France: L’objectif de réduction de la pauvreté contredit par les faits

Jean Louis Pradels/
La Depeche du Midi

Le gouvernement de la France vient de présenter au Parlement un rapport en demi-teinte sur l’objectif de réduction de la pauvreté d’un tiers entre 2007 et 2012. Cet objectif paraît encore bien lointain aux yeux du Secours Catholique (point focal de Social Watch en France), et d’ATD Quart Monde

La pauvreté des jeunes ne cesse d’augmenter en France, selon un rapport de François Tcherkessoff publié par le Secours Catholique. Ils étaient 1,1 million en 2009. Le tableau de bord gouvernemental de la pauvreté indique une baisse de 5% entre 2007 et 2009 du nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté de 915 € mensuels (calculé à 60% du niveau de vie médian des Français).

7,1 millions de personnes vivaient en dessous de ce seuil en 2009, contre 7,5 millions en 2007. Cette tendance relativement favorable va dans le sens de l’objectif officiel de baisse d’un tiers de la pauvreté en cinq ans (2007-2012).
Mais ce taux de pauvreté monétaire « ancré dans le temps », c’est-à-dire calculé sur plusieurs années, est notamment contesté par ATD Quart Monde, qui lui préfère un taux «  relatif », non ancré dans le temps et reflétant mieux la réalité. Celui-ci est en hausse de 0,5% en 2009.

Augmentation provoquée par la forte hausse du chômage cette année-là, sous l’effet de la crise, observe le rapport du ministère des Solidarités.

Le Secours Catholique note pour sa part une évolution négative sur le taux de pauvreté calculé à 40% du niveau de vie médian (moins de 636 € par mois). C’est celui en dessous duquel vivent la majorité des personnes aidées par l’association, soit un million de personnes. Ce taux a progressé de 6% entre 2007 et 2009.

Toujours sur le plan de la pauvreté monétaire, celle des jeunes de 18 à 24 ans est très préoccupante. En 2009, 22,5% d’entre eux sont pauvres, soit 1,1 millions de jeunes et 2,4% de plus qu’en 2008, relève le rapport gouvernemental. En sept ans, de 2002 à 2009, la pauvreté des jeunes a augmenté de 17%, souligne pour sa part le Secours Catholique. Chômage, précarité des emplois, faiblesse des rémunérations en sont les causes.
36% de migrants démunis

Le taux de pauvreté des personnes immigrées est encore supérieur. Culminant à 36,6% en 2009 (contre 35,4% en 2008), il est trois fois plus élevé que celui du reste de la population et s’explique par une « plus forte exposition au risque de chômage », l’âge et le niveau de qualification des travailleurs, selon l’analyse gouvernementale.

A contrario, l’emploi à temps plein protège contre la pauvreté… exception faite des travailleurs pauvres. Leurs ressources sont inférieures au seuil de pauvreté de 915 € pour 1,6 million d’entre eux en 2009, soit 6,7% des personnes occupant un emploi. Temps partiel, emploi précaire, faibles rémunérations sont, là encore, à la source de ces pauvretés.

Contre cette dégradation de la qualité du travail, qui est en développement, le rapport du ministère des Solidarités en appelle à des indicateurs de qualité de l’emploi. « Une hausse des taux d’emploi peut coexister avec la multiplication des situations de temps partiel subi, de chômage partiel ou de contrats à durée déterminée », reconnaît le rapport placé sous la responsabilité de la ministre des Solidarités, Roselyne Bachelot-Narquin.

Autre aspect du dénuement, la « pauvreté en conditions de vie » inclut l’année 2010 et elle est en augmentation sur la période 2007-2010. Elle reflète 27 privations comme les restrictions de consommation, le manque total d’épargne ou l’absence d’eau chaude.

Le cumul de huit de ces carences suffit à caractériser la pauvreté en conditions de vie. 13,3% des personnes répondent à cette définition, un pourcentage qui inquiète tout particulièrement notre partenaire ATD Quart Monde. L’association souligne que «  le taux de pauvreté en conditions de vie, qui était en baisse continue de 1997 à 2007, augmente à nouveau depuis 2007, donc avant même la crise ».

La tendance générale n’est pas bonne. Son inversion passe, outre l’amélioration de la situation économique, par de gros efforts sur le logement, l’énergie, l’alimentation, les soins médicaux, les salaires et la qualité de l’emploi…

Source
Secours Catholique : http://bit.ly/6qHus4