Institut Nord-Sud du Canada influe sur proposition de TTF

Rodney Schmidt
(Photo:Globe and Mail)

Les dirigeants des pays du G20 ont reconnu la légitimité d'une taxe sur les transactions financières (TTF), faisant ainsi un pas de plus en avant vers l'adoption d'un outil important dans le domaine du développement international, qui permettra de recueillir des milliards de dollars pour financer des projets prioritaires dans le domaine du développement international, tel que l'éducation, les changements climatiques ou la santé.

Dans un communiqué publié vendredi dernier, en clôture de leur sommet de deux jours, les dirigeants du G20 ont déclaré : « Nous reconnaissons également qu'au fil du temps, de nouvelles sources de financement doivent être trouvées pour répondre aux besoins de développement... Nous reconnaissons les initiatives prises dans certains de nos pays pour taxer le secteur financier à des fins diverses, dont une taxe sur les transactions financières entre autres pour soutenir le développement. »

Rodney Schmidt, directeur de la recherche à l'Institut Nord-Sud (INS) à Ottawa, et membre d'un groupe de cinq grands spécialistes qui a élaboré cette mesure, a précisé : « Cette mention de la TTF, reconnue comme étant légitime, constitue une étape fort importante, même si sa mise en œuvre n'est pas endossée par tous les membres du G20. »

Cette TTF proposée consisterait en un petit prélèvement sur les transactions financières effectuées principalement par les grandes banques, fonds spéculatifs et autres opérateurs de transactions à haute fréquence.

Les travaux de M. Schmidt et de ses quatre collègues ont pour titre Projet de traité international relatif à une taxe multilatérale et multijuridictionnelle sur les transactions financières, et précisent comment fonctionnerait ce système.

Selon M. Schmidt, la TTF « est d'une part pratique et applicable, ce qui signifie que l'évasion fiscale serait minime, et d'autre part efficace, à savoir qu'elle générera énormément de fonds sans pour autant que cela entraîne des effets néfastes sur les marchés financiers. »

Rodney Schmidt travaille depuis plusieurs années déjà sur la TTF. En 2008, l'INS a d'ailleurs publié un de ses documents de recherche La Taxe sur les transactions de change : Une idée audacieuse pour le financement du développement dans lequel il présente des données démontrant que la taxe est applicable et qu'elle pourrait permettre de recueillir des milliards de dollars pour le développement sans pour autant que cela ait des répercussions sur les marchés financiers, ainsi que Estimer les recettes tirées d'une taxe internationale sur les transactions de change.

Cette taxe générerait quelque 50 milliards de dollars par an si elle était prélevée dans un certain nombre de pays du G20, selon un rapport préparé pour le G20 par Bill Gates, fondateur de Microsoft. Plusieurs billions de transactions financières sont enregistrées chaque jour dans le monde ; ainsi, si elles étaient taxées à raison de moins de un pour cent par dollar, cela donnerait des dizaines de billions de dollars par an.

Selon Rodney Schmidt : « La TTF et celle qui l'a précédée – la Taxe sur les transactions de change – est une idée à la fois nouvelle et ingénieuse. Elle permettrait de se pencher sur une énorme distorsion de la politique fiscale, soit la sous-fiscalisation très prononcée, relativement à d'autres activités, de l'un des secteurs économiques les plus grands. »

Il a par ailleurs ajouté que « jusqu'à tout récemment, une telle taxe n'était pas applicable sur une grande échelle. Toutefois, grâce aux progrès de la technologie et de l'infrastructure financière, les gouvernements d'aujourd'hui peuvent unilatéralement taxer les activités boursières relativement aux instruments financiers sans pour autant céder un avantage quelconque aux pays concurrents ni aux centres financiers. »

Rodney Schmidt a aussi déclaré que « le groupe d'experts convoqué par la président Sarkozy a circonscrit les mécanismes de collecte, la conception de la législation en matière de fiscalité et les fondements juridiques pour agir de la sorte dans la zone européenne et partout dans le monde. »

Cette taxe reçoit l'appui de la France, de l'Allemagne, de la Communauté européenne et d'une soixantaine de pays, mais pas celui du Canada, des états-Unis, du Royaume-Uni ou encore de la Chine.

M. Sarkozy a indiqué que la TTF ferait tout d'abord l'objet d'un projet « pilote » dans la zone européenne, que le G20 accepte ou non de la mettre en application de façon générale. Les partisans de cette TTF ont fait savoir que les fonds ainsi amassés serviraient à financer les projets de développement prioritaires et à indemniser les pays en voie de développement pour l'aide qui leur avait été promise mais non fournie, et obligerait en outre les banque du monde entier à partager leurs profits découlant de la mondialisation.

Les critiques prétendent que la taxe devra être mise en œuvre à l'échelle internationale, sinon les centres financiers qui la prélèveront seraient confrontés à des difficultés. Toutefois, l'ancien vice-président de la Banque mondiale, Geoff Lamb, a déclaré que le rapport Gates démontre que des pays comme le R-U et l'Inde ont déjà imposé des taxes sur les transactions financières intérieures sans effets négatifs.

Rodney Schmidt s'avère être l'un des plus grands experts dans le monde sur la question de la taxe sur les transactions financières, le Programme des Nations Unies pour le développement citant fréquemment ses travaux dans son Rapport sur le développement humain de 2011, publié la semaine dernière. Ses travaux ont joué un rôle majeur dans la rédaction du chapitre traitant des innovations à l'échelle mondiale.

Source
Institut Nord-Sud : http://bit.ly/92p7df