Africa : La société civile revendique un nouveau rôle pour l’état dans le secteur minier

Obuasi, Ghana. (Photo : George
Osodi/ Africa Renewal/Panos)

Les réseaux de la société civile africaine ont lancé un appel à ce que l’Etat joue un rôle central en vue d’assurer que l’exploitation minière contribue au développement des économies et des populations africaines, a écrit Sylvester Bagooro (Third World Network-Africa) dans un rapport publié par le magazine African Trade Agenda.

Lors d’une réunion panafricaine tenue du 26 au 29 juin 2012, les organisations de la société civile se sont félicités de l’engagement des leaders africains à assurer la valorisation dans l’économie minière et l’établissement des liens entre ce secteur et les autres secteurs.

Toutefois, les organisations ont souligné que sans le rôle actif de l’état dans ces processus, l’établissement de ces liens n’aura pas lieu. A cet égard, les organisations ont lancé un appel à un changement radical dans le rôle de l’état afin qu’il passe d’un simple régulateur à un participant actif de l’économie minière.

Cette réunion panafricaine des organisations de la société civile a porté sur la Vision Minière Africaine adoptée par les Chefs d’Etat Africains en 2009 et ses documents connexes. Organisée sous l’égide de l’Initiative Africaine sur l’Exploitation Minière, l’Environnement et la Société (AIMES) et de la section africaine de la Confédération Internationale des Syndicats (CIS-Afrique), la réunion a été abritée par Third World Network-Africa (TWN-A) avec l’appui de la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique (CENUA).

La réunion ne visait pas seulement à faciliter et à approfondir la compréhension de la VMA et des documents de politique et processus connexes de l’agenda de réforme minière et propulser la réalisation de la vision minière mais aussi cherchait à apporter des contributions au Plan d’Affaires du Centre Africain pour Développement de l’Exploitation Minière (AMDC).

La vision est sans équivoque l’aspiration collective des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union Africaine. Elle représente une nouvelle initiative car elle s’écarte des régimes en vigueur et envisage un nouveau régime sous lequel l’exploitation minière jouera un rôle de catalyseur dans la transformation des pays africains riches en ressources minières.

Quelques questions ont été identifiées. Elles vont de la logique de politique à la mise en œuvre et à la réalisation de VMA sur le continent.

Tout d’abord, la VMA doit être la force motrice de toutes les politiques industrielles dans les pays africains et tous les leaders africains, les leaders politiques en particulier, doivent faire preuve d’engagement envers sa mise en œuvre.

Les organisations de la société civile ont exprimé la nécessité d’établir des liens au sein du secteur minier et avec d’autres secteurs des économies nationales. L’exploitation minière doit être liée aux autres secteurs tels que l’industrie et l’agriculture. L’ère pendant laquelle les minéraux extraits de l’Afrique sont transformés en Europe et sur d’autres continents doit prendre fin. L’établissement de liens et la diversification de l’extraction des minéraux sont nécessaires pour la création des emplois et le développement du continent en général.

Les participants ont donc revendiqué un changement radical du rôle de l’état en tant que simple régulateur et promoteur des investissements dans le secteur pour qu’il joue un rôle actif et stratégique d’intervention. A titre d’exemple, l’Etat doit exercer son pouvoir en vue de permettre aux citoyens et aux entreprises locales de prendre leur place légitime dans l’exploitation des ressources du continent.

L’une des questions importantes est l’appropriation de l’espace de politique, des processus et des entreprises. A cet effet, la réunion panafricaine lance un appel à l’Etat de responsabiliser les citoyens africains et les entreprises africaines pour leur permettre d’occuper une place centrale dans le secteur d’extraction minière sur le continent. Cela ne peut se produire que si les gouvernements jouent un rôle actif dans la promotion des hommes et femmes d’affaires africains qui vont profiter des opportunités qu’offrent les liens et la diversification dans le secteur minier.

L’un des domaines dans lequel le développement des entreprises locales s’est révélé très important est celui de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle. La formulation et la mise œuvre des politiques publiques doivent prendre en compte les miniers artisanaux en vue de les habiliter en matière de politique, de technologie et de financement à jouer un rôle central dans l’agenda de transformation du secteur minier.

Des points de vue très forts ont été exprimés au sujet du travail indécent, les écarts salariaux et le déplacement des communautés et les inégalités sociales surtout entre l’accès des femmes et des hommes au travail au sein et hors des mines. Les politiques publiques doivent donc aborder résolument ces questions conformément à la VMA.

La réunion a également identifié les menaces externes à l’agenda de réforme. Il s’agit notamment des accords multilatéraux et bilatéraux sur le commerce et l’investissement que les pays africains ont signé ou comptent signer. Ces accords peuvent réduire davantage l’espace de politique dans lequel l’agenda peut être réalisé.

Une menace évidente est la nouvelle Initiative sur les Matières Premières de l’UE qui cherche à avoir un accès privilégié aux ressources minières africaines pour le bon fonctionnement de l’économie européenne. Les questions abordées dans l’initiative des matières premières se reflètent dans l’Accord de Partenariat Economique en cours de négociation entre l’Europe et les pays africains. La logique de l’Initiative des Matières Premières n’est pas conforme à celle de la VMA.

En outre, la lutte inlassable pour les ressources de l’Afrique doit être abordée de manière stratégique. La guerre politique entre les puissances mondiales telles que les Etats-Unis, l’Europe et les économies émergentes constitue une menace grave à la réalisation de la Vision Minière Africaine.

Les gouvernements africains ont besoin d’une stratégie pour faire face aux puissances externes sur le continent. A cet égard, le réalignement et la cohérence des politiques s’avèrent urgents en vue de promouvoir l’intégration et de renforcer les positions de négociation des gouvernements.

Concernant le Centre Africain pour le Développement de l’Exploitation Minière, les participants l’ont perçu comme un axe important pour la mise en œuvre et la réalisation de la VMA et ont lancé un appel à la mise au point des mécanismes de financement autonomes du centre. La pertinence de l’AMDC a poussé les participants à mettre en relief la manière dont l’aide a laissé des cicatrices pénibles sur le continent. Elle a servi au fil des ans comme un outil de politique étrangère pour influencer l’élaboration des politiques contre l’agenda de transformation des économies africaines.

Source
African Trade Agenda : http://bit.ly/MV2agZ