Les secteurs de la sante, de l’education et de l’energie

Le 25 septembre 2015, l’Assemblée Générale des Nations Unies a adopté le programme de développement pour l’après-2015 : " Transformer notre monde : le Programme de développement durable à l’horizon 2030 ". Ainsi, tous les pays et toutes les parties prenantes agiront de concert pour libérer l’humanité de la tyrannie de la pauvreté et du besoin, et prendre soin de la planète et la préserver.

A l’instar des autres pays et nations, le Bénin n’a pas manqué de prendre des mesures audacieuses et porteuses de transformation. Un arrimage de l’Agenda 2030 est fait avec le Programme d’Action du Gouvernement (Bénin Révélé 2016-2021), les autres documents de planification en l’occurrence, le Programme de Croissance pour le Développement Durable (PC2D 2018-2021) et le Plan National de Développement (PND 2018-2025) est porteur de cohésion dans l’action.

La présente note est la contribution de Social Watch Bénin au rapport Spotlight mondial du réseau Social Watch en prélude au Forum Politique de Haut niveau des Nations Unies (FPHN) à New York du 7 au 16 juillet 2020 et portant sur le thème "Action accélérée et voies de transformation : décennie d'action et de réalisation pour le développement durable."

1. Secteur de la santé

1.1. Quelques réalisations et actions phares

Pour l’ODD 3 « Bonne santé et bien-être », la priorisation du Bénin a porté sur les cibles 3.1, 3.2 et 3.3.

Concernant l’élaboration de documents fondamentaux, il y a entre autres :

  • Le document de Politique Nationale de Santé (PNS) assortie d’un Plan National de Développement Sanitaire (PNDS, 2018 -2022) ;
  • Le Plan de Rattrapage d’Urgence 2017-2018 et sa Feuille de Route pour l’atteinte des cibles en ce qui concerne le VIH.

En termes de réalisations, le Gouvernement a prévu (i) le recrutement des agents de santé pour renforcer les effectifs du personnel des formations sanitaires, (ii) le renouvellement d’ambulances dans certaines Zones Sanitaires, (iii) la facilité d’accès à la Planification Familiale des jeunes et des femmes en âge de procréer, (iv) la construction, réhabilitation d’infrastructures hospitalières et (v) l’équipement des formations sanitaires, etc.

1.2. Analyse des progrès vers l’atteinte des indicateurs dans le secteur

Les ressources financières allouées au ministère en charge de la santé connaissent une baisse depuis 2015 (7,9% en 2015 ; 6,8% en 2016 ; 5,2 % en 2017 ; 5,3% en 2018 et 5% en 2019). Depuis lors, la part du Budget de l’Etat allouée au secteur de la santé est toujours en dessous des 15% recommandés par la Déclaration d’Abuja et de 10% par l’OMS.

Le tableau ci-dessous présente l’évolution des indicateurs dans le secteur de la santé au Bénin.

Tableau 1 : Evolution des indicateurs dans le secteur de la santé au Bénin

 

Libellé des Indicateurs

Données de base

Valeurs cibles
en 2018

Valeurs atteintes 2018

Cible ODD

Observations

Année de base

Valeurs

Valeurs

Sources

 

 

Taux de fréquentation des services de santé

2016

45,20%

56%

51%

ASS2018

ND

Non atteinte

Prévalence contraceptive (méthodes modernes)

2014

12,15%

15,16%

15,50%

EDS2017-2018

ND

Cible atteinte

Taux de couverture en ARV des PVVIH

2014

47%

57%

18%

ASS2017

ND

Dégradé

Taux de mortalité maternelle liée à la grossesse (pour 100000 NV)

2013

335,5

279

433

EDS2017-2018

70

Dégradé

Taux de mortalité infanto- juvénile (%)

2013

106,3

92

96

EDS2017-2018

25

Non atteinte

Taux de mortalité Néonatale (%)

2014

37,8

33

30

EDS2017-2018

12

Cible atteinte

Taux de natalité des femmes de 15 à19 ans (%)

2014

19,6

17,52

10,8

EDS2017-2018

ND

Cible atteinte

Sources : ASS2017, ASS2018et EDS2017-2018

1.3. Défis à relever

Pour espérer être au rendez-vous de l’Agenda 2030 dans le secteur de la santé, plusieurs défis restent encore à relever par le Gouvernement.

La réduction de la mortalité maternelle et infantile, car des décès évitables de nouveau-nés et des maladies comme le paludisme, la tuberculose et le SIDA de même qu’une meilleure couverture des services de santé et des actions en faveur des populations les plus marginalisées au Bénin restent encore des défis majeurs.

Le niveau de prévalence des méthodes de planification familiale est encore faible : (5,7 enfants par femme âgée de 15-49 ans). Enfin, la recherche d’autres sources de financement en faveur du secteur de la santé, est encore à optimiser.

2. Secteur de l’éducation

L’ODD 4 porte sur l’Education de qualité et les cibles priorisées pour le Bénin concernent : 4.1 ; 4.4 et 4.5.

2.1. Quelques réalisations et actions phares

Les principales actions mises en œuvre dans le secteur de l’éducation tirent leur essence du Plan Décennal de Développement du Secteur de l'Education Post 2015.

Pour exemple, au titre des actions engagées dans le sous-secteur de l’enseignement primaire, il y a, (i) l’introduction de l’informatique et de l’anglais dans les programmes d’enseignement au primaire ; (ii) la mise en route des cantines scolaires ; (iii) la création d’une Agence de Construction des Infrastructures dans le Secteur de l’Education pour assurer les constructions d’infrastructures scolaires.

Concernant l’Enseignement Supérieur et la Recherche Scientifique, les principales réformes mises en œuvre en 2018 sont entre autres : (i) la poursuite de l’assainissement des Établissements Privés d’Enseignement Supérieur pour une formation de qualité ; (ii) le maintien de la gratuité des droits d’inscriptions qui couvre près de 70 % des étudiants ; (iii) la dématérialisation des actes de carrière du personnel du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (MESRS).

2.2. Analyse des progrès vers l’atteinte des indicateurs dans le secteur

Le tableau suivant présente l’évolution des indicateurs de l’éducation de base

Tableau 2 : Evolution des indicateurs de l’éducation de base holistique, inclusive et de qualité

Libellé des Indicateurs

Données de base

Valeurs cibles 2018

Valeurs atteintes 2018

Ecart à la cible

Observations

Année de base

Valeurs

Taux Brut de scolarisation au préscolaire

2016

15,6%

19%

16,80%

-2,2%

Non atteinte

Indice de parité filles/garçons du taux brut de scolarisation dans le primaire

2016

0,87

0,95

0,93

-0,02

Non atteinte

Taux Brut de scolarisation au primaire

2017

113,27%

116,94

110,76%

-6,18%

Non atteinte

Taux d'achèvement du primaire

2016

71,31%

70,5%

58,49%

-12,01%

Dégradée

Proportion de redoublants au primaire

2016

10,0%

10,42%

10,82%

-0,40%

Non atteinte

Indice de parité filles/garçons (primaire)

2017

0,94

0,95

0,91

-0,04

Dégradée

Taux de qualification des enseignants au primaire

2016

70,4%

95%

70,43%

-24,57%

Stationnaire

Proportion d'enfants qui maitrisent au moins les normes d'aptitude minimale en lecture en fin de cycle primaire

2014

48,30%

60%

ND

ND

ND

Proportion d'enfants qui maitrisent au moins les normes d'aptitude minimale en lecture et en mathématiques en fin de cycle primaire

2014

60,20%

60%

ND

ND

ND

Proportion d'enfants hors du système éducatif inscrits dans les alternatives éducatives

2015

0,84%

1,6%

ND

ND

ND

Ratio élèves/enseignant au primaire

2015

47

51,17

46,20

4,67

Cible atteinte

Taux brut de scolarisation 1er cycle ESG

2016

69

65

54%

-11%

Dégradée

Indice de parité (fille/garçon)

2016

 

0,9

0,8

-0,1

Non atteinte

Pourcentage de redoublant (1er cycle du secondaire)

2016

24,5%

22,45

26,7%

-4,25%

dégradé

Taux d'achèvement du 1er cycle ESG

2016

45,6

46,67

40,6%

-6,07%

dégradé

Proportion de la population cible ayant accès à la formation professionnelle (CQM/CQP)

2016

1,3

50,71

ND

ND

ND

Ratio élèves/groupes pédagogiques au 1er cycle

2016

46

50,71

43

-7,71

amélioré

Taux de qualification des enseignants (1er cycle ESG)

2016

24,8

33,6

25,23

-8,37

Dégradée

Proportion d'enseignants ayant suivi au moins une formation pédagogique (1er cycle ESG)

2016

ND

60

ND

ND

ND

Proportion de jeunes en fin de premier cycle du secondaire qui obtiennent au moins la moyenne en français

2016

46

ND

52%

ND

Valeur 2016-2017 avec amélioration

Proportion de jeunes en fin de premier cycle du secondaire qui obtiennent au moins la moyenne en mathématiques

2016

13

ND

38

ND

Valeur 2016-2017

Indice de parité (fille/garçon) du taux brut de scolarisation dans le secondaire

2016

0,79

0,89

0,81

-0,08

Non atteinte

Source : DPP/MEMP, MESTFP (2019)

2.3. Défis à relever

Pour la réalisation des cibles priorisées pour l’ODD 4, les efforts restent encore à faire pour réduire, voire éliminer la déperdition scolaire. Aussi la problématique de personnel suffisant et qualifié mérite encore plus d’attention de la part du Gouvernement qui devra redoubler d’efforts de mobilisation de financement.

3. Secteur de l’Energie

Pour l’ODD 7 « Energie propre et d’un coût abordable », une seule cible a été priorisée par le Bénin ; il s’agit de la cible 7.1.

3.1. Quelques réalisations et actions phares

En termes de politiques et stratégies, il y a entre autres : 1) l’adoption (2017), des politiques et stratégies de développement des énergies renouvelables et d’efficacité énergétique de la CEDEAO, pour améliorer de façon convenable, le mix énergétique à l’horizon 2030 ; 2) l’élaboration (2017) d’une politique et d’une stratégie pour l’électrification hors réseau, en complément de l’extension des réseaux ; 3) la validation (2019) de la Politique nationale de développement des énergies renouvelables.

En matière de réalisation d’infrastructures dans le secteur de l’énergie, il y a entre autres : 1) le projet « Accès à l’Electrification Hors-Réseau » financé par le MCA II et celui d’électrification par système solaire de 550 infrastructures sociocommunautaires sur financement de la BIDC ; 2) les initiatives d’électrification financées par le Projet d’Appui à la Gestion des Investissements Publics et à la Gouvernance dans les zones urbaines, semi-urbaines et rurales ; 3) la construction et la mise en service (août 2019) d’une Centrale électrique 130 MW « Maria Gléta 2 ».

3.2. Analyse des progrès vers l’atteinte des indicateurs dans le secteur

Pour les deux (02) dernières années (2018 et 2019) des efforts salutaires méritent d’être mis en évidence.  En 2019, l’on peut affirmer que « le délestage a disparu1 ». Il y a quelques années, les délestages étaient récurrents. Les rares coupures observées par moment sont généralement la conséquence de la vétusté des installations du réseau électrique. En effet, de 160 MW en début 2016, la capacité disponible sur le réseau électrique national s’élève à 310 MW en 2019 (Tiré de AskGouv 2019)2.

Pour l’électrification dans les zones rurales, l'ABERME a électrifié 143 localités dans 11 départements dans le domaine de l'électrification par raccordement au réseau de la SBEE. Dans celui de la promotion et de la valorisation des énergies renouvelables, elle a réalisé l'éclairage par système solaire photovoltaïque de 10 centres de santé et CEG, l'alimentation par système solaire de 06 stations de pompage d'eau, etc. (DG ABERME, 2019)3.

Par ailleurs, le besoin en 2019 en matière d’électricité au Bénin varie selon les heures de la journée ; entre 19h et 22h, le pic s’établit à 240-250 MW alors que dans la journée le besoin tourne autour de 160 MW. Déjà, la capacité de la centrale électrique de Maria Gléta affiche 130 MW et répond à 50% des besoins, y compris aux heures de pointe (J-C HOUSSOU, 2019, Ministre en charge de l’énergie)4. Aussi, les efforts consentis par le Gouvernement du Bénin en matière d’énergie électrique ont agi sur le Produit Intérieur Brut (PIB). En 2015, le Bénin avait un taux de croissance de 2,3% mais avec la disponibilité de l’énergie, il est passé en 2018 à un taux de croissance de 6,8% avec une prévision de 7,2% pour 2019 (MEM, 2019)5.

En somme, selon les informations rendues disponibles par « french.xinhuanet.com »6, relayant un communiqué gouvernemental publié en novembre 2019, le Bénin a enregistré 69,4 % du taux de réalisation de la cible 7, relatif à l'accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable.

3.3. Défis à relever

Au nombre des défis à relever, le premier dans le secteur de l’énergie reste la production, l’actualisation et la diffusion d’informations statistiques sur les progrès de la cible de l’ODD7. Aussi le taux d’accès des populations à l’électricité, particulièrement dans les zones rurales reste encore faible.

Outre cela, le Gouvernement doit aussi travailler sur le phénomène des « baisses de tensions régulières ». Par ailleurs, des efforts restent encore à faire en termes de célérité d’exécution ou de réalisation des travaux sur le terrain dans le secteur de l’énergie. Enfin, la concrétisation de grands projets hydroélectriques (barrage d’Adjarala avec le Togo), et barrage sur le fleuve Ouémé reste encore des défis majeurs pour l’indépendance énergétique au Bénin.

Conclusion et recommandations

De 2015 à 2019, des progrès et avancées remarquables sont réalisés par le Bénin dans le cadre de l’Agenda 2030. Cependant, plusieurs défis restent encore à relever. Les recommandations ci-dessous méritent une attention particulière de la part du Gouvernement, notamment dans les secteurs de la santé, de l’éducation et de l’énergie.

En ce qui concerne le secteur de la santé, le Gouvernement devra :

  • Renforcer les dispositifs existant aux fins d’améliorer le niveau d’atteinte des cibles en matière de la réduction de la mortalité néonatale et infanto-juvénile, de la mortalité maternelle liée à la grossesse, de la couverture en ARV des PVVIH ;
  • Mobiliser d’autres sources de financement pour le secteur de la santé tout en tenant compte des mesures de gestion des risques d’épidémies ou de pandémies à l’instar du Covid-19.

En ce qui concerne le secteur de l’éducation, il importe de :

  • Œuvrer pour la mise à disposition d’infrastructures et équipements scolaires suffisants au profit des acteurs du secteur de l’enseignement (primaire, secondaire et universités) ;
  • Recruter des enseignants qualifiés et renforcer les mécanismes de renforcement de capacités existant ;
  • Renforcer davantage les dispositifs en place et les synergies entre les parties prenantes pour augmenter le taux d’achèvement du primaire et réduire le phénomène de déperdition scolaire.

En ce qui concerne le secteur de l’énergie, il s’agit de :

  • Accélérer le rythme de réalisation des travaux d’extension des réseaux électriques et d’interconnexion de la SBEE, de mêmes que les projets de production d’énergies renouvelables ;
  • Procéder au renouvellement et à la modernisation des installations du réseau électrique afin de régler le phénomène des « baisses de tensions régulières » ;
  • Amener les communes à rendre opérationnelle leurs stratégies d’électrification prenant en compte l’extension, la maintenance des réseaux électrique, la gestion des lampadaires, etc.
  • Accélérer les processus de réalisation des projets hydroélectriques (barrage d’Adjarala avec le Togo), et barrage sur le fleuve Ouémé pour renforcer l’indépendance énergétique au Bénin.

Notes :

1 Parce que, le délestage est un phénomène volontaire. On fait le délestage quand l’offre ne répond pas à la demande et pour éviter de perdre le réseau, on est volontairement obligé de couper certaines zones pour équilibrer l’offre et la demande

2 Données énoncées par le Ministre en charge de l’énergie ; AskGouv 2019, site du gouvernement)

3 In « Allocution du DG ABERME, Monsieur Francis TCHÈKPO de l’ABERME, lors de la cérémonie de clôture de la semaine de l’énergie, le 11 avril 2019

4 Tiré de AskGouv, 2019 et Allocution du Ministre de l’Energie et des Mines lors de la cérémonie de clôture de la semaine de l’énergie, le 11 avril 2019

5 Idem