Tunisie : Reprise écourtée du procès du doyen de l’université de la Manouba
Published on Thu, 2012-11-08 11:41
La FIDH a envoyé une mission à Tunis pour observer la deuxième audience devant le Tribunal de première instance de la Manouba dans le procès contre Habib Kazdaghli, doyen de la Faculté des lettres, des arts et des humanités de la Manouba, accusé d’avoir agressé le 6 mars 2012, deux étudiantes qui s’étaient introduites dans le bureau du doyen. Les deux étudiantes comparaissent également en qualité de prévenues dans ce procès, pour des faits de dégradation. « Il est pour nous essentiel d’observer ce procès qui est emblématique des tensions grandissantes liées à la question de la laïcité, de l’accès à l’éducation et des libertés académiques en Tunisie », a déclaré Souhayr Belhassen, Présidente de la FIDH. « Nous appelons les autorités judiciaires tunisiennes à mener leur travail en toute indépendance et impartialité et dans le respect des conditions essentielles d’un procès équitable », a ajouté Khadija Cherif, Secrétaire générale de la FIDH. Lors de l’audience du 25 octobre, le Président du Tribunal a commencé à rapporter le dossier, interrogeant successivement les deux jeunes filles et le doyen de la faculté. Néanmoins, l’audience a été écourtée suite à la demande de renvoi formulée par la défense des deux étudiantes pour des questions procédurales liées à la constitution de parties civiles des plaignantes. La défense du doyen s’est associée à cette demande de report, évoquant à cette occasion des problèmes de procédure. Les problèmes évoqués sont relatifs à la qualité du fonctionnaire du doyen, que le Parquet a souhaité expressément prendre en considération en ajoutant la circonstance spécifique « dans l’exercice de ses fonctions », et au fait que les dégradations commises l’auraient été au préjudice d’une propriété publique et que le Parquet aurait ainsi dû aviser l’Etat de sa possibilité de se constituer partie civile. L’audience, ainsi écourtée, a été reportée ; le procès devrait reprendre le 15 novembre 2012. Le 5 juillet 2012, une première audience avait eu lieu devant la chambre correctionnelle du tribunal de première instance de la Manouba, pendant laquelle le Parquet avait requalifié les faits en « acte de violence commis par un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions ». Le doyen encourt désormais jusqu’à 5 années de prison, alors qu’il n’aurait été passible que de 15 jours de détention si la qualification initiale de la plainte pour agression avait été maintenue.
Retour sur les faits A partir de novembre 2011, des sit-inneurs appartenant à la mouvance salafiste et réclamant le droit au port du niqab pendant les cours et les examens ont occupé la faculté, résultant en l’arrêt des cours et le report d’examens. Un conseil de discipline de la faculté s’est réuni et a décidé en date du 2 mars 2012 de prendre des sanctions à l’encontre d’étudiantes allant jusqu’à un an d’expulsion de l’université, pour avoir incité au non-respect du règlement intérieur et empêché la tenue de cours et d’examens. En signe de protestation, les deux plaignantes, portant le niqab, auraient, le 6 mars 2012, saccagé le bureau du doyen, dispersé ses documents et dossiers, détérioré ou tenté de détruire certains d’entre eux. Selon les avocats du doyen, les deux jeunes femmes auraient également bousculé celui-ci alors qu’il essayait de les faire sortir du bureau. Habib Kazdaghli aurait ensuite quitté son bureau, laissant les deux étudiantes, pour aller porter plainte auprès du district de la garde nationale à la Manouba. Les plaignantes et des étudiants sit-inneurs accusent le doyen d’avoir bousculé une des deux étudiantes et giflé la seconde, ce qui est contesté par le doyen. Source |