bataille ; il l’a associé à la critique de la permissivité et du désintérêt, considérés comme la cause de bien d’autres maux, tels que la corruption, le manque de transparence dans l’administration publique et le mauvais fonctionnement des services publics. Dans ses discours, il a affirmé que les causes de la pauvreté se sont installées parce que la population manque d’esprit d’entreprise et ne fait aucun effort. Il a même blâmé le colonialisme responsable d’avoir installé dans les mentalités un complexe d’infériorité qui provoque, à l’heure actuelle, des difficultés pour atteindre l’auto libération car la clé pour y parvenir est justement l’augmentation de l’estime de soi.
Le discours qui met l’accent sur l’estime de soi et sur l’esprit entrepreneur se répand et toute la classe dirigeante y revient. Pendant ce temps, les services publics tels que le transport sécurisé et de qualité, l’éducation, les services efficaces de santé et la sécurité publique, entre autres, sont toujours rares et inaccessibles pour la plupart des habitants.
L’enrichissement débridé des individus proches du pouvoir, ou du parti au pouvoir, préoccupe toujours les citoyens et le corps diplomatique accrédité auprès du pays. Une minorité privilégiée détient un niveau de richesse important, face à une majorité exclue et accablée par la pauvreté. Les organisations de lutte contre la corruption, comme le Centre d’Intégrité Publique, mettent l’accent sur l’importance de compter sur une loi capable de contrôler les conflits d’intérêts, du fait que la plupart des entrepreneurs nationaux vont de pair avec avec l’élite politique. Un exemple remarquable est celui du président de la République qui possède des actions dans un grand nombre d’entreprises installées au Mozambique4.
Agriculture et faim
Plus de la moitié de la population survit grâce à l’agriculture de subsistance. Cependant, les investissements dans ce secteur ont été faibles. L’agriculture reçoit entre 3 % et 4 % par an du Budget Général de l’État, un chiffre trois ou quatre fois inférieur à l’argent destiné aux services de sécurité. Dans ce sens, le pays a encouragé la production de jatrophe, une plante vénéneuse, matière première pour la production de biocombustibles, ayant pour conséquence que plusieurs secteurs de la population ont laissé de côté la production agricole pour se consacrer à la culture de cette plante. La population de Mogincual représente un exemple concret : elle a connu la famine en 2008 à cause de la baisse de productivité agricole et de la priorité donnée à la production de jatrophe, dont le marché n’a pas encore été développé dans le pays5. Les terres choisies pour la culture du jatrophe, notamment dans les provinces de Gaza, Manica, Solafa, Tete et Nampula sont très fertiles ce qui pourrait réduire, dans les années qui viennent, la production pour la consommation familiale et, par conséquent, intensifier le problème de la famine. De plus, des entreprises spécialisées se sont consacrées à d’autres types de cultures destinées à l’exportation comme, par exemple, la canne à sucre.
Défis en éducation et en santé
D’après l’UNICEF, plus d’un million d’enfants sont exclus du système éducatif et un enseignant du Mozambique a sous sa responsabilité une moyenne de 74 élèves6. Pour améliorer l’éducation il serait nécessaire d’abolir les frais d’inscription et, en même temps, d’augmenter les investissements en éducation et en matériel scolaire ainsi que le nombre de professeurs ; l’accès des jeunes à l’éducation devrait être élargi. Le rapport de l’UNICEF signale que les progrès significatifs en matière d’expansion de l’enseignement n’ont pas été accompagnés d’une augmentation des investissements dans le secteur. Il est bien connu que près de la moitié des enseignants primaires n’a pas reçu de formation professionnelle formelle.
Les services nationaux de santé n’atteignent que 30 % de la population. Plus de 65 % des enfants ont un déficit en vitamine A7. En 2008 le G-19 a injecté dans le budget général 308 millions d’euros environ, et a même conseillé le Mozambique de renforcer la sécurité sociale, l'accès à la justice et la lutte contre la malaria (la maladie la plus meurtrière du pays), le choléra, et le VIH/SIDA. Les programmes pour prévenir et combattre les maladies sont tout à fait insuffisants et sont concentrés dans les principales zones urbaines, au détriment des régions rurales8. Il existe encore d'autres problèmes dans le secteur de la santé tels que le manque de ressources humaines qualifiées pour la formation et le besoin de plus de ressources techniques et financières.
La situation du VIH/SIDA est très grave. La contagion a été estimée à 500 personnes par jour9 et, actuellement, elle atteint 16,2 % de la population. Les Nations Unies affirment que le taux d’incidence est 1,7 fois plus élevé chez les femmes10. Certaines estimations indiquent que le VIH/SIDA réduira la croissance économique per capita du pays entre 0,1 et 0,3 % chaque année. On prévoit que l’espérance de vie va chuter de 37,1 ans en 2006, à 35,9 ans en 201011.
Autres défis
Les pays du G-19 ont demandé au gouvernement de renforcer sa capacité pour garantir la sécurité sociale et d’améliorer l’accès à la justice. Ils ont également manifesté leur préoccupation du fait de l’excès de bureaucratie, du manque d’énergie pour combattre la pauvreté en général et des progrès insuffisants dans le domaine de la lutte contre la corruption ayant été identifiée comme la cause de tous les maux qui freinent le développement du Mozambique.
Pour attaquer l’inégalité de la distribution des revenus, le Gouvernement a créé un fonds connu comme « Sept millions de meticales » (environ 264.000 d’USD), afin de stimuler les districts ruraux, à travers la formation, pour que la population, organisée en associations, puisse entreprendre des initiatives locales de génération de revenus. Cependant, l’initiative du fonds local a été très critiquée pour avoir été lancée sans objectifs clairs ni modalité d’administration prédéfinie. Les administrations de district ayant été mises en fonction ne possèdent pas les compétences nécessaires à la gestion bancaire ou pour gérer les institutions de micro finances.
De plus, les travailleurs de ces districts ruraux se trouvent parmi les moins qualifiés du pays. Les rapports publiés jusqu’à maintenant indiquent que, outre les associations fantômes créées pour recevoir l'argent, plus de la moitié des débiteurs ne sont plus susceptibles d’être localisés et il n’y a pas de garanties de remboursement des prêts. Certains critiques affirment que le fonds a été créé pour assurer au Frelimo, parti au pouvoir depuis 1975, une plus grande visibilité et plus de présence dans les districts et dans les zones rurales.
Le programme, démarré en 2007, n’atteint toujours pas de résultats dans la pratique ; les fonds sont administrés de manière subjective, il existe une utilisation politique de l’initiative favorisant notamment les associations de personnes affiliées au parti au pouvoir, le Frelimo.
Le Gouvernement a approuvé une politique salariale de moyen terme dans le but de séduire et de retenir le personnel qualifié, notamment dans les districts ruraux. Mais dans la pratique, les techniciens plus qualifiés préfèrent travailler dans le secteur privé qui leur permet d’accéder à de meilleurs salaires et à de meilleures conditions de travail.
À partir de novembre 2008, le Mozambique a été réorganisé en 43 conseils municipaux (contre 33 auparavant). L’initiative de continuer avec la décentralisation des fonds sectoriels et des compétences concernant leur gestion, est encore en vigueur. Les districts sont considérés comme des pôles de développement ayant commencé le processus de décentralisation de fonds. Il a cependant été vérifié qu’une grande partie du budget est encore administrée au niveau central et/ou provincial. Ces ressources doivent subir une décentralisation similaire à celle de l'administration. Pour ce faire, il faut former les gens et développer les infrastructures, dont l’électricité, le réseau téléphonique et les institutions bancaires.
De cette manière, le défi de décentraliser les ressources ainsi que les compétences, revient à créer des capacités en matière de ressources humaines.
Conclusions
Bien que le Gouvernement ait réussi à soutenir une politique appréciée à l’étranger, au niveau interne, il n’arrive pas a maintenir un dialogue constant, inclusif et participatif avec les citoyens ; de ce fait, il est presque impossible d’obtenir des progrès vis-à-vis du développement humain à court et à moyen terme. Les faiblesses du système judiciaire ainsi que la discrimination en fonction des préférences politiques, représentent de grands obstacles pour le développement. Le défi est toujours là : la démocratie doit être renforcée et l’administration publique doit devenir plus juste et transparente.
1 Équipe Technique : Salvador Nkamate – Ligue des Droits de l’Homme,
Karina Cabral – Groupe Mozambicain de la Dette, Jorge Cuinhane – AWEPA
Naldo Chivite – MONASO.
2 UNDP. “Human Development Indices: A Statistical Update 2008.” New York: United Nations Development Programme. Disponible sur : <hdr.undp.org/en/statistics/data/hdi2008/>.
3 Voir : <www.ine.gov.mz>.
4 Voir : <bvc.cgu.gov.br/bitstream/123456789/1644/1/Corrup%C3%A7%C3%A3o+mo%C3%A7ambique.pdf>.
5 Voir : <macua.blogs.com/moambique_para_todos/2009/02/atraso-na-assist%C3%AAncia-alimentar-trag%C3%A9dia-espreita-mogincual.html>.
6 Voir : <www.unicef.org/mozambique/media_2877.html>.
7 Voir : Rafael Machava, “A situaçao da pobreza en Moçambique: diferenciaçoes regionais e principais desafios”, sur : < www.cecemca.rc.unesp.br/ojs/index.php/estgeo/article/view/542 >.
8 Ibid.
9 Institut Nacional des Statistiques. “Contendo dados do HIV/SIDA.” CD-Rom. 2004.
10 Voir : <www.unaids.org/en/CountryResponses/Countries/mozambique.asp>.
11 Voir : <www.unicef.org/mozambique/overview.html>.
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Crises, défis et perspectives
Reconstruction Rurale, Népal
Neeraj N. Joshi y Sarba R. Khadka
Les experts affirment que le Népal sera affecté par les répercussions de la crise financière mondiale sur plusieurs fronts. D'autres crises, liées à l'environnement, à l'alimentation, à l'énergie, aux finances et à la politique frappent la société depuis un long moment déjà. Il devient impérieux d’examiner cette réalité d’un point de vu de genre, et d'analyser quelle fonction la société civile pourrait avoir dans la promotion des initiatives et des plans pour soulager la situation des populations vulnérables touchées par la contraction économique.
Le Népal, qui se trouve au 145ème rang sur les 179 pays classés par l'Indice de Développement Humain (IDH) de 2008, souffre de nombreuses crises superposées (alimentaire, énergétique, climatique et politique), ainsi que de constants troubles civils, même s'ils sont, dans l’actualité, sporadiques1. Jusqu'à ce jour, des conséquences significatives de la crise financière mondiale n’ont pas été enregistrées ; toutefois, les experts signalent que le pays est probablement touché de différentes manières.
Les envois de fonds, par exemple, qui représentent actuellement 19 % du PIB, ont constitué une vraie aubaine pour l'économie durant la dernière décennie 2. Les envois de fonds sont la raison principale pour laquelle la balance des paiements continue à être excédentaire, malgré un déficit commercial énorme. En outre, ils ont aidé à réduire la pauvreté de 42 % en 1995-96 à 31 % en 2003-04. Plus de 1,2 million de personnes travaillent en dehors du Népal 3. La décélération dans le secteur de la construction et dans les secteurs des services au Moyen-Orient (qui constitue une grande source d’envois de fonds), ainsi que dans des pays comme la Corée du Sud, la Malaisie et le Japon, réduira la demande de main d'œuvre népalaise au delà des frontières nationales. Etant donné que plus de 34 % des foyers reçoivent des envois de fonds, ce qui représente une hausse de 80 % par rapport à 1994-95, la diminution de ceux-ci pourrait nuire aux progrès réalisés en faveur de la réduction de la pauvreté et pourrait, en principe, réduire la demande domestique, puisque les ménages, qui voient leurs revenus diminuer, hésiteront avant de réaliser des dépenses. L'excédent de la balance de paiements chutera, dès lors, très certainement.
La décélération mondiale et la récession des économies développées affecteront également les exportations, l'investissement étranger et l'Aide Publique au Développement (APD), mais aussi les services, qui ont représenté 50,9 % du PIB en 2007. Quant au commerce, près de 80 % des articles d'habillement népalais sont exportés aux États-Unis. L'Allemagne, en revanche, constitue le marché le plus important pour ses tapis. La lente récupération financière de ces pays aura probablement un impact négatif sur la vente des exportations du pays4. La Confédération des Industries Népalaises a estimé récemment les pertes du secteur manufacturier à un peu plus de 256 millions de dollars américains 5. La chute libre de la demande dans l'industrie textile et du vêtement, en soi déjà très affectée, conjointement à la diminution constante des prix internationaux des matières premières de base, pourraient faire que la perte totale soit beaucoup plus importante.
La crise aura également un impact considérable sur le secteur touristique. L'Europe représente 25,7 % du total des touristes visitant le pays et les États-Unis 5,9 %. Au fur et à mesure que la crise financière s’aggravera dans les pays Occidentaux, les touristes potentiels reporteront ou annuleront probablement leurs voyages. L'Association des Hôtels du Népal, en collaboration avec le Gouvernement, souhaitent lancer des packages afin d’attirer près d’un million de touristes en 2010 ; toutefois, si la décélération économique mondiale se prolonge, ce rêve pourrait devenir irréalisable6.
Les réserves de devises de la Banque Centrale subiront également une pression à la baisse. L'institution devra tenter de contrôler le taux d'inflation, actuellement supérieur à 13 %, en augmentant les taux d'intérêt. Le système bancaire pourrait aussi avoir des problèmes si le vigoureux marché immobilier se contracte7. En même temps, le secteur de l'aide au développement ne sera pas non plus débarrassé de la crise. Les ONG du Népal reçoivent des fonds de la part de donneurs patronaux, de gouvernements et de grandes fondations de l’Occident. La réduction de ces fonds obligera ces organisations à interrompre leurs initiatives en matière de développement. Ceci aura un impact négatif en ce qui concerne la lutte contre la pauvreté et les autres problèmes liés au développement8.
La crise environnementale
Le réchauffement global, résultat du changement climatique, auquel le Népal ne contribue que très faiblement, menace aussi de faire fondre les neiges et les glaciers de l’Himalaya, ce qui rendrait le milieu glaciaire hostile à la vie humaine. Une analyse récente du Département d’Hydrologie et de Météorologie montre que le pays fait face à une augmentation annuelle moyenne de la température de 0,06o C. Le réchauffement soutenu a affecté l'écologie de l’Himalaya, y compris les patrons d’enneigement et de fonte des glaces. Le recul des glaciers et en conséquence l'augmentation considérable de la taille et du volume des lacs glaciaires, favorise les crues soudaines des lacs glaciaires (phénomène appelé GLOF, sigle anglais pour Glacial Lake Outburst Flooding). Il existe au moins vingt lacs à risque dans la région montagneuse, et l’on craint de plus en plus qu’un séisme ou des précipitations excessives provoquent un GLOF qui entraînerait sur son passage des habitations et détruirait les infrastructures se situant le long des bassins fluviaux : des centrales hydro-électriques, des routes et des ponts9. Cela est d’autant plus inquiétant que la fonte des glaciers de l’Himalaya pourrait avoir un impact énorme sur les ressources hydriques et les systèmes écologiques fluviaux de toute l'Asie du Sud10.
La fréquence des précipitations a également changé radicalement durant les dernières années. Il est devenu difficile de pronostiquer l'arrivée et la durée des pluies de la mousson et de ce fait, le rendement des cultures décroît de plus en plus. En 2006, les agriculteurs ont dû replanter leurs rizières car les pluies avaient soudainement cessé. Par ailleurs, le deuxième ensemencement avait été mauvais car de fortes pluies se sont abattues pendant la récolte, endommageant les cultures. Les inondations de la mousson de 2008 qui sont aussi imputables au réchauffement global, les inondations ayant été provoquées par la fonte des neiges des sommets montagneux, ont obligé plus de 180.000 personnes à se déplacer.
La crise énergétique
Après le Brésil, le Népal est le second pays le plus riche au monde en terme de ressources d'eau douce. Il possède un potentiel de production de 82.000 mégawatts d'hydro-électricité, et la production de la moitié de ce volume est techniquement viable. Cependant, on n’en exploite aujourd’hui qu’1 % environ alors qu’en 2008 et 2009 le pays a traversé la pire des pénuries électriques depuis longtemps. Il existe un déséquilibre chronique entre la consommation d'énergie et la fourniture de ressources énergétiques. Chaque année, la demande d'électricité augmente de 10 %, tandis que la production reste constante. Le décalage entre l'offre et la demande a obligé le gouvernement à déclarer une crise nationale d'énergie en décembre 2008. C’est à ce moment-là que les Autorités de l'Electricité du Népal ont imposé des coupures de 12 heures quotidiennes de la distribution électrique. Avec l’arrivée de la saison sèche, début 2009, les coupures ont duré jusqu'à 16 heures par jour. Par conséquent, la productivité du secteur industriel a chuté de près de 50 %. La pénurie d'énergie a provoqué la fermeture de plusieurs petites et moyennes entreprises (PME). Ces PME, qui produisent non seulement des produits finis et créent des emplois, fournissent également des produits intermédiaires aux entreprises plus importantes. Le manque d'énergie a aussi nui sérieusement à d’autres types d’entreprises : il a provoqué la fermeture de plusieurs usines de transformation du jute, de stations de radio FM, de cybercafés, d’usines de papier, d’hôtels et de centres touristiques.
D’un autre côté, les gens utilisent toujours plus de diesel, dont la fourniture est irrégulière, puisqu'il est importé 11.
Finalement, les forêts des zones rurales ont également subi une pression étant donné le manque de sources alternatives d'énergie.
La crise alimentaire
Le Népal se trouve sur la liste des 16 pays en danger de famine souffrant de graves problèmes liés à l'insécurité alimentaire12. Des années de conflit ont empêché de réaliser des investissements dans l'agriculture, alors qu’environ 69 % de la population en dépend complètement. Il s’agit en grande partie d’agriculteurs de subsistance possédant de petites parcelles de terre.
La « révolution verte » n'a pas produit de résultats substantiels chez les paysans et la chute de la productivité a mis un terme à l'autosuffisance alimentaire qui avait caractérisé le pays précédemment. Le Programme Alimentaire Mondial fournit actuellement une aide alimentaire à 2,7 millions de personnes. La situation s’est beaucoup aggravée en 2008, non seulement à cause de la hausse des prix mais aussi parce que l'Inde a décidé de suspendre ses exportations de riz dont le Népal est dépendant. Les conflits armés et les fréquentes catastrophes naturelles sont venues s’ajouter au problème. L’Unicef signale que 60 % de la mortalité infantile13 est due à la malnutrition, et le Programme Alimentaire Mondial évalue que 41 % de la population est sous-alimentée14.
La dépendance généralisée de l'agriculture de subsistance est la cause sous-jacente de plusieurs problèmes de dégradation environnementale, en particulier de l'épuisement des ressources forestières, ce qui à son tour produit une décroissance de la biodiversité et une désertification. Les stratégies de survie, les connaissances de la population pauvre et les options de moyens de vie durables doivent être liées.
La crise politique et sociale
Le Gouvernement de coalition fait face à plusieurs défis. Il doit établir une paix durable, institutionnaliser la démocratie par la rédaction d'une Constitution pour la République Fédérale Démocratique du Népal, et installer un système fédéral de gouvernement qui soit acceptable pour la majorité, bien qu'il ne le soit pas pour tous les secteurs de la société. Toutefois, des retards en ce sens ont donné lieu à de nombreux problèmes. Plusieurs groupes armés se sont constitués dans différentes zones du pays et de nouveaux groupes continuent à surgir. Les kidnappings, extorsions, décès, pillages, vols, grèves et conflits quotidiens provoqué par ceux-ci, déstabilisent de plus en plus le pays et constituent une grande menace pour la démocratie récente.
Les répercussions de la crise sur le genre et sur la fonction de la société civile
Les différentes crises affecteront aussi bien les moyens de survie des femmes que ceux des hommes. Les changements climatiques rendent de moins en moins prévisibles et de plus en plus faibles les ressources d'aliments traditionnelles. Les femmes sont très dépendantes des ressources naturelles. Elles constituent souvent leur seule source d'aliments et de revenus, alors que ces ressources sont menacées par le changement climatique susceptible de provoquer la perte des récoltes. En cas d’inondations, les rues et les maisons souffrent des dommages et ce sont les femmes qui veillent le plus sur les personnes qui proviennent des zones inondées. D’un autre côté, l'aggravation de la pénurie de l'eau affecte surtout les femmes encore une fois, puisqu'elles sont, traditionnellement, les responsables de la récolte de l'eau au sein de leurs communautés.
Des grands pans de population continuent à être exposés aux conflits civils, ce qui limite l'accès aux aliments et aux services sociaux et économiques. Cette situation crée beaucoup de souffrance, spécialement chez les femmes, dont les droits à la propriété ne sont pas garantis et qui se trouvent face à une situation inégalitaire en ce qui concerne l'accès aux ressources et au travail.
Les organisations de la société civile qui travaillent au niveau national et international ont une fonction importante à remplir en diffusant à travers l'activisme, le lobbying et les campagnes, le message des conséquences des crises sur le genre. Elles peuvent plaider, en particulier, pour l'intégration de la perspective de genre dans les programmes publics de développement, et dans la négociation de stratégies d’adaptation et d’atténuation afin de réduire la vulnérabilité des femmes et des hommes népalais.
1 La fin de la rébellion dirigée par le Parti Communiste du Népal(Maoïste) en novembre 2006 et qui a été suivie par l’instauration d’un nouveau gouvernement en mai 2008, n’a pas abouti à l’arrêt total de la violence.
2 Sapkota, C. “Impact of Global Financial Crisis on the Nepali Economy.” República, 2 décembre 2008. Disponible sur : <www.myrepublica.com/portal/index.php?action=news_details&news_id=99>.
3 Parajuili, K. “Nepal Fears Global Financial Crisis, Looks to China.” Disponible sur : <www.asianews.it/index.php?l=en&art=13574&size=A>.
4 Pyakuryal, B. (2008). “A Matter of Life and Debt”. Disponible sur : <www.kantipuronline.com/columns.php?&nid=165540>.
5 “Impact of Global Financial Crisis on the Nepali Economy.”
6 Singh, M. “Global Financial Crisis: Its Impact.” The Rising Nepal. 2008.
7 Adhikari, S. (2009). “Global Economic Crisis and Nepal.” The Rising Nepal.2009
8 Sapkota, C. “Constraints to Industrial Sector Growth in Nepal.” Disponible sur : <www.sapkotac.blogspot.com/2009/01/constraints-to-industrial-sector-growth.html>.
9 ICIMOD. “The Melting Himalayas: Regional Challenges and Local Impacts of Climate Change on Mountain Ecosystems and Livelihoods.” Texte technique. Katmandú: Centre International pour le Développement Intégré des Montagnes (ICIMOD). 2007.
10 Ibid.
11 Hassan, M. “Nepal Heading Towards a Dark Future: Needs More Electricity.” Disponible sur : <www.southasiabiz.com/2008/02/nepal_heading_towards_a_dark_f.html>.
12 Shamsuddoha, M. et al. “ Revamping Policies for Attaining Food Security in the LDCs. ” Ginebra : INSouth Centre. Disponible sur : <www.insouth.org/>.
13 Voir : <www.unicef.org/infobycountry/nepal_nepal_background.html>.
14 Voir : <www.wfp.org/countries/nepal>.
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Un changement de direction est nécessaire
Dr. Adolfo Acevedo,
Comisión Económica de la Coordinadora Civil.
Coordination Civile
La chute des exportations et des envois de fonds qui se fait ressentir de nos jours, provoquera probablement, la croissance du chômage et la paupérisation des Nicaraguayens. Dans le court terme et pour limiter les impacts de la crise, le Gouvernement devra augmenter les dépenses vers le secteur public pour relancer ainsi l'activité économique et l'emploi. Quoi qu’il en soit, ces mesures ne s'attaqueront pas au nœud du problème. Un changement de direction devra s’imposer pour remettre en question l'actuel modèle de croissance, pour sortir l'agriculture de sa léthargie et pour effectuer des efforts conséquents en faveur de la revalorisation du capital humain.
L'actuelle crise économique internationale n'est pas seulement la plus grave et la plus profonde depuis la Seconde Guerre Mondiale, elle est aussi la mieux synchronisée, car bien qu’elle soit née dans les pays développés, elle affecte de manière simultanée l'économie de chaque région du monde. Pour la première fois en 60 ans, l'économie mondiale verra sa croissance décroître en 2009. Tandis que le Fonds Monétaire International (FMI) annonce une croissance négative (- 1,3 %), l'OCDE indique que le commerce mondial se contractera de 13,2 %. On s’attend à ce que cette crise produise une perte de 50 millions d'emplois1 et 200 millions de personnes pourraient basculer dans la pauvreté. D'autre part, la Banque Mondiale a annoncé que, suite à ces impacts, plus de 400.000 enfants pourraient mourir pour des causes qui sont évitables2.
En ce qui concerne le Nicaragua, la crise affectera probablement, dans le court terme, la croissance de deux rubriques fondamentales pour l'économie du pays, les exportations et les envois de fonds familiaux, ce qui pourrait provoquer une augmentation du chômage (rien que dans les Zones Franches, de janvier 2008 à mars 2009, la perte nette d'emplois se situait déjà à 20.000).
L'impact de la crise économique internationale se reflétera, probablement, dans le ralentissement de la demande globale, ce qui déterminera une forte diminution du rythme de croissance de la production et de l'emploi, avec le risque inhérent d'une entrée en récession. Les différentes projections qui ont été effectuées sur l'économie montrent qu’à différentes échelles, les principales composantes de la demande globale se décéléreront de manière ostensible en 2009.
La réduction de l’exportation de biens et de services, du flux des envois de fonds familiaux, du crédit interne et externe, ainsi que des problèmes de liquidité et une incertitude grandissante, se traduiront probablement par de fortes pressions récessives qui affecteront, de manière différente, plusieurs secteurs de l'économie. Le ralentissement du rythme de croissance de la demande globale se reflétera probablement dans un taux de croissance du PIB qui, dans le meilleur des cas, pourra atteindre 0,5 %, avec une forte probabilité de chuter à -1 %.
La chute des exportations et des envois de fonds
La production de biens et de services pour l'exportation a été le moteur fondamental de la croissance économique du Nicaragua, tandis que la production de biens et de services pour le marché interne n'a presque pas augmenté durant la dernière décennie et demie. En même temps, le Nicaragua est fortement dépendant pour l’écoulement de ses exportations – qui représentaient 26,7 % du PIB en 2008 – du marché des États-Unis, qui a été très frappé par la crise. En raison de cela, les exportations ont enregistré une récession de presque 19 % en mars 20093.
Les envois de fonds familiaux, pour leur part, qui ont représentés en 2008 la somme de 807 millions de dollars américains – presque 13 % du PIB –, avaient déjà chuté de 4 % en mai 20094. Quatre familles nicaraguayennes sur dix, reçoivent des envois de fonds, 60 % desquels proviennent des États-Unis. Les envois de fonds représentent un filet social essentiel pour l'économie nicaraguayenne, puisqu'on estime qu’en leur absence, le taux de pauvreté augmenterait de 4 points de pourcentage.
Chômage et pauvreté
La Commission Economique pour l’Amérique Latine et les Caraïbes (CEPALC) a observé une augmentation du taux de chômage de 7,5 % en 2008 à 7,8 % et 8,1 % en 2009, outre l’accroissement du travail informel. Cette augmentation va signifier qu’1.8 millions de personnes viendront s’ajouter aux 1.6 millions de Nicaraguayens déjà au chômage.
Ceci pourrait se refléter par la dégradation de la quantité et de la qualité de l'emploi. La perte d'emploi formel aura pour conséquence la perte des bénéfices de la sécurité sociale, tant du bénéficiaire principal que des bénéficiaires à charge de celui-ci.
Il est difficile pour les personnes qui ont perdu leur emploi dans le secteur formel d’en retrouver un dans le même secteur, puisqu’il se réduit fortement. Etant donné que les personnes en situation de pauvreté ne peuvent pas se permettre de rester au chômage, il est probable que cette situation mène vers l’augmentation de l'emploi et du sous-emploi dans le secteur informel. Ce secteur, auquel ont recours les chômeurs et la plupart des jeunes actifs, va se saturer, ce qui engendrera une détérioration du revenu par tête. Les niveaux de pauvreté et d’indigence qui sont déjà excessivement élevés, augmenteront davantage et la décomposition du tissu social va s’aggraver.
La distribution des revenus dans le pays, est très inégalitaire (0,56 du coefficient Gini), la population des couches les plus précaires est celle qui profite le moins des phases de croissance de l'économie, en revanche elle est la plus touchée lors de chocs défavorables. Les plus pauvres n’ont ni épargnes ni actifs auxquels recourir pour amortir les impacts et faire face aux périodes difficiles, de sorte que les effets des crises peuvent vite les faire glisser sous le seuil de pauvreté extrême ou dans l'indigence.
Il est probable que, face à la croissance du chômage, des nouveaux moyens de génération de revenus, à petite échelle ou à échelle familiale et dans le secteur informel, émergeront comme stratégie de survie des foyers. Il est possible également qu’il y ait une augmentation de la recherche d'emploi pour son propre compte. De telles stratégies pourraient avoir des effets significatifs sur l’augmentation du travail non rémunéré au sein des familles, avec une retombée du fardeau sur les femmes et les enfants. En même temps, la saturation de ce type d'emplois tendrait à réduire encore plus les revenus par tête et par foyers qui en dépendent, car les niveaux de pauvreté associés à ce type d'emplois sont déjà très importants.
D'autre part, la hausse des prix des aliments observée en 2007 et 2008 a eu un sévère impact sur les plus pauvres, leur accès aux aliments a été fortement réduis et ceci a contribué à aggravér leur situation. En décembre 2007 l'indice de prix des aliments avait augmenté de 24,9 % par rapport à décembre 2006, tandis qu'en décembre 2008 il avait encore augmenté de 22,5 % en plus.
Cette restriction dans l'accès aux aliments ne concernerait pas uniquement les catégories urbaines défavorisées qui, selon L’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), constituent 93,8 % des acheteurs nets d'aliments, mais elle concerne également les catégories les plus défavorisées en milieu rural, dont 73 % seraient aussi des acheteurs nets d'aliments. La dégradation de la situation économique des foyers pourrait compliquer davantage l'accès aux aliments et pourrait aggraver la situation de faim dans un pays où 22 % de la population souffre de sous-nutrition.
Les femmes sont les plus touchées
Les femmes constituent un groupe de la population spécialement vulnérable face aux effets de la crise. Selon l'Institut National d'Information du Développement (INIDE), 71 % des femmes qui vivent dans les zones rurales en âge de travailler, et 58 % de celles qui vivent dans les agglomérations, ne s'incorporent pas au marché du travail et, par conséquent, n'ont pas de sources de revenus propres. La diminution des revenus familiaux pourrait se traduire par une surcharge du travail féminin au sein des foyers, dans le but de produire les biens qui ne pourront plus être acquis sur le marché.
D'autre part, 86,5 % des Nicaraguayennes travaillent dans les secteurs liés aux services (35,8 %), au commerce (32,3 %) et à l’industrie manufacturière (18,4 %). Ce sont les secteurs qui pourraient être les plus touchés par le chômage ou par la précarisation de l'emploi à conséquence de la crise. De fait, les femmes ont été les plus touchées par la perte d'emplois dans les zones franches.
Les mesures pour contenir les effets de la crise
Limiter les effets de la crise économique internationale signifierait principalement d’atténuer la décélération de la demande globale ou des frais orientés vers l'acquisition de biens et de services domestiques. L'instrument auquel ont recours le plus fréquemment les gouvernements pour faire face aux pressions récessives est la mise en œuvre d'une politique monétaire et de crédit expansive, pour relancer la consommation et l'investissement et atténuer les problèmes de liquidité, ce qui signifie que la Banque Centrale pourrait : 1) réduire le coefficient de réserve légale, 2) acquérir à nouveau les lettres de change placées à travers des opérations à marché ouvert, ou 3) réduire le taux de remise qu’elle applique aux lignes de crédit qu'elle accorde au système financier.
Dans tous les cas, il sera indispensable de disposer de lignes de crédit pour soutenir les banques qui pourraient, éventuellement, éprouver des problèmes de liquidité – dû, par exemple, au retrait de leurs sources de financement externe - ou bien pour qu’elles puissent soutenir les entreprises qui ont des problèmes de liquidité. Dans un cas extrême, il faudra être en mesure de recapitaliser les banques qui pourraient avoir des problèmes de solvabilité. Ceci ne signifie pas que le secteur financier sera traité de manière privilégiée, mais le fait qu’il soit instable pourrait avoir des répercussions extrêmement graves sur l'économie réelle (l'actuelle crise mondiale a commencé par une « simple crise » du secteur financier).
Jusqu'à présent, la mesure la plus importante entreprise par le Gouvernement a été d'obtenir une ligne de crédit de la Banque Centraméricaine d'Intégration Économique (BCIE), qui sera utilisée dans l'éventualité ou des banques éprouveraient des difficultés financières.
Toutefois, il est difficile que les banques développent des opérations offensives de crédit face aux perspectives précaires et incertaines des différents secteurs de l'économie. Le crédit bancaire tend à être pro-cyclique, c'est-à-dire, qu’il se restreint lorsque les circonstances économiques se détériorent, les détériorant davantage.
Pour contrecarrer la contraction de la demande globale, résultat de la diminution de la consommation privée et de l'investissement, il serait logique d’accroître les dépenses publiques. Celles-ci représentent, tout comme les frais privés, une partie de la demande globale, capables de relancer l'activité économique et l'emploi. Au contraire, si au lieu d’augmenter les dépenses publiques celles-ci diminuent, la récession va s’aggraver; c'est-à-dire que la réduction des dépenses publiques sera pro-cyclique.
La meilleure option pour résister à une telle décélération de la demande globale serait de proposer un plan d'investissements publics qui permette de compenser la chute de la croissance des autres composantes de cette demande. C’est le schéma privilégié partout dans le monde.
Un programme offensif d'investissements publics en infrastructure de base, de mise en place rapide, tel que – la réparation et l’entretien de chemins et l’amélioration du réseau relatif à la voierie, l'expansion et l'amélioration du réseau de distribution d’eau potable et d’assainissement, l’expansion du réseau de distribution d'énergie, le maintien, la réparation et la construction de nouvelles salles de classe, de logements, etc. –, ainsi qu'un programme pour améliorer la productivité des petites et moyennes unités économiques, urbaines et rurales, présenteraient plusieurs avantages. Non seulement ils contribueraient à contrecarrer ou du moins à atténuer l'impact de la crise, mais ils permettraient aussi de créer des actifs et des capacités qui contribueraient au futur développement du pays. De tels investissements constituent une des conditions préalables et les éléments fondamentaux du processus de développement.
Il s'avérera essentiel, en outre, de protéger par tous les moyens possibles les dépenses essentielles à l’investissement en capital humain, notamment les frais liés à l’éducation, à la santé, à l’accès aux médicaments essentiels et à la nutrition. Il faudra également accroître les dépenses en protection sociale, car elle constitue l’amortisseur des effets les plus graves de la pauvreté dans un contexte de fluctuations non désirées de l'économie.
Les mesures à long terme
Toutefois, il ne suffit pas de faire face à l'impact de la crise seulement à court terme. Il est indispensable d’amorcer le changement de direction du pays. Il faut dépasser, de manière ferme, les conditions qui produisent le retard et qui marginalise l'agriculture5 et les zones rurales. Il faut remettre en question l'actuel modèle de croissance et il faut effectuer un effort extraordinaire d'investissement en capital humain et en infrastructure de base. Notre proposition est de faire un effort national sans précédent pour atteindre, dans un délai sans appel, une série d'objectifs fondamentaux :
• Eradiquer l'analphabétisme des adultes. Il faudra arriver, à la date fixée, à un taux d’alphabétisation de 100 % de la population âgée de plus de 15 ans.
• Généraliser l'éducation avant l’école primaire, élevant à 100 % le taux net d’inscription des enfants de 3 à 5 ans.
• Atteindre un taux d’inscription nette à l’école primaire de 100 %.
• Obtenir qu'au moins 80 % des filles et garçons inscrits en première année de l'éducation primaire, puissent terminer le cycle complet de l'enseignement primaire.
• Atteindre un taux net d’inscription en Secondaire de 75 %.
• Elever de manière significative la qualité et la pertinence de l'éducation pour tous les niveaux.
• Obtenir, dans le délai établi, que l’on puisse atteindre une scolarité moyenne au niveau national, de 9 ans.
1 Voir : OIT. Tendencias mundiales del empleo, 2009. Diponible sur : <www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---dgreports/---dcomm/documents/publication/wcms_103599.pdf>.
2 Voir : <www.gara.net/paperezkoa/20090322/128371/es/El-BM-compara-profundidad-crisis-actual-Gran-Depresion>.
3 Voir : <impreso.elnuevodiario.com.ni/2008/10/14/economia/87227>.
4 Voir : <www.remesasydesarrollo.org/estadisticas/remesas-familiares-hacia-nicaragua-siguen-cayendo-por-recesion-economica>.
5 L'agriculture représente 21 % de la valeur ajoutée brute produite par les divers secteurs de l'économie nicaraguayenne, et elle emploie autour de 30 % des forces de travail du pays. Il s’agit du secteur qui génère le plus d’emplois.
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Des contraintes interminables
Social Watch Nigéria
Luke Chukwu
Judith Ogunniran
Ray Onyegu1
La plupart des Nigérians ont vécu pendant longtemps dans une situation d’effondrement économique. La corruption est généralisée, il a pénurie d’électricité dans tout le pays, l’éducation et la santé se trouvent dans des conditions déplorables et la lutte armée pour le contrôle des ressources pétrolières est toujours intense. La crise économique mondiale a encore aggravé la pauvreté. Les experts soulignent que le pays devrait prendre des mesures afin de réduire sa dépendance du brut et résoudre les mauvaises pratiques budgétaires annuelles.
Plus de 90 % des Nigérians ont connu les crises économiques pendant longtemps, mais leur situation précaire s’est aggravée depuis que le gouvernement actuel a pris le pouvoir. L’effondrement total de l’infrastructure publique – telle que les voies publiques et l’électricité – et la corruption généralisée ont fait que la vie est devenue un récit sans fin de besoins, d’abandon et de peur. Le Nigéria est sur le point d’être considéré un état en situation d’échec.
Corruption
Chaque jour les médias électroniques et les journaux dénoncent des cas de représentants du gouvernement qui saccagent des fonds publics et virent l’argent à l’étranger. D’après l’ancien président de la Banque Mondiale Paul Wolfowitz, pendant près de quatre décennies plus de 300 millions de dollars ont été volés et cachés dans des banques étrangères2. On a suggéré que si les États-Unis, aux budgets nationaux milliardaires, pouvait envoyer la Secrétaire d’État, Hillary Clinton, récupérer 14 millions de dollars que les fraudeurs fiscaux ont déposé en Suisse, il n’y aurait aucune raison pour que le Nigéria ignore les avertissements de l’économiste et Prix Nobel Joseph Stiglitz et des représentants de l’ONU, pour aller à la recherche des milliards de nairas nigérians stockés dans des banques étrangères3. Cependant, au lieu de passer à l’action, on parle d’emprunter davantage d’argent pour lutter contre la crise économique, ce qui ferait retomber le Nigéria dans le piège de la dette.
Electricité
Le Nigéria doit générer 10.000 mégawatts minimum par jour pour assurer l’approvisionnement normal d’électricité. Cependant, lorsque le gouvernement actuel a pris ses fonctions en 2007, on ne générait que 3.000 mégawatts par jour. La production est tombée à moins de 1.500 mégawatts deux ans plus tard. L’obscurité règne dans tout le pays. Les affaires ont chuté vertigineusement en raison du manque d’approvisionnement régulier et continu d’énergie. Le secteur industriel a pratiquement disparu. Le chômage est généralisé. D’après un rapport publié à la une du journal The Guardian, le Gouvernement va encore emprunter 600 millions d’USD à la Banque Mondiale pour améliorer la situation de l’approvisionnement d’énergie4. Ceci pose de nombreux problèmes. Par exemple, il n’y a aucune garantie de ce que le prêt n’aille pas directement sur les comptes de représentants du gouvernement à l’étranger. Le projet d’électricité est à long terme, mais les besoins des gens sont immédiats.
Éducation et santé
Les enseignants universitaires ont fait plusieurs grèves cette année pour attirer l’attention sur l’état déplorable du secteur de l’éducation. Entre autres choses, ils protestent à cause du manque d’installations, de l’effondrement total des infrastructures telle que l’électricité et le logement, et des procédés arbitraires du gouvernement concernant l’amélioration de leurs conditions de travail. La situation des secteurs primaire et secondaire ne diffère pas de celle du secteur supérieur. Les grands commis de l’État, ainsi que les politiciens, envoient leurs enfants à des écoles et des universités à l’étranger. Une fois leur formation finie, beaucoup de ceux qui étudient à l’étranger refusent de rentrer dans la pourriture du pays.
Les hôpitaux et les installations de santé sont devenus des mouroirs. Les représentants du gouvernement et les politiciens voyagent à l’étranger pour traiter leurs problèmes de santé. Depuis plusieurs années, des médecins et autres professionnels de la santé font un exode massif vers l’Europe et les États-Unis, où ils peuvent travailler dans de meilleures conditions. Les hôpitaux et autres installations de la santé publique manquent de médicaments ; et là où ils sont disponibles, ce sont des médicaments falsifiés. Les centres de santé efficaces sont privés et la plupart des habitants, qui sont pauvres, n’ont pas les moyens d’y accéder.
Conflit armé dans le delta du Niger
Il n’y a aucun signe d’arrêt du conflit armé existant entre les forces du gouvernement et les militants séparatistes de la région du delta du Niger pour le contrôle du pétrole, qui génère 95 % de la richesse pétrolière du pays. Les militants enlèvent des travailleurs étrangers et font exploser des tuyauteries et d’autres installations qui appartiennent aux entreprises pétrolières. Plusieurs compagnies, parmi lesquelles BP-Shell, ferment leurs exploitations dans la région. On craint que le gouvernement ne puisse pas atteindre ses objectifs de revenus si le débit actuel de la baisse de la production pétrolière continue. Le résultat n’en sera que davantage de pauvreté et de morts.
Mauvaise mise en œuvre des budgets annuels
Les experts ont présenté un tableau économique sombre pour les Nigérians lors d’une table ronde sur la perspective commerciale et économique pour l’année fiscale 2009 et pour la révision du budget 2009. La table ronde fut organisée par le Bureau d’information commerciale à Lagos en janvier 2009. Les participants ont été le directeur général d’Associés Economiques, le Dr Ayo Tériba ; le directeur de recherches du Comité national de l’intelligence économique, M Wénéso Orogoun ; et le célèbre économiste et doyen de la Faculté académique de l’Ecole de commerce de Lagos, le Dr Doyin Salami. Outre la crise économique mondiale, les participants ont ajouté la mauvaise mise en œuvre des budgets annuels comme élément ayant favorisé le ralentissement de la croissance de l’économie pendant ces dernières décennies. Selon les experts, la question n’est pas tellement de savoir quelles sont les difficultés économiques croissantes et la mauvaise qualité de vie du nigérian moyen, mais combien de temps cette situation pourra durer.
Orogoun a qualifié de scandaleux le fait que l’utilisation de projets de capital vers le troisième trimestre 2008 soit à peine de 33 %. Il s’est demandé pourquoi, compte tenu de la situation déplorable du transport, surtout sur les routes, le Ministère du transport n’avait utilisé que 42,3 % de son allocation budgétaire en 2008, et n’en remboursant qu’environ 420 millions de dollars au Trésor. En effet, en septembre 2008, seulement dix ministères avaient utilisé plus de 50 % de leurs répartitions budgétaire. Orogoun a attribué cette situation au manque de capacité technique pour mettre en œuvre le budget, à l'inefficacité du contrôle du budget et à la corruption.
Tériba, qui était l’orateur invité, a dit que l’effondrement mondial ne signifierait pas seulement une chute de la demande mondiale des biens et services, mais aussi une baisse soudaine des prix des matières premières mondiales, comme cela est le cas, par exemple, avec la réduction radicale du prix du brut. Il a également dit qu’il y aurait pénurie de crédits et une majoration des taux d’intérêts qui entraîneraient les effets multiplicateurs correspondants. Il a présenté un cadre dans lequel il serait très difficile que les banques locales puissent accorder des crédits, et si elles le faisaient, le taux d’intérêt en serait très élevé. Ceci s’ajouterait aux coûts déjà élevés des affaires dans le pays, en aggravant encore la pénible situation du secteur industriel et de tous les commerçants en général. L’expert a également dit que les industries et autres entreprises subiraient également une baisse importante de la demande de leurs biens et services en raison de la réduction du pouvoir d’achat de la population. Cette situation se traduirait sans aucun doute en perte de richesse, diminution de l’emploi et autres problèmes socio-économiques.
Tériba a mis l’accent sur le fait que les problèmes économiques qui vont apparaître ne se résoudraient pas aussi vite qu’il le faudrait, parce qu’il semble n’y avoir aucune capacité pour gérer la situation, bien qu’il croie que le Gouvernement pourrait tout de même alléger les effets de la crise mondiale en réalisant de plus grands efforts pour restaurer la confiance en l’économie. Il a suggéré que la décision de baser le budget 2009 sur 45 dollars par baril de pétrole projette un pessimisme qui envoie de mauvais signaux aux acteurs impliqués. Selon lui, puisque le gouvernement a basé le budget 2008 sur 59 dollars par baril de pétrole, alors que le prix était à 100 dollars, il pourrait baser le budget 2009 sur un prix bien plus élevé et utiliser les profits de 2008 pour en compenser le décalage.
Salami a manifesté que les Nigérians doivent s’attendre à des temps difficiles en raison des mesures qui seront prises par le gouvernement prendra pour lutter contre la crise mondiale. Il a critiqué la dépendance du pays du brut, et il a remarqué qu’on s’attend à ce que la demande mondiale diminue de 85,84 millions de barils par jour (mbj) en 2008, à 85,66 mbj en 2009, alors que les pays pétroliers n’appartenant pas à l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) se préparent à augmenter la production de 50,57 mbj en 2008 à 51,15 en 2009. Cela implique que, les revenus du pétrole chutant, le gouvernement s’efforcera davantage pour obtenir une meilleure collecte d’impôts, et réduira ainsi les revenus disponibles et les épargnes des citoyens. Salami a souligné que des années difficiles sont à prévoir pour ceux qui dépendent uniquement du commerce, et a suggéré qu’une solution consisterait à identifier les actifs sous-évalués de l’économie et à persuader les gens d’investir.
Devant cette situation, on ne peut prévoir qu’un avenir sombre. La crise économique mondiale s’ajoute aux conditions de vie déjà déplorables des pauvres du Nigéria. Ceci constitue un très mauvais panorama qui ne peut malheureusement qu’empirer.
1 Luke Chukwu est Directeur du Comité de Direction de Social Watch, Nigéria, professeur de comptabilité à l’université d’Imo Sate, Nigéria ; Judith Ogunniran est Sous-directrice du Comité de Direction de Social Watch, Nigéria, Directrice Exécutive de Socio Economic Rights Initiative.
2 Ojiabor, O. “Corruption Has Ruined Nigeria – APRM report.” Economic and Financial Crimes Commission, 2008.
Voir : www.efccnigeria.org/index.php?option=com_content&task=view&id=110&Itemid....
3 Onuorah, M. y Okwe, M. “World Bank Gives Nigeria $600m for Power.” The Guardian, jeudi 18 juin 2009. Voir : <www.ngrguardiannews.com/news/article01//indexn2_html?pdate=180609&ptitle=World%20Bank%20gives%20Nigeria%20$600m%20for%20power>.
4 Stolpe, O. Chef de Projet senior de l'Office contre la Drogue et le crime des Nations Unies, dans une conférence de presse sur "Non-Conviction Based Forfeiture of Proceeds and Instrumentalities of Unlwful Activity Bill". Abuja, 20 mai.
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Objectifs du Millénaire pour le Développement mis en péril
Development Network of Indigenous Voluntary Associations (DENIVA)
David Obot
La crise financière rendra difficiles les efforts pour réduire la pauvreté en Ouganda. L'aide étrangère, les envois de fonds et les recettes dérivées des exportations se réduisent déjà. Le Gouvernement doit développer de nouvelles stratégies pour identifier les causes profondes de la pauvreté, de l'exclusion et des mauvaises conditions sociales dans le pays, tout en se joignant à d'autres pays au niveau régional et international pour promouvoir une réforme de l'architecture financière mondiale. Il existe plusieurs initiatives de la société civile qui, si elles sont soutenues, pourraient aider à résoudre la crise.
Vers la fin de 2008, les leaders du G-20 ont lancé un appel aux pays développés et en développement et aux institutions financières internationales pour prendre des mesures « urgentes » afin d’éviter les impacts négatifs de la crise économique mondiale. Un rapport de la Banque Mondiale, préparé pour la réunion des Ministres des Finances du G-20 en mars 2009, mettait en garde contre les implications à long terme pour les pays en développement, y compris la diminution des services d’éducation et de santé pour les pauvres1.
En outre, l'aide officielle au développement (AOD) des pays pauvres pourrait diminuer à mesure que la crise s’accentue dans les pays donneurs2. La Commission du Développement Social de l'ONU signale que la crise actuelle aura des conséquences graves pour les politiques sociales et menacera la stabilité sociale ; les crises alimentaires et climatiques retrancheront les plus vulnérables en marge de la société3.
Le Fonds Monétaire International (FMI) a indiqué que les marchés financiers de l'Afrique Sub-saharienne sont vulnérables en raison du ralentissement de la croissance mondiale et que l'Ouganda est en situation de risque à la suite des prêts pour investissements sur le marché boursier4. La Banque Centrale a signalé qu’avec la diminution des revenus des exportations et du tourisme, la croissance économique du pays se trouvera maintenant de l’ordre de 5 % ou 6 %, au lieu de 8 % prévu auparavant5.
Le Ministre des Finances a informé que bien que l'Ouganda ne soit pas « directement exposé » au risque, le ralentissement économique pourrait conduire à une réduction des flux financiers provenant des investissements étrangers, du tourisme, des envois de fonds de l'étranger et des flux d'aide des pays donneurs6. Il a ajouté que la réduction des envois de fonds de l’étranger et du soutien des pays donneurs a déjà provoqué un déficit dans le recouvrement de recettes de 108 milliards d'UGX (51,4 millions d'USD) de juillet 2008 à février 2009. Les envois de fonds de l’étranger ont totalisé 1.392 millions d'USD durant l'année fiscale 2007-2008 7.
De plus, le commerce extérieur a été médiocre. Bien qu'on ait enregistré une augmentation des exportations entre 2003 et 2007, les importations ont creusé le déficit commercial en 2007 (voir Figure 1). La Banque Mondiale remarque que les pays à faibles revenus en Afrique Sub-saharienne sont sous pression en raison des impacts de la diminution des prix des matières premières8.
Faibles perspectives d'atteindre les OMD
Selon le rapport 2008 du FMI Perspectives de l'Économie Mondiale, une baisse de la croissance mondiale d'un point en pourcentage entraînerait une chute de 0,5 point en pourcentage du produit intérieur brut (PIB) en Afrique. Le rapport a prévu les effets éventuellement graves de la crise financière mondiale sur ce continent en termes de commerce, d’investissement étranger direct (IED) et de ressources d'aide. Il a aussi souligné que bien que la corrélation entre les PIB africain et mondial entre 1980 et 1999 ait été de 0,5, entre 2000 et 2007 elle n’était que de 0,2. Entre-temps, le Rapport sur les Investissements dans le Monde 2008 de la CNUCED montre que les flux de recettes de l'IED en Ouganda pour les années 2004, 2005, 2006 et 2007 ont été de 295 millions d'USD, 380 millions d'USD, 400 millions d'USD et 368 millions d'USD, respectivement.
Celles-ci ont représenté d'importantes contributions à l'économie ougandaise. Une diminution de l'IED pourrait affecter la capacité du pays à réaliser les ODM, spécialement l'objectif relatif à la réduction de la pauvreté. Ceci sera spécialement critique pour les foyers pauvres et ceux qui ont à leur tête des personnes âgées, des jeunes, des personnes handicapées et des femmes et enfants déplacés, et renforcera la pauvreté intergénérationnelle. Actuellement, le Gouvernement révise son Plan d'Action pour l'Éradication de la Pauvreté afin de l'intégrer au Plan National de Développement9.
La population de l'Ouganda en 2008 était de 29.6 millions, dont 49 % avait moins de 15 ans. La distribution de la population est de 85,1 % en milieu rural et de 14,9 % en milieu urbain. Le taux de fécondité totale est de 6,7 par femme, et le taux de croissance démographique se maintient à 3,2 %. Il est à noter que le pourcentage de personnes qui vivent en-dessous du seuil de pauvreté a été ramené de 38,8 % à 31,1 % dans les Enquêtes Nationales de Foyers (ENF) de 2002-2003 et de 2005-2006, cela signifie une réduction de 1,4 millions de personnes en termes absolus10. Toutefois, beaucoup de gens se heurteront à de grandes difficultés pour faire face aux effets de la crise financière mondiale. La proportion de l'agriculture dans le PIB total continue à diminuer et s’élevait à 21 % en 2007. Cela signifie davantage de stratégies, dont la modernisation, pour améliorer la production agricole et les revenus de la population rurale pour réduire la pauvreté.
En 2005-2006 le taux net de scolarisation dans l’enseignement primaire était de 84 % ; et le taux d'alphabétisation des personnes entre 15 et 24 ans a augmenté de 80 % à 84 %. Bien que les dispositions de l’éducation primaire et secondaire universelle se soient nettement améliorées, le taux d’abandon scolaire est encore élevé : sur un total de 1.914.893 élèves inscrits en premier degré en 2003, seulement 939.804 sont allés à l'école en 2007. En termes de promotion de l'égalité des sexes, la relation filles/garçons en éducation primaire a été réduite de 0.99 à 0.96 ; alors que, la participation des femmes dans les emplois rémunérés du secteur non-agricole a diminué de 39,2 % à 28,2 %.
En matière de santé, les taux de couverture immunitaire varient depuis 89 % pour la tuberculose et de 85 % pour la rougeole et l’hépatite B à 12 % pour le tétanos. Selon l'ENH 2005-2006, le paludisme (60,8%) est encore la maladie mortelle la plus répandue, suivie par les infections respiratoires (14,2 %), la diarrhée (9,5 %, avec un pourcentage plus élevé dans les secteurs ruraux) et les infections cutanées (3,2 %). Le taux de mortalité infantile a diminué de 88,4 % à 76 %. La mortalité maternelle pour 100.000 enfants nés vivants a diminué de 505 à 435 et la proportion d'accouchements assistés par du personnel de santé qualifié a augmenté de 39 % à 41,1 %. Dans la lutte contre le VIH/SIDA et d'autres maladies de transmission sexuelle, l'utilisation de préservatifs parmi les personnes à plus haut risque (de 15 à 24 ans) a augmenté de 49,8 % à 52,9 %, alors que le taux de prévalence d'utilisation de contraceptifs parmi les femmes de 15 à 49 ans, qui sont particulièrement vulnérables à l’ infection, était de 23,6 %.
Quant à la durabilité environnementale, la proportion de terres boisées a diminué de 21,3 % à 18,3 %; et la population rurale ayant accès à des sources d'eau améliorées a augmenté de 53,5 % à 58,5 %. En ce qui concerne l'ODM 8, le service de la dette comme pourcentage des exportations des biens et services a diminué de 20,4 % à 15,8 %.
Gouvernement et société civile: un partenariat très nécessaire
Les mesures gouvernementales pour atténuer l'impact de la crise pendant l’exercice 2008-2009 comprennent : l’amélioration des collectes de recettes pour contribuer avec près de 13,1 % du PIB ; l’assistance à des personnes pauvres et sans terre pour acquérir des parcelles à travers le Système de Prêts pour l'Acquisition de Terres ; l’augmentation des fonds pour les services de mécanisation et des services de vulgarisation agricole afin de couvrir tous les secteurs ; en modifiant la Loi de Sociétés Coopératives de 1991 pour améliorer le contrôle et le règlement de ces sociétés ; soutien à la recherche scientifique pour le développement de technologies et de prototypes commerciaux ; soutien aux PME ; déploiement d’un système de micro-financement pour 800 des 1.020 sous-districts ; et assurer le règlement effectif et le contrôle des banques11.
Le soutien des donneurs à l'Ouganda, soit par un soutien budgétaire direct soit par des projets, devrait produire une hausse de 30 % du budget national de 2008-2009. Le Gouvernement devrait assurer une réduction des frais dans l'administration publique et la baisse des taux d'intérêt pour les prêts bancaires. L'exercice du secteur privé exigera une utilisation du crédit plus saine et prudente, et les personnes qui feront la demande de prêts à des fins commerciales devront également être rigoureuses dans la gestion des fonds prêtés. Cela nécessite des politiques novatrices pour l'industrialisation et le commerce, exigeant de plus grands efforts du Gouvernement pour promouvoir l'intégration économique, spécialement celles en conformité avec la Communauté de l'Afrique Orientale.
Plusieurs organisations de la société civile sont engagées dans différentes questions de développement, y compris le développement humain, la paix, le VIH/SIDA, le contrôle de la corruption, la sécurité alimentaire et le changement climatique. Action AID Ouganda, par exemple, a offert une assistance aux déplacés congolais et aux personnes touchées par des conflits dans le nord de l'Ouganda. DENIVA est en train de donner du pouvoir aux Communautés sous forme d’allocations de ressources budgétaires, par le contrôle de la corruption et en augmentant la sensibilisation aux droits des rapatriés dans le nord du pays. L’Organisation de Soutien à l’Aids (TASO, sigle en anglais) offre encore des services de prévention et d’aide aux personnes affectées par le virus du SIDA dans tout le pays. L'Association Nationale d'Environnementalistes Professionnels et la Coalition d'Activistes pour le Développement et l'Environnement, qui mettent l’accent sur la sécurité environnementale, ont réussi à faire réexaminer la vente prévue de la forêt Mabira par le Gouvernement, une des plus grandes réserves naturelles d'Ouganda. L'Alliance pour le Droit à l'Alimentation préconise une augmentation de la sécurité alimentaire.
Il est important que l’on crée un environnement favorable où les efforts de la société civile - soutenus par le Gouvernement avec des ressources adaptées, ainsi que par les partenaires du développement et les communautés - se cristallisent sur des apports solides pour faire face à la crise.
1 Banque Mondiale (2009). Disponible sur : <web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/COUNTRIES/AFRICAEXT/O, ContentMDK:21990236~piPK:146830~theSitePK:258644,00.html>.
2 te Velde, D.W. (2008). The Global Financial Crisis and Developing Countries : Which countries are at risk and what can be done? Londres : Overseas Development Institute (ODI). Disponible sur : <www.odi.org.uk/resources/download/2462.pdf>.
3 Gu, Z. and Wang, X. (2009). “ UN Commission discusses steps to mitigate negative impact of global financial crisis on social development. ” China View online. Disponible sur : <news.xinhuanet.com/english/2009-02/06/content_10770873.htm>.
4 Fonds Monétaire International. Impact of the Global Financial Crisis on Sub-Saharan Africa. Washington, DC: FMI. Disponible sur : <www.imf.org/External/pubs/ft/books/2009/afrglobfin/ssaglobalfin.pdf>.
5 Reuters. “ The Financial Crisis ”. 23 octobre 2008. Disponible sur : <customers.reuters.com/community/stayinformed/middleeastafrica/MEA_23.10.08_Newsletter.pdf>.
7 FMI, op. cit.
8 Banque Mondiale. “ Crisis Takes a Mounting Toll on Developing Countries ”. 13 mars 2009. Voir : <go.worldbank.org/YGK6U1EFI0>.
9 Ministère des Finances, Planification et Développement Economique (MFPDE). Poverty Eradication Action Plan (2004/5-2007/8). Kampala : MFPDE.
10 Bureau des Statistiques d’Ouganda (BSO). 2008 Statistical Abstract. Kampala.
Voir : <www.ubos.org>.
11 Voir : <www.finance.go.ug/docs/BudgetSpeechFY202008_09_12thJune2008_Final.pdf>.
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Pauvres et incarcérés
Allam Jarrar
Palestinian NGO Network
Depuis 1948, lorsqu’ ils ont été convertis en une population de réfugiés dans leur propre pays et dans les états arabes voisins, les conditions de vie des Palestiniens ont été néfastes. Et, depuis l’occupation militaire réalisée par Israël en 1967, la colonisation et la discrimination raciale sont devenues des pratiques communes du pouvoir d’occupation. Aussi bien le mur de séparation, qui a commencé à être construit en 2002, que la clôture imposée aux territoires palestiniens et la dernière attaque brutale d’Israël sur Gaza en décembre 2008, ont augmenté la ségrégation, le chômage et la récession économique.
Pendant plus de 60 ans le peuple palestinien a été privé de son droit essentiel à l’autodétermination et il a été empêché de constituer son propre état indépendant, à l’intérieur duquel le développement social puisse être une réalité sans de grands obstacles politiques venant de l’étranger. Depuis 1948, l’année du Nakba (la catastophe), lorsque plus de la moitié des Palestiniens ont été expulsés de leurs propres terres, tout le processus de leur développement a été façonné par des forces externes. L’année 1967 a été témoin d’une nouvelle complication quand les forces militaires d’Israël ont occupé le reste de la Palestine.
Seule l’instabilité s’est accrue
L’Autorité palestinienne, conformée en 1994 à la suite des accords d’Oslo signés à Washington, a assumé la responsabilité pour le bien-être socio-économique de la population palestinienne dans les zones de la Cisjordanie et Gaza. Cependant l’incapacité pour mener à bien le traité de paix a conduit en 2002 à la deuxième Intifada (révolte) palestinienne entraînant une plus grande détérioration des indicateurs socio-économiques de la population.
Le PIB par habitant a chuté de 1.612 dollars en 1999 à 1.129 dollars en 2006 d’après le rapport 2007 de la Banque mondiale destiné au Comité de Liaison Ad-Hoc. Le PIB était même de plus en plus encouragé par le gouvernement, par la consommation privée des envois de fonds depuis l’étranger et par l’aide des donateurs ; l’investissement était tombé à des niveaux extrêmement faibles et laissait en même temps « une base productive inappropriée pour une économie autosuffisante1 ».
D’autre part, la Cisjordanie et Gaza avaient une force de travail en expansion, mais à cause du degré d’imprévisibilité des points de traversée et des contrôles de la frontière, le secteur privé se réduisait peu à peu. C’est pourquoi l’emploi a augmenté de 60 % dans le secteur public. Pendant que le secteur public s’élargissait, la capacité de production de l’économie se vidait et devenait chaque fois plus dépendante des donateurs2.
Derrière le mur
Les zones palestiniennes sont complètement séparées en trois groupes principaux ; l’accès à Jérusalem est refusé aux Palestiniens. Les neuf dernières années, le régime de clôture interne imposé par le pouvoir d’occupation d’Israël en Cisjordanie, ainsi que la construction du mur de séparation, ont provoqué une profonde récession économique et une croissance économique négative. Par ailleurs, Israël retient les revenus des impôts perçus au nom de l’Autorité palestinienne. Ceci affecte le flux et la destination de l’aide des donateurs car ils doivent les rediriger sur le budget pour le soutenir. En empêchant le développement dans la zone C (notamment les régions orientale et sud), Israël a évité que les donateurs dirigent leur aide à près de 60 % des zones censées être sous la juridiction de l’Autorité palestinienne. Les donateurs devraient exiger des explications sur cette limitation puisqu’elle laisse de larges zones dans des situations désespérées.
La pauvreté en croissance
Le nombre de palestiniens pauvres augmente de plus en plus et davantage de palestiniens courent encore le risque de tomber dans la pauvreté. Des enquêtes réalisées en mai 2007 par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) /Programme d’assistance au peuple palestinien montrent que 58% des Palestiniens vivent sous le seuil de pauvreté et près de la moitié d’entre eux, 30 %, vivent dans l’extrême pauvreté3. D’ailleurs, près de 9,4 % des foyers de taille moyenne qui sont techniquement au-dessus du seuil de pauvreté (ayant des revenus mensuels d’environ 500 - 750 USD) courent de grands risques de tomber dans la pauvreté si les conditions socio – économiques actuelles se prolongeaient.
Quant à la tendance négative de la pauvreté des revenus, le pourcentage des foyers étant en-dessous du seuil de pauvreté a augmenté de 50 % en mars 2006 à 60 % en août 2007, et ont des pics si élevés qu’ils arrivent à 68 %, d’après les mesures de novembre 2006. La pauvreté est plus aiguë dans la bande de Gaza ; les foyers pauvres, qui au mois de mars 2006 représentaient 52 %, sont montés à 71 % en août 2007. Elle est plus dominante et plus sévère dans les circonscriptions de Khan Younes et Gaza du nord. En Cisjordanie, le pourcentage des foyers pauvres pendant la même période paraît s’être maintenue stable pour l’essentiel, il n’a varié que de 49 % à 51 %. Mais ces chiffres cachent des pics de pauvreté des revenus de plus de 60 %4 ; quelques circonscriptions dans la zone nord de la Cisjordanie, comme Tubas, Salfit, Tulkarm et Qalquilyah, montrent des taux de pauvreté similaires à ceux de la bande de Gaza.
La persistance de l’extrême pauvreté oblige beaucoup de foyers à dépendre de mécanismes de survivance avec d’autres ressources en plus de leurs revenus principaux. Cependant, presque 40 % de la population ne peut même plus accéder à ces moyens alternatifs pour résister aux difficultés, ce qui souligne la sévérité de la pauvreté dans le territoire palestinien occupé5.
La dernière attaque massive
Un blocus total s’est imposé à Gaza ; tous les points d’entrée et sortie ont été fermés ; on a immobilisé tous les projets financés par les donateurs ; Gaza est devenu une énorme prison ayant 1,5 million de Palestiniens incarcérés où il n’arrivait qu’un peu d’aide humanitaire d’urgence. Fin décembre 2008, Israël a lancé une guerre totale contre Gaza qui a duré 22 jours et a tué plus de 1.400 palestiniens, laissant des milliers de blessés et des foyers détruits, de très nombreuses personnes sans foyer et a pratiquement détruit l’infrastructure civile et de sécurité de Gaza. Au moment de rédiger ce rapport-ci, aucune mesure efficace pour « reconstruire » Gaza n’avait été prises.
Les effets du conflit ne se déterminent pas seulement par le nombre de pertes humaines ou de locaux détruits. Comme les méthodes d’occupation sont violentes dans l’ensemble, leurs impacts ont des retentissements profonds dans la société palestinienne à travers des conséquences sociales, psychologiques, culturelles et économiques.
Aide sous pression
D’après le rapport de la Banque Mondiale6, les flux d’aide qui arrivent en Cisjordanie et à Gaza « continuent d’être fragmentaires et ils se concentrent en des arrangements bilatéraux avec les donateurs sur la base de positions politiques à court terme plutôt qu’en une vision à long terme ayant des fondements plus larges sur l’économie et la gouvernance ». L’aide a été réactive et temporaire. L’agenda de l’aide est déterminé moins par les besoins de développement de la Palestine que par les différents agendas politiques des principaux donateurs qui se font de la concurrence entre eux. D’autre part, l’aide s’est principalement centrée sur ce qui a été décrit comme des politiques de construction de l’État, alors qu’on ignore le besoin de se centrer sur la construction de la société palestinienne.
D’ailleurs, l’aide de quelques donateurs n’a pas été neutre : elle a aggravé le conflit interne en soutenant plus un groupe qu’un autre, en retenant l’aide à différents groupes en raison de leur position politique, ou en s’abstenant de financer des projets de développement en conformité avec les restrictions et les pressions d’Israël. L’aide au développement est tombée de près de 28 % des déboursements totaux en 2005 à un peu moins de 10% en 2007. En attendant, « l’appui budgétaire » a augmenté de près de 30% en 2005, presque 70 % des déboursements de 20077.
1 Banque Mondiale (2007) “Two Years After London: Restarting Palestinian Economic Recovery. Economic Monitoring Report to the Ad Hoc Liaison Committee” Le 24 septembre. Voir : <siteresources.worldbank.org/INTWESTBANKGAZA/Resources/AHLCMainReportfinalSept18&cover.pdf>.
2 Ibid.
3 PNUD (2007). “Poverty in the Occupied Palestinian Territory 2007”. Development Times, N° 1, juillet. Voir : <www.undp.ps/en/newsroom/publications/pdf/other/dtpov.pdf>.
4 Voir “The Palestinian Poverty Monitor” et les enquétes mensuelles de « Pulse » sur <www.neareastconsulting.com>.
5 PNUD (2007), op. cit.
6 Banque Mondiale (2007), op cit.
7 Ibid.
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Développement d’un plan contre la crise
DECIDAMOS (DÉCIDONS), Campagne pour l’Expression des Citoyens
Genoveva Ocampos
En dépit des graves conséquences attendues comme résultat de la crise financière internationale, les perspectives pour le Paraguay pourraient être encore pires. Ce pays possède un niveau réduit d’endettement extérieur – dû aussi aux difficultés des gouvernements précédents pour la mise en place des prêts octroyés –, un niveau respectable de réserves internationales et une économie basée sur l’exportation des biens agricoles. Par conséquent, un petit pays comme le Paraguay, qui produit des aliments et de l'énergie verte, qui dispose d’une énorme quantité d'eau douce et de terres fertiles, a des avantages comparatifs qui doivent être potentialisés.
Au Paraguay, la crise provoquée par l'échec financier dans les pays du Nord a été perçue, au début, comme lointaine ou extérieure à la réalité nationale. D'autre part, suite à la sécheresse qui a affecté la région – une des plus nuisibles des dernières années – les dommages issus de la crise financière et ceux causés par le manque d'eau ont été difficiles à séparer. Les conséquences de la crise internationale sur le pays ainsi que le conditionnement, pour le pire ou pour le meilleur, que cette situation peut exercer sur les projets du nouveau gouvernement de l’Alliance Patriotique pour le Changement (2008-2013) deviennent donc évidents. De même, cette crise peut rendre plus difficiles des négociations importantes telles que, par exemple, celles concernant le prix juste pour l'énergie de l'entreprise binationale Itaipú, cédée au Brésil.
Bien que l’envergure de ses effets et, par conséquent, la détermination des mesures nécessaires à prendre pour y faire face avec des possibilités de succès soit difficile à estimer, la nécessité de laisser de côté les attitudes mesquines et opportunistes, ainsi que les impostures et les improvisations de toute sorte, héritage des mauvais gouvernements précédents, devient évidente.
Tendances, expectatives et réactions
L’effet immédiat a été une demande d’aide au Gouvernement pour financer 50 % de la récolte face à la fuite des entreprises transnationales chargées de l’opération. La demande, estimée à l’origine à 500 millions d’USD, s’est réduite de moitié lorsque les calculs concernant le refinancement et les semailles du cycle à venir ont été faits. Ni le secteur financier privé ni le secteur public ne semblent disposer à présent de ce montant ; en outre, le dilemme se pose concernant ceux que le Gouvernement devrait aider, dans quel but et dans quel ordre de préséance.
Le Gouvernement face à la crise
Le Gouvernement a établi une stratégie prudente et réaliste, conçue en étapes, dans le but de rationaliser et de favoriser les ressources disponibles6 :
1) 1ère étape, à partir d’octobre 2008. Des mesures monétaires pour donner de la liquidité au système bancaire et des mesures fiscales pour rationaliser les dépenses et augmenter les revenus.
a) La réduction conditionnée de l’ajustement légal sur les dépôts, aussi bien en guaranis (monnaie du Paraguay) qu'en dollars, en vue de stimuler les banques pour qu'elles attirent les épargnes à long terme, et de libérer des ressources pour les destiner au financement et au refinancement des crédits productifs.
b) La réduction des taux d’intérêt des instruments de contrôle monétaire, afin que les banques « fassent travailler leur argent », c’est-à-dire augmentent l’offre de crédit.
c) La Banque Centrale est intervenue pour soutenir le guarani face à un dollar très apprécié, ce qui a des effets ambivalents : cela pénalise les importateurs mais à la fois cela peut être un soulagement pour les exportateurs, tandis qu'un guarani dévalué –le revers de la médaille du phénomène– pourrait enchérir les paiements de la dette.
2) 2e étape, à partir de janvier 2009. Politique fiscale expansive.
Une augmentation déficitaire des dépenses publiques est prévue, ou plutôt un budget expansif orienté vers les dépenses dans des travaux publics (asphaltage, ponts), ainsi que des politiques sociales visant à créer de l'emploi (logements) et à protéger les secteurs vulnérables des effets de la crise. Au début, un déficit de financement a été estimé à 300 millions d’USD. Un contrôle journalier des activités visant à soutenir l’exécution des augmentations budgétaires (travaux publics, pour un montant de 100 millions d’USD à 200 millions d’USD environ, et des transferts conditionnés – de 17.000 à 120.000 bénéficiaires) a été promis.
3) 3e étape, à partir de février 2009. Des mesures pour satisfaire les besoins financiers et de crédit dans les secteurs productifs.
En outre, le portefeuille de crédits de l’Agence Financière du Développement –qui permettra de créer plus d’opportunités de refinancement à moyen et à long terme– ainsi que celui de la banque publique par rapport à la demande des petits et moyens producteurs, seront renforcés. Les dépenses du Gouvernement seront orientées notamment vers les produits nationaux.
4) 4e étape, en construction. Des mesures additionnelles pour augmenter l’investissement public et privé.
Outre les crédits réguliers, des crédits de contingence ont été prévus, ceux-ci étant à présent révisés ou bien ont été déjà approuvés et doivent être remis au Parlement, ou bien une demi-sanction leur a été déjà accordée. Ces lignes de crédit, destinés aux routes et chemins, à la production (Banque Interaméricaine de Développement), à la production agricole et à l'eau (Banque Mondiale) obligent à réviser les modalités des concessions et des contrats publics-privés, ainsi que l’amélioration de la capacité d’exécution du budget.
En ce qui concerne le plan contre la crise qui sera analysé par le Parlement, le nouveau Gouvernement a renforcé les mesures pour en discuter dans différents cadres – partis politiques, parlementaires, représentants du secteur privé et des organisations de la société civile – mais ni la pertinence des mesures proposées ni leur capacité à réduire les effets prévus sont véritablement évidentes. Selon certains, ces mesures devraient être mises en place avec ou sans une crise, du fait que les prêts ont été déjà engagés ou bien que l’approbation n’a pas encore été accordée. Selon d’autres, les prêts de contingence de la banque multilatérale doivent toujours être évalués en termes de bénéficiaires, de coûts et de contribution à l'amélioration des dépenses publiques.
En outre, de nouvelles réclamations corporatistes, difficiles à justifier et/ou à satisfaire, sont apparues. A titre d’exemple, durant l’année 2008, les demandes d’autres corporations se sont ajoutées à celles des fonctionnaires publics quant à l’augmentation des salaires, et les entreprises du soja réclament un refinancement et un crédit flexible à court terme. D’autre part, des réclamations réitérées concernant les terres, la souveraineté alimentaire et la relance de l'économie des paysans se poursuit dans les campagnes de façon intermittente.
Des critiques émises par des entrepreneurs et des hommes politiques opportunistes quant aux transferts conditionnés en argent pour les secteurs les plus vulnérables (avec une couverture et un montant plus grands par rapport à l’administration antérieure, pouvant entraîner aussi une concurrence plus grande et des complications d'accès) viennent s'ajouter à cette confusion d’intérêts. En réalité, les transferts en argent ne constituent pas la panacée et ne seront pas faciles à mettre en place, du fait des difficultés pour faire la distinction entre pauvres et indigents lorsque les revenus constituent l'étalon de mesure ou que la faible couverture médicale et/ou la mauvaise qualité des services de santé publique et d'éducation touche tout le monde de la même façon. Les transferts conditionnés sont justifiés pendant des « époques exceptionnelles » et face aux difficultés pour reconstruire des alternatives immédiates. Mais cela ne suffira pas : ils entraînent des risques en termes de gouvernance et de durabilité, par conséquent une mise en place adéquate dépendra de la capacité du Gouvernement pour surmonter les problèmes liés à la méthode et à la mesure, ainsi qu’aux pressions locales.
En dernière instance, une volonté politique est nécessaire ainsi qu’une explication de la stratégie qui n'a pas encore été réglée, pour construire une majorité parlementaire inexistante aujourd’hui, en grande mesure à cause de la crise de leadership, de médiation et de représentation qui affecte les partis politiques. Le défi du Gouvernement sera celui de neutraliser les forces rétrogrades au sein Parti Rouge, et qui ont déjà manifesté leur volonté d'ignorer le plan, signifiant un boycott en perspective.
Réponse de la société civile
Les premiers qui se sont manifestés ont été ceux ayant bénéficié jusqu’à présent des politiques néolibérales et d’intégration des marchés : les agro-exportateurs, les industriels, les importateurs, les publicitaires. Le problème réside dans le fait que le secteur des entreprises – sauf exceptions – se borne à demander des explications sur la portée des mesures et à formuler des réclamations, plutôt qu’à proposer des alternatives. De ce fait, les réclamations des travailleurs du soja – par exemple – sont perçues rapidement comme illégitimes, car elles essaient non seulement de cacher des pertes mais aussi de maintenir le niveau d’activité et de profits par le biais de la subvention publique. Il faut remarquer que les profits extraordinaires ont atteint leur sommet lors du cycle précédent, en partie grâce à la spéculation sur le futur marché des matières premières agricoles, avec la promotion des biocombustibles7. Cela montre que la crise peut mener à des impasses ou renforcer les schémas d'affectation des ressources qui doivent être dépassés.
L’irresponsabilité et l’aveuglement évidents de l’opposition conservatrice ou de droite conduiront au refus du plan contre la crise avec la seule intention de porter préjudice au nouveau Gouvernement de centre gauche. D'autre part, les réclamations des organisations des travailleurs et des paysans risquent d'être appliquées, soit par des partis de gauche au sein du gouvernement et en-dehors de celui-ci, soit par des médias qui cherchent à semer la confusion au sein de l’opinion publique.
Et puis il y a ceux qui discréditent les propositions contre la crise, en les qualifiant de mesures néolibérales et en argumentant qu'elles n'entraînent qu'un endettement externe, nuisible et pas nécessaire, ou qui ne bénéficiera qu’aux riches, aux banques et aux finances internationales. Cependant, la situation actuelle n’admet plus les tournures idéologiques, empêchant les paraguayens d'assumer une conjoncture critique, fortement conditionnée par l’héritage d'une mauvaise gestion publique et par des affaires essentielles restées en suspens et qui pèseront chaque fois plus à l'heure de prendre des décisions.
Des organisations de la société civile – telles que le Comité de Coordination pour les Droits de l’Enfance et de l’Adolescence et l’organisation Decidamos (Décidons) qui ont formé l’Alliance pour l’Investissement à l’Enfance et à l’Adolescence – envisagent une contribution à la connaissance des effets de la crise chez les petits garçons, les petites filles et les adolescents en situation de vulnérabilité, par le biais du débat sur les politiques d'investissement dans l'enfance, afin de fournir des propositions concrètes.
Un plan contre la crise ne sera probablement pas une mesure idéale, mais il s'avère nécessaire et dépendra de ce que le Gouvernement pourra construire avec les efforts de tous. Compte tenu des antécédents dans la planification du pays, la mise en œuvre de ce plan serait un véritable avancement. Le succès dépendra d’une compréhension juste des problèmes hérités et de ceux qui pourraient apparaître dans un contexte chaotique et imprédictible. De toute façon, la crise pourrait être la solution pour orienter encore une fois le cours en matière économique, sociale et environnementale, ainsi que pour améliorer la capacité de gestion et de contrôle de l'État, ce qui facilitera également la participation de la société civile dans le domaine public.
1Programme "Investir dans les Gens". Étude sur l’impact de la crise sur les indices de pauvreté au Paraguay. PNUD/UNICEF/UNFPA.
2 Última Hora (UH), le 17 janvier 2009.
3 Ibid.
4 ABC, le 29 décembre 2008 et le 20 janvier 2009.
5 ABC, le 6 octobre 2008 et Última Hora, le 18 octobre 2008.
6 Última Hora, le 31 janvier 2009.
7 Grassroots Internacional, lettre au Président Barack Obama: Spéculation des marchés financiers dans la production des aliments, www.grassrootsonline.org.
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De mal en pis
Marivic Raquiza
Social Watch Philippines
Au Philippines, la mondialisation économique est à l’origine de l’amplification du travail au noir, de la compression des industries locales et d’une forte dépendance des exportations et des envois de fonds depuis l’étranger alors que la pauvreté continue à augmenter en raison de la répartition injuste des richesses. Aujourd’hui, la crise mondiale provoque la diminution des envois de fonds venus depuis l’étranger et la fermeture des usines. Comme toujours, ce sont les pauvres et les marginaux qui paient le prix fort. Il y a un besoin urgent de motivation durable basée sur les droits et en faveur des pauvres.
Contrairement aux évaluations du Gouvernement et des agences de notation financière assurant que les Philippines pourraient résister à la crise mondiale, son économie tournée vers l’étranger a rendu le pays très vulnérable aux chocs externes. La mondialisation de la production, causant une rapide amplification du travail au noir, la compression des industries locales en raison de la concurrence mondiale avec des importations bon marché largement subventionnées et la forte dépendance vis-à-vis des exportations et des marchés du travail étrangers ont des conséquences extrêmes pour la survie de la majorité des citoyens1.
En effet, même avant le choc provoqué par la crise mondiale, la majorité des philippins connaissaient déjà des difficultés en raison de la détérioration des conditions économiques. D’après l’enquête sur les Dépenses et Revenus Familiaux, les revenus des foyers ont diminué entre 2003 et 2006, de plus, un nombre élevé de Philippins était bloqué sur des emplois à faible productivité avec des salaires en dessous du seuil de pauvreté et des niveaux de famine sans précédent2, d’après le registre des Saisons du Climat Social3. Le Gouvernement a finalement reconnu que la pauvreté avait augmenté en 2006 pendant une période de croissance économique ce qui venait corroborer le caractère inéquitable de la répartition de la richesse. À partir du 10 juin 2009, le Gouvernement a revu à la baisse les objectifs de croissance du PIB pour 2009 avec une fourchette située entre 0,8 et 1,8%, ce qui a contraint le Secrétaire du Directoire de la Coordination des Statistiques Nationales à déclarer que l’économie philippine “est au bord de la récession” 4.
Envois de fonds de l’étranger et exportations
Les retombées de la crise seront très étendues. Les envois de fonds depuis l’étranger par exemple ont participé à hauteur de 13 % à la construction du PIB en 2007. Les Philippins qui travaillent à l’étranger représentent un dixième de la population totale (autour de 8 millions), certainement « la principale source de revenus nets en devises étrangères pour l’économie philippine »5. Maintenant le Ministère du Travail et de l’Emploi informe que près de 575.000 Philippins pourraient perdre leur emploi à l’étranger, en particulier en Corée du Sud, à Taiwan, Macao, Singapour et à Hong Kong, de même que ceux qui travaillent sur les navires de croisière. La Banque Centrale des Philippines prévoit que les envois de fonds diminueront entre 6 et 10 %.
Les revenus des exportations ont chuté brusquement de 40,4 % en 2008 en comparaison avec l’année précédente, entre autres secteurs, l’électronique a accusé une baisse de 47,6 %6. Les fonctionnaires du Ministère du Travail sont nerveux face au nombre croissant d’usines qui ferment, non seulement dans le secteur de l’électronique mais aussi dans l’habillement ainsi que d’autres sociétés de zones industrielles. Ce sont presque 110.000 travailleurs qui ont été concernés par la crise seulement entre octobre 2008 et mars 2009. Ce chiffre comprend 50.380 travailleurs déplacés et 59.149 travailleurs avec des contrats « flexibles » (avec des réductions d’horaires de travail ou un congé forcé)7.
Chômage, sécurité sociale et alimentation
Les Philippins ne peuvent se permettre une augmentation du chômage et du sous-emploi. Alors que le taux de chômage se situe entre 8 et 10 %, le sous-emploi avait déjà atteint 22 % y compris lors de la crise mondiale8. En effet, l’emploi à lui seul ne garantit pas une vie digne de ce nom : une majorité (51 %) de la main d’œuvre philippine, composée de 12,1 millions d’agriculteurs et pêcheurs et d’environ 10 millions d’ouvriers agricoles et ouvriers non-qualifiés, gagne des salaires de misère, équivalents à ceux des travailleurs au noir.
Une grande majorité de travailleurs des zones de traitement des exportations sont des femmes. En raison de la crise, le nombre de licenciements ou d’accords de travail flexible dans ces zones concernera surtout les femmes, principales responsables de la gestion et de l’entretien de la famille. La crise qui s’avère de plus en plus aiguë ne fera qu’accroître la charge pesant sur elles pour faire face à leurs multiples responsabilités. Néanmoins, en général les travailleurs masculins constituent la majeure partie des chômeurs (64,1 %) en comparaison avec les travailleuses (35,9 %), ce sont les secteurs avec prédominance de main d’œuvre masculine comme la construction et le transport qui ont été les plus affectés par la crise.
La sécurité sociale des Philippines couvre environ 84,5 % des travailleurs employés. Les travailleurs pauvres bénéficient cependant peu des services de sécurité sociale et la couverture sociale de ceux qui travaillent au noir est limitée9. Il n’y a pas d’assurance chômage et le Gouvernement a évité d’instaurer des réseaux de protection pour lutter contre le chômage en raison de leur coût trop élevé. De plus, la portée des programmes d’aide sociale destinée à ceux qui vivent en-dessous du seuil de pauvreté est limitée, la prestation des bénéfices l’est tout autant. La sécurité sociale privée n’est pas non plus à l’abri du chaos mondial : l’industrie de pré-nécessité10 philippine a déjà eu recours à l’aide du Gouvernement pour lutter contre la diminution de la valeur de ses fonds fiduciaires. Malheureusement, la mauvaise gestion, la cupidité et la capture de régulation ont également détérioré le fonctionnement de certaines compagnies de pré-nécessité et, selon les informations reçues, certaines sont au bord de l’effondrement ce qui met en danger les revenus de milliers de souscripteurs du plan.
Les indices des prix des produits alimentaires et du carburant s’améliorent peu à peu par rapport à 2008. Néanmoins, comme de nombreux Philippins perçoivent de faibles revenus, l’achat de biens et services pour couvrir les besoins élémentaires sont toujours un défi quotidien. Comme conséquence de la crise mondiale, on a observé une inflation du riz, l’aliment de base des foyers philippins se traduisant par une plus grande insécurité alimentaire. En effet, la Banque Asiatique de Développement a calculé que, pour chaque hausse de 10 % sur les tarifs des aliments, 2,72 millions de Philippins franchiront le seuil de la pauvreté11. Même si les Philippines sont un pays aux revenus moyens, il existe des disparités régionales. Alors que le capital jouit de niveaux de croissance élevés, la dénutrition infantile est égale dans certaines régions et même supérieure à celle de l’Afrique Subsaharienne. Ceci démontre le niveau élevé d’inégalité dans le pays, son coefficient Gini est de 0,45, soit un tiers plus élevé qu’en Asie, après le Népal et la République Populaire de Chine.
Services sociaux de base, l’environnement et AOD.
La prestation de services sociaux de base subira sans aucun doute un impact lié à l’effondrement financier mondial12. L’Objectif de Développement de Millenium (ODM) sur l’éducation primaire universelle est déjà le plus menacé au niveau national13. De nombreux éducateurs s’alarment du fait que les étudiants dépendant des envois de fonds de leurs parents résidant à l’étranger n’assisteront pas aux cours à la prochaine rentrée universitaire en raison de la baisse des revenus à l’étranger14. Déjà bien avant la crise mondiale, les Philippines étaient le pays de la région le moins bien placé au regard des taux de mortalité infantile et maternelle, la raison en est le trop faible investissement public 15. En général, les fonds alloués aux ODM liés à la santé proviennent de l’aide officielle au développement (AOD), bien qu’il faille enquêter pour savoir si l’aide est dirigée vers les plus nécessiteux – les communautés les plus pauvres – selon les activistes de l’Initiative pour un Budget Alternatif (IPA)16.
Le Gouvernement a également fait appel à l’AOD pour mettre en place ces trois dernières années la législation environnementale comme la Loi sur l’Eau Potable et la Loi sur l’Air Pur17. La priorité de ses dépenses porte sur les mines et la production forestière (davantage que sur leur protection), malgré les questions non résolues liées aux grands désastres miniers et à la déforestation généralisée. Ceci signifie que si l’AOD est considérablement affaiblie, suite à la crise mondiale, son impact négatif pèsera surtout sur des secteurs comme la santé et l’environnement.
Réponse du Gouvernement à la crise
Le Gouvernement s’est rallié à l’opinion mondiale visant à « encourager/améliorer l’économie » selon la formule bien connue de la relance économique et il a présenté un Plan d’Adaptation Économique (PAE) de 330 milliards de PHP (6869 milliards d’USD) afin de lutter contre la crise. Une étude préparée par l’IPA a cependant démontré que sur les 1,4 billions de PHP (29,141 milliards d’USD) prévu au budget national approuvé il y a peu par les deux Chambres du Congrès, seuls 10,070 milliards de PHP (210 millions d’USD) de nouveaux fonds seront alloués à un Fonds de Relance Économique (FEE) fixé pour aborder l’impact négatif de la crise mondiale. Sont intégrées au FEE des questions comme, entre autres, le soutien aux prêts souscrits par les étudiants universitaires, la formation technique et professionnelle pour la jeunesse, les prêts et subventions aux petites et moyennes entreprises, la reconversion professionnelle pour les chômeurs et le retour au pays ainsi que la construction de nouveaux établissements scolaires. Même si nombre d’entre eux sont des objectifs tout à fait louables, on ne peut que s’interroger sur la raison qui a poussé à affecter la plus grosse part de ces fonds à l’enseignement supérieur et aucun à la petite enfance, à l’enseignement primaire et secondaire. Deuxièmement, l’accent mis sur la reconversion des travailleurs licenciés est positive mais il convient de se concentrer davantage sur la création de nouveaux emplois bien au-delà des secteurs de la construction d’établissements scolaires. En d’autres termes, il n’y a aucun plan intégral visant à atténuer les effets de la crise. Bien plus alarmant encore, le fait que le Président ait appliqué son véto à la proposition d’utiliser et dégager 208 millions d’USD aujourd’hui soumis à une “mise en oeuvre conditionnelle” sur la base de règles qui seront définies finalement par le Pouvoir Exécutif. De cette façon, l’utilisation du FEE est aujourd’hui directement placée sous le contrôle du président.
Un supplément de 300 milliards de PHP (6.244 milliards d’USD) destiné au FEE, très manipulé par les fonctionnaires du gouvernement, sera dispatché entre les organismes du Gouvernement et le secteur privé. Au moment de la rédaction de ce rapport, la proposition est toujours dans le vague. De nombreux analystes sont sceptiques car la majeure partie des fonds des organismes gouvernementaux provient également de fonds publics. Peu nombreux sont ceux qui placent leurs espoirs dans l’“esprit caritatif” du secteur commercial, surtout dans un contexte de déclin économique. Même en période de prospérité, les recettes du Gouvernement sont très nettement en dessous des objectifs et ce, en raison de l’évasion fiscale massive des grandes sociétés et des plus riches.
Les activistes de l’IPA se disent consternés du fait qu’en cette période où l’insécurité professionnelle et la faim sont croissantes, les fonctionnaires publics ont fait du prosélytisme politique avec le budget national 2009 avec des milliards de pesos18. Le règlement des intérêts de la dette se situe à hauteur de19 6.300 milliards d’USD, ce qui constitue 21 % du budget national 2009. Néanmoins, le Gouvernement devra obtenir des recettes bien supérieures à 7.886 milliards d’USD pour régler le corps principal de la dette qui, de manière trompeuse, n’apparaît pas dans la section des dépenses du budget national20.
En fin de compte, la préoccupation est forte du fait que la majeure partie des fonds publics, y compris ceux des mesures de relance économique, finira par être une “relance politique”, allant directement dans les coffres électoraux des candidats de l’administration qui se préparent aux élections nationales de 2010. Il existe une croyance très profonde selon laquelle l’administration Arroyo utilise régulièrement des fonds publics pour rester au pouvoir et que son objectif principal au cours de son mandat a été d’assurer sa propre survie politique face au malaise social et politique montant.
Regarder vers l’avant
Il devient primordial de créer un ensemble de mesures de relance mais, à la différence de ce qui a été proposé par le Gouvernement, il devrait être basé sur une stratégie nationale claire, soumise au droit, en faveur des pauvres et durable, et destinée à renforcer la demande nationale surtout dans le climat économique actuel, hostile aux exportations. Il faudrait donner la priorité à la sécurité alimentaire, à la création d’emplois tout en renforçant les entreprises locales afin que les travailleurs et travailleuses puissent en bénéficier, ainsi qu’à l’investissement dans des projets d’infrastructures écologiques et en faveur des pauvres (par exemple, la construction d’un réseau de système d’irrigation, l’électrification de villages isolés et le développement d’une énergie propre), ainsi que le développement de la sécurité sociale et économique des pauvres et des chômeurs.
À court-terme, il est nécessaire de trouver un remède immédiat pour amortir les pires effets de la crise mondiale sur la population philippine. Ceci signifie qu’il faut garantir que le FEE soit affecté au bon endroit : à l’alimentation, aux revenus et solutions d’urgence ainsi qu’aux services sociaux de base. De plus, l’élimination de la Taxe sur la Valeur Ajoutée, la Réforme régressive sur le pétrole, la mise en place d’une hausse des salaires généralisée de 2,6 USD et une augmentation de 62,44 USD par mois sur les salaires du Gouvernement sont autant de mesures qui devraient apporter une certaine souplesse économique. Il faut finalement penser sérieusement à la renégociation de la dette publique de sorte qu’une grande partie des revenus du pays soit destinée à couvrir les besoins élémentaires et de première nécessité des personnes au lieu d’être affectée à la dette.
1 Gonzales, E. “Social Protection in the Philippines”. Dans Social Watch Philippines 2007. Missing Targets, An Alternative MDG Midterm Report. Quezon City : Social Watch Philippines.
2 Malaluan, N. “Dire State of the Nation: The Crisis of Income and Employment in the Philippines”. Opinion Section, BusinessWorld, 21 août 2006. Disponible sur : <www.aer.ph/index.php?option=com_content&task=view&id=437&Itemid=63>.
3 Voir : <www.sws.org.ph/>.
4 Voir : <archive.inquirer.net/view.php?db=1&story_id=207724>.
5 Pascual, C. “Remittances for Development Financing”. Dans Finance or Penance for the Poor. Quezon City : Social Watch Philippines (dans la presse).
6 Office National des Statistiques. “Merchandise Export Performance”. Décembre 2008 (préliminaire).
7 Fabros, M. L. “Health Insecurity : A GMA Legacy”. Dans Social Watch Philippines, 2007, op. cit.
8 Dans Social Watch Philippines 2007, op. cit.
9 Social Watch Philippines 2007, op. cit.
10 Les entreprises de pré-nécessité proposent des plans pour couvrir les futurs coûts de l’éducation, des retraites, etc. Tant que les cotisations des assurés sont placées sur des fonds fiduciaires investis sur des instruments financiers sous forme d’actions et bons, celles-ci sont soumises aux caprices du marché.
11 Angara, E. J. “A Gathering Storm”. Opinion, Business Mirror. 24 novembre 2008.
12 Ce rapport ne comprend pas une remise en question des effets et impacts du programme de transfert de budget sur la prestation des services sociaux, en particulier l’éducation et la santé, la raison est qu’il s’agissait d’une expérience pilote développée sur quelques communes en 2008. Cela peut être intéressant de l’observer sur 2009.
13 Raya, R. R. “The Missed Education of the Filipino People ”. Dans Social Watch Philippines 2007, op. cit.
14 GMA TV News. “Educators Brace for Impact of Global Financial Crisis ”. 4 décembre 2008. Disponible sur : <www.gmanews.tv/story/137541/Educators-brace-for-impact-of-global-financial-crisis>.
15 Social Watch Philippines 2007, op. cit.
16 L’IPA est un vaste réseau d’organisations issues de la société civile qui s’oriente et plaide pour une augmentation de la part des dépenses sociales et environnementales dans le budget national. Ce mouvement est conduit par Social Watch Philippines.
17 Ronquillo, J. D. y Morala, R. O. “Environmental Insecurity: The Cost of Misgovernance”. Dans Social Watch Philippines 2007, op. cit.
18 Loi Générale sur les Appropriations 2009.
19 Ceci reflète ce qui apparaît dans la Loi de Budget 2009 et dans le Message du véto présidentiel, rétablissant une coupe budgétaire de 50 milliards de PHP (1,06 milliards d’USD).
20 Tanchuling, M. Entretien avec le Secrétaire Général, Coalition Freedom from Debt, Philippines, 3 mars 2009.
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Un scénario de développement encore plus sombre
Ewa Charkiewicz
Coalition Karat/Feminist Think Tank
Katarzyna Szymielewicz
Coalition Polonaise de Social Watch/Commission Internationale des Juristes
Dr Mariusz Czepczyński
NEWW Polska / Université de Gdansk
Même avant que la crise ne commence à faire sentir ses effets, entraînant une dévaluation, un taux de chômage plus élevé et une baisse des revenus, des investissements et des exportations, la Pologne avait déjà connu l’ inégalité croissante des salaires et des revenus au cours de sa transition vers l’économie de marché. En l’absence de transparence du Gouvernement dans ses opérations , il est difficile que le débat public s’engage autour des mesures à adopter pour lutter contre la crise comme par exemple avoir recours aux prêts des institutions financières internationales. En même temps, la mentalité patriarcale de la société et le manque de politiques de protection sociale font des femmes les premières victimes de la crise.
Avant la crise financière mondiale, la Pologne représentait un cas exemplaire de transition néolibérale vers l’économie de marché. Un rapport récent de l’Organisation pour la Coopération et le Développement Économique (OCDE) indique que sur 30 pays, la Pologne occupait l’avant dernière position en termes de pauvreté chez les enfants et la quatrième place en termes d’inégalités de revenus ; 10 % des plus riches ont reçu une part plus importante des revenus du marché et ont versé en proportion moins d’impôts que dans n’importe quel autre état de l’OCDE, à l’exception de la Turquie1. Les privatisations ont affecté plus gravement les secteurs sociaux (les retraites, la santé et l’éducation) alors que l’État a augmenté son soutien aux entreprises (par exemple le Vice-Premier ministre a annoncé un plan de soutien aux entreprises ayant pris part à des contrats sur l’avenir avec un risque élevé) mais pas aux citoyens.
Ce sombre panorama s’obscurcit encore davantage à mesure que la crise s’étend. La première conséquence a été la dévaluation radicale du zloty (la monnaie nationale) par rapport à l’euro et au franc suisse – entre 25 % et 30 % environ sur six mois – et l’effondrement de la bourse de Varsovie. Le premier impact a affecté les marchés financiers et les entreprises polonaises qui spéculaient sur la monnaie, mais maintenant la crise a commencé à affecter le débat politique national avec en particulier la baisse récente des revenus nationaux et la chute des investissements et exportations. De même, contrairement aux projections de départ (plutôt optimistes), la crise financière a un impact significatif sur l’accès au crédit que ce soit pour les entreprises ou pour les consommateurs polonais.
Chômage
De récentes enquêtes sur le marché du travail signalent que le chômage est passé de 9 % à 12 % depuis la crise, cette hausse concerne également l’administration. Néanmoins, le nombre réel de personnes se retrouvant dépourvu d’un moyen de subsistance est plus important, et seulement 15,5 % de ces employés ont accès aux soins de santé publique2. Les autres dépendent d’eux-mêmes.
De plus, la moyenne statistique ne reflète pas les difficultés auxquelles doivent faire face les populations dans les villages où une source de travail importante, dont la plupart des foyers tirent leurs revenus, est sur le point de fermer soit en raison d’une baisse des commandes ou à la suite de manœuvres opportunistes – par exemple certaines entreprises prétexteraient la crise financière pour renvoyer des travailleurs et diminuer les coûts.
La crise touche encore plus sévèrement les personnes n’ayant pas épargné, n’ayant pas les moyens de produire leurs aliments, n’ayant pas de liens familiaux dans le monde rural (bien qu’elles soient sur le point de disparaître sous la pression de l’agriculture intensive, les fermes des petits producteurs survivent encore en Pologne). Les nouvelles familles de classe moyenne connaissent aussi des difficultés, en particulier les jeunes couples avec enfants qui ont souscrit des hypothèques énormes à taux variables ou dans une devise étrangère, pour acheter leur logement.
Accès au financement et perspectives de croissance à long terme
En conséquence de la fameuse « crise du crédit » (caractérisée par la soudaine réduction de l’accès au crédit et par la hausse des coûts), les perspectives de croissance économique du pays se sont sensiblement réduites : on est passé de 6,5 % en 2007 et 5,5 % en 2008 à une prévision pour 2009 variant entre 2,5 % et 3,7 %3.
De même, la Pologne a commencé à être touchée par la soudaine rupture d’entrée de capitaux, suivie d’une aversion croissante des investisseurs pour le risque et l’effet d’exclusion à mesure que se développe, parmi les économies les plus fortes d’Europe, la concurrence pour le financement de la dette publique4. La situation s’est vue exacerbée par la crise du change à l’étranger : l’affaiblissement du zloty a été préjudiciable pour les entreprises ayant signé des contrats avec stocks options et pour les personnes ayant des hypothèques en devise étrangère.
L’offre de crédit est fortement limitée sur tous les segments du marché du crédit et plus de 80 % des banques ont adopté des critères bien plus stricts pour délivrer des crédits de toutes sortes. Elles ont en particulier renforcé les conditions par rapport au niveau de sécurité et, dans le cas des prêts hypothécaires, le montant des cotisations des prestataires. Dans la pratique, toutes les banques ont revu à la hausse leur marge de crédit – de 1 % à 2 % en milieu d’année 2008 pour passer à 7 %-8 % au premier trimestre 20095. Le coût de l’argent sur le marché interbancaire a sensiblement augmenté en raison de la rupture sans précédent de la confiance mutuelle entre les institutions financières. La Commission de Supervision Financière de Pologne (CSF) a renforcé les coefficients de liquidité et les obligations de déclarations6. L’évaluation avancée par la banque sur les possibilités de redressement de l’économie est très négative et davantage de restrictions sur les prêts accordés aux entreprises sont prévues7.
Stabilité du marché hypothécaire
La politique bancaire en vigueur qui fixe à 30 % le montant exigé de contribution propre, écarte toute possibilité d’achat de logement individuel pour la majorité de la population, dans le même temps il manque environ deux millions d’appartements sur le marché8. La conséquence la plus probable sera une hausse radicale des loyers, mais les prix des appartements à la vente ne devront pas nécessairement baisser rapidement. De même, les frais d’amortissement des prêts hypothécaires en devise étrangère (79 % à 81 % du total du portefeuille de crédit en 20089) ont énormément augmenté en raison de la subite chute de la valeur du zloty et du changement très peu favorable en politique bancaire du calcul des marges de flottaison.
La population pense que les banques manipulent le taux de change au détriment des clients. A l’heure actuelle, la différence entre les valeurs d’achat et de vente peut atteindre 12 %10 ; et pas même l’Agence de la Concurrence et de la Protection des Consommateurs ne peut imposer de restrictions sur le taux de change. Des groupes de consommateurs se réunissent via Internet afin de se procurer des devises étrangères en grosses quantités dans l’espoir de négocier le montant du spread et même parfois de renégocier les conditions de leurs contrats de crédit11 .
La crise du crédit et la menace de banqueroute généralisée
15 % des entreprises ont déjà des problèmes pour obtenir des crédits de fonctionnement12. Les banques ont durci les conditions de délivrance des prêts pour 50 % des entreprises, situation qui s’aggravera certainement en 2009. D’après les pronostics préliminaires, la banque disposera de deux fois moins de fonds à prêter en 2009 que l’année précédente. Il est tout à fait probable qu’elles aient commencé à démarcher les entreprises pour qu’elles soldent ou renégocient leurs prêts en réclamant des indemnités de retard selon les conditions du contrat de crédit13. En 2008, par pression de la concurrence, les banques ont délivré de nombreux prêts avec des marges d’intérêt réduites au minimum, ces prêts sont aujourd’hui devenus une charge pour les banques. Les petites et moyennes entreprises qui manquent de garanties significatives dans leur capital privé sont particulièrement menacées.
En plus de la crise du crédit, des milliers de sociétés sont tombées dans le piège des stock options et elles frôlent aujourd’hui la banqueroute. Encouragées par les banques, les entreprises ont acquis des stock options en grandes quantités pour protéger les bénéfices de leurs exportations. A la suite de la rapide dévaluation du zloty, non seulement ces entreprises ont perdu la totalité de leur capital de départ mais elles ont aussi cumulé des dettes colossales en raison de contrats mal protégés.
Le déficit démocratique
D’autres gros problèmes sont la baisse des revenus de l’état et l’augmentation des dépenses du paiement de la dette publique. Ces deux points sont étroitement liés à la déficience démocratique régnante : aucun débat public n’est venu encadrer le nouveau prêt d’urgence de la Banque Mondiale pour un montant de 3.750 millions d’euros et les activités de l’État sont, dans une grande mesure, peu claires pour les médias, les élus et le public. Lorsque la Depository Trust & Clearing Corp. (qui intervient comme registre central du commerce d’échange de crédits) a publié ses rapports, avec les mille contrats les plus importants, il s’est avéré que la République de Pologne ainsi que d’autres états souverains, avaient participé au commerce de produits dérivés comme le secteur privé. Depuis le début du XXIème siècle, l’OCDE, la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI) ont organisé des formations et séminaires pour les fonctionnaires du Ministère de l’Économie afin de participer à la création et à la négociation des marchés de dette publique. Lorsque l’État intervient en tant que société commerciale, il abandonne ses citoyens, en particulier ceux qui ne génèrent pas de revenus pour l’État ou le marché.
Conséquences – disparités hommes-femmes
En 1989 et 1990, lorsque la Pologne a emprunté la voie du libre marché, les premières victimes ont été les ouvrières du secteur textile, les usines non-compétitives fermaient et rien ne venait les remplacer. A l’heure actuelle, le secteur textile rajeuni, où prédominent les femmes, fait une nouvelle fois l’objet de réduction : à mesure que les commandes d’importations (principalement depuis l’Allemagne) diminuent, les sous-traitants locaux réduisent leurs activités ou ferment, ce qui mène à une perte sèche évaluée à 40.000 emplois14.
Prisonniers de l’économie souterraine
La baisse des revenus familiaux attribuée à la crise économique pourrait générer l’appauvrissement de groupes sociaux entiers, en particuliers les classes populaires et moyennes. Il est tout à fait probable que l’impact soit plus significatif chez les femmes, ce sont elles qui, par tradition, prennent la plus grosse responsabilité quant au bien-être familial (ceci est vrai en particulier dans les groupes aux revenus les plus faibles). Certains analystes signalent que la crise amplifie le secteur « au noir » (informel) de l’économie polonaise à mesure que de nombreux chefs d’entreprise, en particulier les petits, tentent de minimiser les coûts salariaux et évitent la fiscalité et autres coûts liés au travail légal. Il semble très probable que le développement de l’économie au noir affecte davantage les femmes que les hommes, ce sont elles qui sont embauchées sur les emplois faiblement rémunérateurs, en particulier dans le secteur des services privés (par exemple la vente au détail).
Limites à la génération de revenus
La diminution des moyens financiers transfère les coûts sociaux de la crise financière sur les foyers et les femmes en particulier. Environ 60 à 70 % du travail non-rémunéré d’aide à la famille est effectué par les femmes15. La classe sociale, l’origine ethnique, l’âge et la situation géographique sont les éléments déterminants pour distinguer l’impact qu’a cette crise économique sur les hommes et les femmes. Par exemple, en raison des frais élevés de location d’un logement, la mobilité sur le marché du travail devient limitée pour les habitants de petits villages situés dans des zones où la récession économique est importante. L’obligation, enracinée au niveau institutionnel, de fournir le travail domestique au sein du foyer, limitent encore davantage la capacité des femmes en âge de se reproduire à chercher des moyens alternatifs de création de ressources.
Organisations de femmes
De nombreuses organisations de défense des droits de la femme, y compris des ONG, savent déjà ce que signifie perdre des fonds à mesure que les dons des entreprises privées et des particuliers diminuent fortement. Les fonds publics ont également diminué en raison de la baisse estimée du PIB pour 2009, obligeant à faire des coupes dans de nombreux programmes budgétaires. Le budget du Fond d’Initiatives Civiques, un programme gouvernemental qui soutient les organisations à but non lucratif, sera diminué de moitié. Tant que les objectifs néolibéraux sont la priorité (gestion de la diversité, discrimination, esprit d’entreprise) et que les ONG endossent le rôle de prestataires de services à mesure que l’État se retire du secteur social, le fond a apporté des ressources importantes pour soutenir les activités des ONG. Il est tout à fait probable que le financement que les ONG reçoivent des autorités locales chute également.
Par ailleurs, la crise économique a déjà eu une conséquence négative sur la capacité des ONG de femmes à recevoir des fonds aussi bien de la part des donateurs privés que publics pour leur participation à un projet financé conjointement avec la Commission Européenne. Ceci est spécialement alarmant car, alors que les fonds de l’Union Européenne ont généré de nouvelles opportunités pour les ONG en Pologne, ni l’État, ni les autorités locales n’ont développé les mécanismes nécessaires pour apporter un soutien financier aux ONG qui obtiennent des fonds de l’Union Européenne.
Un scénario lugubre
Il est possible qu’une situation d’aggravation économique s’installant dans le temps cause des conflits sociaux et politiques au cours des prochaines années. L’éventuelle polarisation économique, le chômage montant et le cuisant échec des marchés financiers ainsi que le budget public pourraient être l’antichambre du développement de comportements et partis radicaux, conservateurs et de droite. La montée du néo-conservatisme pourrait encourager des valeurs traditionnelles, patriarcales et cantonner les femmes à leur rôle traditionnel. « cuisine, enfants et peut-être l’église ». De plus, parce qu’on les considère comme bien plus importantes, les questions économiques peuvent dominer le discours public et causer une marginalisation des problèmes sociaux et des problèmes liés aux rapports hommes-femmes.
1 OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économique) (2006). Growing Unequal.Income Distribution and Poverty in OED Countries. Paris : OCDE.
2 Office National des Statistiques. “Registered Unemployment, first quarter 2008.”
3 Estimations rapportées par le site Internet Bankier.pl disponibles sur : <euro.bankier.pl/news/article.html?article_id=1886336>.
4 Rybiński, K. Finansowanie rozwoju Polski w kryzysie. Ernest & Young, février 2009.
5 Toutes les données sont basées sur le rapport dela Banque Nationale de Pologne (2009). Situation of the credit market in the first quarter of 2009, Varsovia, enero.
6 En juillet 2008, la Commission de Supervision Financière Polonaise a imposé aux banques l’obligation de maintenir et de déclarer ses standards de liquitidé, entraînant de fait une amélioration de la liquidité bancaire permettant ainsi de juguler la “crise de confiance”.
7 FSC (Commission de Supervision Financière
) (2008). Informacja o sytuacji banków po trzech kwartałach 2008 r. Disponible en: <www.knf.gov.pl/sektor_bankowy/Publikacje_nadzoru_bankowego/publikacje_sektora_bankowego/index.html>.
8 Enquête sur Internet menée par Money.pl disponible sur : <www.money.pl/banki/raporty/artykul/kredyty;hipoteczne;tylko;dla;bogatych,142,0,376462.html>.
9 Données fournies par l’Association des Banques Polonaises et rendues public lors d’une conférence en décembre 2008. Disponible sur :
<www.zbp.pl/site.php?s=MTIyNTk0MTI=>.
10 Enquête sur Internet menée par Money.pl disponible sur : <www.money.pl/banki/wiadomosci/artykul/ciezki;los;posiadaczy;kredytow;banki;uderzaja;spreadem,207,0,383183.html>.
11 Dominiak, T. “Polacy buntuj¹ siê przeciwko bankom.” POLSKA The Times, 25 février 2009.
12 Enquête réalisée par la Confédération polonaise des Chefs d’Entreprises du Privé Lewiatan. Voir : <www.pkpplewiatan.pl>.
13 Niklewicz, K, Samcik, M et Hałabuz, N. “Znikające tanie kredyty.” Gazeta Wyborcza, 24 février 2009.
14 Brzoska, P. “Lodz cienko przedzie, szwaczki znow traca prace.” Polska – Dziennik Łódzki, 29 décembre 2008. Voir : <www.polskatimes.pl/dzienniklodzki/pieniadze/74052,lodz-cienko-przedzie-szwaczki-znow-traca-prace,id,t.html>.
15 Budlender, D. “The statistical evidence of care and non-care work in six countries.” Genève : Institut de Recherche des Nations Unies pour le Développement Social (UNRISD). 2008.
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Une crise ancienne et de nouveaux défis
Social Watch Portugal; Oikos
Catarina Cordas
João José Fernandes
La crise économique que le Portugal doit affronter depuis au moins 2001, aggravée par la crise financière et économique internationale actuelle, a eu comme conséquence une hausse du chômage et de la pauvreté. Cependant la pauvreté n’est pas seulement un effet de la situation actuelle, elle répond plutôt à une condition structurelle qui se maintient. Presque la moitié de la population, y compris les personnes de classe moyenne qui ont perdu leur emploi et/ou leur logement, a souffert de la pauvreté entre 1995 et 2000. Le changement climatique a aussi un effet sur l’économie et le bien-être de la population. De nouvelles optiques et de nouvelles mesures sont nécessaires pour combattre la pauvreté et pour faire face aux défis environnementaux.
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D’après le Bulletin Financier du Printemps 2009 de la Banque du Portugal1, l’économie a commencé à décélérer sensiblement au début 2008 et puis, à partir du deuxième trimestre, elle est entrée dans la période de récession la plus profonde des dernières décennies. Le Bulletin établit que l’économie subira une baisse de 3,5 % en 2009, sa pire performance depuis 1975. Cette réduction montre que la faible productivité a eu un effet sur le taux de chômage qui s’est approché de 8 % en janvier 2009, par rapport au 7,7 % de janvier 2008. Fin février 2009 presque 500.000 chômeurs (5 % de la population) s’étaient enregistrés dans les bureaux d’emploi.
Le crédit, le logement et le risque de pauvreté
Le manque d’accès au crédit est une autre conséquence assez négative de la crise économique internationale. Bien qu’il n’y ait pas de données officielles à ce sujet, en 2008 beaucoup de familles ont perdu leurs logements à cause de l’impossibilité de payer les remboursements des prêts. D’après l’Enquête sur les Revenus et les Conditions de Vie 2007 de l’Union Européenne (UE-SILC en anglais), les composantes non monétaires du revenu, telles que la propriété du logement, atténuent l’incidence et l’intensité de la pauvreté2. La perte du logement – ou les difficultés croissantes pour son acquisition que rencontrent les classes moyenne et basse – et la perte de l’emploi ont augmenté le risque de pauvreté, définie par l’UE-SILC comme la proportion d’habitants adultes touchant des revenus annuels inférieurs à 4.544 euros (environ 379 euros par mois) en 2006.
D’après l’UE-SILC, le risque de pauvreté pour le chômeur portugais était de 32 % en 2006, légèrement plus élevé qu’en 2005 (31 %). Cette augmentation était prévisible à cause de la hausse du chômage. Cependant, en général, le risque de pauvreté a diminué jusqu’à atteindre 18 %, une diminution de 5 % approximativement à partir de 1994, alors qu’il était de 23 %. L’amélioration est la conséquence positive des programmes européens de lutte contre la pauvreté mis en œuvre à partir de 1989 et du Plan d’Action National pour l’Inclusion 2003-20053, qui contenait certains principes directeurs très positifs:
L’UE-SILC a montré que 47 % des familles avait souffert de la pauvreté entre 1995 et 2000, dont 72 % étaient restées deux ans ou plus dans la pauvreté4. Beaucoup de ces familles sont les nouveaux pauvres, hommes et femmes qui appartenaient à la classe moyenne mais qui se sont appauvris à cause d’une crise familiale, comme le chômage ou l’augmentation du taux d’intérêt des prêts pour le logement ou des hypothèques. Au début 2009, les ONG ont mis en relief certaines histoires dramatiques de personnes qui avaient souffert un changement radical dans leur vie et qui sont devenues dépendantes de l’aide de tierces personnes. Le président du Réseau Européen contre la Pauvreté a affirmé que, sur les deux millions de pauvres du Portugal, 17 % a actuellement du travail mais celui-ci ne permet pas de couvrir les besoins quotidiens5. La pauvreté augmente dans les grandes villes et récemment les tentatives de suicide ont aussi augmenté.
Traitement de la pauvreté
Ces conclusions suggèrent que le problème est pas ce que nous faisons mais ce qu’il reste à faire »6. Un transfert d’environ 3,5 % du revenu de ceux qui ne sont pas pauvres serait suffisant pour couvrir les besoins de ceux qui le sont7.
La pauvreté au Portugal – comme ailleurs – ne se résoudra pas seulement avec des politiques sociales, bien que celles-ci soient importantes. Il est nécessaire que les politiques économiques s’occupent de la distribution inégale du revenu, des biens et du pouvoir. De plus en plus, les économistes et les organisations de la société civile signalent que l’inégalité sur le plan des actifs conduit à l’inefficacité économique et qu’il devrait y avoir plus d’investissement dans le capital humain (capacités, éducation, santé, instruction), ce qui favoriserait la promotion des droits de l’homme. Seulement de cette manière le Portugal sera capable de surmonter les faiblesses qui pendant longtemps ont entravé sa productivité et l’ont condamné à avoir l’un des taux de croissance économique les plus faibles d’Europe.
Les trois recommandations clés pour lutter contre la pauvreté sont:
Les effets du changement climatique
Une étude complète sur les effets du changement climatique au Portugal, le SIAM II8, suggère que les effets plus importants du réchauffement mondial sont l’érosion significative du littoral, avec une hausse de la fréquence des événements météorologiques extrêmes (comme la sécheresse prolongée et les inondations soudaines), la réduction des précipitations (entre 30 % et 40 %) et l’augmentation des températures moyennes annuelles. Sans être catastrophiques, les conséquences du changement climatique dans le pays produiront des pertes de l’ordre de 5 % à 10 % du PIB. Il existe des effets potentiels sur les ressources aquifères, le littoral, l’industrie de la pêche, l’agriculture, les forêts, la biodiversité l’énergie, la santé humaine et sur d’importants secteurs de l’économie nationale comme le tourisme.
Il est de plus en plus évident, puisque le changement climatique mondial est inévitable, que les politiques d'atténuation et d’adaptation doivent se renforcer. En ce qui concerne l’atténuation, il est nécessaire de réduire les émissions de dioxyde de carbone, d’améliorer l’efficacité énergétique, d’insister sur la réutilisation et le recyclage des produits, d’examiner toute la politique de transport et de mobilité, et également de se concentrer sur la production d’énergie propre et renouvelable. Le pays devrait aussi développer des mécanismes pour utiliser une bonne partie des moyens fournis par les projets du Fonds du Charbon portugais afin d’obtenir un double avantage: la compensation des émission de charbon/efficacité énergétique et la lutte contre la pauvreté, particulièrement dans les pays en développement.
En ce qui concerne l’adaptation, il est important, entre autres, de faire des investissements dans la protection du littoral et les ressources aquifères, dans des cultures plus résistantes au changement climatique et pour une meilleure efficacité énergétique dans les bâtiments publics et résidentiels.
1 Voir : <www.bportugal.pt/publish/bolecon/primavera_09/econ_port_primavera09_p.pdf>.
2 Institut National de Statistique (INS). “Dia Internacional de Erradicacao da Pobreza.” Destaque, 15 octobre 2007. Disponible sur : <www.ine.pt/ngt_server/attachfileu.jsp?look_parentBoui=8046108&att_display=n&att_download=y>.
3 Voir : <www.pnai.pt/>.
4 Costa, A., Baptista, I., Perista P. et Carrilho, P. (2008). Um olhar sobre a pobreza – vulnerabilidades e exclusão social no Portugal contemporâneo. Lisboa: Gradiva.
5 Voir Rede Europeia Anti Pobreza sur : <www.reapn.org/>.
6 Costa, A., Baptista, I., Perista P. et Carrilho, P., op. cit.
7 Ibid.
8 Santos, F. D. et Miranda, P. Alterações Climáticas em Portugal. Lisboa: Gradiva, 2006.
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Proposition des travailleurs
Confederación General de Trabajadores del Perú (CGTP)
Soutien du CEDEP
Mario Huamán Rivera1
Le plan de relance économique du Gouvernement, lancé pour faire face à la crise, ajoute 3 milliards d’USD au budget annuel. Le Gouvernement, en partenariat avec des entreprises privées, s’en servira pour construire des logements, pour financer le secteur exportateur et pour développer des programmes d’aide sociale. Pour leur part, les travailleurs ont présenté un plan dont les objectifs sont les suivants : le maintien des niveaux de croissance économique adéquats et la génération d'emploi, la préservation des postes de travail, l’assistance aux secteurs moins favorisés et la relance de la croissance et de la consommation de la production nationale.
Le Pérou n’est pas une exception dans le contexte de la crise mondiale. En 2008, la croissance économique représentait près de 10 % du PIB, alors qu’en 2009 elle a chuté en-dessous de 4 %, selon l'Institut National de Statistique et d’Informatique. On estime que les exportations qui tournaient autour de 32 milliards d’USD l’année dernière sont estimées à 22 milliards d’USD pour cette année. D’après le Président de la République, ceci représente jusqu’à présent la perte de 200.000 postes de travail et un effondrement du pouvoir d’achat du salaire et de l’épargne des péruviens. L’industrie minière métallique et non métallique, la fabrication de ressources non primaires, l’agro-industrie, le commerce et les services sont les secteurs les plus affectés. Si l’on n’applique pas les mesures correctives nécessaires, la situation deviendra de plus en plus grave pendant le deuxième semestre.
Le plan de relance de l'économie proposé par le gouvernement ajoutera 10 milliards de PEN (sols péruviens-environ 3,4 milliards d’USD) au budget 2009. Cette somme sera obtenue via l’émission d'obligations de dette publique. Le Gouvernement, en partenariat avec des entreprises privées, dépensera cet argent pour la construction de logements, le financement du secteur exportateur et le développement de programmes d'aide sociale. Le tout coûtera 500 millions de PEN (169 millions d’USD).
Normalement, en temps de prospérité, on demande aux travailleurs d’attendre patiemment les bénéfices de la croissance, alors que, pendant la crise ils n’ont qu’à se serrer la ceinture. Pour affronter les conséquences nocives de la crise, il est donc indispensable de renforcer la demande interne, c'est-à-dire augmenter la consommation des travailleurs et protéger la production nationale, ainsi que d’annuler les Traités de Libre Commerce (TLC) qui se soldent par une ouverture inutile du marché péruvien alors que les marchés internationaux sont en pleine contraction.
Le graphique montre la forte chute des rémunérations réelles de la population économiquement active du Pérou pendant la période 1970-2006 calculée en sols péruviens par an (1 USD = 2,95 sols en juillet 2009). Si en moyenne, un travailleur gagnait 6.000 sols annuels en 1974, en 2006 son salaire réel était de 1.700, soit trois fois moins environ. La petite reprise de la période suivante à l’application du modèle néolibéral des années 1990 est bien plus faible que celle obtenue par les travailleurs lors des années 1970. Pendant cette période, l’État a appliqué le modèle keynésien et s’est activement impliqué dans l’économie, l’organisation des syndicats, la négociation collective et la stabilité de l’emploi.
Proposition de la CGTP
Face à cette réalité, la Confédération Générale des Travailleurs du Pérou (CGTP) a présenté au gouvernement et à l’opinion publique, en collaboration avec un groupe d’économistes, une proposition alternative2 résumée ci-après.
1) Objectifs. Au lieu de permettre l’approfondissement de la récession, le pays devrait répondre à la crise en encourageant un nouveau type de croissance économique. Il faudrait encourager la création de nouveaux postes de travail et leur préservation au lieu de licencier les travailleurs. Nous croyons qu’il est possible d’encourager la croissance basée sur l’équilibre entre la consommation de la production nationale et des exportations. L’investissement de l’État doit être focalisé sur les secteurs productifs et sur les régions où l’emploi chute massivement, et de préférence, il faut prendre en charge les plus pauvres, les filles et les garçons, et les personnes âgées.
2) Des mesures concrètes. Pour que ce qui précède devienne une réalité, il faut penser à appliquer des mesures concrètes dans les domaines suivants : mesures fiscales ; mesures visant la dynamisation du marché interne ; protection de l’emploi digne et décent ; augmentation de la productivité agraire et souveraineté alimentaire ; encouragement à la petite entreprise et protection des secteurs pauvres de la population.
a) Politiques fiscales. Du point de vue fiscal, nous proposons une augmentation des dépenses publiques en infrastructure pour la création rapide d’emplois à niveau massif, en tant que mesure contre cyclique en vue d’obtenir des revenus pour des familles pauvres qui consomment des produits nationaux.Ce plan de relance doit être accompagné de la mise en place d’une politique fiscale de redistribution basée aussi bien sur des impôts directs pour le financement des mesures proposées, sur un impôt extraordinaire sur le patrimoine à appliquer aux entreprises minières que sur un impôt sur les plus-values destiné à compenser la réduction des revenus fiscaux issus d’autres sources.Les impôts sur les carburants qui, au Pérou, atteignent 40 % du prix de l'essence et du pétrole, doivent être diminués. Ceci permettra de baisser les prix des aliments et du transport, et d’améliorer la demande et la compétitivité des petites entreprises.
b) Défendre la production nationale pour dynamiser le marché interne.Un plan spécial d’investissement de fonds publics est proposé au niveau régional pour supprimer les barrières bureaucratiques et pour assurer des mécanismes de transparence des dépenses publiques et privées.Il faut suspendre l’application des TLC qui portent atteinte à la production nationale. Des mesures tarifaires et para tarifaires sont nécessaires pour protéger la production nationale et l’emploi des péruviens des importations subventionnées.Pour relancer l’économie familiale, il nous faut un programme de crédit à taux d’intérêt réduits favorisant l’agriculture et les petites et moyennes entreprises (PME), ainsi que le développement des crédits hypothécaires pour la population aux revenus moyens ou modestes.Les réserves internationales doivent être sauvegardées et la valeur du sol péruvien doit pouvoir augmenter graduellement afin d’améliorer la concurrence des entreprises et d’équilibrer la balance commerciale.
c) Protéger le travail digne et décent.L’État doit promouvoir la négociation collective et la liberté syndicale par le biais desaccords tripartites négociés par secteur entre les travailleurs et les employeurs en vue de maintenir les niveaux d’emploi. Il est nécessaire d’appliquer un programme de reconversion du travail pour les travailleurs licenciés victimes de la crise. Ce programme sera financé par le Fonds de Stabilisation Fiscale et par l'aide internationale au développement. Ces travailleurs doivent être protégés par une assurance chômage temporaire.Les entreprises soutenant les programmes de formation et l’innovation technologique doivent bénéficier de mesures d’incitation fiscale.
d) Augmenter la productivité agraire et défendre la souveraineté alimentaire.Le gouvernement doit promouvoir une politique concertée pour augmenter la productivité de l’agriculture et de l’élevage.Cette politique devrait inclure le rétablissement des contrôles de prix, des taxes anti-dumping et des impôts exceptionnels sur les oligopoles alimentaires.Le gouvernement doit également faciliter l’obtention et le refinancement de crédits dans le secteur agraire ; il doit aussi abroger les décrets qui facilitent l’évincement des terres appartenant aux communautés paysannes et amazoniennes.
e) Défendre les petites et moyennes entreprises (PME). Le gouvernement devra favoriser les achats aux PME ainsi que leur financement en augmentant la contribution de la Société Financière de Développement (SOFIDE) au Fonds de Garantie des Crédits aux PME.
f) Protéger les plus pauvres. Le gouvernement doit favoriser les programmes sociaux combinant l’emploi temporaire par le biais de l’amélioration de l’infrastructure de production ainsi que celle des services médicaux, éducatifs et de nutrition de base.Il est aussi nécessaire de mettre en œuvre un programme de transfert d’argent pour les paysans et les éleveurs pauvres ne participant pas à des programmes d’emploi temporaire afin d’éviter la vente aux enchères de leurs terres et de leurs animaux. Le gouvernement doit aussi allouer des pensions vieillesse aux plus de 65 ans sans revenus, et mettre en place une assurance médicale universelle qui garantisse une prise en charge de qualité.
La proposition de la CGTP est favorable à l’intégration économique et à l’échange commercial au niveau régional et sous-régional.Elle soutient aussi l’internationalisation des entreprises péruviennes et la diversification du marché.
1 Secrétaire général de la Confédération Générale des Travailleurs du Pérou (CGTP).
2 Voir : <www.cgtp.org.pe>.
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La démocratie dans une impasse
Gender Studies, o.p.s.
Linda Sokačová
ADEPTTs
Saša Uhlová
Trast pro Ekonomiku a společnost
Petr Gočev
Ekumenická akademie
Tomáš Tožička
Le président Václav Klaus a déclaré en 2008 que le pays traversait une très bonne période, en ayant « foi dans le présent ». Cette euphorie tend à disparaître maintenant que l’économie commence à montrer des signes de faiblesse. La réforme des finances publiques, qui a entraîné une diminution des impôts pour les secteurs les plus aisés et l’augmentation de la taxe à la valeur ajoutée (TVA), a créé de plus lourdes charges pour les plus pauvres. Pour certains groupes marginalisés, comme les Roms, la situation est devenue tellement difficile qu’ils ont commencé à émigrer. Un point positif tout de même, en ce sens que le pays a fait quelques progrès – bien qu’insuffisants – pour diminuer les discriminations de genre.
Le président Václav Klaus a débuté l’année 2008 en déclarant que c’était la meilleure période de l’histoire tchèque et a souligné que l’énorme hausse des prêts et des hypothèques octroyés était un symptôme de « la foi dans de le présent ». Il s’est aussi vanté de la solidité de la monnaie nationale, affirmant que c’était la preuve d’une économie forte. En réalité, la couronne tchèque (CZK) était soutenue artificiellement par la spéculation. Le gouvernement de droite, à l’instar du président, a continué à ne pas reconnaître la situation et à nier que la crise économique mondiale aurait des conséquences dans le pays. Cet optimisme a commencé à s’évanouir seulement lorsque les statistiques et la réalité de tous les jours, vécue par la plupart de la population, ont empêché de nier que la production était en train de dégringoler à une vitesse jamais vue auparavant. La République Tchèque est au cinquième rang des pires performances de l’Union Européenne1.
Les effets des réformes et de la crise
En 2007, le Gouvernement a commencé une restructuration des finances publiques, baissant les impôts des salariés du secteur économique le plus élevé et augmentant la TVA des articles de base. De telles mesures ont augmenté la charge fiscale des familles nombreuses à faible revenu. Tandis que le Ministère des Finances prévoyait pour 2008 une inflation de 3,8 %, l’indice des prix à la consommation est monté à 6,3 %2 et le revenu réel au troisième trimestre 2008 s’est réduit de 2,7 %3 par rapport à 2007. Avant même que les effets de la crise économique mondiale deviennent évidents dans le pays, les prévisions annonçant que les réformes nuiraient à la majorité de la population, se sont réalisées.
La crise économique mondiale, qui commence maintenant à toucher le pays, est en train de diminuer encore plus le niveau de vie. Au troisième trimestre 2008 le nombre de travailleurs au chômage était plus élevé qu’au trimestre précédent, ce qui ne s’était pas vu depuis 2005. Fin 2008 le taux de chômage officiel était arrivé à 4,4 %. Cependant ce chiffre ne comprenait pas les 178.000 personnes n’étant pas activement à la recherche d’un travail. Si l’on ajoutait ce nombre, le taux de chômage serait plus élevé de moitié4. Les travailleurs étrangers, en particulier les asiatiques, sont généralement les premiers à être licenciés et sont ceux qui souffrent le plus. Leur protection légale est inadéquate, la plupart dépendent d’agences de travail, ce qui précarise leur situation d’emploi et un grand nombre d’entre eux se sont endettés pour pouvoir immigrer. En plus de la catastrophe économique au niveau personnel, le retour au pays pourrait mettre en danger la subsistance de leurs familles.
Depuis que les effets de la crise ont commencé à se faire sentir, la moitié des petites et moyennes entreprises ont dû licencier du personnel et réduire la journée de travail, ou se préparent à le faire prochainement5. Les cours à la bourse ont baissé de plus de moitié par rapport à leur niveau maximum en 2007. Cependant le Gouvernement n’a pas abandonné ses projets de privatiser le système des pensions6. Fin 2008 il a commencé à envisager des mesures contre la crise, et ce en grande partie comme réponse à la croissante préoccupation mondiale et aussi à la pression de l’industrie nationale.
L’énorme endettement des foyers a placé l’industrie financière dans une position précaire. Jusqu’à il n’y a pas très longtemps, les prêts personnels augmentaient d’un tiers chaque année. La plupart étaient des dettes hypothécaires, mais presque 20 % correspondaient à des prêts d’institutions non bancaires, principalement à des achats à crédit. Dans certains cas ces prêts ont un taux d’intérêt annuel effectif de plus de 200 %. L’État soutient ce taux en introduisant, par exemple, des mécanismes pour faciliter le recouvrement des dettes. La loi sur la faillite de 2008 comprend une option de faillite pour les particuliers, mais son utilisation est trop compliquée.
La réforme du système de santé
Depuis que le ministre de la Santé a déclaré « je veux le capitalisme dans le système de la santé », il a tout fait pour y parvenir7. Plusieurs hôpitaux régionaux ont été privatisés et les services soi-disant non lucratifs ont été réduits, principalement les traitements difficiles ou à long terme. La responsabilité de ces cas a été transférée aux grands hôpitaux publics et aux hôpitaux universitaires. En 2008 la dépense publique pour la santé a baissé jusqu’à moins de 7 % du PIB, un des pourcentages les plus bas de l’UE. Environ 20.000 employés (8 %) ont abandonné le système de santé8. La perception de droits sur les services et l’intention de diminuer les retenues pour la sécurité sociale, surtout pour les contribuables les plus riches, sont les clés de la stratégie fiscale régressive du gouvernement.
Les Roms et l’exclusion sociale
Les réformes antisociales et le début de la crise économique ont des effets plus graves sur les secteurs déjà démunis, comme les retraités, les mères célibataires et d’autres groupes très vulnérables. Les Roms ne sont pas tous exclus socialement, cependant la plupart des 250.000 Roms qui vivent dans le pays ont souffert des effets directs de l’économie décroissante. En 2006, dernière année pour laquelle on dispose de données, 80.000 Roms vivaient dans près de 300 localités socialement exclues9. Ceci est dû principalement à la discrimination institutionnalisée et au manque d’intérêt du gouvernement pour résoudre les problèmes des Roms.
En janvier 2008, l’Agence pour l’Intégration Sociale a ouvert ses portes dans des localités roms10 avec pour mission d’élever le niveau de vie des Roms exclus et de faciliter leur intégration dans la société tchèque. Le financement pour l’achat direct de services était supposé être le principal moyen d’y parvenir. Cependant le Gouvernement a donné à l’agence l’ordre d’établir un cadre pour la coopération avec les parties intéressées dans chaque région avant de demander un quelconque service. Le personnel a consacré toute l’année 2008 à cette tâche, après quoi un audit interne a conclu que le point de vue de l’agence violait les politiques du gouvernement.
L’agence s’est avérée décevante. Son mandat est faible. Au lieu d’argent, elle n’offre que des conseils. L’abandon de longue date de la part du gouvernement et les énormes problèmes économiques ont fait de quelques groupes roms de localités socialement exclues les proies de la haine raciale. Les grandes manifestations organisées par les néo-nazis et d’autres habitants de Litvinov contre les Roms en 2008 en sont un exemple. En avril 2009 une fillette de deux ans a eu de graves brûlures à la suite d’une attaque à la bombe Molotov contre la maison d’une famille rom à Vítkov ; ses parents et d’autres membres de la famille ont également été blessés.
Le Gouvernement a attribué aux difficultés économiques l’augmentation des demandes d’asile des Roms au Canada pendant l’année 2008. Mais ces difficultés sont seulement une partie des diverses raisons qui les poussent à émigrer. Les Roms ne se sentent pas bien accueillis en République Tchèque et craignent la vague croissante de violence fasciste11.
La situation de la femme
La participation des femmes dans la vie publique et dans la prise de décision continue à être infime. Néanmoins, le Gouvernement n’a adopté aucune mesure pour diminuer l’inégalité entre hommes et femmes dans les postes politiques et décisionnels. La proportion de femmes à la chambre basse du parlement est de 15,5 %, ce qui, selon les données de l’Union Interparlementaire, place le pays au soixante-neuvième rang. A l’exception du système judiciaire, où 64,5 % des juges des tribunaux de district et 60,4 % des juges des tribunaux régionaux sont des femmes, elles occupent moins de 25 % des postes législatifs et exécutifs. Même au sein du pouvoir judiciaire, au fur et à mesure que l’on monte dans la hiérarchie la proportion de femmes diminue.
Le pays a réalisé des progrès significatifs ces dernières années en ce qui concerne la violence contre les femmes, en approuvant des lois qui condamnent la violence au foyer et le harcèlement. Cependant ces mesures s’avèrent encore insuffisantes pour réduire toutes les formes de violence sexiste. Malheureusement les groupes de femmes organisées ont du mal à trouver le financement nécessaire, en partie en raison de leur exclusion du concours de subventions 2008 promu par le Ministère du Travail et des Affaires Sociales, qui stipule que les projets « ne doivent pas contenir d’éléments politiques et ne peuvent promouvoir aucune cause politique ou idéologique, y compris l’idéologie féministe ». En conséquence de quoi, beaucoup de ces groupes ont dû arrêter leurs activités.
Le système légal tchèque n’a pas de lois interdisant la discrimination. Le président a opposé son véto pour la loi contre la discrimination qui aurait aligné la législation du pays sur la loi européenne. Une majorité absolue au parlement est nécessaire pour annuler le véto présidentiel. En attendant que cela soit un fait, la République Tchèque viole ses engagements en tant que membre de l’UE. Il existe encore de sérieuses lacunes dans la protection des droits individuels. Elles sont particulièrement évidentes dans le code du travail, qui avait été modifié par la loi rejetée par le président.
Sur le plan économique, les statistiques montrent que beaucoup plus d’hommes que de femmes entre 20 et 35 ans sont économiquement actifs. Ceci s’explique fondamentalement parce que l’on considère encore que l’éducation des enfants est surtout une responsabilité des femmes. Il s’agit seulement ici de l’un des nombreux stéréotypes en matière de genre concernant la maternité qui place les femmes en position désavantageuse sur le marché du travail – lors de l’embauche, au cours de la carrière professionnelle et pour l’accès à l’amélioration de leur formation.
L’inégalité entre hommes et femmes par rapport au revenu était de 19,8 % en 2007, la moyenne la plus élevée d’Europe. Presque deux cinquièmes des femmes (39 %) et un quart des hommes (2 %) pensent que les femmes sont moins payées que les hommes pour le même travail. Les enquêtes d’opinion montrent que les personnes considèrent que l’âge (64 %) et le genre (45 %) sont les barrières les plus fréquentes pour réussir sur le marché du travail12.
En janvier 2008 le Gouvernement a adopté une nouvelle politique sur les allocations familiales, dénominée permis parental « à trois vitesses ». Les parents peuvent maintenant choisir pendant combien de temps ils bénéficieront de l’allocation familiale. La durée détermine le bénéfice mensuel. Les femmes qui perçoivent des revenus plus élevés en touchent davantage et celles qui perçoivent des revenus plus faibles, moins. Le Ministère du Travail et des Affaires Sociales, qui est très conservateur sur les questions de discrimination de genre, refuse de soutenir et de développer les institutions de l’aide à l’enfance et a l’intention d’éliminer les crèches, dont le nombre s'élève seulement à 40 dans tout le pays. La série de mesures du gouvernement dénominée pro-famille ne comprend pas le soutien intégral aux institutions d’aide à l’enfance.
Un autre problème est le manque de soutien aux politiques qui allient les programmes d’aide à l’enfance et à la famille avec les activités qui encouragent l’intégration des femmes immigrantes. Ces femmes ont une position désavantageuse pour entrer sur le marché du travail, puisqu’elles ne possèdent pas de qualifications ni de connaissances académiques. De même, les chances de trouver du travail pour les mères célibataires sont très minces. Les immigrants des deux sexes doivent en général se contenter d’occuper les postes les moins intéressants et les moins bien payés, mais ce sont les femmes immigrées qui le plus fréquemment subissent un traitement inégal. Ceci est dû en partie à leur ethnie ou leur nationalité, mais aussi à la discrimination de genre lors de l’embauche, ainsi qu’à l’inégalité des conditions de travail et des salaires13.
La coopération au développement
L’Aide Officielle au Développement (AOD) tchèque est destinée en grande partie à la coopération en matière de transformation. Son objectif est de promouvoir la démocratie dite de style occidental dans les pays de l’ex-URSS, à Cuba, en Birmanie et en Iraq. D’après le Gouvernement cette approche se justifie principalement par l’expérience de la République Tchèque dans la transformation postcommuniste. Cependant le gouvernement a renoncé à remplir son engagement envers l’UE qui était d’augmenter l’AOD. L’augmentation a pris fin en 2007 et l’aide a diminué pour la première fois en termes réels de pourcentage du revenu national brut (RNB), de 0,12 % à 0,11 %, en dépit de la pression des ONG et d’autres organisations. Les fonctionnaires ministériels ont informé le Comité des Affaires Etrangères du parlement que le pourcentage de la contribution augmentera, principalement grâce à une diminution du RNB. Le programme n’est pas transparent : en 2008 il n’y a pas eu d’appel d’offres ouvert pour le projet de transformation à Cuba. Les projets qui ont obtenu le financement ont été cofinancés par des institutions néolibérales des États-Unis, comme la Fondation Nationale pour la Démocratie.
Les ONG et les médias
Les ONG tchèques subissent une énorme pression financière ; elles dépendent de plus en plus de leur financement public ou de fondations étrangères – très peu de celles-ci apportent un soutien significatif aux initiatives civiques indépendantes. Ceux qui accèdent aux subventions doivent remplir certains critères politiques et leurs activités doivent être conformes aux politiques du donateur. Pour éviter la critique et l’exclusion, la plupart des organisations évitent l’activisme et se concentrent sur l’offre de services. L’aide économique la moins restrictive provient de la Commission Européenne, particulièrement des fonds gérés directement par la Commission. La campagne civique la plus importante continue à être Les Tchèques contre la Pauvreté ”, qui fait partie de l’Action Mondiale contre la Pauvreté et qui se centre sur la défense et l’accomplissement des Objectifs du Millénaire pour le Développement.
Le journalisme indépendant n’existe pratiquement pas. Les médias fournissent une information sélective et incomplète ; leur objectif semble souvent soutenir les intérêts de groupes économiques et politiques particuliers. En raison de cette atmosphère, la République Tchèque se trouve dans une impasse.
1 Voir : <www.ct24.cz/ekonomika/ceska-republika/45209-smutny-pohled-do-statistik-prumysl-v-prosinci-klesl-o-14-6-procenta/>.
2 Voir : <www.czso.cz/csu/redakce.nsf/i/mira_inflace>.
3 Voir : <www.czso.cz/csu/csu.nsf/informace/cpmz120108.doc>.
4 Voir : <www.czso.cz/csu/csu.nsf/informace/czam020209.doc>.
5 Voir : <ekonomika.ihned.cz/c1-34782520-temer-polovina-ceskych-firem-rozda-kvuli-krizi-vypovedi>.
6 Voir : <www.cbw.cz/cs/article/penzijni-reformamene-statuvice-sobe.aspx>.
7 Voir : <www.cuni.cz/IFORUM-5916.html>.
8 Voir : <osz.cmkos.cz/CZ/Z_tisku/Bulletin/12_2008/39.html>.
9 Voir : <www.mpsv.cz/files/clanky/3043/Analyza_romskych_lokalit.pdf str.15>.
10 Voir <www.socialni-zaclenovani.cz/>.
11 Taylor, L. (2008). “ Czech minister blasted by Roma ”. The Star, le 19 novembre. Disponible sur: <www.thestar.com/News/GTA/article/539490>.
12 En septembre-octobre 2008 une enquête quantitative a été réalisée pour savoir comment les employés hommes et femmes percevaient l’égalité des chances, et s’ils considéraient que leur employeur leur permettait d’harmoniser leur travail avec la vie privée et la famille. Voir Gender Studies, o.p.s., disponible sur: <www.genderstudies.cz>.
13 Krchova, A., Viznerova, H. y Kutalkova, P.Zeny migrantky v Ceske republice. Uvedeni do problematiky.Praga: Fes Prag. 2008.
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Perspective funeste
Fundatia pentru Dezvoltarea SociÉtatii Civile
(Fondation de la Société Civile pour le Développement)
Valentin Burada
La chute des exportations a provoqué des faillites, une diminution des activités et une hausse du chômage. Les envois de fonds des émigrés, qui représentent 5 % du Revenu National Brut, ont chuté de 10 % au début de l’année 2009. La privatisation et la vente des banques nationales de ces dernières années ont conduit le pays et les citoyens à s’endetter auprès des banques occidentales. Un récent prêt portant sur plusieurs millions et délivré par le Fonds Monétaire International, semble principalement destiné à soutenir les entreprises étrangères. Une des victimes de la crise est l’aide au développement : l’ensemble de la politique de coopération pour le développement roumain est en danger de disparition.
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Comme ses voisins de l’ancien bloc soviétique, la Roumanie se trouve piégée dans l’instabilité de la crise financière et économique mondiale. Le pays a profité d’un boom économique ces dernières années, stimulé en partie par des prêts importants des banques occidentales et un accès simplifié aux prêts externes. Néanmoins, à l’heure actuelle on observe une contraction des crédits, la monnaie nationale est instable et la situation semble extrême.
Budget national, envois de fonds des émigrés et chômage
La Roumanie dépend des marchés chancelants de l’Union Européenne (UE). Les exportations ont diminué de 25 % et les flux de capitaux changent de direction. Rien qu’en janvier 2009, les rapatriements se sont élevés à 539 millions d’EUR. La baisse des exportations s’est traduite par une hausse du chômage, des faillites et une contraction des activités des entreprises. En avril 2009, environ 500.000 personnes (5,7 %) étaient au chômage – dont pratiquement la moitié étaient des femmes – par rapport à un taux de 3,9 % en avril 2008. La Commission Européenne a estimé qu’en mai 2009, le chômage s’élèverait à 8 %. Chaque point de pourcentage correspond à 100.000 chômeurs supplémentaires.
Même si le salaire mensuel net moyen était de 327 d’EUR en mars 2009, une augmentation de 17,6 % par rapport au mois de mars 2008 d’après l’Institut National de la Statistique, est moins impressionnante que lors des premiers mois de 2008 lorsqu’on a assisté à des augmentations de plus de 30 %. On s’attend à ce que la crise diminue encore davantage les augmentations et même inverse la tendance. Le Gouvernement a annoncé le gel des salaires budgétés ce qui signifie moins de pouvoir d’achat. Lors d’un entretien à la télévision nationale en avril 2009, le premier ministre Emil Bloc a reconnu qu’il y avait un risque pour que le Gouvernement soit dans l’impossibilité de régler les salaires et retraites des fonctionnaires. De plus, les marchés exportateurs traditionnels pour les producteurs d’aliments s’étant contractés , les agriculteurs roumains se trouvent également menacés en interne par les importations subventionnées de produits agricoles et alimentaires en provenance d’autres états membres de l'Union Européenne, ils cherchent donc à réorienter leurs exportations.
Les revenus budgétaires ont commencé à diminuer au cours du dernier trimestre 2008, une tendance qui se poursuit en 2009 – avec 8,7 % de moins en janvier que sur la même période en 2008 et qui va très certainement encore s’aggraver. La baisse la plus importante a concerné les impôts sur les revenus (-30,7 %). Les fonds récoltés au titre de la TVA, qui est encore la principale ressource du budget, ont chuté de 8 % et une nouvelle baisse est encore possible.
Comme réponse, on a proposé de nouveaux impôts plus élevés et des augmentations des contributions sociales. En mars 2009, le Gouvernement a annoncé une augmentation de près de 1 % des contributions sur les fonds d’assurance médicale aussi bien sur la part salariale que patronale du fait que la hausse du chômage allait générer moins de contributions. Auparavant, la contribution obligatoire était de 5,2 % pour les employés et de 5,5 % pour les patrons. Les représentants du secteur commercial pensent que cette mesure augmentera encore davantage le chômage car les entreprises continueront à abaisser leurs coûts et fonctionneront avec moins d’employés.
En février 2009, le Gouvernement a annoncé que les entreprises qui embaucheront des personnes au chômage et étant le seul actif de la famille ou des personnes âgées de plus de 50 ans, percevront des subventions pour une période pouvant aller jusqu’à 12 mois afin de couvrir la moitié des salaires de ces nouveaux embauchés. Les subventions soutiendront également l’emploi de Roumains et de ceux qui, en raison d’un faible niveau d’études ou de compétences, n’ont que très peu de chances de trouver un emploi sur le marché du travail. Pour les chômeurs de plus de deux ans, les subventions couvriront 75 % de leur salaire pendant 24 mois. Le plan, évalué à 133 millions d’EUR, est financé à 85 % par la Commission Européenne. De cette somme, 29 millions sont consacrés à l’emploi en zone rurale. En mars 2009, le Gouvernement a également décidé d’allonger la période d’allocations chômage de trois mois supplémentaires, alors que les patrons et employés seront exonérés de trois mois de contributions sociales pendant l'arrêt saisonnier des activités.
D’après des données fournies par la Banque Nationale de Roumanie, les citoyens qui travaillent à l’étranger, enverront 8,7 milliards d’EUR en 2008 (par rapport à 7 milliards d’EUR en 2007). Ceci représente presque autant que l’investissement étranger direct total (un record de 9 milliards d’EUR) et 5 % du Revenu National Brut. Une étude publiée par la Banque Mondiale classe la Roumanie à la huitième place des pays en voie de développement par rapport aux envois de fonds des émigrés1. Néanmoins, début 2009, le niveau de ces envois de fonds a chuté de 10 % par rapport à la même période de 2008. L’Italie et l’Espagne, les deux pays constituant 90 % de la totalité des envois de fonds, font face à des difficultés économiques sérieuses et des taux de chômage élevés. Ce sont environ 800 mille Roumains qui travaillent en Espagne, principalement dans les secteurs les plus touchés (services, industrie et construction). En novembre 2008, les autorités espagnoles ont annoncé que 100 mille Roumains étaient au chômage et elles prévoyaient que 30 mille supplémentaires allaient perdre leur emploi en 2009.
En novembre 2008, le Ministre du Travail et des Affaires Sociales a déclaré qu'en 2009, la Roumanie pourrait absorber jusqu'à 500 mille retours de travailleurs de l'étranger, principalement en raison de la pénurie de main d'œuvre sur des projets d'infrastructure et du secteur agricole. Néanmoins, ces déclarations semblent destinées essentiellement à apaiser les inquiétudes de l’Italie et de l’Espagne par rapport au fait que les travailleurs Roumains deviendraient une charge pour leurs plans d’allocations chômage, déjà trop tendus. Quoi qu’il en soit, d’après un sondage réalisé par la Fondation Soros en septembre 2008, seulement 14 % des Roumains travaillant en Espagne avaient l’intention de rentrer au pays en 2009.
Banques étrangères, FMI et population
Quasiment toutes les banques roumaines ont été privatisées ces dernières années et vendues aux banques étrangères. Jusqu’au début de la crise financière, les banques étrangères ont réalisé des gains énormes sur un marché en pleine et rapide expansion. En 2008, BCR (Este Group/Autriche) a communiqué sur une augmentation de ses gains nets de 119,8 %, BRD Société Générale (France) a enregistré une hausse de 46 % et la banque Raiffeisen (Autriche) a augmenté ses gains de 75,6 % par rapport à 2007. Seulement pour ces trois banques, les plus importantes de Roumanie, le résultat net dépasse un milliard d’EUR.
Lorsque la crise a éclaté, la Banque Nationale de Roumanie est intervenue afin de tenter de calmer la folie des prêts liés à la concurrence, en imposant une série de restrictions visant à prévenir la cessation de paiements. Le niveau d’endettement a malgré tout brusquement augmenté. Tout ceci a conduit à un scénario dans lequel, comme dans la majeure partie de l’Europe Centrale et de l’Est, les dettes roumaines sont dues à des banques d’Europe occidentale, surtout basées en Autriche, France, Grèce et Italie. Sans jamais prendre en ligne de compte l’impact négatif de leurs actions, les banques ont encouragé une tendance de consommation non pas basée sur la production réelle de la véritable économie locale mais sur une augmentation des importations en provenance d’Europe de l’ouest. Pour faire simple, avec l’argent prêté par l’Europe de l’ouest, ces banques ont soutenu leurs propres économies nationales et ont endettés la Roumanie et ses citoyens.
Cette situation s’est aggravée du fait que les Gouvernements d’Europe de l’ouest ont fait pression sur leurs banques pour se retirer en bradant les filiales installées en Europe de l’Est. La Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) s’attend à une cessation de paiements allant jusqu’à 20 % pour les prêts d’Europe de l’Est, la Roumanie se trouverait parmi les pays les plus touchés. Les décideurs politiques de Bucarest se voient limités au niveau des possibilités des politiques fiscales du fait des restrictions qui s’imposent pour corriger les valeurs négatives de la balance des paiements. En même temps, un affaiblissement de la monnaie nationale pourrait éventuellement déclencher une cessation de paiements qui malmènerait la stabilité financière. Afin de contrecarrer ces dangers, le Gouvernement a demandé et a reçu un prêt de 19,9 milliards d’EUR du FMI, de la Commission Européenne, de la Banque Mondiale et de la BERD. Le FMI apportera 12,9 milliards d’EUR sur la totalité.
Le Gouvernement a insisté sur le fait que le prêt est lié à l’engagement des banques étrangères en Roumanie de relancer le crédit sans externaliser les ressources du pays ni affecter les obligations du budget national en matière d’éducation et santé. Fin mars 2008, le FMI a obtenu des engagements écrits des sièges centraux des principales succursales bancaires en Roumanie qui devraient continuer à soutenir ces filiales et ne retireraient pas leur capital. Cependant, le Gouvernement a un mauvais vécu en matière de résistance contre la pression étrangère. Il manque aussi de moyens pour trouver les « solutions » étrangères permettant de faire face aux problèmes nationaux. Que ce soit le Gouvernement ou la société civile, à quelques exceptions près, ils ont été très lents à exposer réellement les enjeux. Les mesures d’austérité proposées par le Gouvernement, comprenant le gel des salaires et des retraites publiques ainsi que les hausses fiscales ont provoqué le mécontentement et la mobilisation des syndicats.
Le prêt du FMI semble avoir été contracté sous des pressions externes, principalement pour sauver les intérêts des compagnies étrangères basées en Roumanie. Il ne servira pas à rembourser la dette externe du pays mais à couvrir les dettes des succursales locales des banques étrangères. On utilisera donc des fonds publics pour réparer les dégâts occasionnés par le capital privé. En général, les Gouvernements d’Europe Occidentale ont réussi à manipuler ce dommage. Néanmoins, les réclamations désespérées du Gouvernement autrichien pour que le FMI et l’Union Européenne interviennent et sauvent leurs banques en Europe de l’est, démontrent que les banques étrangères prennent parfois des risques démesurés (par exemple, les banques autrichiennes ont prêté à la région l’équivalent de 70 % du PIB de l’Autriche). Le remboursement d’un prêt représentant 40 % du budget annuel de la Roumanie ne sera possible dans les prochaines années qu’en diminuant le niveau de vie de la population.
Crise de l’aide au développement
En 2007, en intégrant l’Union Européenne, la Roumanie s’est engagée à contribuer en tant que pays donateur au soulagement de la pauvreté dans le monde, par sa participation à la politique d'aide de l’Union Européenne et en configurant sa propre politique d’aide officielle au développement (AOD). Il est probable que la crise financière actuelle ait un effet radical sur les flux d’aide roumains. Le budget de l’AOD géré par le Ministère des Affaires Étrangères (MAE) est passé de 5 millions d’EUR en 2008 à 1,9 millions d’EUR en 2009. Pendant ce temps, le prêt du FMI portant sur plusieurs millions a déjà imposé des limites budgétaires aux domaines « non essentiels » et le remboursement du prêt (en 2015) affectera le budget de l’AOD pour de nombreuses années. Même lorsque les contributions multilatérales d’AOD se maintiennent à un niveau relativement constant, il est très peu probable que l’on atteigne l’objectif de 0,17 % d'AOD auquel le Gouvernement s’est engagé pour 2015.
Les organisations de la société civile (OSC) ont signalé que l’ensemble de la politique de coopération au développement roumaine était en danger de disparition. Il est déterminant que tout l’investissement antérieur sur la capacité institutionnelle récemment développée pour le MAE sera touché. Le Gouvernement a fait face à la majeure partie de ses besoins internes de développement de compétence par la tertiairisation de tâches spécifiques avec le PNUD Roumanie. Les OSC s’inquiètent parce que, de cette façon, le Gouvernement perd son principal objectif à court terme: Renforcer la capacité nationale.
Un signe clair des impacts de cette approche a été le changement de la structure administrative interne du MAE au début de l’année 2009. Alors que le Gouvernement a consacré des ressources financières importantes au PNUD Roumanie pour recruter des experts, l’agence de l’Aide au Développement, sous tutelle du MAE, est descendue de catégorie et son personnel a été réduit de moitié avec la diminution conséquente de sa capacité de programmation et de gestion de l’aide au développement. Même si en temps de crise, les coupes budgétaires sont compréhensibles, le fait de détruire la capacité administrative des institutions publiques n’est pas acceptable lorsque les conséquences portent à long terme. Les représentants du PNUD devraient comprendre que le fait de détourner des ressources et de retarder les processus de renforcement du pouvoir, risque de porter préjudice aux acteurs locaux de la coopération au développement en Roumanie.
1 D’après People Move, un blog sur l’émigration, les envois de fonds des émigrés et le développement, on estime que les flux des envois de fonds vers les pays en voie de développement dépassaient 300 milliards d’USD en 2008. Disponible sur : <peoplemove.worldbank.org/en/content/remittance-flows-to-developing-countries>.
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Réduire la pauvreté : un objectif très lointain
Pastor Clotaire Rodonne Siribi
GAPAFOT
Au lieu de diminuer, la pauvreté a sensiblement augmenté depuis 1990. Les désordres, les pillages et les destructions qui ont accompagné la rébellion menée par le général François Bozizé au pouvoir ont détruit le tissu économique, déjà détérioré, du pays. Aujourd'hui le gouvernement présente une stratégie de réduction de la pauvreté qui répondra difficilement aux exigences de l’OMD 1 si l'on ne s'engage pas immédiatement et de façon durable dans la voie de la paix et de la sécurité, et si l'on ne développe pas une croissance qui, en plus d’être exceptionnelle, favorise les pauvres.
Malgré ses ressources multiples, l’économie de la République centrafricaine a été sinistrée par des années de pillage des fonds publics et par d'incessantes crises politico-militaires. Les désordres, les pillages et les destructions qui ont accompagné la rébellion menée par le général François Bozizé au pouvoir le 15 mars 2003 ont fini par défaire un tissu économique qui était déjà en piteux état après une vingtaine d’années de gestion maffieuse qui ont vidé les caisses de l’État. Tous les appareils de production ont été détruits.
Une grande partie des 623.000 km2 du territoire de la République est recouverte de bois et le sous-sol renferme des diamants. Cependant, ces deux richesses naturelles, principales sources de revenus du pays, ont longtemps servi à remplir les poches de ceux qui détenaient le pouvoir et de leurs proches. Aujourd’hui en pleine restructuration, sa production a baissé. Bien que la terre soit fertile – même si seulement 1/5 est cultivé – et le climat clément, les productions de coton et de café n’ont cessé de s’effondrer ces dernières années. La récolte de coton de 2004-2005 n’a pas dépassé les 5.000 tonnes, contre quelque 50.000 en 1998. Ceci est dû non seulement à l’inconsistance de la structure qui est supposée gérer le secteur, mais aussi – et principalement – aux règles du jeu du commerce international, qui ne sont pas favorables aux producteurs africains, et spécialement aux subventions allouées aux producteurs des pays industrialisés. En ce qui concerne le café, la République centrafricaine a produit pendant un temps plus de 18.000 tonnes par an, mais sa culture a quasiment disparu. L’agriculture est pratiquement abandonnée. Les paysans, après avoir subi directement les conséquences de la rébellion, souffrent de l’insécurité chronique et ne continuent de cultiver que pour leur subsistance.
La réduction constante de ces activités réduit aussi les revenus fiscaux et douaniers déjà rares en raison de l’inefficacité de la collecte exercée par l’État centrafricain, fait régulièrement dénoncé par le FMI (qui lui a concédé en juillet 2004 un crédit de 8,2 millions de dollars dans le cadre d’un programme post-conflit). Par ailleurs, le budget du pays se voit grevé par une dette extérieure supérieure à 1 milliard de dollars (à la fin de 2002), dont le règlement représentait 44,7 % des ressources budgétaires en 2003 selon la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC).
Incapacité de l’État
Depuis la tentative de coup d’État de mai 2001, les aides extérieures ont été suspendues et ce n’est que grâce aux donations spécifiques de 2004 en provenance des partenaires traditionnels (l' UE, la France, la Chine ou la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale) que la République centrafricaine a pu sortir la tête de l’eau. L’État se montre incapable de payer ses fonctionnaires, les pensions et les bourses. Lors de la chute du président Ange Patassé en mars 2003, les fonctionnaires comptaient déjà 36 mois de retard dans le versement de leur salaire. Après avoir simplement effacé le tableau, François Bozizé s’est engagé à payer les salaires dans un délai convenu, promesse qu’il n’a pas pu tenir longtemps car le ministre de l’économie s’est reconnu incapable de payer les fonctionnaires d’État, qui ont reçu en janvier 2008 leur salaire de juillet 2004. Ces retards pèsent sur la consommation intérieure et causent une inquiétante tension sociale, exacerbée par l’inflation des prix des produits alimentaires. Malgré cela, l’économie a connu une légère amélioration en 2004 (2,5%) après plusieurs années de stagnation.
Pour les Centrafricains, les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) se trouvent très éloignés et resteront un rêve. Selon le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), les deux tiers des Centrafricains, soit 3,8 millions, vivent en dessous du seuil de pauvreté. L’espérance de vie n'est que de 39,5 ans ; un enfant sur dix (11,5 %) meurt avant l’âge de 5 ans et moins de la moitié des adultes (48,6 %) sont alphabétisés. Ces résultats placent la République centrafricaine au 169ème rang sur 177 pays intégrant la classification de l’Indice de développement humain.
Stratégie de réduction de la pauvreté
Pour essayer d'inverser cette situation dramatique, le Gouvernement a tenté de mettre en place une stratégie de réduction de la pauvreté avec deux buts principaux.
Cette stratégie s’appuie sur les quatre piliers suivants :
Diagnostic de pauvreté
Le présent diagnostic de pauvreté est le résultat de deux recherches menées par le Ministère de la Planification sur les conditions de vie en milieu urbain et rural, réalisées avec l’aide technique et financière du PNUD en 2003 et complétées par une recherche participative financée par la Banque Mondiale en 2006.
Cette enquête a identifié 10 problèmes principaux : mauvaise gouvernance ; problèmes liés à l’insécurité ; faiblesse des revenus ; inefficacité de l’éducation et de la formation ; problèmes de santé ; corruption ; manque d’emploi et absence d’opportunités ; manque d’eau potable ; absence d’une politique de renforcement des capacités nationales et problèmes environnementaux.
Les problèmes retenus comme prioritaires sont ceux qui, quantitativement, ont été considérés comme les plus importants en raison de leur influence décisive et de leurs impacts négatifs sur les conditions de vie de la population. Les témoignages des participants, pris en groupe ou individuellement et dans toutes les régions, mettent clairement en évidence trois problèmes principaux : l'absence d'une bonne gouvernance, l'insécurité et l’absence de paix.
Les mauvaises conditions prévalent dans tout le pays. Dans certains quartiers de Bangui, la capitale, la population ne dispose d'électricité que quatre jours sur sept et, dans la plupart des quartiers, elle n’a pas accès à l’eau potable. En raison de la forte chute du niveau des revenus, beaucoup de Centrafricains envahissent les espaces verts non seulement en ville mais aussi sur les formations forestières périphériques. Étant donné que l’inflation a réduit les revenus, la vente de bois à brûler est souvent la seule alternative face aux autres moyens de subsistance qui sont de plus en plus précaires, mal payés et illicites. En conséquence, la savane croît à un rythme de 500 mètres par an de part et d’autre de Bangui Boal et s’est déjà déplacée de 30 kilomètres vers le sud et le sud-est.
Le taux de pauvreté est de 73 % dans les villes et de 69 % dans les zones rurales. Cette privation s’est vue accentuée par une énorme inégalité dans les revenus et les dépenses domestiques. Le niveau de consommation de 10 % des ménages les plus pauvres représente à peine le dixième de celui de 10 % des plus prospères. Il est bien peu probable que l’objectif de 31 % pour 2015 soit atteint si l’on ne s'engage pas de façon rapide et durable dans la voie de la paix et de la sécurité sur la totalité du territoire et si l'on ne développe pas une croissance exceptionnellement forte et favorable bénéficiant les pauvres, notamment en milieu rural.
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La crise existe après tout
Partnership for Development Center
Diana Mocanu
La Moldavie vit une époque de turbulences. Avant les élections d’avril, le Parti Communiste au pouvoir a minimisé les conséquences de la crise financière. Les experts avaient pourtant déclaré que les pays pour lesquels les envois de fonds depuis l’étranger représentent un tiers du PIB, comme la Moldavie, sont les plus vulnérables. Après les élections, le gouvernement a cependant commencé à parler de la crise comme d’une « catastrophe ». Pour l’instant, les mesures proposées ont manqué leur cible.
A l’heure actuelle, la Moldavie vit des temps orageux sur le plan politique. En avril 2009, lorsque le Parti Communiste de la République de Moldavie (PCRM) au pouvoir a remporté les élections parlementaires, des milliers de manifestants ont envahi les rues dénonçant la fraude, ils ont affronté la police et ont pillé le parlement. Le Gouvernement a affirmé que la bataille menée après le résultat des élections n’était qu’une tentative de coup d’état masquée, organisée avec la participation de la Roumanie. Plus tard, après les présidentielles de juin, le président et leader du PCRM, Vladimir Voronin, a « mis fin à son partenariat politique » avec les partis de l'opposition.
Une nouvelle réalité politique
La superposition de la crise politique et de la crise économique et financière a creusé le fossé entre le Gouvernement et l’opposition qui ont refusé d’assumer leur responsabilité, chacun se rejetant la faute. Les nouvelles élections parlementaires du 29 juin ont eu comme résultat un parlement où aucun parti ne détient la majorité et encore moins les 61 sièges nécessaires pour élire un nouveau président. Les quatre principaux groupes d’opposition ont obtenu 53 sièges en tout. Ce nombre n’est pas suffisant pour élire un nouveau président de leur préférence bien que les leaders aient manifesté leur volonté de forger une alliance pour déplacer les communistes.
L’accord de Transnistria occupe encore une fois le devant de la scène. Ceci est dû a la stratégie préélectorale du président Voronin, qui a signé la Déclaration de Barvikha étant considérée par l’opposition comme une capitulation face aux intérêts russes1. L’opposition craint que la Moldavie puisse perdre sa souveraineté, son indépendance et son intégrité. Elle croit avoir le droit de diverger sur le prix payé par le leader du PCRM pour obtenir l’appui de la Russie – dans le but d’éliminer de la course électorale les autres adversaires qui visaient à attirer l’électorat de langue russe.
En même temps, la position internationale de la Moldavie s’est notamment détériorée et sa candidature d’adhésion à l’Union Européenne est en danger. La rhétorique a été largement utilisée pour définir les élections d’avril comme étant une « épreuve » pour la démocratie moldave garantissant le progrès vers l’intégration du pays à l’UE (l’UE fait l’objet de plus de la moitié des échanges commerciaux de la Moldavie, un grand nombre de moldaves travaillent dans l’UE et plus de 70 % de la population est pour l’intégration européenne). Cependant, le résultat préliminaire de cette « épreuve » a été l’abus des ressources administratives, le harcèlement permanent de l’opposition – ayant provoqué des manifestations et des révoltes – et la violation flagrante des droits de l’homme de la part des organismes responsables de faire respecter la loi.
La société moldave est profondément divisée et radicalisée, non seulement du fait de la manière dont a été menée la campagne électorale, mais notamment comme conséquence du comportement des forces de sécurité en période post-électorale. La stabilité politique ne sera récupérée qu’après avoir mené une enquête exhaustive sur les événements d’avril.
Crise et possibilités
Avant les élections d’avril 2009, le gouvernement a nié avec véhémence les conséquences de la crise pouvant affecter le pays et a essayé de maintenir artificiellement le statu quo économique. Malgré ces efforts, la Banque Mondiale n’a pas été aussi optimiste et la Moldavie a été incluse dans la liste des pays en développement ayant un très haut niveau de vulnérabilité2. Après les élections, le président Voronin a déclaré, lors d’une réunion avec des entrepreneurs, des membres du gouvernement intérim, des parlementaires et des hommes politiques, que « la crise est un incendie, une catastrophe ». Les fonctionnaires du gouvernement ont expliqué que l’importance de la crise avant les élections avait été minimisée dans le but « d’éviter la panique ».
En 2008, la croissance économique a été impressionnante (7,2 %). Malgré cela, la deuxième vague des effets de la crise financière mondiale a frappé le pays avec force. Les premières conséquences se sont fait sentir lors du dernier trimestre 2008 et elles ont été confirmées par les indicateurs statistiques du premier trimestre 20093. D’après la première ministre Zinaida Greceanii, les effets sont dûs notamment au déclin des exportations et des importations, à la réduction de la production et à la diminution des envois de fonds depuis l’étranger. Dans ce cas, la seule manière pour la Moldavie d’affronter la crise, sera la mise en œuvre d’une politique conçue pour garantir et conserver la stabilité économique.
La première ministre Greceanii a souligné que les investissements en infrastructure doivent provenir aussi bien des ressources budgétaires que des investissements étrangers. Elle a cité un projet d’investissement tchèque à mettre en œuvre au nord du pays, avec un apport de 600 millions d’EUR (882 millions d’USD) pour la construction d’une centrale électrique. Suivant la première ministre, la réforme de libéralisation économique (légalisation du capital, amnistie fiscale, impôt sur les revenus réinvestis, ainsi que des politiques bancaires strictes ayant été encouragées dernièrement) aidera aussi bien à assurer la stabilité macroéconomique de la Moldavie qu'à diminuer l’effet de la crise.
Le ministre des Finances a manifesté que le système financier moldave est très solide et que, l’année dernière, la capitalisation des banques a augmenté de 26,8 %, les actifs de 22,3 % et les portefeuilles de crédits de 19,4 %. Par conséquent, la liquidité actuelle du système bancaire est d’environ 30 %, notamment supérieure aux exigences de la limitation de risques (de 20 % minimum)4.
Cependant, l’Association pour la Démocratie Participative a annoncé que, en raison de la crise économique, beaucoup de banques nationales n’octroient déjà plus de crédits individuels pour la consommation personnelle ni d’hypothèques y compris pour les sociétés, puisque celles-ci, notamment dans le secteur de la construction, ne sont pas en mesure de rembourser les prêts. D’autre part, du fait de la possible dépréciation de la monnaie nationale, le leu, vis-à-vis des principales devises de référence, les citoyens ne se sont pas bousculés pour demander des crédits.
La plupart de la liquidité des banques est due aux envois de fonds des moldaves qui travaillent à l’étranger. Il serait bien possible que, en raison de la diminution des transferts, les banques accumulent moins d'argent dans leurs portefeuilles. Les données de la Banque Nationale de Moldavie montrent qu’en avril 2009 les réserves monétaires ont atteint 1,08 milliard d’USD, ce qui implique une diminution de presque 586 millions d’USD (35 %) par rapport à décembre 2008. Cette réduction est due aux interventions faites sur le marché monétaire sous forme de ventes et d’accomptes à valoir sur la dette externe du pays, entre autres versements externes, ainsi qu’à la réduction du taux de change des devises à titre de réserves monétaires par rapport au dollar américain. Pour sa part, le Fonds Monétaire International (FMI) prévoit que si les envois de fonds depuis l’étranger et les exportations continuent à diminuer, les réserves monétaires du pays pourraient chuter d’1,3 milliard d’USD ce qui dans la pratique signifie que le pays pourrait perdre ses réserves monétaires.
D’autre part, suivant l’Académie des Sciences de la Moldavie (ACM), la crise mondiale pourrait entraîner des effets positifs pour le pays5. Bien que les envois de fonds depuis l’étranger et les importations diminuent, cela « peut favoriser l’économie réelle afin de remplir le manque de produits sur le marché interne ». La dépréciation du leu peut également avoir des effets positifs, à savoir l’augmentation des exportations. Le rapport de l’ACM signale que la nécessité d’être compétitif implique une amélioration qualitative des produits atteignant ainsi les standards européens6.
Un pays qui dépend des envois de fonds depuis l’étranger
Les économistes de la Banque Mondiale affirment que les pays pour lesquels les envois de fonds depuis l’étranger représentent un tiers du PIB sont les plus vulnérables face à la crise économique. C’est le cas de la Moldavie et du Tadjikistan où ces fonds constituent 35 % et 45 % du PIB, respectivement, et également de l’Arménie et du Kirghizistan. En 2008, les émigrants moldaves ont envoyé 1,6 milliard d’USD par des voies officielles seulement, notamment depuis l’Italie et la Russie. Une enquête récente menée par l’Organisation Internationale pour les Migrations a confirmé que plus de 35 % de la population moldave habite dans des foyers recevant des fonds de l’étranger7.
Une enquête réalisée par CBS-AXA en Moldavie a révélé que 20 % des bénéficiaires de fonds de l’étranger en 2008 ne reçoivent déjà plus d’argent et que 45 % ont informé qu’ils recevait moins ou beaucoup moins que l’année précédente8. Cependant, contrairement à pas mal de suppositions ou d’inquiétudes, il n’existe pas de preuves du retour massif des migrants lié à la crise économique, bien que le nombre de migrants rentrés temporairement en 2008 ait doublé (de 4,9 % à 9,1 %) et que 8 % aient déclaré qu’ils rentraient pour rester. Ce qui est intéressant c’est que la raison principale mentionnée pour le retour est la famille, alors que la perte du travail et le manque de possibilités économiques séduisantes n’étaient que des motivations secondaires.
La réponse du Gouvernement
La priorité du Gouvernement est le versement des salaires, pensions, bourses et subventions sociales9. De nouveaux programmes conçus pour favoriser la création de nouvelles entreprises et des projets d'infrastructure seront lancés et mis en œuvre pour assurer la stabilité économique de la Moldavie et pour attirer de nouveaux investissements étrangers. Parmi les mesures incluses dans le plan contre la crise (ou anti-catastrophe) annoncé par le président Voronin peuvent être mentionnées l’aide aux entreprises à « quota zéro » pour l’impôt sur les revenus corporatifs pendant les quatre prochaines années afin de soutenir les agents économiques dans le contexte de la crise mondiale ; l’introduction d’un taux fixe pour les revenus des personnes physiques (par exemple, 15 %), et l’augmentation du montant des revenus non imposables ; la réduction de la contribution au budget social de 5 % ; l’augmentation de la TVA de 20 % à 22 % pour garantir le fonds social et réduire les dépenses budgétaires à un minimum de 20 %.
Le plan contre la crise comprend environ 40 modifications apportées à des documents législatifs. Le Parlement examinera le plan après l’approbation de la nouvelle composition du gouvernement. D’après le vice-premier ministre intérimaire, aucune de ces mesures n’apportera de revenus supplémentaires au budget ; par contre, les employeurs seront obligés de publier les salaires réels.
Défauts du plan du Gouvernement
Ión Sturza, premier ministre en 1999, a déclaré que les réformes fiscales ne sont pas significatives pour l’économie moldave et que, à ce qu’il paraît, les nouveaux privilèges sont octroyés en échange de soutien. D’après lui, les propositions confirment le fait que les réformes précédentes n’ont pas été efficaces et n’ont pas non plus produit les résultats escomptés.
D’autre part, les économistes signalent que la réduction de 5 % sur la contribution sociale arrive trop tard parce que les fonds sociaux peuvent être décapitalisés et que cela menace la capacité du gouvernement à payer les pensions. De plus, l’augmentation de la TVA de 20 % à 22 % rendra la consommation plus difficile dans l’avenir et réduira les exportations. Etant donné que l’économie nationale est basée sur la consommation, il aurait été préférable de diminuer la TVA. Si ces mesures constituent tout le « plan contre la crise », alors le gouvernement ne fera qu’accumuler de nouveaux moyens financiers pour le budget.
1 Le 18 mars, le président Vladímir Voronin, le président russe Dimitri Medvedev et le « président » installé par la Russie à Transnistria, Igor Smirnov, ont signé une déclaration conjointe rédigée en russe où l’on déclare : « compte tenu du rôle stabilisateur de l’opération de paix en cours, les parties considèrent qu’il serait recommandable de la transformer en une opération de maintien de la paix sous le parrainage de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe pour [atteindre] comme résultat un accord sur Transnistria ».
2 Organisation Mondiale du Commerce (2009). “ The World Bank has Included Moldova among the Developing Countries with the Highest Level of Vulnerability to the World Crisis ”, 10 avril. Disponible sur : <moldovainomc.org/index.php?option=com_content&view=article&id=103:world-bank-has-included-moldova-among-the-developing-countries-with-the-highest-level-of-vulnerability-to-the-world-crisis&catid=1:latest-news&Itemid=50>.
3 Voir : <www.expert-grup.org/?go=biblioteca&n=110>.
4 La première banque – et jusqu’à présent la seule – à annoncer la banqueroute a été l’Investprivatbank, en juin 2009.
5 Frunza, V (2009). “All Bad is for Good: World Crisis Might Have Positive Effects for the Republic of Moldova”. 28 avril. Disponible sur : <moldovainomc.org/index.php?option=com_content&view=article&id=111:all-bad-is-for-good-world-crisis-might-have-positive-effects-for-the-republic-of-moldova&catid=1:latest-news&Itemid=50>.
6 Ibid.
7 Voir : <www.iom.md/materials/studies_reports/2009_05_11_moldova_country_profile.pdf>.
8 Voir : <www.azi.md/en/story/3271>.
9 Voir : <www.businessexpert.md/index.php?r=5&s=1642>.
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Crise mondiale, malaise national
Association Technology and Society
Mirjana Dokmanovic, PhD
Danica Drakulic, PhD
Le manque de décision du Gouvernement et l'absence de stratégie et de vision claires pour répondre aux effets négatifs de la crise favorise le pessimisme et le mécontentement parmi la population, qui exige des actions – et pas seulement des mots – pour combattre la corruption et le crime et pour rétablir l'état de droit. La situation économique se dégrade et met en danger les droits économiques et sociaux de la citoyenneté. Les recettes publiques ont diminué en raison de la privatisation à grande échelle qui a commencé en 2003. Les hommes politiques, sous la pression du FMI et du mécontentement public, préparent des projets qui sont rejetés presque immédiatement.
La Serbie souffre de la baisse de sa production industrielle, de la chute de ses importations et exportations, de son commerce intérieur et extérieur, ainsi que d’une baisse notable de la bourse à Belgrade. En outre, un fort déficit commercial est constaté. L’absence d’entrées d’investissement et de crédit pourrait entraîner de graves problèmes dans la balance des paiements et une augmentation du déficit commercial ainsi qu’une montée du chômage et une baisse de revenus.
Le déclin de l’économie
La croissance du PIB prévue à 3,5% pour le budget 2009 a été trop optimiste. La baisse du PIB estimée à -4,8 %1 est évidente. Vers mai 2009, la production industrielle était descendue à 18 % par rapport à la moyenne de 2008. Le chômage élevé et les problèmes d’ordre social sont les facteurs qui limitent le développement durable. D’après les données de l’Agence Nationale de l’Emploi, vers fin juillet 2009 le nombre de chômeurs s’élevait à 763.062 (25,85 %, dont 52,94 % de femmes), et 70 % des personnes employées travaillait à mi-temps2. Les estimations du nombre de travailleurs ayant perdu leur emploi entre décembre 2008 et mars 2009 oscillent entre 31.0003 et 133.0004, du fait – dans bien des cas – de la baisse de la production et de l'annulation de bons de commande. En moyenne, environ 2.500 employés sont licenciés chaque mois5. Plus de 2.000 petites et moyennes entreprises ont fermé leurs portes en 2008; le contexte économique ne favorise pas la création de nouvelles entreprises, et la faillite menace 60.000 sociétés. La dette interne, qui s’élevait à plus de 3.000 millions d’USD au mois de février, met en danger les activités économiques et l’emploi.
La dette externe est en constance augmentation, ayant dépassé 30.700 millions USD au mois de juin 2009 (64 % du PIB)6, 16 % de plus qu’en 2007. Alors que le déficit du commerce extérieur était de 9.500 millions d’USD en 2008, la valeur de la monnaie nationale, le dinar, a chuté de 25 % pendant le dernier trimestre de l'année dernière. Le manque d’investissement étranger direct (IED) ainsi que des entrées d’argent provenant des banques étrangères, limite les ressources pour le protéger. Un afflux de devises estimé à 5.900 millions d’USD est nécessaire pour maintenir la stabilité du dinar. Néanmoins, étant donné que le pays n'a obtenu que 3.300 millions d’USD de bénéfices avec la privatisation à grande échelle pendant l'année 2003 et qu'aucun accroissement d’investissement étranger n'est prévu, ce montant ne sera pas disponible.
En fait, les résultats de la privatisation ont été catastrophiques. La majeure partie du capital acquis par la vente des biens publics a été dépensée au lieu d'être investi, et le secteur des exportations n'a pas été restructuré. La plupart des investissements ont été destinés au secteur bancaire, au commerce et à l’immobilier. La production industrielle reléguée au deuxième plan et le développement technologique négligé ont conduit à une compétitivité extrêmement faible de l'économie. Les chiffres officiels reflétant la totalité des recettes de l'État provenant du processus de privatisation depuis l’an 20007 sont inexistants. L’achat de branches entières de l’industrie (par exemple, l’industrie laitière) par des investisseurs étrangers a encouragé la création des monopoles et l’augmentation des prix. En outre, la vente de 51 % de l’industrie pétrolière de la Serbie à la compagnie russe Gasprom pour un montant de 528 millions d’USD a généré un mécontentement parmi la population et les experts, étant donné que celle-ci constituait une des sources de revenus les plus importantes du pays. Avant la privatisation, la contribution des compagnies de l’État équivalait à 44,5 % du PIB par rapport à 17 % en 2008. Le nombre de travailleurs est passé de 400.000 à 135.000 et continue à se réduire. Même US Steel, l’entreprise qui a acheté la plus grande compagnie sidérurgique serbe, Smederevo, vient d’annoncer des licenciements.
La crise économique, ainsi qu'une privatisation défavorable, ont entraîné une augmentation de la pauvreté. Durant le premier trimestre de 2009, le nombre de personnes sous le seuil de pauvreté s'est élevé à 60.000, et cette tendance continue8. Ceux qui sont le plus en danger sont les chômeurs, les enfants, les personnes âgées de plus de 65 ans, les handicapés, les roms, les réfugiés, les femmes, les familles en milieu rural avec des personnes âgées, et les familles nombreuses.
Réponse du Gouvernement
Le Gouvernement a d’abord hésité face à la crise, a réagi très lentement et n'a pas averti la population du danger. À partir d’une évaluation de l’impact de la crise du mois de décembre 2008, le Gouvernement a suggéré que certains secteurs – sans spécifier lesquels – subiraient fortement les conséquences, tandis que d’autres ne seraient pas affectés9. Néanmoins, il a présenté un “Cadre de Mesures“ liées à l’État (dans le sens le plus large), à l’économie (les secteurs industriels et financiers) et à la population en général10.
En février 2009, le Gouvernement a adopté un plan de relance, visant à accroître la liquidité par l’approbation de prêts aux banques (afin que celles-ci puissent – à leur tour – offrir des prêts aux commerçants dans des conditions favorables), et la provision de fonds pour la promotion des exportations d’entreprises (celles-ci s’engageant à ne pas réduire leur nombre d’employés). Des conditions favorables ont été établies en ce qui concerne les comptes de crédits des citoyens afin de relancer le pouvoir d'achat et la production. D’après le Ministère de l’Économie et du Développement Régional, jusqu'au 4 août le Gouvernement avait accordé des prêts pour un montant total de 874 millions d’USD en vue d'accroître la liquidité11, ainsi que des prêts équivalents à 25 millions d’USD pour les consommateurs12. Presque 1.000 demandes de prêts ont été reçues pour créer des petites et moyennes entreprises. Le Syndicat Patronal a exigé des règles strictes pour l’approbation de ces prêts afin d’éviter la corruption, étant donné que dans certains cas des prêts avaient été accordés à des magnats et les fonds avaient disparu13.
En outre, des mesures positives ont été mises en place pour relancer l'emploi dans les groupes vulnérables, tels que les travailleurs entre 45 et 50 ans, les personnes handicapées, les roms et les chômeurs n’ayant pas retrouvé d’emploi depuis plus de deux ans. L’emploi concernant ces catégories sera subventionné à partir de 1.100 d’USD et jusqu’à 2.200 d’USD.
Vers fin mars 2009, les négociations avec le Fonds Monétaire International (FMI) se sont conclues par un accord stand-by pour un montant de 3.960 millions d’USD à mettre en oeuvre à partir d’avril 2001. Il a été souligné que sans l’aide du FMI, la Serbie ne serait pas en mesure de couvrir son déficit budgétaire ou de payer les retraites et les salaires. Le Gouvernement a également signé un accord avec la Banque Mondiale en vue de recevoir un prêt pour un montant de 46 millions d’USD, destinés au développement des secteurs privé et financier. La Commission Européenne fait un apport de 142 millions d’USD pour alléger les conséquences économiques et sociales de la crise.
Un état d’indécision
Jusqu’à mi-2009, aucune politique cohérente ni globale n'avait été mise en place pour compenser les di