Femmes autochtones du Canada ont demandé à l’ONU mesures contre la violence

Jeannette Corbiere Lavell.
(Photo: NWAC)

L’Association des femmes autochtones du Canada s'est adressée à l’Instance permanente sur les questions autochtones des Nations Unies et a demandé des mesures pour éliminer la violence envers les femmes et les filles autochtones.

Jeannette Corbiere Lavell, présidente de l'Association, a affirmé qu'environ une femme autochtone sur cinq dans son pays a subi de la violence sexiste.

Ci-dessous la déclaration lue par Corbiere Lavell à la onzième session de l’Instance permanente sur les questions autochtones à New York.

Combattre la violence à l’égard des femmes et des filles autochtones

Déclaration de l’Association des femmes autochtones du Canada; Assemblée des Premières nations; Chefs de l’Ontario; Association nationale des centre d’amitié; Alliance canadienne féministe pour l’action internationale; Association canadienne des Sociétés Elizabeth Fry; Canadian Friends Service Committee (Quakers) ; Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee); et Amnistie internationale

La violence à l’égard des femmes et des filles autochtones et la faillite de l’État à réagir adéquatement à ce problème sont intégralement liées au fait que les femmes et les filles autochtones subissent la discrimination à grande échelle et soient parmi les groupes de la société canadienne les plus défavorisés socialement et économiquement, une réalité profondément liée à la colonisation et à ses incidences.

La discrimination envers les femmes et les filles autochtones est aussi enracinée dans la culture du système judiciaire canadien. La marginalisation sociale et économique des femmes et des filles autochtones n’en fait pas seulement des proies pour les hommes violents, mais elle est utilisée par les officiels comme justification pour leur faillite à les protéger.

Malgré les statistiques aberrantes concernant les disparitions et les meurtres des femmes et des filles autochtones, le gouvernement du Canada a manqué à son obligation de diligence raisonnable d’empêcher adéquatement la violence, d’enquêter sur les disparitions et les meurtres et de traduire les auteurs devant la justice. Les autorités, particulièrement le gouvernement fédéral, n’ont pas réussi à implanter un plan national global pour s’occuper de la violence, incluant des mesures comme la formation adéquate de la police, des procureurs et des juges de toutes les juridictions; un protocole policier efficace pour faire face aux disparitions des femmes et des filles autochtones; des systèmes fiables de collecte de données désagrégées; la coordination entre les juridictions et des mécanismes de responsabilités. Les initiatives pour s’occuper des disparitions et des meurtres ont été jusqu’à maintenant sporadiques. Le gouvernement du Canada doit prendre des mesures immédiates et globales afin de remplir ses obligations internationales touchant les droits de la personne pour empêcher la violence envers les femmes et les filles autochtones au pays, enquêter sur les actes de violence et les punir.

La rencontre du groupe d’experts internationaux sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles autochtones a reconnu que la sécurité dans les communautés est directement liée à l’implantation de l’autodétermination et au démantèlement des barrières sociales, politiques et économiques qui entravent les droits des peuples autochtones. Les barrières persistantes qui portent atteinte aux droits civils, politiques, sociaux et humains des femmes et des filles autochtones ont fait en sorte qu’elles ont connu des taux anormalement élevés de pauvreté, de violence et de dépossession des terres et des ressources. Les ramifications de ces pertes sont graves et ont eu des incidences continues sur les communautés autochtones.

La violence est un symptôme important d’un état systémique plus grand et de barrières portant atteinte aux droits dans de nombreux États. La restauration de l’autodétermination et de l’autonomie des Autochtones est cruciale, comme des structures de gouvernance fortes et indépendantes et des occasions permettant aux peuples autochtones d’améliorer une situation marquée par la pauvreté et la violence tout en retrouvant leurs territoires traditionnels. La mise en œuvre forte et significative de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones des Nations Unies et la pléthore des droits qu’elle comprend contribuera grandement à l’amélioration de la sécurité et du bien-être, et au renforcement des sociétés et des communautés autochtones.

Les conventions internationales et les instruments de défense des droits de la personne, comme la déclaration des Nations Unies, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et la Convention relative aux droits de l’enfant dénoncent et condamnent la violence envers les femmes et les filles. Les États doivent continuer de travailler avec les peuples autochtones pour s’assurer que leurs lois et leurs politiques consacrent avec respect les valeurs et principes de ces conventions internationales, ce qui doit être fait avec la participation et l’implication entière des peuples autochtones, particulièrement des femmes et des filles.

Des approches plus significatives, justes, respectueuses et globales sont nécessaires et doivent être développées en coordination avec les femmes et les filles autochtones. Le gouvernement fédéral a coordonné les mesures requises et doit s’y conformer tout en reconnaissant les approches holistiques des peuples autochtones.

Nous recommandons d’explorer et d’implanter les mesures suivantes pour vraiment régler la grave question de la violence envers les femmes et les filles autochtones du Canada :

1. Tous les États dont le Canada doivent développer et implanter un plan national global pour s’occuper des conditions sociales et économiques, et immédiatement développer et implanter une stratégie nationale pour les femmes et les filles autochtones défavorisées au niveau social et économique, incluant la pauvreté, le logement inadéquat, le faible niveau d’éducation, les politiques inadéquates d’aide sociale aux enfants et la surcriminalisation;

2. Le Canada doit entreprendre une enquête sur les disparitions et les meurtres des femmes et des filles autochtones dans tout le pays pour en arriver à des mécanismes nationaux et transjuridictionnels et des protocoles pour la police et les avocats du ministère de la Justice. L’enquête doit inclure une révision des pratiques et des mesures en ce qui a trait au bien-être des enfants, à l’aide sociale, au logement, à la justice, à la police et à l’incarcération tout en identifiant où des correctifs systémiques sont nécessaires pour remédier au sexisme institutionnalisé où les Autochtones pourraient participer de manière significative au processus;

3. On demande instamment au Canada de coopérer avec le Comité sur l’élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes dans une enquête dans le cadre de l’Article 8 du protocole optionnel touchant la conduite du Canada et la situation de violence envers les femmes et les filles autochtones;

4. Les États doivent s’assurer que les femmes et les filles autochtones sont activement impliquées au niveau politique, économique et social, et ce, de plus en plus pour honorer les responsabilités et rôles traditionnels des femmes au sein des nations autochtones et y revenir;

5. Le Canada doit mettre sur pied un mécanisme fédéral pour enquêter sur les inconduites et la discrimination au sein du système judiciaire et des forces policières, et le ministère de la Justice du Canada doit mettre sur pied un mécanisme pour enquête sur les allégations d’inconduite et de discrimination au sein des composantes du système judiciaire fédéral, provincial ou territorial et responsabiliser les entités commettant des gestes d’inconduite ou de discrimination.

Source
Association des femmes autochtones du Canada : http://bit.ly/J4NCF6


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