Crise, spéculation, pauvreté et climat aggravent la déforestation

Photo : Crustmania/Flickr/CC

La crise économique mondiale, la spéculation sur le marché de produits de base et de terres de culture, l'aggravation de la pauvreté et le changement climatique se sont constitué en de nouveaux facteurs de déforestation, en aggravant les causes historiques du phénomène comme l'avance des frontières agricoles, la coupe pour la production de bois et le bois de chauffage et l'utilisation de bois de chauffage comme source d'énergie, comme constaté dans le Rapport de Social Watch 2012.

D'autre part, l'augmentation de l'énergie a élevé la consommation de bois de chauffage et charbon végétal dans les secteurs les plus pauvres de la population, ce qui a ajouté une pression additionnelle sur les forêts.

En même temps, dans un cercle vicieux, la disparition de forêts réduit l'absorption de dioxyde de carbone émise à l'atmosphère par l'activité humaine, ce qui empêche de mitiger le changement climatique. Le phénomène s'aggrave par le manque de lois de protection de secteurs écologiquement sensibles ou par son manque d'application dans les pays où ils ont été approuvés.

La dépendance de l'Union Européenne de l'importation d'aliment pour son bétail a élevé « la demande de terres à l'étranger », ce qui a causé une déforestation, entre d'autres préjudices environnementaux et sociaux, ont signalé Mirjam van Reisen, Simon Stocker et Georgina Carr dans le chapitre du Rapport de Social Watch consacrée au mouvement européen des  « indignados ».

« La rapide propagation de modèles production et consommation non soutenables » détermine « l'épuisement rapide des ressources naturelles », ainsi que le réchauffement de la planète, événements climatiques extrêmes plus fréquents, désertification et déforestation, selon une déclaration préliminaire du Groupe de Réflexion de la Société Civile sur les Perspectives de Développement Global, compris dans le Rapport de Social Watch avec le titre « Río+20 et au-delà : sans justice il n'y a pas d’avenir ».

 

Le rapport de la coalition de Social Watch en Finlande synthétise comment Le Nord industriel encourage la déforestation. « Des importantes entreprises finlandaises qui arborent être des leaders mondiaux en viabilité et ont établi des monocultures à une grande échelle dans le Sud contribuent au déplacement des communautés et à l'appropriation de terres à une grande échelle », ont expliqué ses auteurs



La demande d'huile de palme par Nestle Oil, entreprise de majorité étatique qui prétend être leader mondiale dans la production de biocarburants, détermine « la conversion de terres et la déforestation dans des forêts humides», principalement dans de l'Indonésie et la Malaisie, que selon des experts « contiennent les réserves de carbone les plus concentrées du monde », indique l'apport finlandais. « La surface totale plantée nécessaire pour approvisionner ses raffineries est calculée dans 700.000 hectares », ajoute le rapport.

En contrepartie, « la destruction de la principale source de subsistance de peuples indigènes aboutit aussi à la perte de leurs moyens de vie traditionnels. Quand la forêt disparaît, sa culture disparaît aussi », résume l'apport national de la Malaisie au Rapport de Social Watch 2012.

 

Le modèle d'extraction

L’un des cas les plus graves est, précisément, celui de la Malaisie, où « la vertigineuse perte de forêt tropicale dans le XX siècle se lie clairement aux modèles d'extraction » par lesquels on a dégagé des « grands secteurs » pour produire du caoutchouc et du huile de palme et des millions d'arbres ont été détruits pour couvrir la demande nationale et internationale de bois.

« En 1985, le secteur forestier a apporté plus de 15% des recettes par des exportations », bien que la déforestation ait crû 86% entre 1990 et 2005, « plus que dans tout autre pays tropical », indique l'apport malaisien au Rapport de Social Watch.

La situation est grave en Zambie, où la déforestation, dont dans les décennies précédentes était estimée en 300.000 hectares par an, s'est élevée à 800.000 en 2008. Entre 1990 et 2010, le pays a perdu 6.3% de sa couverture forestière, 3.3 millions d'hectares environ. Le rapport national de la Zambie paraît contenir toutes les mauvaises pratiques possibles à ce sujet : exploitation commerciale de bois autochtones entamée dans la décennie de 1930, coupes et brûle pour étendre la frontière agricole, l'utilisation de bois de chauffage et charbon végétal comme source d'énergie familiale et de bois pour construire, et le manque de normes de protection des forêts.

Au Brésil, la coupe et brûle de forêts amazoniennes répond « à l'expansion des exploitations agricoles ». L'attaque de grands propriétaires fonciers contre le Code Forestier, à débat dans la Chambre de Députés, inclut « la réduction de de 80% à  50% de la surface de réserve forestière qui doit maintenir toute propriété rurale de l'Amazonie », indique l'apport national au rapport de Social Watch.

L'Amazonie du Pérou (la huitième couverture forestière du monde et la deuxième de l'Amérique latine), ainsi que ses forêts naturelles andines, ont souffert aussi des décennies « d'agriculture de frottement et de brûle et de consommation de charbon de bois pour maisons et restaurants ». Les mangroves et forêts sèches et sub-humides « sont épuisés » et ont déforeste 150.000 hectares par an.

 

L'agro-exportation destructive

Les monocultures destinées à l'exportation vers des pays riches, comme celle de la canne à sucre au Guatemala et celle du café au Nicaragua, ont aussi contribué à la perte de forêts. Le modèle agro-exportateur du Paraguay a aussi dérivé dans « une déforestation constante ». Le gouvernement de Cameroun a résolu « d'augmenter encore plus la production » de cacao quand les prix ont baissé dans les années 80, « pour ce que on a dégagé encore plus des secteurs de forêt tropicale ».

Au Guatemala, où les activités extractives et l'utilisation de bois pour construire et de bois de chauffage pour cuisiner ont aussi influencé, on est arrivé « à la disparition virtuelle des forêts naturelles », que serait totale en 2040 si le rythme de déforestation de 82.000 hectares annuels persiste.

Le Nicaragua perd chaque année 75.000 hectares de forêt par la coupe illégale, l'agriculture et les incendies, souvent provoqués pour ouvrir des terres aux cultures. En outre, 76% de l'énergie destinée à cuisiner vient du bois de chauffage. Huit des 12 millions d'hectares de forêts sont dégradées.

À l'activité agricole répond aussi la réduction de la couverture boisée du Panama, de 70% en 1970 à 35% en 2011, selon des données de l'Autorité Nationale de l'Atmosphère reprises par l'apport national au Rapport de Social Watch 2012.

L'Argentine a perdu 23.553 kilomètres carrés environ de forêts indigènes entre 1937 et 1987, et 2.500 par an entre 1998 et 2006, c’est à dire un hectare tout les deux minutes. Les causes, selon le rapport, sont « l'exploitation forestière irrationnelle, l'expansion de la frontière agricole et l'absence de politiques publiques et de stimulants aux acteurs privés pour le reboisement avec des espèces natives ».

La non application de la Loi Forestière de Birmanie, ainsi que de la Loi d'Industrie minière qui oblige à consulter à la population touchée par les projets, a permis la perte de 20% des forêts du pays entre 1990 et 2005. L'industrie minière et d'autres activités extractives affectent aussi les Philippines et « elles devront être suspendus ou être tenus à des contrôles très stricts » pour « reconstituer la couverture forestière, qui du 40% idéal est tombée au 27% ».

L'histoire se reproduit en Arménie, dont le gouvernement a permis « l'industrie minière dans des secteurs écologiquement sensibles ». Pour cela et par « l'utilisation de bois de chauffage comme combustible », la déforestation « a changé d'échelle à un niveau sans précédent », selon le rapport national de Social Watch, lequel estime que « seulement 7% du territoire reste boisé, très en dessous du 35% d'il y a deux siècles, et une grande partie des forêts sont dégradées ».

 

Aux cachettes

Les conflits armés dans des pays comme l'Afghanistan, le Sri Lanka et le Soudan ont contribué à la destruction, où certaines factions détruisaient des forêts pour laisser sans cachette à ses adversaires et pour être approvisionnés de bois de chauffage.

Le Sri Lanka, de fait, conserve à peine 1.5% de sa forêt originale, en grande partie perdu pendant le régime colonial britannique pour la plantation de caoutchouc, café et thé, selon un rapport de Conservation International repris par la coalition nationale de Social Watch. Après le conflit, entre 1990 et 2005, « le pays a eu un des taux de déforestation des forêts primaires des plus haut du monde, en perdant plus de 18% de la couverture forestière restante », ce qui a été aggravé avec les efforts de reconstruction après le tsunami de 2004.

L'insécurité alimentaire aggravée par les sécheresses imputables au changement climatique induit aux agriculteurs de la République centreafricaine à avancer sur les forêts. En outre, le bois de chauffage représente 90% de l'énergie dans les cuisines de tout le pays et 91.7% du chauffage en Bangui, la capital, où on brûle chaque jour entre 750 et 1.400 tonnes.

Au Nigéria, outre les agriculteurs, les chasseurs brûlent des forêts pour trouver leurs proies, ce qui s'ajoute à la demande de bois pour logements, pour logement et pour l'activité de pêche et de bois de chauffage comme combustible.

La déforestation de Tanzanie, dont la couverture boisée s’est réduite de 15% entre 1990 et 2005, « a augmenté beaucoup depuis 2000 ». La recrudescence de la pauvreté a élevé l'utilisation de bois de chauffage comme source d'énergie pour cuisiner.

Les forêts du sud du Sénégal disparaissent « à un rythme effréné », selon l'apport de ce pays au Rapport de Social Watch. Ses auteurs attribuent le phénomène aux conflits armés, à la recherche de nouvelles terres de culture, à la production de charbon et à l'utilisation de bois pour construire.

En Somalie, la déforestation répond à la production de charbon pour l'utilisation locale et l'exportation, et impose « une pression grave » sur les forêts, qui couvrent à peine 9% du territoire. Au Soudan l'utilisation de bois de chauffage et charbon végétal, qui représentent presque 75% de la consommation d'énergie, « a mené aussi à l'élimination de beaucoup de forêts », ce qui accélère l'avance du désert du Sahara «sur ce qu’avant étaient des terres arables et forestières ».

Pendant cela, les mangroves de la Thaïlande « sont menacés par les logements et l'industrie, outre son utilisation pour bois de chauffage, du charbon végétal, des meubles et la construction ».

Source

Rapport de Social Watch 2012: http://bit.ly/rCabKY