La crise financière touche l'aide au développement

Nina Schneider (Photo : Alliance Sud)

La crise financière touche désormais l’aide au développement. En 2011, les pays pauvres ont reçu, pour la première fois depuis des années, moins d’aide de la part des pays industrialisés. Avec 133,5 milliards USD, celle-ci a été inférieure de 2,7% à celle de l’année précédente. Par rapport au revenu national brut (RNB), les contributions des pays DAC sont tombées de 0,03% en moyenne, passant de 0,49% à 0,46%, selon Nina Schneider, chargée de Coopération au développement au Alliance Sud, point focal de Social Watch en Suisse.

Ci-dessous la suite de Nina Schneider:

Angel Gurria, le secrétaire général de l’OCDE, est inquiet: «Le recul a eu lieu pile au moment où les pays en développement étaient frappés de plein fouet par la crise et avaient justement besoin de plus de soutien.» Il a appelé les pays donateurs à ne pas utiliser la crise comme excuse pour ne pas tenir leurs engagements.

L’année passée, grâce à la décision du parlement de porter l’aide au développement à 0,5% du revenu national brut d’ici 2015, la contribution suisse à l’aide au développement a augmenté de 0,06% pour atteindre 0,46% du revenu national brut – en termes réels, cela signifie qu’elle a augmenté de 14,15% pour atteindre les 2,737 milliards de francs. C’est ainsi que la Suisse se retrouve à la 11ème position de la liste des pays de l’OCDE.

Mais la part d’aide fantôme est encore trop élevée. Les dépenses consacrées aux requérants d’asile en Suisse, qui n’ont rien à voir avec l’aide au développement, ont augmenté de 24%, atteignant avec 489.3 millions de francs un nouveau record.

Selon les données de l’OCDE, presque tous les pays européens ont diminué leur aide au Sud:

■ Les budgets de l’aide au développement qui ont diminué le plus étaient ceux des pays qui sont eux-mêmes en crise: l’Espagne (-32,7%) et la Grèce (-39,3%). Mais même des pays plus stables ont procédé à des coupures substantielles, tels que la Belgique (-13,3%) et l’Autriche (-14,3%).

■ Seuls trois des quinze „anciens“ pays de l’Union européenne (UE) ont tenu leurs promesses de continuer à augmenter le budget de la coopération du développement. L’Italie a augmenté ses dépenses en pourcentage de façon significative (+33%), mais elles restent toujours très basses (0,19% RNB). De plus, presque la moitié est dévolue à l’accompagnement des requérants d’asile en Italie même et à des mesures de désendettement. L’Allemagne, en tant que pays donateur moyenne, a augmenté ses contributions de 5,9%, ce qui correspond à une augmentation de 0,01% du RNB. La Suède vient de prendre la tête des pays donateurs du DAC, en augmentant encore davantage ses contributions déjà importantes, cette fois de 10,5% pour parvenir à 1,02% du RNB.

■ En 2011, ce ne sont que cinq pays qui ont atteint le seuil de 0,7% prescrit par l’ONU et affirmé dans les Objectifs du Millénaire pour le développement: la Suède (1,02%), la Norvège (1,0%), le Luxembourg (0,99%), le Danemark (0,86%) et les Pays-Bas (0,75%).

La Suisse rattrape son retard petit à petit

Selon les données officielles, la Suisse a dépensé l’année dernière 2,737 milliards de francs ou 0,46% du RNB (2010: 0,40%) pour la coopération au développement. Cela comprend la première tranche de l’augmentation des contributions à 0,5% du RNB jusqu’en 2015 décidée par le parlement en février 2011. Sur la liste de l’OCDE, la Suisse a amélioré sa position d’une place; elle se situe maintenant au 11ème rang. Mais un coup d’œil aux statistiques montre qu’il y a beaucoup de cosmétique dans tout cela:

■ Presque 28% des augmentations sont dues à des dépenses accrues pour les requérants d’asile. Celles-ci sont comptabilisées comme aide au développement seulement depuis 2004. En 2011, avec 489.3 millions de francs, elles ont atteint un sommet historique et ont représenté presque 18% de toute l’aide au développement (2010: 16,2%), bien qu’elles n’aient rien à voir avec elle.

■ Les remises de dette bilatérales ont presque doublé pour atteindre 69 millions de francs (2010: 31,6 millions de francs). Elles représentent 2,5% de toute l’aide, bien qu’elles ne coûtent pas un centime à la Confédération car les dettes ont été effacées depuis longtemps.

■ Sans les dépenses pour l’asile et le désendettement, qui représentent un bon 20% du total, la Suisse aurait atteint 0,36% du RNB – ce qui représente 0,04% de plus qu’en 2010. La coopération au développement réelle n’a donc augmenté que de 208,3 millions de francs, ce qui représente une augmentation de 10,6%.

Source
Alliance Sud : http://bit.ly/HQvsuG

 

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